Réflexions en cours

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

lundi 13 novembre 2006

Casino Royal

La sortie du prochain James Bond approche. Mais ce qui fait l'activité actuellement, c'est la primaire pour l'investiture socialiste à l'élection présidentielle. Jeudi, le PS votera pour désigner son candidat. Et dans cette campagne, on ne peut pas dire que l'affrontement ait été digne de ceux que mène l'espion britannique. En effet, elle a été féroce, mais on peut comprendre que Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn ne se soient pas laissés remisé par une candidature qui aurait du être fantaisiste. Ségolène Royal aura montré au cours des derniers mois un état d'impréparation ahurissant pour un poste de si haut niveau, en essayant de montrer son "originalité" en lançant des idées bancales voire inquiétantes, comme lorsqu'elle propose de faire du tirage au sort un procédé de contrôle démocratique à la place du suffrage universel, pour ensuite se lancer dans des explications de texte tenant lieu de retraites désorganisées.

Si elle a eu lieu de nombreuses occasions de s'exprimer, ce fut à chaque fois pour provoquer la consternation de ceux qui l'écoutaient vraiment. Lorsqu'on lui demande comment elle compte financer les mesures du programme socialiste, voire faire reculer la dette, elle s'en tient à dire qu'elle compte sur une croissance plus forte. Oui, mais comment obtenir une croissance plus forte ? Elle déroule alors un argumentaire stupéfiant, expliquant que le manque de croissance s'explique par le manque de confiance entre le gouvernement et les administrations régionales, qu'il y a du "désordre", qu'elle veut elle veut l'"ordre juste", et que ça suffira pour créer les conditions de la croissance. L'alignement de la couleur du gouvernement avec celle des exécutifs des régions, voilà tout son programme économique. Qui est contre l'ordre ? Qui est contre la justice ? Qui est contre l'ordre juste ? Elle tient depuis des mois sur des slogans creux, et pour de nombreuses personnes qui s'intéressent au débat politique, le subterfuge commence à devenir vraiment grossier. Sur la plupart des grands sujets, elle apparaissait incompétente en comparaison de ses adversaires. Est-ce sa vraie nature, ou tente-t-elle de dissimuler ce qu'elle pense vraiment ?

L'affaire de la vidéo où elle annonce clairement qu'elle ne veut pas "crier sur les toits" ses idées de réforme de l'enseignement au collège de peur de provoquer la colère des syndicats, montre avant même d'observer le fond du problème, qu'elle ne fait de la politique qu'à grands coups de sondage, quitte à tenir un double langage sur ce qu'il faut faire, et que ce qui compte avant tout est d'être suffisamment populaire pour être élue, le reste passe après et de loin. Dès lors, s'exprimer, c'est prendre des risques. Et vu comment elle se décrédibilise sur les figures obligées comme l'économie ou la politique étrangère, il est naturel qu'elle ne souhaite pas être audacieuse sur le reste. Du reste, ce n'est pas ce que ses partisans demandent. La plupart la soutienne uniquement en considérant qu'elle est la seule à pouvoir battre de Nicolas Sarkozy. Quant on lui demande ses différences, elle répond que sa différence est visible, et qu'il est temps que la France ait une femme chef de l'Etat. Certes, mais pourquoi ce serait-elle ? Les féministes combattent pour que les jugements se fassent sur les compétences, et non sur le sexe. Pour Ségolène Royal, sa féminité est le seul élément qu'elle met en avant pour demander les suffrages des citoyens, c'est donc bien l'inverse d'une démarche d'égalité des sexes. Cet angle qu'elle a adopté pour sa campagne touche au répugnant, lorsque son ultime argument pour contrer les critiques de ses propositions (ou de ses non-propositions) est d'accuser ses adversaires de machisme, en s'abritant derrière une stratégie de victimisation qui ne convient évidemment pas pour un Président ou une Présidente de la République.

Dès lors, une éventuelle victoire de Ségolène Royal en mai 2007 serait un pari extrêmement risqué pour la France. Pour s'en sortir il faudrait qu'elle nomme un Premier ministre solide, qui prendrait la responsabilité de la plupart des questions. Mais il n'est pas dit que cela suffise. Les Français devront refuser un jeu où ils ont toutes les chances de perdre, malgré la séduction qu'il peut engendrer.

samedi 11 novembre 2006

Le joli coup de Nicolas Hulot

En menaçant de se présenter à l'élection présidentielle, Nicolas Hulot a indéniablement adopté une stratégie astucieuse pour faire progresser ses convictions sur la protection de l'environnement. Il le dit lui-même : il n'a aucune envie d'y aller. Les contraintes de la campagne seraient énormes, alors qu'il ne souhaite pas vraiment assurer les fonctions de président, à l'inverse de personnalités à la popularité moins flagrante. Mais il a envie de défendre des idées, et surtout l'environnement. Lors de ses voyages à travers le monde, il a eu l'occasion d'en observer la beauté, et combien celle-ci était menacée. Il y a bel et bien une urgence vis-à-vis de l'effet de serre, et si cela fait une vingtaine d'années que la question a été posée, elle reste jusqu'à présent sans réponse. Il y a tout de même une prise de conscience dans le pouvoir politique : Al Gore étudiait ces questions lorsqu'il était sénateur, et son engagement actuel n'en est que la continuation. Nicolas Hulot lui-même a depuis des années l'oreille de Jacques Chirac, qui n'a pas été inactif en la matière. Nul besoin de Verts au gouvernement pour faire progresser la cause écologique, et cette précaution est désormais inscrite dans la Constitution française. C'est la mesure la plus symbolique, mais des mesures concrètes ont été également prises. Ce n'est certes pas suffisant, et c'est pour cela que Nicolas Hulot prend la parole aujourd'hui.

Il le fait au travers d'un pacte, une demande d'engagement aux candidats aux présidentielles et aux simples citoyens. Il y d'autant moins d'excuses à ne pas en tenir compte que, contrairement à d'autres démarches écologiques déconnectées, les objectifs et recommandations prônées sont pragmatiques et réalisables. Les objectifs sont particulièrement clairs et impératifs : transports moins gourmands en énergie, recherche en la matière, biodiversité doivent être pris en compte dans la création des politiques publiques. Les propositions ont le mérite d'être ouvertes au dialogue, ce qui est un signe de souci d'efficacité. On peut se demander en effet si l'imposition des émissions de carbone est le meilleur moyen dans toutes les situations de les diminuer. Quant à la mise en place d'une grande politique de sensibilisation, elle sous-entend cruellement que trop nombreux sont ceux qui ne prennent pas déjà en compte cette préoccupation. On ne peut alors pas en faire l'économie.

C'est donc en défendant un objectif clair et de façon pragmatique que Nicolas Hulot a demandé le soutien de tous les autres candidats, sous peine de s'y mettre lui-même. Son combat désintéressé et ses émissions émouvantes l'ont rendu populaire, et une éventuelle candidature, appuyée par la société civile, serait dangereuse pour chaque parti, de par la concurrence créée. Avec une menace suffisamment crédible, il a réussi à imposer l'environnement dans le débat présidentiel. Cela devrait se traduire par des engagements clairs des différents candidats qu'on sera leur rappelé une fois au pouvoir. Il est encore heureux qu'un simple citoyen puisse participer de façon forte au débat sans être un politicien de métier. Ce n'est pas forcément évident, mais Nicolas Hulot a trouvé le moyen d'utiliser sa notoriété de façon crédible et intelligente pour faire progresser une cause qui nous concerne tous.

free hit counter