Lors d'une interview à la chaîne d'information allemande N24, le Premier ministre israélien Ehud Olmert a cité comme exemples de pays qui ont l'arme nucléaire la France, les Etats-Unis, la Russie et Israël. Pour ce dernier pays, cette déclaration est assez surprenante, dans la mesure où l'Etat hébreu n'a jamais reconnu formellement détenir la puissance atomique comme arme stratégique. En tant que Premier ministre, Ehud Olmert est le mieux placé pour savoir si son pays a oui ou non la bombe nucléaire. Et cette interview apparaît alors comme une annonce officielle, un changement par rapport à la situation antérieure, bien que nombreux se doutaient de cet état de fait. Pourtant, une porte-parole israélienne a immédiatement démenti le fait que ce soit une annonce, en décrivant un lapsus dans la bouche d'Ehud Olmert. Puis l'administration israélienne est revenue à sa politique d'ambiguïté, refusant de confirmer ou de démentir la possession de telles armes, se contentant de dire "Israël ne sera pas la première puissance nucléaire de la région".

Ambiguë, certes, mais en même temps très claire. Il n'est en effet pas difficile d'interpréter cette position. Le principal intérêt de posséder la bombe atomique n'est pas son utilisation éventuelle, mais la simple menace qu'elle représente. C'est alors un jeu psychologique : dans une opposition entre un pays qui en dispose et un qui n'en dispose pas, ce dernier se verra systématiquement perdant et craindra de se voir annihilé en cas de guerre. Ce fût le cas du Japon en 1945. Pour écarter cette menace, il cherchera à acquérir lui-même la bombe atomique, pour dissuader son adversaire d'en faire usage, sous peine de connaître le même sort. Israël est un pays qui n'a jamais été accepté de sa région, et l'Iran proclame encore désirer sa destruction complète, tout en cherchant à construire son propre arsenal nucléaire. Il serait naïf pour Israël de croire qu'une telle situation n'arriverait jamais. En tant qu'Etat démocratique et responsable, il est conscient qu'il serait criminel de vouloir régler ses conflits par le feu nucléaire. En outre, si Israël venait à représenter une menace d'annihilation claire pour ses voisins, cela les encouragerait fortement à développer au plus vite leurs propres forces pour rétablir un équilibre, ce qui serait contre productif in fine pour Israël. Mais celui-ci doit être prêt si l'un d'eux prend l'initiative d'acquérir la puissance nucléaire, car le risque d'utilisation n'est pas mince. Les recherches en la matière sont longues, et il faudrait être réactif dans cette situation. La position d'Israël est donc d'être prêt, d'avoir la puissance nucléaire dans une optique défensive, et sa possession sera annoncée en réaction d'une éventuelle annonce d'un Etat voisin d'acquisition de la technologie nucléaire militaire, pour le dissuader de l'utiliser à son encontre. Israël sera donc immédiatement le deuxième pays à être une puissance nucléaire dans la région. Mais dans les faits, Israël l'est depuis longtemps, par mesure de sécurité...