700 milliards de dollars. Voilà le montant que veut obtenir du Congrès américain le secrétaire au Trésor, Henry Paulson, pour renflouer tous les établissements financiers mis à mal par la crise financière actuelle. Après les sauvetages de Bear Sterns, Merryl Lynch par des concurrents, de Freddie Mac et Fannie Mae par le gouvernement et la faillite de Lehman Brothers, l'administration Bush envisage désormais une solution globale qui ressemble fortement à un plan de nationalisation massive. Ce n'est évidemment pas dans les mœurs américaines, ce qui fait que l'accord de la classe politique locale est particulièrement dur à obtenir. Les républicains ne hostiles par nature à l'intervention publique, et les démocrates s'interrogent sur le pouvoir discrétionnaire dans l'usage de ces fonds qui seront octroyés au gouvernement. D'une manière générale, la finance mondiale a l'impression d'évoluer dans un mauvais rêve.

La crise des subprimes se révèle dévastatrice, pour les ménages pauvres devant abandonner leur maison comme pour les établissements de crédit. Des banques européennes sont aujourd'hui menacées de pareil sort. L'origine de la crise peut être envisagée de façon brève : après l'éclatement de la bulle internet, les attentats du 11 septembre et la crise de confiance causée par la faillite d'Enron, la Fed avec à sa tête Alan Greenspan a voulu faire repartir l'économie américaine en baissant fortement les taux d'intérêts. Les banques américaines en ont profité pour prêter davantage, et à des clients plus risqués, moyennant des taux certes plus élevés en contrepartie, mais toujours suffisamment bas pour être attractifs. L'afflux de nouveaux clients a favorisé la demande immobilière, et le mouvement s'est emballé jusqu'à devenir former une bulle. L'augmentation des taux d'intérêts qui est ensuite intervenue a fait éclater la bulle, et tout d'un coup la valeur de l'immobilier a fortement baissé, en même temps que le coût des emprunts augmentait, ne laissant plus la possibilité à bon nombre de ces ménages de les rembourser. Les manquements massifs aux remboursements ont mis à leur tour en difficulté les banques, et ce d'autant plus que les emprunts avaient été transformés en titre de dette sur les marchés financiers, dispersés dans un grand nombre d'établissements, les rendant chacun plus vulnérable.

La crise actuelle peut donc être considérée comme étant le remboursement des années précédentes vécues à crédit. Les difficultés économiques qui attendent les Etats-Unis sont la conséquence de la forte croissance qui les ont précédés. Si la France venait à être touchée, le sentiment qui pourrait prévaloir serait celui de l'amertume. Les règles bancaires y sont bien plus strictes, elles forment justement la réglementation française honnie par les milieux économiques anglo-saxons. La France n'a pas eu de telle période de croissance : ces dernières années, elle s'est contentée d'un rythme annuel faible aux alentours de 2%. Comment se fait-il que l'économie française subisse les baisses de régime de l'économie mondiale, sans vraiment bénéficier des périodes fastes ? Cette question fait bien plus mystère que l'origine de la crise actuelle. Cette dernière provient directement de la décisions de personnes ayant pris trop de risques pour leur entreprise, mais elles se défausseront en disant que tout le monde le faisait alors. C'est justement là le problème.