Réflexions en cours

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vendredi 20 mars 2009

De la difficulté de gouverner en temps de crise...

...et de la facilité de protester.

Et encore une "journée d'action", où l'action en question n'est de pas travailler ! La France est depuis fort longtemps habituée à ces journées de grèves, de manifestations importantes, censées montrer toute la colère des travailleurs face à à peu près tout. En la matière, on ne peut contester que les syndicats ont de l'expérience, puisque c'est devenu leur raison d'être. Mettre un ou deux millions de personnes dans la rue n'est pas bien difficile, à vrai dire les commentateurs s'émeuvent même lorsque la "mobilisation" est moins forte. Ce sont essentiellement toujours les mêmes personnes qui y participent, bien que l'on trouve à chaque manifestation des nouveaux venus, qui viennent pour la première fois. Comme les chiffres totaux restent toujours à peu près les mêmes, cela veut dire que ces nouveaux venus ne reviendront pas, ou bien qu'elles ne font que commencer leur carrière de grévistes. Si l'on peut évidemment comprendre le désarroi des salariés du secteur privé qui risquent de perdre leur emploi à cause de la mauvaise conjoncture économique, il reste que le gros des troupes vient des habituels pourvoyeurs de la fonction publique. Hier, la grève a ainsi vu l'immobilisation de la SNCF, de Radio France et de l'Education Nationale. Soit du grand classique en fait.

Mais quelle était la raison de la grève du jour ? Il s'agissait en fait de protester contre la crise. A cela on peut penser qu'il est paradoxal de réclamer davantage de travail en ne travaillant pas. Surtout, la crise est un phénomène qui dépasse de loin la France, laquelle est même moins touchée que bon nombre de pays développés. C'était aussi l'occasion de manifester contre Nicolas Sarkozy, cible là encore traditionnelle. Aujourd'hui, son tort serait de ne rien avoir "lâché". Le gouvernement dit "non". A quoi ? A faire un nouveau plan de relance. Mais pourquoi faire un nouveau plan de relance, alors que celui qui a déjà été conçu les mois derniers n'a pas encore été appliqué ? Ce n'est pourtant pas comme s'il était anodin, vu qu'il fera doubler le déficit public, pourtant déjà gigantesque. S'agit-il donc de multiplier de façon excessive les mesures non financées, pour le plaisir de dépenser n'importe comment et de dire toujours oui à son interlocuteur ? Sur le moment, c'est sans nul doute plus agréable. Cela a au moins le mérite d'éviter de pénibles conflits. Sur le long terme, c'est catastrophique, et la France le sait pour souvent recourir à ce procédé.

Le gouvernement n'a donc pas un intérêt fort à céder aux revendications des syndicats. Quoi qu'il fasse, il sera de toutes façons violemment critiquées, car étant aux affaires, il est tenu responsable de l'état des choses. En période de crise, de tels sentiments sont évidemment exacerbés, alors que toute marge disparaît. Avec la montée du chômage, vient avec la baisse des cotisations sociales. Avec une croissance négative, les recettes fiscales diminuent. Et tout cela alors que les dépenses dues aux dispositifs d'assurance chômage augmentent de façon mécanique. L'Etat prend sur lui automatiquement une partie de l'impact de la crise, résultant de l'action de "stabilisateurs automatiques". D'autres pays, comme les Etats-Unis, en sont dépourvus. Cela doit être pris en compte dans les comparaisons.

Devoir faire une relance importante de l'économie sans en avoir les moyens est donc une tâche difficile, qu'il est plus facile d'exiger que d'aider à faire. Ce qui semble primer par dessus tout, c'est cet irrépressible besoin de faire grève et de bloquer l'économie, par habitude ou par plaisir de croire que ça fait bouger les choses. Mais dans quel sens ? Les grèves systématiques nuisent à l'économie, ce n'est pas un secret. Les salariés de l'Union Navale de Marseille s'étonnent aujourd'hui de la liquidation judiciaire de l'entreprise, et en conséquence de leur prochain licenciement. Ce chantier de réparation navale n'avait plus aucun travail dans son carnet de commande. Or les navires doivent toujours être entretenus, et d'autres ports européens continuent de le faire. La particularité de Marseille est le blocage fréquent pour d'innombrables mauvaises raisons de son port par ceux qui y travaillent. Le trafic au port de Marseille a en conséquence chuté, car il n'est désormais plus du tout considéré comme fiable, et cela est encore dévastateur pour la santé économique des entreprises du port. Les travailleurs des chantiers navals de Marseille ne récoltent que ce qu'ils ont semé. Pourtant ils continueront de protester, contre leurs cibles habituelles, contre eux-mêmes en fait, mais sans le savoir. Au moins garderont-ils l'impression de participer à la "lutte sociale". Mais est-ce bien le plus important ?

dimanche 8 mars 2009

Les trous sans fond

Le conflit en Guadeloupe touche à sa fin, et d'une façon bien peu glorieuse. Au fur et à mesure il aura montré sa nature nationaliste, voire raciste, sous l'influence de son leader exalté Elie Domota. L'Etat a accepté de signer un accord à courte vue, qui sera surtout dévastateur sur la durée. Encore plus de fonctionnaires, encore plus de surprimes aux revenus par rapport à ce qu'il se fait en métropole, encore plus de dépenses publiques qui ne se justifient pas... Le coût dépassera les centaines de millions d'euros, mais cela ne sera que de nouvelles dépenses régulières de fonctionnement, rien qui permette de penser que l'économie locale repartira par la suite sur de nouvelles bases. Bien au contraire, le secteur privé, déjà bien faible, sort encore plus détruit par les grèves, les fermetures imposées par des milices et l'image donnée de l'inhospitabilité de la Guadeloupe. Tout ce qui faisait de la Guadeloupe une île socialement affaiblie sort renforcé, et l'argent public est dépensé à torrents pour cela.

D'une manière générale, le déficit public explose. Le gouvernement reconnaît qu'il dépassera les 5 % du PIB en 2009, ce qui est une très mauvaise nouvelle. Bien sûr, l'intervention de l'Etat est nécessaire en période de crise. La sauvegarde des banques via des prêts pour consolider leurs actifs, le plan de relance fondé sur l'investissement en infrastructures ou les mesures de primes à la casse, tout cela a un coût. Cela aurait déjà été plus facile si l'on avait fait davantage d'efforts pour réduire les déficits les années précédentes. Cela aurait également du faire écarter de nouvelles mesures coûteuses et très marginalement utiles, comme de nouvelles réductions d'impôts (telle que la suppression des deux derniers tiers de l'impôt sur le revenu de 2009 pour les ménages placés dans la première tranche). Le minimum serait déjà d'éviter les dépenses qui seront condamnées à être maintenues années après années, créant de nouveaux gouffres pour les finances de l'Etat !

Il serait aussi avantageux de poursuivre les réformes structurelles visant à économiser l'argent public, surtout dans les situations où il est peu productif. Mais il suffit de contestations de la part de tous les corporatismes pour faire reculer tout effort en la matière, les personnels au mode de raisonnement binaires se succèdent dans des "luttes" pour préserver leur pré carré, oubliant la vision d'ensemble qu'il faut avoir lorsque l'on considère l'intérêt général. Dès lors, pourquoi le gouvernement devrait-il reculer ? La crise le met en situation de faiblesse, mais il doit se souvenir que quoiqu'il "lâche", il n'en sera pas davantage approuvé. C'est ainsi que de l'argent public est dépensé sans raison, qu'il en pleut pratiquement pour un oui ou pour un non, oubliant toute considération de nécessité.

Il aura par exemple suffi au sculpteur Daniel Buren de se plaindre dans les médias, pour que plus 4 millions d'euros soit dépensés pour rénover son "œuvre" au Palais Royal, en fait des colonnes de béton unanimement détestées par la population. Voilà où le manque de courage conduit, où le manque de respect de l'argent des Français amène. L'économie française et la France dans son ensemble en souffrent, et cela depuis bien trop longtemps. Plutôt que de faire pleuvoir de l'argent aveuglement sur des trous sans fond, la priorité devrait plutôt être de chercher où se trouvent les graines prêtes à éclore dans la terre. Et quitter, ainsi, la voie de la fatale facilité.

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