Si l'on en croit les médias, François Hollande a été élu hier Président de la République française. Les mauvaises langues trouveront que la France n'a pas beaucoup changé depuis son élection, mais il faut bien constater que c'est là un bilan conforme aux attentes que l'on pouvait former en lui. Certains observateurs avisés de la vie politique croient néanmoins que le peuple sera quand même appelé aux urnes en avril prochain, probablement pour déterminer lesquels des adversaires du nouveau Président ont été battus au premier tour plutôt qu'au second. Alors, qui aura l'honneur d'être battu au second tour par notre nouveau chef de l'Etat ?

En 2007, François Bayrou n'avait pas été loin d'atteindre le second tour. En octobre 2006, il était crédité de 8 % d'intentions de vote, mais une campagne réussie lui permit de recueillir 18 % des suffrages exprimés. Il rêve évidemment de faire autant, voire plus. Ce ne sera pas évident, les dernières années lui ayant été défavorables. Son nouveau parti, le MoDem, s'est révélé être une usine à déceptions, ce qui est un exploit car n'étant même pas au pouvoir. Pour un mouvement démocratique, le culte du chef comme horizon indépassable s'est avéré éprouvant. Les militants sont donc un peu démobilisés, mais le pire reste encore les difficultés de positionnement de François Bayrou. Ses attaques quasi-systématiques et sans mesure contre la droite ont affaibli son image d'homme politique raisonnable, s'élevant au delà du jeu politicien manichéen habituel. L'absence de Jean-Louis Borloo de la course peut encore lui permettre de dépasser les 10 %, mais ceux qui haïssent Nicolas Sarkozy iront directement confirmer l'élection du nouveau Président.

Marine Le Pen souhaite elle aussi faire durer sa campagne présidentielle deux semaines de plus que les autres, comme l'avait fait son père dix ans avant. Une forte abstention lui serait théoriquement profitable. La présidence de Nicolas Sarkozy, bien plus à droite dans les paroles que dans les actes, lui ouvre normalement un boulevard. L'exercice de la prédiction, déjà habituellement difficile, l'est encore plus pour la candidate de l'extrême droite, et les surprises les plus marquantes viennent généralement de ce côté.

Enfin, Nicolas Sarkozy n'a jamais fait l'unanimité, c'est le moins qu'on puisse dire. Lorsqu'il n'était encore que ministre, toute une frange de la population se roulait déjà dans la satisfaction de haïr cet homme. Chez ceux qui ne comprennent qu'il existe une droite, cette haine n'a évidemment pas diminué après plusieurs années à l'Elysée. Par rapport à la précédente élection, il a également perdu de nombreuses personnes, déçues pour une raison ou une autre. Reste à voir si ceux-là passeront du côté de l'opposition, de l'abstention, de l'extrême droite, ou bien pourront être convaincus à nouveau. Nicolas Sarkozy a déjà un atout : la légitimité. Ceux qui n'aimeront pas notre nouveau Président François Hollande le verront comme le choix d'en face. En plus, le respect de l'autorité est une valeur qui a cours à droite. Le risque d'une guerre de chefs ou de profondes divisions est donc faible en présence d'un Président sortant. Et puis ceux qui verraient dans l'UMP un navire qui coule n'ont aucune envie d'être le capitaine qui reste à bord jusqu'au bout. Toutes les spéculations sur un changement de candidat sont en conséquence un peu vaines, et Nicolas Sarkozy reste celui qui a la plus forte probabilité d'accéder au second tour.