Réflexions en cours

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mardi 13 novembre 2012

Le rapport Gallois

Après avoir évité le thème de la compétitivité comme la peste pendant la campagne électorale et ses premiers mois au pouvoir, François Hollande a commencé à s'intéresser à la question en juillet, quand Jean-Marc Ayrault a commandé un rapport sur ce thème à Louis Gallois. Alors que sa publication approchait, les fuites se multipliaient, et laissaient entrevoir des propositions bien éloignées des positions habituelles de la gauche. Mais le gouvernement assurait que ce rapport ne serait pas enterré, et que les mesures préconisées seraient appliquées. Qu'en est-il ?

Après un rapide état des lieux, le rapport aborde les mesures à mettre en oeuvre. Surtout, pas de politique de la demande (où l'on cherche à favoriser la consommation), puisque cela ne fait que profiter aux importations ! On pourrait croire que tout le monde le sait, mais comme on continue d'en entendre beaucoup, y compris au gouvernement, qui réclament une telle politique, ce rappel reste utile. Il faut donc favoriser une politique de l'offre, en donnant la priorité à l'investissement, qui permet d'être moins sensible à la compétitivité prix des salaires. Et puis le rapport continue avec des idées bien éloignées de celle de la majorité jusqu'à présent : halte à la sur-réglementation et vite un choc de compétitivité... à travers le transfert d'une partie du financement de la protection sociale (30 milliards d'euros) vers la baisse des dépenses publiques et la fiscalité : au choix, la TVA ou la CSG. Le festival continue avec la volonté de mener des recherches sur les techniques d'exploitation des gaz de schiste.

Le rapport souhaite que l'industrie française puisse monter en gamme grâce à l'innovation, et met l'accent sur le maintien du crédit impôt recherche et des pôles de compétitivité aux bilans positifs. Il évoque également le problème du transfert de la recherche vers l'innovation, dont les raisons sont idéologiques lorsqu'il s'agit de transformer la recherche publique en innovation dans le privé. Il est également question d'orienter l'action des pouvoirs publics vers trois priorités techniques et industrielles : les technologies génériques, la santé et l'économie du vivant et la transition énergétique. La plupart des propositions restantes ne mangent pas de pain, même si elles ne sont pas toutes évidentes à mettre en place (comme la systématisation de la présence des entreprises aux conseils d'administration des établissements d'enseignement technique et professionnel).

Alors, que reste-t-il de ces mesures une fois passées par le gouvernement ? La vraie question est bien évidemment celle de la survie des plus audacieuses, celles les plus aptes à changer quelque chose. Pour ce qui est du gaz de schiste, la politique gouvernementale ne peut être qualifiée d'"écologiste" mais bien d'"obscurantiste". En effet, il est tabou ne serait-ce que de chercher une manière peu polluante d'exploiter le gaz de schiste, dont la France est, dit-on, bien pourvue, alors que ces nouveaux apports d'énergie font actuellement le bonheur inespéré des Etats-Unis. Si les techniques d'exploitation actuelles sont polluantes, il faudrait justement en trouver de meilleures, mais il en est hors de question pour raisons politiciennes ! En France, on a peut-être du pétrole (de schiste), mais visiblement, on ne veut même pas avoir des idées.

Pour trouver l'usine à gaz, il faudra se tourner vers le mécanisme retenu pour diminuer les charges sociales des entreprises. Baisser les taux serait bien sûr trop simple, il y aura donc "un crédit d'impôt basé sur la masse salariale" versé avec une année de décalage. Fini le choc de compétitivité, visiblement, il n'y a pas de raison d'être pressé en France. C'est un pacte pour les cinq prochaines années, on peut donc prendre notre temps. En revanche, il est bien question d'augmenter la TVA, quelques mois à peine après avoir remis en cause sa hausse voulue par le gouvernement précédent. François Hollande clamait partout qu'il n'augmenterait pas la TVA, Jean-Marc Ayrault critiquait durement la droite sur ce sujet, ils s'y mettent également malgré tout ce qu'ils ont pu dire ! Dans sa première année de mandat, François Hollande aura passé les six premiers mois à défaire ce que Nicolas Sarkozy avait fait, et va passer les six prochains à le refaire lui-même. En fin de compte, c'est une sorte d'hommage.

Seuls les taux changeront. L'objectif est d'augmenter les marges des entreprises plutôt que de leur permettre d'avoir des prix plus faibles à l'exportation. Du coup, l'essentiel de la hausse se fait bien plus sur les produits à taux réduits que sur la majorité des biens et services. Mécaniquement, les importations contribueront bien peu au financement de la protection sociale, et ce n'est donc plus de TVA sociale dont il est question. La compétitivité prix des entreprises ne profitera donc pas directement de ces taux. Et puis, cela ne dégage que six milliards d'euros au mieux, sur les 30 milliards nécessaires selon le rapport Gallois. Qu'à cela ne tienne, le gouvernement limite ce crédit d'impôt à 20 milliards, dont 10 viendront de la baisse des dépenses publiques. Le reste ? Le reste viendra d'une nouvelle "fiscalité écologique" qui ne sera pas en place avant 2016. Autant dire à la Saint Glinglin... Pendant ce temps, les sommes prévues ne seront tout simplement pas financées (une solution qui s'appelle l'emprunt et donc l'augmentation de la dette publique).

Sur les grands principes, le rapport est donc positif, et même mieux accueilli à droite qu'à gauche. L'exécution, en revanche, risque bien de pécher. Le gouvernement, tel Perséphone, se retrouve à retricoter ce qu'il a détricoté la veille. Autant dire qu'il navigue à vu, et que cela laisse quand même une impression d'amateurisme. On a perdu bien du temps !

lundi 5 novembre 2012

La redevance télé devrait être optionnelle

Ces temps-ci, à l'Assemblée Nationale, les jours se passent tranquillement en jouant au jeu du "quel impôt va-t-on pouvoir créer ou augmenter ?" Cela fait bien longtemps que le pouvoir en place ne se soucie plus des effets des hausses d'impôts sur l'économie, le maintien de dépenses publiques énormes pour raison idéologiques étant de loin la priorité. Si seulement ces dépenses pouvaient toutes être nécessaires, voire même utiles... Mais non, on continue de se faire plaisir en augmentant les impôts afin de financer des postes parfois très accessoires. Tel est le cas des débats actuels sur la hausse de la redevance audiovisuelle. En effet, la question n'est pas de savoir s'il faut l'augmenter, mais bien jusqu'à quel point il faut l'augmenter. 4 euros d'augmentation (soit déjà plus que l'inflation) sont déjà actés, entre le Parlement et le gouvernement, on tergiverse désormais pour savoir s'il faut passer cette augmentation à 6 euros. Jamais, au grand jamais, on ne se soucie des contribuables qui auront à la payer. Envolés, tous les discours sur le pouvoir d'achat, l'essentiel de nos jours, c'est le pouvoir de payer l'impôt.

Et pourquoi faudrait-il payer cette redevance ? Elle finance les chaînes et les radios publiques, on peut parfaitement vivre sans y avoir recours, mais il faut s'en acquitter à partir du moment où l'on possède un téléviseur. La redevance, c'est un bouquet de chaînes payantes obligatoire. De la vente forcée, en somme. Contrairement à d'autres services publics, celui-ci n'est pas forcément d'intérêt général, et il coûte plus cher que la concurrence privée. Pour bien faire, il faudrait que le paiement de la redevance soit optionnel, pour permettre à ceux qui ne le souhaitent pas d'économiser cet argent.

Alors bien sûr, cela réduirait considérablement les ressources de l'audiovisuel public. Eh bien justement, cela permettrait de s'interroger enfin sur notre politique audiovisuelle afin de la rendre plus pertinente. Pour commencer, la suppression de la publicité sur les chaînes publiques après 20 h n'était pas utile, et a fait perdre des ressources. Il conviendrait donc de la rétablir, contrairement aux vœux du gouvernement actuel. Ensuite, est-ce bien nécessaire qu'il y ait autant de chaînes publiques ? En métropole, on a sur la TNT :
  • France 2
  • France 3
  • France 4
  • France 5
  • France Ô
  • Arte
  • LCP/Public Sénat
  • Gulli, détenue à 34 % par France Télévisions
Et on peut rajouter à cela France 24 en trois déclinaisons (français, anglais, arabe) sur le satellite, et TV5 Monde, détenue en grande partie par la France. Pourquoi autant de chaînes ? Est-ce bien nécessaire pour le public ? On pourrait commencer par supprimer France 4, qui n'est qu'une chaîne de plus qu'on ne peut pas distinguer des autres sur la TNT. Laissons le secteur privé s'en occuper, ou bien libérer cette fréquence pour qu'une autre chaîne puisse diffuser en haute définition à la place. Même chose pour France Ô. Est-ce une chaîne régionale, ou bien une chaîne communautaire ? Si c'est une chaine régionale, une simple diffusion gratuite des programmes produits en outre-mer sur le satellite et l'ADSL suffirait, on ne peut pas supporter le coût énorme de diffusion sur l'ensemble du territoire métropolitain en TNT. Si c'est une chaîne communautaire, elle n'a pas sa place du tout dans l'audiovisuel public.

La logique est la même pour LCP/Public Sénat. Il est utile que chacun puisse avoir accès aux débats du Parlement, seulement, il faut s'en tenir à ça, et ne pas ajouter en plus des programmes de flux ou de stock qui alourdissent le coût. Le problème de ces chaînes est bien qu'absolument personne ne les regarde, à tel point qu'elles refusent de souscrire aux données d'audience. La plupart du temps, quand le public regarde l'Assemblée Nationale, ce sont les questions au gouvernement sur France 3... Le flux des débats en assemblée plénière ou en commission doit donc pouvoir être accessible sur internet, avec possibilité de revoir les séances passées, mais une diffusion sur la TNT ne se justifie pas. Economisons l'argent public !

De même, si l'audiovisuel public français a besoin d'argent, il peut revendre sa participation dans Gulli, à moins que d'éventuels dividendes constituent une rentrée d'argent en soi. Un service public de l'audiovisuel doit se concentrer sur des missions que ne peuvent pas assurer le privé. En tant que chaîne de culture et de documentaire, la présence d'Arte se justifie pleinement, et représente des programmes de qualité. L'audiovisuel extérieur français est également un outil utile, en l'occurrence pour l'influence de la France dans la monde.

France 2, France 3 et France 5 ne sont-elles pas en surnombre ? Si l'argent manque, on pourrait rationaliser tout ça. France 3 garderait les informations et les programmes régionaux, France 2 l'information nationale, et les meilleurs programmes de France 5 pourrait alimenter les grilles de ces deux chaînes, qui garderaient également les programmes religieux et les clips électoraux. Et du côté de Radio France, la publicité pourrait faire son entrée. Une privatisation de France Inter est également une idée intéressante. Voilà bien des manières de maîtriser les coûts de l'audiovisuel public, et ainsi, permettre le maintien du pouvoir d'achat des Français.

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