Réflexions en cours

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dimanche 27 mai 2007

L'entrée progressive de l'ex-Yougoslavie dans l'Union Européenne

Aussi disparates qu'ils sont perçus, les pays de l'ex-Yougoslavie ont des relations avec l'Union Européenne bien différentes. Ils ont pourtant tous vocation à entrer dans l'Union Européenne. C'est d'ailleurs le chemin qu'a suivi efficacement la Slovénie. Ce pays situé au nord des Balkans a eu la chance d'échapper aux longs conflits armés qui ont suivi l'éclatement de la Yougoslavie (il n'y eut qu'une faible guerre de 10 jours en 1991). Elle a ainsi pu s'adapter rapidement au modèle économique européen, pour arriver à un niveau de développement comparable à d'autres pays de l'Europe de l'ouest. Elle a ainsi pu adhérer sans difficulté à l'Union Européenne en 2004, et adopter l'euro comme monnaie dès 2007. Elle présidera en 2008 le Conseil de l'Europe, et si elle reste un petit pays (avec deux millions d'habitants), elle n'en est pas moins respectée comme exemple de pays réussissant à passer à l'économie de marché sans difficulté et surtout sans psychodrame. Car le problème de la Yougoslavie n'était pas son économie, certainement en meilleure forme que celles de ses voisines roumaines ou bulgares, mais bel et bien ses nationalismes, sources de conflits depuis un siècle.

A ce titre là, la guerre y a fait rage pendant la plus grande partie des années 90. Entre les Serbes, les Croates et les Bosniaques (soit, grosso modo, entre les orthodoxes, les catholiques et les musulmans), la lutte pour le contrôle de territoire fut sanglante. Le guerre entre les Serbes et les Bosniaques concernant l'indépendance de la Bosnie-Herzegovine a été particulièrement difficile, notamment lors du siège de Sarajevo. Le conflit entre serbes orthodoxes et musulmans indépendantistes se retrouve également dans le cas du Kosovo. Les cicatrices sont encore vivaces. Dans le cas de la Croatie, le pays réussit relativement à mettre cela de côté, se rapprochant en cela de la Slovénie. Le pays peut prétendre adhérer à l'Union Européenne, et des négociations sont sur le point de débuter. Il y a pourtant un obstacle de taille : le manque de collaboration des autorités croates dans la capture des criminels de guerre des anciennes guerres.

Quant à la Serbie, elle semble encore tourmentée par la perte de son rang d'élement central au sein de l'ensemble qu'était la Yougoslavie. Les indépendances du Kosovo et du Montenegro sont encore mal acceptées, et la vie politique y est très mouvementée, voire dangereuse. La notion de "poudrière des Balkans" peut y sembler encore d'actualité. Dès lors, il est peu probable que la Serbie puisse adhérer dans un avenir proche à l'Union Européenne. Les Serbes eux-mêmes ne semblent pas se poser la question. Le Montenegro, lui, déclare son indépendance pour justement mieux se jeter dans les bras de l'Europe. Avec le Kosovo, ils pourraient en effet être éligibles à l'adhésion, mais l'on peut se poser la question de l'opportunité de multiplier le nombre de micro-Etats dans les instances européennes. Il faudra de toutes façons que la question serbe soit vraiment calmée d'ici là.

La Bosnie-Herzegovine peut elle aussi prétendre adhérer à l'Union Européenne. Ce serait déjà un démenti à ceux qui croient que la religion est un critère d'appartenance à l'Europe. La Bosnie et l'Albanie sont majoritairement musulmanes, mais n'en appartiennent pas moins à l'Europe en tant que territoire. Mais là encore, il faudrait auparavant que les blessures se cicatrisent dans le cas de la Bosnie, et pour l'Albanie que l'économie soit vraiment plus forte et se rapproche un minimum des niveaux du reste de l'Europe. D'une manière générale, la Yougoslavie a donc vocation à se retrouver en quelque sorte réunie au sein des instances de l'Union Européenne. Mais les dates d'arrivées seront probablement très étalées dans le temps.

samedi 19 mai 2007

L'Espagne ne renonce pas à la Constitution européenne

Depuis une vingtaine d'années, l'Espagne connaît une croissance importante, qui l'a fait quitter son statut de pays à part dans l'occident, vis-à-vis de son faible développement d'autrefois. L'Espagne avait beaucoup souffert de la politique franquiste, qui l'avait laissé dans un marasme économique pendant une quarantaine d'années. Pour se relever, elle pouvait compter sur de nouvelles politiques plus libérales, pour relancer la croissance, mais pour rattraper le reste de l'Europe occidentale, elle a eu besoin de l'aide de l'Union Européenne. Depuis son adhésion en 1986, l'Espagne a massivement bénéficié des aides régionales européennes. Elles lui ont permis de financer des infrastructures indispensables, et de créer de nouvelles industries. Ce fût un élément fondamental du retour de l'Espagne dans la moyenne européenne, comme c'est aussi le cas pour l'Irlande. En conséquence, la construction européenne est plutôt bien vue de l'autre côté des Pyrénées. L'Europe est vue comme un moyen de libération et de développement, plutôt que comme un facteur de perte de souveraineté. Ainsi, lors du référendum qui eut lieu le 20 février 2005 sur le Traité Constitutionnel Européen, tous les partis avaient appeler à voter oui. L'approbation fût donc de 77 %, même si le taux de participation n'était que de 42 %. C'était le seul référendum organisé sur la question avant ceux de la France et des Pays-Bas, qui s'étaient soldés par des rejets.

Pour José-Luis Zapatero, le Premier ministre espagnol, ce référendum donne du poids au TCE, et c'est la raison pour laquelle il considère que la Constitution ne doit pas être abandonnée. Ainsi, les pays qui ont déjà ratifié le Traité ne devraient pas être les perdants des rejets français et néerlandais, et ce serait alors à ces pays de faire les efforts nécessaires pour se sortir eux-mêmes de cette situation. C'est ainsi qu'en ce début d'année, l'Espagne avait organisé avec le Luxembourg un sommet à Madrid des 18 pays qui avait ratifié le TCE, dans le but de faire une démonstration de force. Le message est simple : le texte du TCE ne doit pas être passé par pertes et profits.

José-Luis Zapatero aurait pourtant tord de refuser de remettre en discussion les institutions européennes. Il doit voir la réalité en face, les échecs français et néerlandais bloquent la poursuite de la construction européenne, sans oublier que d'autres pays qui ont laissé de côté la question sont des obstacles potentiels bien plus forts à l'adoption généralisée du TCE. En outre, en faisant une telle démonstration de force, l'Espagne introduit une vraie division entre les différents pays, et cela ne va pas dans le sens d'une solution. En fait, il ne s'agit pas de faire du dogmatisme, même si l'on peut comprendre que le Premier ministre espagnol ait du mal à accepter l'idée que le référendum qu'il a organisé avec succès n'ait en fin de compte servi à rien. Mais cette légitimité populaire sur l'ensemble du texte, vaut aussi pour le texte en morceaux. En l'occurrence, dans la solution d'un traité simplifié limité aux institutions, l'Espagne pourrait le ratifier sans difficulté en s'appuyant sur la consultation menée en 2005. Elle rejoindrait ainsi le front de la recherche de sortie de crise, formés de la Grande-Bretagne, de la France, de l'Allemagne ou de l'Italie. La situation a trop durée, il faut aller vite, pour éventuellement viser une issue avant la fin de l'année.

mercredi 9 mai 2007

Le point sur l'Europe

En ce jour de fête de l'Europe, l'Union Européenne voit enfin une chance de peut-être poursuivre sa construction. Celle-ci a été bloquée par les non français et néerlandais au Traité Constitutionnel Européen. Mais ce serait réducteur de croire que ces deux pays étaient les seuls obstacle à la poursuite de la construction européenne. La Pologne, la Grande-Bretagne ou le Danemark étaient des difficultés autrement plus coriaces pour cette adoption, que les deux premiers rejets ont permis d'éviter. Toujours est-il qu'il faut surmonter ce bloquage. Alors qu'il n'y avait évidemment aucun plan B pour sortir de cette impasse, nous sommes condamnés à faire quelque chose, à inventer ce plan B malgré les deux ans de perdus, et malgré les renégociations difficiles qui sont à prévoir. Si la Pologne conservatrice semble plus que jamais réticente, le nouveau Président de la France a été élu avec un mandat fort concernant la relance de la construction européenne. José Manuel Barroso, le Président de la Commission Européenne, est conscient des difficultés causées par cet arrêt au fonctionnement des programmes européens, et est prêt à travailler sur un scénario de sortie de crise avec les différents pays. Le prochain Conseil de l'Europe, présidé par l'Allemagne, doit en être le moment opportun. La relance pourrait s'y faire sur la base du traité simplifié voulu par Nicolas Sarkozy dans sa campagne.

Alors que les Polonais ou les Néerlandais souhaiteraient de préférence une renégociation intégrale, raffraichissant seulement le Traité de Nice, cette idée de traité simplifié apparait comme une idée qui fait son chemin, une voie qui a sa pertinence aux autres pays qui ont déjà ratifié le TCE. Ceux-ci préféreraient que les pays retardataires le ratifient à leur tour, mais le réalisme montre que c'est une solution pragmatique, plus évoluée et en fait meilleure que la renégociation totale. Les Britanniques voient la possibilité de s'abstenir de faire un référendum si les Français n'en organisent pas, les Polonais pourraient se faire une raison si quelques points délicats étaient abordés, et l'Allemagne voit d'un bon oeil l'idée de conserver les avancées du TCE, même si les traités d'ordre non institutionnels ne sont pas intégrés à celui qui serait adopté. Certes, le SPD allemand réchigne à cette idée, mais surtout du fait qu'il a une position commune avec le PS français, c'est à dire de rajouter un protocole social à texte déjà bien chargé dans l'idée de le soumettre à nouveau au vote.

En tous cas l'élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence française est vue comme une bonne nouvelle en Europe, du fait des actions qu'il souhaite accomplir, et avec la Présidence allemande de l'Europe qui est en cours, il reste de l'espace pour agir très rapidement, et obtenir des progrès décisifs avant l'été. Si en France le nouveau traité simplifié serait ratifié par le Congrès, alors les prochaines législatives seront de fait une nouvelle consultation sur l'Europe. Cette dimension ne pourra être absente de la campagne qui s'ouvre actuellement. Et tous nos voisins attendent que la France retrouve son rôle de moteur dans la construction européenne qu'elle a malheureusement perdue.

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