Les marchés financiers sont nerveux. Les difficultés à sécuriser la dette grecque (mais aussi irlandaise, portugaise, italienne, espagnole, etc) font redouter un risque de défaut. Cela entrainerait des dépréciations massives dans les bilans des institutions financières, ce qui créerait in fine une crise économique encore plus sévère que celle actuelle. Appelés à la rescousse, les autres pays de la zone euro peinent à s'entendre. D'un côté, l'Allemagne pense qu'il faudrait que les créanciers puissent prendre en charge une partie de la facture. Après tout, ils ne peuvent s'en prendre qu'à eux mêmes s'ils ont fait payer des taux d'intérêts faibles à des pays dont la dette est risquée. Les Etats ont déjà fort à faire à essayer de renflouer (par des prêts risqués) ces pays en difficultés pour avoir à tout payer. Mais de l'autre côté, où a tendance à se trouver la France, on considère que toute menace de participation des créanciers ne risque que de concrétiser le risque de défaut. En effrayant les prêteurs, les pays comme la Grèce auraient encore plus de mal à se refinancer, et les dépréciations mettraient directement à mal l'économie mondiale. Et par cette différence persistante d'opinion, la crise ne se risque pas, ce qui rend donc nerveux tout le monde.

D'habitude, dans une telle situation, la monnaie concernée serait un véritable repoussoir et plongerait rapidement. Mais à plus de 1,40 $ pour 1 €, l'euro reste à un cours élevé. C'est parce qu'après tout, personne n'est vraiment incité à acheter des dollars également. Les Etats-Unis se trouvent dans leur propre crise de la dette, un problème financier qui peine également à se régler à cause de désaccords politique. La dette américaine est à des niveaux très élevés. La nouvelle majorité républicaine du Congrès ne veut pas augmenter le plafond légal de la dette. Ce plafond a été augmenté de façon quasi systématique au cours des dernières décennies. Mais les républicains, qui se recentrent sur la rigueur budgétaire, ne veulent plus continuer cette fuite en avant. Ils veulent donc des coupes budgétaires massives pour désendetter le pays.

De son côté, Barack Obama considère que ces réductions de dépenses toucheraient surtout les défavorisés (puisque ce sont eux qui bénéficient le plus des services publics), et qu'il faut qu'il y ait donc aussi des augmentations d'impôts sur les plus hauts revenus. Or la plupart des républicains se sont engagés à ne jamais augmenter les impôts, sous aucune circonstance. Il y a donc très peu d'espace pour un compromis. Seulement, début août, l'Etat fédéral américain devra emprunter pour payer ses dépenses courantes, et donc augmenter sa dette au delà du plafond légal actuel. Dans le cas contraire, les Etats-Unis seraient également en situation de défaut, une crise qui pourrait autant endommager l'économie mondiale que les cas européens.

Résultat de ce double problème de dette simultané : ni le dollar ni l'euro ne sont attaqués. La livre britannique reste à ses niveaux bas, auxquels elle est arrivée après le début de la crise financière qui handicapa la City. En fait, la monnaie qui devrait vraiment augmenter, c'est le yuan chinois. Les déséquilibres commerciaux entre la Chine d'un côté, l'Europe et les Etats-Unis de l'autre, devraient pousser à acheter de la monnaie chinoise. Mais le gouvernement chinois ne laisse pas sa monnaie s'affaiblir, envers et contre tout. Donc rien ne se passe d'un point de vue monétaire. Au niveau du cours des actions, c'est une autre histoire. Le CAC 40 n'arrive pas à dépasser les 4000 points, mais c'est un niveau qui finit par devenir assez courant depuis une bonne dizaine d'années. Au final, tant qu'il n'y a pas un défaut avéré d'un pays, toutes ces inquiétudes n'handicapent pas vraiment le reste de l'économie. C'est pour ça que ces risques colossaux passent à peu près inaperçus à la plus grande partie de la population...