Réflexions en cours

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

mardi 19 octobre 2010

Union des Etats / Union des peuples

La Commission Européenne aimerait pouvoir compter sur de nouvelles ressources, basées sur un impôt européen. Les différents Etats qui composent l'Union Européenne ont peu de chances d'être d'accord avec cet objectif. Ils aimeraient encore garder la main sur la façon dont leurs agents économiques sont ponctionnés. Surtout, une telle mesure risque fort d'être impopulaire auprès du grand public. Déjà, il peut paraître paradoxal que la Commission souhaite augmenter ses dépenses lorsqu'elle demande aux gouvernements de réduire les leurs. Surtout, la population peut à bon compte se demander si l'argent prélevé est bien utilisé. Et les politiques de l'Union Européenne sont à l'heure très majoritairement incomprises. Bien sûr, on peut vouloir faire de la pédagogie et faire des campagnes d'informations sur l'action de l'Union Européenne. C'est utile, mais cela restera insuffisant. Jusqu'à présent, l'Union Européenne est surtout accessible pour une élite. Aucun particulier ne demande de rendez-vous à son député européen pour lui parler de ses problèmes. Il n'en rencontre jamais dans le marché, et serait d'ailleurs bien en peine pour l'identifier s'il le croiserait. Seules les entreprises peuvent faire pression sur les députés européens, en allant faire du lobbying dans l'enceinte du Parlement. De la même façon, les Commissaires Européens se déplacent peu pour aller au contact de la population, comme pourraient le faire les ministres.

Cet état de fait remonte aux origines mêmes de la construction européenne. A l'origine, il ne s'agissait pas d'une grande réunion populaire, où les peuples auraient exprimés leur envie d'une organisation supra-nationale. Les pères fondateurs étaient des hommes politiques qui ont fait un travail remarquable de diplomatie, permettant de poser de nouvelles bases via des traités qui étaient dès le départ un peu obscurs. De même, les nouvelles adhésions de pays membres se sont fait par des négociations intergouvernementales. La construction européenne est une œuvre de la Raison et de la discussion entre Etats. C'était d'ailleurs certainement la meilleure chose à faire. Mais est-ce suffisant ?

Aujourd'hui, maintenant que le Traité de Lisbonne a donné un cadre formel à l'Union Européenne, ce n'est plus des ses structures dont il faut s'inquiéter. Au bout de cinquante années, nous sommes arrivés à une étape. Le défi des cinquante prochaines années sera de réaliser l'Union des peuples, et non la seule Union des Etats. On ne pourra plus davantage progresser dans la construction européenne sans une adhésion franche des peuples dont elle a vocation à s'occuper. A cette aune-là, le plus dur reste donc bien à accomplir. Et pour commencer, il faudrait que les institutions européennes en soit clairement conscient.

vendredi 15 octobre 2010

Euro, Nutella et petit déjeuner

Le quotidien La Voix du Nord a la bonne idée de réaliser un dossier sur l'inflation en se basant sur les tickets de caisse fournis par des lecteurs. Cette méthode permet de voir les fluctuations de prix de produits fixes dans le même magasin sur une période de dix ans. Et contrairement à ce que peut affirmer une revue de presse racoleuse, le premier relevé, consacré aux produits du petit déjeuner, n'indique pas du tout une flambée des prix liée au passage à l'euro. Evidemment, ça va contre les idées reçues et c'est moins spectaculaire, mais c'est comme ça.

Les variations de prix de 8 produits sont présentés. Pour 7 d'entre eux, ces variations sont comprises entre -4,2 % (pour le pot de 250 g de Ricoré) et 28,6 % (pour le litre de lait Candia). En faisant la moyenne de ces 7 variations, on découvre que leur augmentation a été de 18,01 %. Or l'article rappelle dès le départ que l'indice des prix à la consommation a augmenté de 18,2 % dans cette période allant de 2000 à 2010. Ces augmentations de prix relevées empiriquement sont donc conformes à l'inflation constatée officiellement, étant même légèrement en dessous. 18,2 % d'inflation en 10 ans, cela fait un taux annuel moyen de 1,69 %. C'est moins que les 2 % d'inflation recherchés par la Banque Centrale Européenne. Il n'y a donc pas de flambée des prix. Au cours des 10 années, on relève bien des évolutions sensibles d'une année sur l'autre, mais surtout en fonction du cours de certaines matières premières. De ce fait, elles peuvent avoir lieu tant à la baisse qu'à la hausse.

Les consommateurs croient souvent que l'euro fut responsable d'une hausse des prix incroyable. Elle ne se constate pas vraiment sur la durée ou sur l'ensemble des produits. Et quand bien même il y aurait eu une augmentation des prix, ce n'aurait pas été la faute de l'euro en lui même. Les coûts des producteurs n'ont pas augmenté en changeant de monnaie, il peut seulement y avoir une croyance que les consommateurs seraient prêts à accepter des prix plus élevés pour l'occasion. Cela ne se vérifie pas, d'une part par ce que le consommateur est généralement attentif à l'emploi de son argent, mais aussi parce qu'il peut toujours faire jouer la concurrence entre producteurs. Qu'ils soient en francs ou en euros, un producteur n'a pas intérêt à être beaucoup plus cher que ses concurrents (car le risque de sanction est fort). Au contraire, si ses concurrents augmentent leurs prix, il a tout intérêt à garder les mêmes : les consommateurs reconnaitront un prix inférieur à un autre, et il en sera récompensé. La concurrence est donc un excellent garde fou contre l'inflation.

Cela se voit d'autant mieux en considérant le huitième article dont le prix fut analysé, le pot de 400 g de Nutella. Son augmentation très importante de prix (102,6 % sur 10 ans soit plus de 7 % par an) ne peut s'expliquer sur les seules variations de cours de la noisette ou de l'huile de palme. Elle s'explique néanmoins très bien quand on se rappelle que le Nutella n'a pas de vrai concurrent. Les pâtes à tartiner des marques de distributeurs ne bénéficient pas du tout de la même cote d'amour et ne peuvent prétendre remplacer le Nutella dont la formule est farouchement gardée secrète. Pour les consommateurs, l'alternative c'est donc soit du Nutella plus cher, soit rien du tout. Et connaissant l'aspect presque addictif du produit sur certaines personnes, Ferrero ne se prive donc pas d'augmenter le prix. Il est confiant sur le fait que ses clients suivront. Au bout du compte, dans le cas du petit déjeuner comme dans d'autres, l'euro s'avère innocent dans l'augmentation des prix. Seule la concurrence peut parfois être prise en défaut.

free hit counter