Réflexions en cours

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mercredi 29 septembre 2010

Prendre une hypothèse de croissance économique zéro pour le budget de l'Etat

Le budget de l'année 2011, présenté par François Baroin en conseil des ministres, se veut plus rigoureux que les précédents. Diminutions des dépenses et augmentations des recettes via la suppression de niches fiscales sont au menu. Le déficit public, estimé à 7,7 % du PIB pour 2010, est colossal. Il faut donc le diminuer. Certes, une bonne partie de ce déficit est due à l'impact de la crise : les dépenses augmentent (tant de façon mécanique, comme l'augmentation des indemnisations chômage, que politique, via le plan de relance) et les recettes diminuent (le montant des impôts dépend de l'activité économique). Mais avant même que cette violent crise économique n'éclate, la France restait bien loin de l'équilibre, se plaçant à peine dans les critères de Maastricht où il est demandé que le déficit soit limité à 3 % du PIB. Des décennies de déficits publics ont entraîné la formation d'une dette énorme. Son importance est telle que les mots manquent en fait pour bien la qualifier...

Conséquence : les intérêts représentent un poids démesurée dans le budget de l'Etat. En 2011, elle devrait représenter environ 47 milliards d'euros. Le déficit étant estimé à 92 milliards d'euros (25 % du budget !), on peut dire que la moitié du déficit sera causé par la charge de la dette, héritée par les déficits précédents. C'est un jeu infernal qui s'apparente à un cercle vicieux. En temps normal, on pouvait donc considérer que la totalité de la dette servait à peu près à payer les intérêts résultant des déficits précédents. Difficile dès lors de faire diminuer la dette. Et l'on ne pouvait que regretter le manque de sérieux des gouvernements successifs, quand on songe que sans les erreurs précédentes, le budget aurait pu être équilibré.

Encore faut-il tout faire pour ne pas perpétuer ces erreurs. Or ce budget de la rigueur est bâti sur des bases bien optimistes. En comptant 2 % de croissance pour 2011, c'est 12 milliards d'euros de recettes supplémentaires qui sont attendues. Ce scénario n'est pas le plus probable. Non seulement la période économique n'est pas formidable, mais en plus les prévisions de croissance sont généralement peu fiables. Chaque gouvernement est obligé de s'adapter au fur et à mesure, quand il constate le montant des rentrées d'argent.

Quand on a une dette comme la notre, la première priorité devrait être de réduire les déficits, et éventuellement ensuite d'anticiper le remboursement des emprunts, afin de diminuer la charge des intérêts. Au final, l'argent des taxes sera mieux utilisé, puisqu'employé directement dans les vrais postes de compétences de l'Etat, et non à payer plus cher le fonctionnement des années précédentes. Voilà une méthode pour y parvenir : arrêter de faire des prévisions de croissance pour le budget de l'Etat. Cela ferait comme pour les entreprises prudentes qui sont gérées en se basant constamment sur le worst case scenario. Il faudrait alors partir du principe qu'il n'y aura pas d'augmentation des recettes due à la croissance de l'activité économique. On prendrait alors l'hypothèse d'une croissance zéro de l'économie. Et ce, pour la forme et les calculs. Cela n'empêcherait évidemment pas qu'il y ait une vraie croissance économique, mais toutes les recettes fiscales supplémentaires seraient alors comme une surprise, des recettes non allouées qui seraient alors immédiatement attribués à la réduction de la dette.

Le but serait alors de construire les budgets sans compter de façon hypocrite sur des hausses de recettes assez aléatoires. Evidemment, dans l'immédiat, cela amplifierait le besoin de rigueur, par l'augmentation des impôts ou la diminution des dépenses publiques. Mais au bout du compte, cela permettrait que chaque euro dépensé ait une vraie utilité.

vendredi 17 septembre 2010

Les lobbys audiovisuels défendent rageusement leurs niches fiscales

Tout a commencé par une remarque anodine de la Commission Européenne : pourquoi les offres triple play (internet/téléphone/télévision) françaises sont elle taxées à moitié à 5,5 % (au lieu de 19,6 %), alors que la partie télévision, qui bénéficie de ce régime préférentiel de TVA, représente moins d'un tiers du coût global ? On ne savait pas trop bien pourquoi la Commission intervenait à ce sujet, mais elle mettait le doigt sur une question intéressante... pour l'Etat français. En effet, alors qu'il faut à tout prix réduire les déficits, le projecteur était soudainement pointé vers ce qui est tout simplement une niche fiscale. La télévision payante bénéficie d'une TVA à taux réduit, ce taux que les restaurateurs ont eu tant de mal à avoir. Et cette TVA réduite ne se justifie tout simplement pas. Le ministre du budget, François Baroin, a pu vouloir légitimement corriger cela en reclassant ce service dans le taux normal. Or chaque niche fiscal a son chien de garde, et en l'occurrence, c'était ouvrir la boîte de Pandore.

Tout un tas de gens ont ainsi intérêt à ce que les opérateurs de télévision payante soient riches. Les chaînes de télévision ont des obligations incroyables en terme de financement d'œuvres audiovisuelles. Un groupe comme Canal Plus doit bien sûr acheter des programmes (films, événements sportifs, séries, téléfilms, documentaires, téléfilms) pour alimenter son antenne. C'est son intérêt direct. Mais il doit aussi veiller aux intérêts de ses fournisseurs. L'Etat l'oblige donc à participer à tout un tas de programmes dont cette entreprise n'a que faire, et à participer à divers fonds qui ne lui rapporteront rien. Ces impôts particuliers sont liés aux chiffres d'affaires de ces groupes. Donc toute taxation supplémentaire qui va dans les caisses de l'Etat risque de faire perdre de l'argent aux producteurs. Ceux-ci n'ont pas apprécié.

Les lobbys se sont alors mis en branle avec tellement de puissance qu'une normalisation de la TVA sur la télévision finit par être écartée par le gouvernement. Désormais, seul les offres triple play seraient concernées, avec un taux de 19,6 % sur l'ensemble de la facture. La encore, les lobbys de l'audiovisuel ne sont pas contents, puisqu'ils voyaient dans le secteur des télécoms une nouvelle vache à lait de financement. Et évidemment, les fournisseurs d'accès à internet sont vent debout face à une mesure qui remettrait en cause le tarif psychologique de 29,90 €.

Être taxé ne fait plaisir à personne. Mais la vraie question à se poser est celle du financement des industries culturelles. Pourquoi le but d'une chaîne de télévision devrait être de financer la production de tout et n'importe quoi, sans toujours avoir le choix ? Les clauses portant sur la "diversité" de la production cinématographiques sont anormales. Financer un film dont on sait dès le départ qu'il n'intéressera personne n'a pas d'intérêt, à part pour ceux qui y travaillent. Le but du cinéma est-il d'apporter quelque chose au reste de la société, ou bien seulement de permettre à des artistes impopulaires de se faire plaisir ?

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