Réflexions en cours

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lundi 28 mars 2011

Perdu de vue : François Bayrou

Les dernières élections cantonales sont passées, et les commentateurs institutionnels déblatèrent inlassablement sur le même phénomène : la montée du Front National. Ce faisant, ils perdent leur temps, et font perdre le temps de ceux qui les lisent ou les écoutent. Car le Front National ne monte tout simplement pas. Dans les faits, il s'avère même qu'il baisse. Lors des élections cantonales précédentes sur les mêmes cantons, en 2004, les candidats FN avaient recueillis 1 490 315 voix au premier tour sur l'ensemble de la France. Il y a une semaine, ils ont recueillis 1 379 902, soit une diminution de 7,41 %. Si l'on calcule en termes relatifs, sachant que le nombre d'inscrits a augmenté de plus d'un million de personnes, la diminution est alors de près de 13 %. Difficile dès lors de parler de montée d'un parti qui perd des électeurs.

Le principal enseignement de ce scrutin est donc bien la force de l'abstention, le nombre de votants ayant diminué d'un quart entre 2004 et 2011. Le fait qu'il ne soit pas lié à une autre élection comme auparavant a joué. Mais la désaffection de la population pour la démocratie est à un niveau déstabilisant pour l'ensemble des partis. L'UMP a perdu beaucoup d'électeurs, mais le grand gagnant désigné de ces élections, le PS, aussi (plus de 29 % de disparus). Il n'y a vraiment pas de quoi se réjouir. Mais si l'on doit faire le palmarès des gamelles électorales, la plus grosse est probablement celle du Modem. En 2004, l'UDF, le prédécesseur du Modem, avait réuni 584 587 votes au premier tour. En 2011, le Modem a fait 111 887 voix, soit une diminution de plus de 80 %. Cela donne 0,53 % des inscrits, 1,22 % des suffrages exprimés. Même le Nouveau Centre a fait davantage, avec 3,2 % des suffrages exprimés, soit plus du double que le Modem.

L'une des raisons de cet résultat rachitique vient du fait que le Modem, qui aurait du transformer la vie politique française, ne s'est pas vraiment donné la peine de prendre part à ce scrutin. Après l'abstention des électeurs, il y a désormais l'abstention des partis politiques. Il faut dire que les revers électoraux du Modem aux européennes de 2009 et aux régionales de 2010 ont été cinglant, et les dirigeants comme les militants de ce parti ne semblent même plus motivés pour défendre leurs idées politiques. Et aujourd'hui, quand on parle de centristes dans l'actualité, on fait référence à Jean-Louis Borloo. La personne qui semble s'immiscer dans le duel gauche/droite de la présidentielle de 2012, c'est pour l'instant Marine Le Pen, et non François Bayrou, qui aurait pourtant pu récupérer les suffrages des mécontents des partis traditionnels. Cela ne veut pas dire que le Modem ou François Bayrou ne referont jamais surface, mais pour l'instant, ce qui est vraiment frappant (et que personne n'aborde), c'est qu'ils sont aux abonnés absents.

jeudi 17 mars 2011

Les dernières élections cantonales

Ce dimanche, ce sont les élections cantonales pour la moitié de la France. Entre les événements de l'Afrique du Nord et la catastrophe japonaise, il n'y a déjà pas beaucoup de place pour une autre actualité. Mais ces cantonales n'auraient probablement pas été sur le devant de la scène même si l'actualité avait été calme. Déjà, l'enjeu est plus faible, puisque seule la moitié des cantons est renouvelé. Ensuite, la grande majorité de la population ne sait pas exactement à quoi sert les conseils généraux, c'est encore pire que pour les conseils régionaux. Enfin, d'habitude, les élections cantonales ont lieu en même temps que d'autres élections (municipales ou régionales), pour faire d'une pierre deux coups. Cette fois-ci, ce n'est pas le cas. Les électeurs sont appelés uniquement pour les cantonales. Du côté du Front National, l'irrespect pour ces élections a été si loin que c'est uniquement la figure de Marine Le Pen qui est imprimée sur les affiches de tous les candidats, et la profession de foi a été standardisée de telle manière que c'est la même pour toute la France. Ce sont pourtant des élections locales.

Bref, tout le monde s'en fiche. La participation s'annonce ridicule, et la gauche sera déclarée vainqueur. On en est à un point où les conseils généraux peuvent faire n'importe quoi, ça ne change rien à l'issue des élections. Au mieux le conseiller général est élu car il est élu local (maire) populaire dans le canton, au pire les votes ont lieux sur la popularité du gouvernement (ce qui n'a évidemment rien à voir). On peut bien s'étonner ensuite que les finances des collectivités locales représentent un gouffre à part entière dans le déficit public.

Mais la particularité de cette élection, c'est aussi que les conseillers généraux élus n'auront qu'un mandat de trois ans. En 2014, tous les conseillers généraux et les conseillers régionaux auront à passer devant le suffrage universel, donnant lieu aux conseillers territoriaux. Ceux-ci seront élus pour représenter leurs électeurs à la fois au département et à la région. Le résultat peut être intéressant. Notre pays à trop de strates administratives, pour chaque projet, une mairie demande des subventions à la communauté de communes, au conseil général, au conseil régional, voire même à l'Etat. S'il y a au moins un guichet unique pour deux de ces portemonnaie, ce sera déjà pas mal. La distinction entre les rôles des conseils régionaux et les conseils généraux est de toute façon assez artificielle. Et on aura également une élection en moins. Ce sera donc les dernières élections cantonales, mais il n'est pas certain qu'elles soient beaucoup regrettées.

mercredi 9 mars 2011

QPC ? WTH !

Le procès de Jacques Chirac pour l'affaire des emplois fictifs de la ville de Paris a été reporté. Un des prévenus à fait valoir une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui fut acceptée. Le but est de savoir si la jurisprudence (selon laquelle il n'y a pas prescription) ne serait pas inconstitutionnelle. La question pourrait aller jusqu'au Conseil Constitutionnel... où siège Jacques Chirac. Evidemment, dans un tel cas, il ne participerait pas à la prise de décision. Son ami Jean-Louis Debré, président de l'institution, a d'ores et déjà prévenu qu'il ne siègerait pas non plus. Jacques Chirac a aussi des liens passés avec d'autres de ses collègues, y ayant notamment nommé Pierre Steinmetz. De toute façon, qu'on en arrive là ou pas, le principal objectif de cette QPC est bien de gagner du temps, en créant une nouvelle question juridique qui suivra son propre chemin. Le procès aura lieu quand elle sera tranchée. Autant être réaliste, ce ne sera pas pour demain.

Un autre homme politique, Jean-Paul Huchon, a eu recours au même subterfuge avec succès afin d'éviter d'être condamné à de inéligibilité. C'était la sanction prévue pour avoir profité de l'argent du Conseil Régional d'Ile de France dans le cadre de sa campagne de réélection. Ce ne sont pas les premiers ennuis de Jean-Paul Huchon avec la justice. Tous les donneurs de leçons l'oublient volontairement, mais il a déjà été condamné, y compris en appel, pour prise illégale d'intérêts, des actes commis à la présidence du Conseil Régional, poste qu'il occupe encore dans l'indifférence la plus stupéfiante. Quoi qu'il en soit, si les délais de la justice n'étaient déjà pas assez longs, la possibilité de déposer une QPC peut désormais les rallonger encore plus. Mais était-ce bien nécessaire ?

Cette possibilité existe depuis un an désormais. C'était l'une des mesures prévues par la modification de la Constitution de juillet 2008, adoptée de façon assez conflictuelle. Si à l'époque on pouvait se demander quelle était l'utilité de cette mesure, quand on en voit les effets aujourd'hui, on peut difficilement échapper à la consternation. S'il faut bien vérifier de la constitutionnalité de la législation, il faut le faire a priori, avant qu'elle ne soit définitivement entérinée, plutôt qu'a posteriori, lorsqu'elle est déjà effective. La morale de cette histoire est qu'il ne faut toucher à un texte aussi fondamental que la Constitution qu'avec les plus extrêmes précaution. Ici, on aurait très bien pu se passer de cette histoire de QPC.

lundi 7 mars 2011

Le culte de la personnalité inversé

Lorsque Nicolas Sarkozy devint ministre de l'Intérieur en 2002, il est rapidement devenu le centre d'attention des médias. Sa volonté d'action et son statut de successeur présomptif de la droite le rendaient particulièrement intéressant à observer pour les journaux. Pour ces raisons, il représenta un espoir pour certains, une menace pour d'autres. Jacques Chirac n'étant plus appelé à se représenter, tout le débat se portait alors sur celui qui se présenterait aux élections en lieu et place. Mais si Nicolas Sarkozy profita de sa popularité pour prendre la tête de son parti puis gagner la présidentielle, il ne fut pas pour autant aussi célébré par son propre camp qu'on aurait pu le croire. Il fut, et reste toujours, l'objet d'une couverture médiatique importante, mais celle-ci est loin d'être systématiquement à son avantage. Bien au contraire : les médias aiment parler de Nicolas Sarkozy sans aimer pour autant Nicolas Sarkozy.

Le plus étonnant est d'ailleurs le fait que de nombreuses personnes trouvent que l'on parle trop de lui, et ne peuvent pas s'empêcher de parler abondamment de lui pour regretter ce fait. Cela aboutit à des situations assez étranges, où des gens qui ne le supportent pas le transforment en source de toute ce qui ne va pas, s'obligeant par la même occasion à penser constamment à lui. Tout cela aboutit à une sorte de culte de la personnalité inversé, où Nicolas Sarkozy est au centre du monde de certains de ses opposants, il est l'objet d'une fixation au mieux comique, au pire malsaine.

Il y a un fort appétit pour ses caricatures. Sur le net, des blogs hostiles lui sont ainsi entièrement consacrés. Toute information négative le concernant sera fortement relayée, comme s'il fallait constamment se convaincre qu'il fallait le combattre. Mais un magazine en a même fait un fond de commerce : l'hebdomadaire Marianne fait ses unes de manière presque systématique sur Nicolas Sarkozy. Tous les angles ont été abordés plusieurs fois, l'un des plus savoureux étant le thème "comment Sarkozy contrôle les médias pour qu'ils parlent de lui". En fait, il n'a pas besoin de contrôler qui que ce soit. Les journalistes comme ceux de Marianne se dévouent volontiers pour parler de Nicolas Sarkozy jusqu'à l'écœurement, ils sont eux-mêmes les auteurs de cette omniprésence médiatique qu'ils critiquent paradoxalement.

Evidemment, si cela perdure, c'est forcément parce que ce doit bien faire vendre. Mais on peut tout de même rester circonspect sur tous ceux qui n'en peuvent plus de Nicolas Sarkozy mais en font une obsession personnelle.

mercredi 2 mars 2011

Besoin de nouvelles têtes à droite

Le départ de Michèle Alliot-Marie (64 ans) du gouvernement est l'occasion de remarquer sa longévité aux plus hautes responsabilités. En ayant été ministre près de neuf ans, elle n'est égalée par aucune personnalité politique des trente dernières années. Les mises en avant d'Alain Juppé et de Gérard Longuet (65 ans tous les deux) peuvent difficilement symboliser l'arrivée d'une nouvelle génération aux affaires. Pour la prochaine présidentielle, Nicolas Sarkozy, voulant rester au même poste, devra au moins changer sensiblement d'équipe. Par rapport aux socialistes qui sont tous désespérés d'occuper un maroquin, il aura au moins quelques latitudes : bon nombre de hierarques de la droite ont déjà eu l'occasion d'être récompensés au cours des neuf dernières années. A 56 ans, le Président ne peut plus exactement incarner la jeunesse. Les sexagénaires seront donc forcément peu nombreux à incarner la relève. Des gens comme Patrick Devedjian (66 ans), Françoise de Panafieu (62 ans) ou Chantal Brunel (62 ans) auront des perspectives de carrière limitées. Si Jean-Louis Borloo (59 ans) devait revenir au gouvernement, ce serait nécessairement pour en prendre la tête. Michèle Alliot-Marie n'a probablement plus cet objectif.

Lors de la campagne de 2007, Nicolas Sarkozy avait mis en avant de nouveaux visages tels que Luc Chatel (46 ans) ou Rachida Dati (45 ans). Il devra recommencer en 2012, et cela suppose de mettre autour de cette candidature des personnalités qui n'ont pas encore été trop usées au gouvernement. Les ministres les plus compétents, comme Valérie Pécresse (43 ans) ou François Baroin (45 ans), pourront occuper des postes plus importants à cette occasion. Mais ils pourront être épaulés par d'autres quadragénaires ou même trentenaires. Il y a déjà ceux qui sont secrétaires d'Etat et qui pourraient devenir ministres, à l'instar de Laurent Wauquiez (35 ans), Nora Berra (48 ans) ou Jeannette Bougrab (37 ans). Il y a aussi ceux qui ont déjà été au gouvernement et qui pourront prétendre y retourner : Jean-François Copé (46 ans), Laurent Hénart (42 ans), Yves Jégo (49 ans), Rama Yade (34 ans)...

Il y a surtout ceux qui n'ont jamais été ministres, mais qui ont le poids politique ou l'expertise nécessaire pour y rentrer. Jean-Luc Warsmann (45 ans) est ainsi un président de la commission des lois à l'Assemblée Nationale particulièrement apprécié. Michèle Tabarot (48 ans) est dans les hautes instances de l'UMP depuis pas mal de temps, et est présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation. David Douillet (42 ans) sera bien ministre des sports un jour ou l'autre. D'autres figures du Parlement comme Valérie Boyer (48 ans), Jérôme Chartier (44 ans) ou Valérie Rosso-Debord (39 ans) pourraient également bénéficier de promotions.

Mais le vivier de nouveaux visages ne se limite pas à l'Assemblée Nationale. La députée européenne Sylvie Goulard (46 ans) ferait ainsi une excellente ministre chargée des affaires européennes. Certes, elle fut élue sur une liste du Modem, mais cette experte des rouages européens n'avait pas d'affiliation politique auparavant. Toujours au Parlement européen, comme les élections de 2009 fut un bon cru pour la droite, il y a forcément de nombreuses personnalités qui peuvent en être issues comme Damien Abad (30 ans) ou Christophe Béchu (36 ans). Enfin, d'anciens candidats qui n'ont pas été élus (par exemple Jean-Claude Beaujour, 46 ans, ou Charlotte Bouvard, 38 ans) peuvent avoir également des profils intéressants.

Évidemment, mettre sur le devant de la scène de nouvelles personnalités ne suffira pas pour la droite, le projet restera in fine bien plus important.

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