Réflexions en cours

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mercredi 24 janvier 2007

Echec et retraite en vie politique

Quand peut on parler d'un homme politique qui a réussi ? A la fin de sa carrière, lorsqu'il prend sa retraite, l'homme politique peut-il se dire "j'ai bien agi pour mon pays" ? Ainsi, Edouard Balladur ne souhaite pas se représenter lors des prochaines élections législatives. A 78 ans tout de même, l'heure de la retraite sera arrivée pour lui. Dans le domaine politique, il aura été député, ministre des finances et Premier ministre, et aura été également candidat à la présidence de la région Ile de France, à la mairie de Paris et bien sûr à la Présidence de la République. Il fait partie d'une époque, entre le pompidolisme et le sarkozysme, avec une carrière parallèle à celle de Jacques Chirac. Et chaque époque est marquée d'une certaine façon par les personnalités qui sont au pouvoir : elles passent, la France reste, de toutes façons il faut bien qu'il y ait un dirigeant, au fil du temps l'information devient "qui était au pouvoir à cette époque" plutôt que "la personne qui était au pouvoir a-t-elle réussi ce qu'elle a entrepris".

Malgré tous les clichés, lorsque l'on se lance dans la vie politique, il y a tout de même une envie de bien faire et d'améliorer les choses pour ses concitoyens. Mais le fait est qu'ils sont difficiles à contenter, un problème en chassant un autre. L'insécurité apparaît moins forte ? La priorité devient alors la lutte contre le chômage. Le chômage diminue, en partie par le recours à des contrats de travail flexibles ? La précarité devient insupportable. Si le CDI à temps complet venait à redevenir la règle, cela ne ferait que raviver les plaintes sur le niveau du pouvoir d'achat. Cela peut continuer longtemps comme cela, et c'est d'ailleurs bien compréhensible. Les pays riches peuvent se permettre de polémiquer sur tous les sujets, l'essentiel étant qu'il y ait quelque chose dont on peut polémiquer. Aux Etats-Unis, en absence de guerre, les débats font rage sur l'avortement ou l'opportunité d'une loi visant à réprimer ceux qui brûlent le drapeau national. Si un Président peut vouloir rassembler son peuple, celui-ci reste toujours très divisé, et l'action d'une personnalité politique ne fait donc jamais l'unanimité. Au contraire même, en prenant des décisions il est extrêmement difficile de contenter tout le monde sur tous les points. Un bilan est donc fait d'ombres et de lumières, et la persistance de difficultés donne l'impression d'échecs insupportables. Raymond Barre, Valéry-Giscard d'Estaing ou François Mitterrand ont du se poser la question de l'efficacité de leur action, ou bien se la posent toujours. Et si jamais ils arrivaient à relativiser suffisamment pour ne pas revenir sur le passé, d'autres n'hésitent pas à mettre le doigt là où ça fait mal. C'est bien pour cela qu'une sortie de la vie politique laisse toujours un goût amer, quelles que soit les choses qui ont été accomplies. Le général de Gaulle lui-même a quitté le pouvoir sous un désaveu de la population française, malgré son statut et ce qu'il avait fait pour la France. Quant à Pierre Bérégovoy, la question prend une tournure cruelle...

En fin de compte, on peut se dire que le seul moyen de juger c'est de comparer les personnalités politiques entre elles. Et encore, les situations pouvant être tellement différentes. Valéry Giscard d'Estaing avait dit avoir apprécié pour discuter avec son successeur de leurs expériences respectives. Et alors qu'il s'apprête probablement à quitter le pouvoir, Jacques Chirac pourra juger son action à l'aune de celle de François Mitterrand. Ainsi, ce dernier avait réussi à faire adopter le référendum sur le Traité de Maastricht, alors que le Président actuel n'aura pas réussi à faire adopter le Traité Constitutionnel Européen. Mais François Mitterrand avait pu compter sur l'aide courageuse de Jacques Chirac pour limiter le non à droite en 1992, alors que le Parti Socialiste aura été moins efficace à gauche en 2005... En fait, en matière de politique étrangère, celle de la France évolue assez peu au fil des alternances, et il est peu probable qu'il y ait une révolution dans ce domaine à la suite des prochaines élections. Et en matière de changement, le bilan apparaît toujours douloureux.

En fin de compte, ce n'est pas tant à l'heure de la retraite qu'un homme politique pourra juger de son action. Il est même peu probable qu'il le puisse. "L'Histoire jugera" a-t-on dit, et il faut du temps pour qu'il y ait suffisamment de recul afin de juger d'une époque. Que l'on se souvienne de quelqu'un qui a été au pouvoir il y a longtemps est déjà remarquable, encore faut il que ce soit pour ses actions positives...

lundi 15 janvier 2007

Un papa ou une maman ?

Nous y voilà. Nicolas Sarkozy vient d'être intronisé candidat de l'UMP pour la prochaine élection présidentielle, deux mois environs après Ségolène Royal pour le PS. Le début de cette confrontation apparaît bien plus tôt que lors des précédentes présidentielles. Et tout se fait dans le cadre d'une montée en puissance de la campagne, et des candidats. Cette fois-ci, le choix proposé entre les deux favoris est assez marqué, mais l'opposition droite/gauche n'est pas suffisant pour décrire les différences entre eux. Ils jouent sur des registres très différents : Nicolas Sarkozy a tenté de montrer compétence et fermeté aux ministères de l'Intérieur et des Finances, il souhaite tenir à la France un discours fort et raisonné et apparaître comme la personne solide sur laquelle la France pourrait s'appuyer dans les difficultés. Ségolène Royal se veut plus apaisante, plus éloignée des grandes questions pour favoriser un souci des petites choses, en apparaissant comme une personne peu expérimentée elle espère donner une impression de nouveauté, et n'hésite pas à jouer sur sa féminité, sa différence visible avec ses anciens opposants à l'investiture socialiste, ainsi que sur son statut de mère. En fin de compte, ce serait plutôt ça la promesse de sa campagne : le bon sens d'une mère de famille pour gérer les affaires de l'Etat.

Vu sous cette grille de lecture, les choses sont tout de suite plus saisissantes. Si Ségolène Royal n'est pas la première personnalité politique à mettre en avant le fait que ce soit une femme, c'est la première à se proclamer mère avant tout, comme elle l'avait montré en conviant les photographes à lui rendre visite à la maternité à la naissance de sa benjamine. Mais il est vrai que les valeurs associées au statut de mère sont positives : cela donne l'image d'une personne soucieuse de ses enfants et qui les console, les protège... De l'autre côté, Nicolas Sarkozy, par l'image d'homme d'Etat qu'il veut donner apparaît patriarcal. En effet, il est le père par contraste de la candidate socialiste, qui semble plus distant, mais aussi plus fort. Son ambition, mise au service de la France, "le choix d'une vie", font de lui quelqu'un qui voudrait être l'homme providentiel dont la France a besoin pour relever tous les défis.

Pour les prochains mois, une grande partie du débat présidentiel se portera sur le choix à faire entre ces deux candidats qui ont l'air suffisamment différent pour poser une vraie question à la France : Droite ou gauche ? Sarko ou Ségo ? Détermination ou douceur ? Un papa ou une maman ?

Ces cinq dernières années, le monde n'a pas tant changé que ça, il suffit de voir la presse de l'époque pour s'en rendre compte. Autour de ces deux figures polarisantes, le débat politique lui semble se clarifier, entre celui qui propose ses solutions au peuple et celle qui verra bien une fois élue ce qu'il faut faire. Il ne faudra certes pas sous-estimer les candidats outsiders : François Bayrou peut espérer facilement pouvoir faire deux fois plus de voix que lors de sa dernière tentative, et rien ne peut laisser penser que Jean-Marie Le Pen puisse avoir moins de voix que lorsqu'il est allé au second tour en 2002. Mais la différence, c'est qu'aujourd'hui les candidats des deux principaux partis semblent pouvoir faire de meilleurs scores que leurs prédécesseurs, Lionel Jospin et Jacques Chirac. Au choc du 21 avril a laissé place une action prudente du Président de la République, qui ne se démarquait pas nettement de ce que faisait Lionel Jospin en étant son Premier Ministre. Cette fois-ci, si les difficultés des Français ne sont pas réglées pour une bonne part, le choix de société est autrement différent : il engage clairement la France. Souhaitons que les Français affirment une volonté claire lors de ce scrutin.

mercredi 10 janvier 2007

Augmentation des impôts dans les régions

En 2004, la gauche a bénéficié du rejet de l'action de la droite au pouvoir, et a remporté 20 régions sur les 22 que compte la France métropolitaine. Le fait que la gauche soit au pouvoir dans les régions et la droite au gouvernement a créé une sorte de cohabitation. Jean-Pierre Raffarin, ancien président de région, était Premier ministre, et avait fait voter une loi sur la décentralisation. De fait, celle-ci a été accusée par les régions de gauche de créer de nouvelles dépenses pour elles, dépenses qu'elles n'auraient pu financer qu'en augmentant massivement les impôts. Dit comme cela, l'explication peut sembler convaincante, mais elle ne résiste pas à l'épreuve des faits : les transferts de compétence liées à la décentralisation ont été réalisés en 2006, mais les administrations régionales socialistes ont pratiquement toutes augmenté les impôts (taxes professionnelles, immobilières et cartes grises) de façon importante dès 2005. Cette année là, la hausse a atteint 21,1 % en moyenne. En 2006, la hausse continua d'être importante (augmentation avec un pourcentage à deux chiffres) en Ile de France et en Provence Alpes Côtes d'Azur, alors que les versements de l'Etat étaient en augmentation. En Ile de France notamment, l'augmentation de la pression fiscale pouvait sembler d'autant plus étonnante que les charges liées à la décentralisation étaient couvertes, et les investissements en baisse. Si l'on cherchait où étaient orientés ces nouveaux crédits, on découvrait qu'ils servaient à couvrir l'augmentation des frais de fonctionnement. La régionalisation devenait alors l'excuse bien pratique du manque de maîtrise budgétaire des régions socialistes, ou même le prétexte leur permettant de faire n'importe quoi. C'est donc bien parce que ces régions ont oublié de se concentrer sur leurs missions principales (surtout la gestion des transports et des lycées) que leurs impôts ont connu une telle augmentation. En Ile de France, cette augmentation a également permis de payer les intérêts de la dette créée depuis l'arrivée de Jean-Paul Huchon à la tête de la région. Depuis 1998 en effet, les dépenses de frais de réception ont augmenté de 160 %, et celles de communication de 210 %. La démocratie participative a coûté 3,4 millions d'euros à cette région en 2005, si l'on ne voit pas ce qu'elle permet de faire, on voit au moins ce qu'elle coûte. Ce ne sont là que des exemples, mais ils sont représentatifs.

Dans la région Languedoc-Roussillon, le désormais célèbre Georges Frêche est allé jusqu'à augmenter la taxe professionnelle et la taxe sur le foncier bâti de 80 %, ce qui permettra aux autres présidents de régions qu'ils ont limité la hausse des impôts en comparaison. Un reportage du magazine télévisé Capital avait montré l'emploi fait de ces nouvelles rentrées fiscales, en particulier dans l'aménagement du nouveau bureau de Georges Frêche. Mais il a également été dépensé dans les frais de mise en place du nouveau nom de la région, la Septimanie, qui a été un échec en fin de compte. Dans la région Poitou Charentes, la présidente Ségolène Royal n'a pas hésité elle-même à augmenter les impôts (en 2005, + 10,54 % sur le foncier bâti, +4,53 % sur le foncier non bâti et + 16,20 % sur la taxe professionnelle). Mais en tant que candidate à la Présidence de la République, elle affirme sans sourciller qu'elle n'a pas augmenté les impôts dans sa région contre toute évidence. Pendant ce temps là, la région Alsace, toujours gérée par la droite augmentait ses impôts d'environ 2,5 % sur les trois principaux impôts régionaux en 2005, ce qui montre bien que de telles hausses dans les régions passées à gauche étaient totalement disproportionnées, et que la décentralisation était un mauvais prétexte. En fin de compte, cela montre la faible rigueur budgétaire de la gauche lorsqu'elle est au pouvoir. Ainsi, le déficit budgétaire constaté dans le solde budgétaire exécuté a augmenté entre 1997 et 2002 lorsque Lionel Jospin était Premier Ministre, alors que la croissance était forte. Aujourd'hui, François Hollande, premier secrétaire du Parti Socialiste, promet d'ores et déjà d'augmenter les impôts. Cela a le mérite d'être clair.

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