Réflexions en cours

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mardi 18 octobre 2011

Pour deux semaines de campagne de plus

Si l'on en croit les médias, François Hollande a été élu hier Président de la République française. Les mauvaises langues trouveront que la France n'a pas beaucoup changé depuis son élection, mais il faut bien constater que c'est là un bilan conforme aux attentes que l'on pouvait former en lui. Certains observateurs avisés de la vie politique croient néanmoins que le peuple sera quand même appelé aux urnes en avril prochain, probablement pour déterminer lesquels des adversaires du nouveau Président ont été battus au premier tour plutôt qu'au second. Alors, qui aura l'honneur d'être battu au second tour par notre nouveau chef de l'Etat ?

En 2007, François Bayrou n'avait pas été loin d'atteindre le second tour. En octobre 2006, il était crédité de 8 % d'intentions de vote, mais une campagne réussie lui permit de recueillir 18 % des suffrages exprimés. Il rêve évidemment de faire autant, voire plus. Ce ne sera pas évident, les dernières années lui ayant été défavorables. Son nouveau parti, le MoDem, s'est révélé être une usine à déceptions, ce qui est un exploit car n'étant même pas au pouvoir. Pour un mouvement démocratique, le culte du chef comme horizon indépassable s'est avéré éprouvant. Les militants sont donc un peu démobilisés, mais le pire reste encore les difficultés de positionnement de François Bayrou. Ses attaques quasi-systématiques et sans mesure contre la droite ont affaibli son image d'homme politique raisonnable, s'élevant au delà du jeu politicien manichéen habituel. L'absence de Jean-Louis Borloo de la course peut encore lui permettre de dépasser les 10 %, mais ceux qui haïssent Nicolas Sarkozy iront directement confirmer l'élection du nouveau Président.

Marine Le Pen souhaite elle aussi faire durer sa campagne présidentielle deux semaines de plus que les autres, comme l'avait fait son père dix ans avant. Une forte abstention lui serait théoriquement profitable. La présidence de Nicolas Sarkozy, bien plus à droite dans les paroles que dans les actes, lui ouvre normalement un boulevard. L'exercice de la prédiction, déjà habituellement difficile, l'est encore plus pour la candidate de l'extrême droite, et les surprises les plus marquantes viennent généralement de ce côté.

Enfin, Nicolas Sarkozy n'a jamais fait l'unanimité, c'est le moins qu'on puisse dire. Lorsqu'il n'était encore que ministre, toute une frange de la population se roulait déjà dans la satisfaction de haïr cet homme. Chez ceux qui ne comprennent qu'il existe une droite, cette haine n'a évidemment pas diminué après plusieurs années à l'Elysée. Par rapport à la précédente élection, il a également perdu de nombreuses personnes, déçues pour une raison ou une autre. Reste à voir si ceux-là passeront du côté de l'opposition, de l'abstention, de l'extrême droite, ou bien pourront être convaincus à nouveau. Nicolas Sarkozy a déjà un atout : la légitimité. Ceux qui n'aimeront pas notre nouveau Président François Hollande le verront comme le choix d'en face. En plus, le respect de l'autorité est une valeur qui a cours à droite. Le risque d'une guerre de chefs ou de profondes divisions est donc faible en présence d'un Président sortant. Et puis ceux qui verraient dans l'UMP un navire qui coule n'ont aucune envie d'être le capitaine qui reste à bord jusqu'au bout. Toutes les spéculations sur un changement de candidat sont en conséquence un peu vaines, et Nicolas Sarkozy reste celui qui a la plus forte probabilité d'accéder au second tour.

vendredi 14 octobre 2011

Un non choix

Dimanche prochain, c'est le second tour de la primaire socialiste. Un débat a eu lieu entre les deux candidats restants, il ne fut pas d'un grand intérêt. Il faut dire que Martine Aubry et François Hollande ne génèrent pas beaucoup d'enthousiasme sur leur personne. Si l'on compare avec les enthousiasmes qu'avaient su réunir autour d'eux Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy ou François Bayrou en 2007, ou même que l'on voyait naître en faveur de Dominique Strauss-Kahn en début d'année, on ne peut que constater qu'il n'y a pas de vague pour qui que ce soit. Le principe de la primaire rencontre le succès, mais les votants expliquent eux-même qu'il s'agit de choisir le candidat qui aura le plus de chances de gagner, et non pas de choisir celui qui sera le meilleur Président de la République. Et depuis le retrait forcé de DSK, Martine Aubry et François Hollande ne peuvent être que des candidats de second choix, présents à ce rendez-vous par un coup du sort.

Comme au jeu des sept différences, en recherchant ce qui diffère, on se rend compte de tout ce qu'ils ont en commun. Deux énarques de la même génération, deux apparatchiks du Parti Socialiste, en théorie devant se soumettre au même programme... Avec Martine Aubry et François Hollande, on a donc le choix entre un mauvais bilan et l'absence de bilan, entre la gauche sectaire et la gauche molle, pour reprendre leurs propres mots. Mais même s'il y a des nuances entre ces deux candidats, il n'est pas certain que cela se concrétise une fois au pouvoir. Si l'un des deux est élu Président, qui sera Premier ministre, si ce n'est l'autre ? Certes, Martine Aubry a d'ores et déjà prévenu qu'elle donnerait une grande place dans la République à Ségolène Royal, mais ce serait encore pire si celle-ci devait accéder à Matignon.

C'est donc un tiercé dont on a les gagnants, mais dont on ignore l'ordre. Le vote de dimanche sert alors à déterminer qui ira à Matignon, et qui ira à l'Elysée. L'amplitude de ce choix est des plus restreintes, et ce second tour ne démontre, en fin de compte, que le manque de leadership naturel de nos deux postulants.

lundi 10 octobre 2011

En politique, ça va, ça vient...

Le 16 novembre 2006, Ségolène Royal était désignée candidate du Parti Socialiste à l'élection présidentielle dès le premier tour de la primaire socialiste, avec 60 % des voix. A l'époque, on met en avant le fait qu'elle ait réussi à gagner contre l'appareil et les éléphants socialistes, grâce à un afflux d'adhérents qui sont venus en prenant une cotisation à tarif réduit seulement pour pouvoir voter pour elle. Deux ans plus tard, en novembre 2008, elle obtient 42,9 % et 49,96 % des voix aux premier et second tours de l'élection du premier secrétaire du PS. Mais hier, elle n'a plus récolté que 7 % des suffrages lors de la primaire socialiste. Certes, celle-ci était désormais ouverte au-delà des seuls adhérents socialistes. Mais Ségolène Royal aurait justement du pouvoir compter sur des sympathisants non strictement socialistes, comme par le passé. Elle n'a pourtant pas été aux responsabilités, et ce n'est donc pas son bilan qui explique sa subite impopularité.

De tels variations brusques de popularité sont assez fréquents en politique. Ainsi, François Bayrou fut à deux doigts d'arriver au second tour de la présidentielle en 2007 (et donc de l'emporter). Son parti, le MoDem, resta ensuite au premier plan, et fut même dans de nombreuses villes l'arbitre des municipales de 2008. Pourtant, lors des élections européennes de 2009, il perdit la moitié de ses sièges, et actuellement, le MoDem ne pèse plus grand chose.

Les Verts ont connu des revirements de fortune similaires. Après un score minimal de Dominique Voynet en 2007, les Verts ont multiplié ce score par cinq en 2009. Renommés "Europe Ecologie", ils avaient même devancé le Parti Socialiste lors de ce scrutin. Ils prirent immédiatement la grosse tête, mais ils baissèrent sensiblement aux élections régionales de 2010 (à 12 % des voix), ce qui rendit un peu plus difficile le passage d'accords électoraux avec le PS. Surtout, suite à la désignation d'Eva Joly comme candidate à la prochaine présidentielle, leur poids dans les sondages s'est nettement évaporé, et la perspective de dépasser les 10 % des voix n'est plus en vue.

Aujourd'hui, c'est François Hollande le champion de la popularité. Peut-être cela durera assez longtemps pour qu'il soit élu Président, mais après cela, après la période de grâce, combien de temps avant qu'il ne connaisse à son tour l'impopularité ? Après tout, Lionel Jospin qui fut relativement populaire (d'après les sondages) lorsqu'il était à Matignon, n'a même pas réuni assez de voix pour arriver au second tour de la présidentielle de 2002...

vendredi 7 octobre 2011

Et si j'allais voter aux primaires socialistes ?

Des primaires pour désigner le candidat d'un parti à une présidentielle, il y en a déjà eu. Lionel Jospin en 1995, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy en 2007, les Verts régulièrement également. Le procédé n'a rien de nouveau. L'innovation de cette année au Parti Socialiste, c'est de permettre aux non adhérents de voter également. Et ils acceptent large : sur leur site, il est indiqué que "tout le monde peut voter !" Et comme le candidat du Parti Socialiste a une probabilité non nulle d'être élu, autant qu'il soit au maximum à mon choix. Voyons donc les critères requis pour pouvoir voter plus en détail... Je suis bien citoyen français inscrit sur les listes électorales. Et il faut également signer un engagement dans les valeurs de la gauche.

Le texte est court. "Je me reconnais dans les valeurs de la Gauche et de la République, dans le projet d’une société de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité, de justice et de progrès solidaire." Je suis républicain, et à ce titre, j'adhère aux valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité qui sont proclamées par la Constitution. Je suis pour la justice également (rares sont ceux qui affirment être pour l'injustice, d'ailleurs). Pour le progrès, bien sûr, pour le solidaire, il faudrait mieux définir le concept : est-ce créer des opportunités pour autrui, ou simplement lui piquer son argent dans son portefeuille ? Quant à se réclamer de la gauche, cela pourrait être plus difficile, pour qui tient un blog de droite. Mais l'on peut fort bien se réclamer de la gauche d'autrefois. Ainsi, Georges Clémenceau a commencé à l'extrême gauche de l'échiquier politique (d'où la dénomination de "radical") pour finir à son centre droit, et ce, sans changer d'idées. L'apparition des socialistes puis des communistes avait provoqué cette glissade. Je me reconnais donc tout à fait dans les valeurs de gauche du début de la IIIème République.

La déclaration ne posant plus de problème, reste un euro à payer. Le Parti Socialiste ressuscite ainsi le suffrage censitaire. Cela peut surprendre, à moins qu'il ne s'agisse d'une adhésion très bon marché au PS. Mais quelques éléments demeurent qui rendent réticents. Déjà, la sincérité du scrutin reste très suspecte, on a vu lors de la dernière élection de la première secrétaire du PS que les élections socialistes étaient sujettes à toutes les manipulations possibles. Ensuite, il y a le fait que le PS se vantera de la participation à leur primaire de façon interminable. Voilà qui n'est pas forcément enthousiasmant, mais ça reste à voir.

La vraie leçon à tirer de ce scrutin sera surtout de savoir si les électeurs seront plus éclairés que les militants socialistes ordinaires. En 2006, ces derniers avaient choisi Ségolène Royal dès le premier tour. Les sondages la donnait alors gagnante face à Nicolas Sarkozy. Ce choix fut désastreux, et s'il ne l'avait été pour les socialistes, il l'aurait été pour la France. Aujourd'hui, Ségolène Royal accuse le pouvoir de manipuler les sondages pour lui être défavorables. Elle ne s'en plaignait pas il y a cinq ans. Après les primaires, il faudra voir si François Hollande n'aura été qu'un candidat de sondages...

lundi 3 octobre 2011

Borloo toujours dans la présidentielle, mais autrement

Depuis le départ du Parti Radical de l'UMP il y a quelques mois, une candidature de Jean-Louis Borloo était probable, mais pas certaine. Il a annoncé hier qu'il ne se présenterai pas, citant comme première raison la division du centre. Cela gène fort ses soutiens, qui ne s'étaient pas gênés pour critiquer très voire trop rudement le gouvernement, alors que Jean-Louis Borloo s'en gardait bien. Mais en soi, il n'avait pas tort sur le fond. Pendant plusieurs mois, il a effectivement cru qu'il se présenterait. Et s'il le lançait, d'après ce qu'il disait et dit encore, cela aurait été pour gagner. Or il a tout simplement constaté que les conditions de la victoire n'étaient pas réunies, et qu'il avait très peu de chances d'arriver au second tour. Et comme être Président n'a jamais été le rêve de sa vie, et qu'il ne voyait pas l'intérêt d'une candidature de témoignage comme il y en a bien d'autres, il a préférer se retirer de la course.

Mais s'il s'est retiré de la course officielle, il pourrait très bien rester dans la présidentielle d'une autre manière. Son enjeu serait alors non pas d'être élu Président, mais d'arriver à un résultat presque semblable : que ses idées politiques soient appliquées. En 2010, Nicolas Sarkozy a humilié les centristes par un remaniement qui les écartait de la gestion du pays, et qui récompensait des personnalités à la loyauté éprouvée mais aux considérations simplistes, telles que celles de la droite populaire. C'est peut-être une façon de circonscrire le Front National, mais pour remporter la prochaine présidentielle, cela ne suffira pas. Nicolas Sarkozy devra se montrer rassembleur, mais après cinq années au pouvoir, ce sera sans doute très compliqué.

Il aura donc besoin d'un souffle d'air nouveau, pouvant compenser au moins partiellement l'image d'usure du Président sortant. Jean-Louis Borloo, en étant sorti du gouvernement depuis près de deux ans et en apportant une inflexion centriste, pourrait apporter cet atout stratégique. Il y a cinq ans, l'hypothèse d'un ticket Sarkozy-Borloo avait déjà des partisans. Pendant la campagne électorale, Jean-Louis Borloo avait déjà été l'une des dernières personnalités de la majorité à déclarer son soutien à Nicolas Sarkozy. Il cherchait certainement des garanties pour apporter son soutien, mais fort de sa popularité d'alors, le candidat pouvait s'en passer. Il n'est pas sûr que ce soit le cas aujourd'hui, et on peut imaginer que Jean-Louis Borloo soit tenté d'un calcul similaire, espérant plus de succès cette fois-ci.

L'intérêt de Jean-Louis Borloo serait donc de continuer à essayer de faire monter son profil et son capital politique (ce qui suppose d'entretenir son réseau de soutiens), sans risquer les coups d'une campagne. Il affirme ne pas avoir négocié un poste avec l'Elysée, mais il pourra toujours le faire pendant la campagne, au moment où on aura le plus besoin de lui à droite. Dès lors, il pourrait endosser lui-même la fin de la campagne de Nicolas Sarkozy, luttant à son tour pour le pouvoir sous le prête nom présidentiel. Bien sûr, un tel calcul est très incertain, et n'évite pas le risque de la défaite. Mais c'est au moins une hypothèse intéressante.

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