Pour les pays occidentaux, il est difficile de se maintenir au sein de la compétition industrielle mondiale lorsque le facteur prix devient le plus important. En effet, le niveau des salaires élevé par rapport aux pays émergents fait qu'il est plus avantageux de produire dans les pays aux bas coûts de production, car même les frais de transport supplémentaires ne suffisent pas à entamer la compétitivité prix des produits fabriqués. La théorie (confirmée par les faits) de cycle de vie des produits nous apprend qu'un nouveau produit connaît d'abord une phase de croissance des ventes après avoir été introduit où les prix sont élevés, car il est nécessaire d'amortir de lourds frais de développement. Lorsque le marché se développe, il devient possible de générer des économies d'échelles, permettant ainsi une baisse des prix, et donc la démocratisation du produit. Lorsque le produit devient mature, la taille du marché attire l'arrivée de concurrents qui feront encore plus baisser les prix. A ce stade, la production des produits manufacturés est souvent délocalisée dans les pays aux bas coûts de production. Au fur et à mesure que le produit se banalise, il est vendu à un prix si bas que sa production, même délocalisée, n'est parfois plus intéressante pour la firme qui l'a créé. Tout ceci montre qu'il est presque vain de vouloir être compétitif sur les produits matures, il est bien plus préférable d'avoir la haute main sur des produits récents, apportant un plus par rapport à la concurrence bon marché qui justifiera que les consommateurs le paieront plus cher. Une forte qualité peut être ce plus, l'image de marque allemande en a beaucoup profité. Le caractère innovant des produits peut l'être aussi. Pour cela, il est nécessaire d'avoir une recherche forte, fondamentale bien sûr, mais aussi appliquée, afin de développer de nouveaux produits.

Les entreprises ne devraient donc jamais négliger leurs budgets de recherche et développement. La France a laissé passé les trains de l'électronique grand public et de l'informatique pour avoir n'avoir pas cherché du tout à innover dans ces domaines. Aujourd'hui, de solides entreprises, respectivement japonaises et américaines, dominent ces domaines très en vue sur les marchés actuels. La France est forte dans les domaines de l'agronomie, du tourisme et du luxe, mais il faut veiller à pouvoir avoir un rôle dans les secteurs clés de demain. Actuellement, la France se concentre surtout sur la recherche fondamentale. C'est en tous cas l'orientation prise par la recherche publique. Le développement des connaissances est certes une quête intéressante, mais ne rien en faire confine à l'absurde. C'est pourquoi il est nécessaire de se soucier des applications concrètes de la recherche fondamentale, et confier ses fruits à la recherche appliquée.

"Des chercheurs qui cherchent, on en trouve. Mais des chercheurs qui trouvent, on en cherche." Cette phrase attribuée au Général de Gaulle reflète bien le paradoxe de la recherche déconnectée des réalités. Dans de nombreux organismes et au sein de la recherche universitaire, le seul but de nombreux chercheurs réside dans la reconnaissance par leurs pairs. Une publication de leur article dans une grande revue, un prix prestigieux font leur succès. Mais comment les peuples pourraient se contenter de cela ? Ce serait refuser toute finalité à la recherche. Il faut donc établir des liens entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée, quitte à ce que ces liens se fassent entre chercheurs publics et entreprises. Un chercheur devrait pouvoir être évalué sur les brevets que ses découvertes permettent de déposer, ou tout du moins sur leurs applications pratiques. Les entreprises peuvent également s'adonner à la recherche fondamentale. Quoi qu'il en soit, ses applications pratiques ne doivent jamais être négligées, et doivent représenter la finalité prioritaire. Une entreprise peut financer de la recherche fondamentale avec un objectif précis, pour permettre une innovation désirée, ou si elle a des moyens financiers conséquents, financer une recherche fondamentale exploratoire, dont les applications ne seraient pas encore connues au départ. C'est la stratégie que peuvent se permettre Microsoft ou Google actuellement.

Dans le domaine de l'informatique justement, le Palo Alto Research Center (PARC) était un centre de recherche fondamentale financé par le fabriquant de photocopieurs Rank Xerox au début des années 1980. Les esprits brillants qui y travaillaient eurent des idées novatrices, transformées en remarquables innovations, telles que l'interface graphique ou la souris. Mais les dirigeants de Rank Xerox firent peu attention à ces trouvailles, et laissèrent Steve Jobs d'Apple se les approprier lors d'une visite au PARC. Cette histoire montre l'effort double à accomplir, d'une part du côté de la recherche fondamentale pour se transformer en innovations, et d'autre part du côté des entreprises et administrations pour les accepter, en faisant face au changement et permettre de s'adapter constamment.

Mais il n'y pas qu'au niveau des entreprises où la recherche est primordiale. Certains domaines de recherche font l'objet d'une attention marquée, qu'il faut encourager. La recherche sur l'énergie doit être un pilier des efforts accomplis, car il faut trouver de nouvelles sources d'énergie, qui polluent moins ou qui permettent de se passer du pétrole, ou mieux encore, de faire les deux à la fois. Il y a là une exigence tant économique qu'environnementale. De grandes espérances reposent donc dans le projet ITER de réacteur nucléaire à fusion. Mais il y a aussi le domaine de la santé, où la recherche fondamentale sur la biologie permettent à force d'efforts la découverte de nouveaux traitements pour chaque maladie.

En 2002, le candidat Jacques Chirac avait souhaité que les montants investis en recherche atteignent les 3 % du PIB. Au vu des controverses qui ont lieu à propos de la recherche publique au cours de son mandat, on peut penser qu'on est encore loin du compte. Rappelons donc la nature prioritaire que doit avoir la recherche tant pour l'Etat que pour les entreprises.