Réflexions en cours

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jeudi 21 avril 2011

Le brevet européen avance

Le 13 avril dernier, le Commissaire européen au marché intérieur, Michel Barnier, a présenté une proposition pour l'établissement de brevets qui s'appliqueraient dans 25 des 27 pays de l'Union Européenne. Cela fait des décennies que l'on évoque cette possibilité, mais que ça n'avançait pas. Actuellement, ce qui coûte le plus cher dans le dépôt d'un brevet dans plusieurs pays, c'est sa traduction (avec des termes souvent très techniques) dans les différentes langues, en plus des frais administratifs. Le principe du brevet européen est donc de diminuer le nombre de langues dans lesquelles le brevet est déposé, tout en protégeant l'innovation dans l'ensemble des pays concernés. Toute la difficulté est alors de sélectionner les langues en question.

Selon la proposition de Michel Barnier, fruit de longues négociations, on pourra déposer un brevet dans n'importe quelle langue, mais si cette langue n'est pas l'anglais, le français ou l'allemand, le dépôt devra être accompagné d'une traduction dans une de ces trois langues. Le brevet européen fera alors référence à ce texte. Pour une période transitoire qui pourra aller jusqu'à douze ans, les brevets déposés en français ou en allemand devront être traduits en anglais aux frais du déposant, et ceux déposés en anglais devront être traduits dans une autre des langues officielles de l'Union Européenne.

Cette proposition repose sur la procédure de coopération renforcée, qui permet à plusieurs pays de prendre l'initiative sur un dossier sans que tous ne suivent. Ce fut nécessaire, car l'Espagne et l'Italie ne voulaient pas suivre ce plan, alors que l'unanimité est requise pour arriver à une décision dans le cadre ordinaire des institutions européennes. Ces deux pays fustigeaient la "discrimination linguistique" mise en place par ce plan, regrettant notamment que leurs deux langues, l'espagnol et l'italien, n'accompagnent pas les trois autres langues possibles pour le dépôt du brevet européen. Mais plus il y avait de langues proposées, et plus il devenait coûteux d'opérer ce brevet. On peut regretter que l'Espagne et l'Italie, deux grands pays, refusent de souscrire à cette proposition, mais on peut également considérer que la France l'aurait également mal pris si le français n'avait pas été proposé.

Le dernier obstacle, l'établissement d'une juridiction compétente pour juger les différents à venir sur les brevets européens, devrait être levé d'ici la fin du printemps. On pourra alors officiellement lancer le brevet européen : ce sera un atout pour la circulation et la protection de l'innovation au niveau européen, une vraie mesure susceptible d'améliorer la compétitivité des entreprises européennes. Voilà le genre de réalisations que l'Union Européenne doit mettre en avant.

mardi 5 avril 2011

Des plans d'austérité bien impopulaires

Lorsqu'à l'automne dernier, le Premier ministre irlandais Brian Cowen a à la fois fait appel au FMI et à l'aide financière européenne, et présenté un plan d'austérité drastique, il dut appeler des élections anticipées. Premier ministre le plus impopulaire de l'Histoire (avec un taux de satisfaction descendant jusqu'à 8 % seulement), il pouvait être certain que son parti recevrait une raclée mémorable. Celle-ci eut lieu au début du mois de mars, et c'est bien une toute nouvelle majorité qui est arrivée au pouvoir. Le nouveau Premier ministre, Enda Kenny, s'est fait élire en promettant d'obtenir un meilleur accord avec l'Union Européenne. Les institutions européennes ont en effet accepté de secourir une Irlande terrassée par les forts taux d'intérêts réclamés pour sa dette publique, mais uniquement à des conditions strictes. Le but est bien de réduire la sensibilité aux marchés financiers qui détiennent la dette, et donc d'avoir des déficits moins élevés. Vu leur ampleur, les plans d'austérité ne sont pas légers. D'où le mécontentement de la population, qui se voit soudainement privée de dépenses publiques auxquelles elle était habituée.

Rien ne dit que Enda Kenny réussira à obtenir un accord plus favorable. Il a un mandat de la part de sa population, mais les fondamentaux irlandais n'ont pas changé pour autant, et les soucis que posent ce pays aux autres dirigeants européens restent les mêmes. Cette situation vient en échos à celle du Portugal. Ce pays est également attaqué par les marchés financiers (par le mécanisme des prophéties auto-réalisatrices), et le gouvernement portugais a voulu regagner leur confiance en serrant la vis sur les déficits public par un nouveau plan d'austérité particulièrement strict. Le plan fut rejeté par le Parlement, d'où des élections législatives anticipées à venir. En conséquence, la spéculation reprend de plus belle, et chacun s'interroge sur la possibilité du Portugal de demander l'aide du FMI et de l'UE. Ce serait là aussi particulièrement mal vu, et entraînerait de toute façon les mesures d'austérité redoutées.

L'Espagne est d'ores et déjà vue comme la prochaine victime désignée. Avec un taux de chômage de 20 %, le pays s'est réveillé particulièrement groggy après l'arrêt brutal d'une croissance miraculeuse. Les déficits publics sont un vrai problème, et le gouvernement se voit obligé d'enchaîner les plans d'austérité, avec l'impopularité que cela entraîne. Le Parti Socialiste Espagnol semble mal en point, les élections législatives de l'année prochaine semblent peu favorables pour la majorité, et José Luis Zapatero a d'ores et déjà annoncé qu'il ne chercherait pas à rester Premier ministre. Mêmes causes, mêmes conséquences. Tout cela donne un peu l'impression d'un mot d'ordre "sortez les sortants" au niveau européen.

Pourtant, il y a un gouvernement qui n'est pas tombé malgré l'austérité sévère qu'il impose à son pays. C'est celui de la Grèce, qui révéla les problèmes sitôt élu, et ne cacha rien du chemin à suivre pour s'en sortir. Il y a une leçon à en tirer : l'heure n'est plus aux gouvernements qui promettent plus de moyens sur tous les sujets et annoncent des lendemains qui chantent. Il faut avoir le courage d'annoncer que rien ne sera facile, que tout ce qui est trop beau pour être vrai ne le sera pas et que c'est en y mettant chacun du sien qu'on obtiendra quoi que ce soit. Bref, il faut des gouvernements de combat, identifiés comme tels dès la campagne électorale. Ce peut également être une leçon pour la France en 2012.

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