Réflexions en cours

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jeudi 26 avril 2007

L'art du rassemblement

Le premier tour passé, les deux candidats restants cherchent cette fois-ci à dépasser la barre des 50 %. Il leur faut donc récupérer les voix qui leur avait échappé au premier tour, de la part de personnes qui n'avaient pas été convaincues la première fois. Le Président de la République est au dessus des partis, il se doit d'être une figure représentant l'ensemble des Français. Voilà pourquoi le général de Gaulle avait voulu qu'il soit élu au suffrage universel, pour que ce soit la rencontre d'un homme et d'un peuple, manifesté par l'approbation de plus de la moitié des suffrages exprimés lors du scrutin. Les candidats doivent donc rassemblembler au delà de leur propre camp entre le premier et le deuxième tour, et concrètement, cela se traduit par un grand écart dans le champ politique à recouvrir.

De la part de Nicolas Sarkozy, la consigne était claire : dès son investiture le 14 janvier dernier à la Porte de Versailles, il annonçait à l'UMP "Je demande à mes amis qui m'ont accompagné jusqu'ici de me laisser libre, libre d'aller vers les autres, vers celui qui n'a jamais été mon ami, qui n'a jamais appartenu à notre camp, à notre famille politique qui parfois nous a combattu. Parce que lorsqu'il s'agit de la France, il n'y a plus de camp." Alors qu'il était très populaire à droite, il semblait vouloir dépasser ce seul horizon. En l'occurrence, nombreux sont ceux qui ont pensé qu'il essaierait de convaincre aussi à gauche, après un discours qui citait en des termes élogieux Jean Jaurès. Ce fut le cas, mais il ne s'est pas limité à cela. Il a aussi voulu ramener dans le camp de la droite républicaine ceux qui étaient tombés du côté du Front National, si nombreux en 2002. Cela fut à l'origine de ce qui a été perçu comme la droitisation de son discours. Il a aussi tenté de jouer la carte du centre, en mettant en avant les soutiens de Simone Veil et de Jean-Louis Borloo. Car il ne devait évidemment pas laisser trop d'espace au centre.

La montée de François Bayrou pouvait en effet être une menace pour lui, car il avait peu de chance de l'emporter face au candidat de l'UDF au second tour. Pour la candidate socialiste, François Bayrou était même une menace de premier tour, la qualification ne semblant pas assuré. La baisse de Ségolène Royal dans les sondages a d'abord profité à François Bayrou, bien plus qu'à Nicolas Sarkozy. Elle a voulu faire une campagne marquée par un socialisme vieillissant, partant du principe que Lionel Jospin avait été éliminé pour avoir voulu faire dès le départ une campagne de second tour. Ses erreurs, l'arrivée tardive de son projet et les péripéties de sa campagne l'ont amené à perdre du terrain qui a été récupéré par François Bayrou, qui voulait par raison tactique devenir le candidat de la gauche au deuxième tour, doutant du fait de pouvoir battre Nicolas Sarkozy au premier. Ainsi, de nombreux électeurs se classant à gauche ont été amenés à choisir le candidat UDF, provoquant la stupeur du Parti Socialiste qui l'attaquait durement, le qualifiait de candidat de droite, ce qui est censé être une injure chez les électeurs de gauche. Ségolène Royal avait même formellement refusé une alliance avec François Bayrou quand cela lui avait été proposé par certaines personnes de son camp. Par contre, François Hollande insistait très lourdement sur le vote utile, pour éviter que ceux qui avaient voté pour l'extrême gauche en 2002 oublient de porter leurs suffrages sur la candidate socialiste. Cela a bien marché, mais encore une fois cela a créé de l'espace pour François Bayrou.

Celui-ci n'est pas arrivé au second tour. Il est vu par les médias comme l'arbitre du match en cours, ce qui est ridicule car il ne vote par pour l'ensemble de ceux qui ont voté pour lui au premier tour. Mais cela fait que Ségolène Royal s'est découverte subitement centriste, prête à négocier son projet avec lui et à offrir des portefeuilles ministériels à l'UDF. Elle souhaite ainsi avoir une majorité qui rassemble tant les trotskistes (qui doivent être surpris par une telle tournure des événements) que les chrétiens démocrates, oubliant de ce fait tout ce qu'elle avait pu dire sur François Bayrou il n'y a ne serait-ce qu'une semaine. Du côté de Nicolas Sarkozy, le but est de garder ses électeurs du premier tour, tout en en gagnant lui aussi au centre. Il ne s'agit pas de gagner les faveurs de François Bayrou, qui cherche à s'opposer à lui dans son intérêt pour les prochaines législatives. Le but est surtout d'attirer ceux qui se considèrent comme autentiquement centristes (ce qui n'est pas forcément lié à François Bayrou) ou tout simplement les indécis qui avaient voté pour le candidat de l'UDF, pour éviter de choisir entre la gauche et la droite sans s'abstenir. Et non seulement Nicolas Sarkozy peut compter sur les propres composantes centristes de l'UDF, mais il apparait que l'UDF est bien historiquement un parti de centre droit, dans la mesure où la majorité de ses parlementaires choisissent le candidat de la droite face à celle de la gauche.

En fin de compte, il est obligatoire de chercher à ratisser vraiment très large lors de telles élections, quitte à perdre un peu de la cohérence de la majorité dégagée ou dans le projet proposé. Il est tout de même nécessaire de garder une certaine idée de la ligne que l'on suit, aussi large qu'elle soit. Au bout d'un moment, il n'est pas nécessaire de se perdre en tractations et de changer complètement de positions pour opérer ce rassemblement. La personnalité politique a davantage l'étoffe d'une personnalité d'Etat lorsqu'elle arrive à rester assez constant sur ses valeurs fondamentales, et rassemble en étant ouvert aux autres. Car l'électeur ne souhaite pas forcément quelqu'un qui ait des idées semblables aux siennes point par point. Il veut aussi porter à la tête de l'Etat un capitaine capable de garder la barre en pleine tempête. Plutôt que d'aller vers tout le monde, le rassemblement peut aussi se faire en laissant chacun venir vers soi.

lundi 23 avril 2007

Un choix clair

Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal sont donc les deux candidats qui se sont qualifiés pour le deuxième tour, arrivant respectivement premier (avec 31,18 % des voix) et deuxième (avec 25,87 %) au premier tour. Les Français se sont énormément mobilisés pour ce scrutin, prouvant l'intérêt que les audiences et les ventes de presse liées à la couverture de la présidentielle laissait entrevoir. Avec une abstention de 16,23 %, ces présidentielles montrent bien que les Français se réapproprient la chose publique. Autre motif de satisfaction : la forte baisse des partis extrémistes, avec Jean-Marie Le Pen qui n'obtient plus que 10,44 % des voix, l'extrème gauche et les autres petis partis étant systématiquement en dessous des 5 %. Ainsi, on assiste à l'acte de décès du Parti Communiste, qui n'aura désormais comme seule ambition viable que celle de se fondre dans une hypothétique union des opuscules d'extrème gauche. Avec 18,57 % des suffrages, François Bayrou n'arrive pas à acceder au second tour. Il clamait pourtant haut et fort à chaque occasion qu'il serait le prochain Président de la République. Mais cela ne l'a pas empêché d'être satisfait, croyant à un rôle de faiseur de roi...

Cette présidentielle aura commencé tôt. Nicolas Sarkozy dit avoir commencé sa campagne en 2002, une fois arrivé au ministère de l'Intérieur. On pourrait aussi dire qu'il l'a commencé lorsqu'il est entré en politique, à l'age de 20 ans. Ces cinq dernières années il n'aura eu de cesse de vouloir grimper les marches, se forgeant une popularité résultante de ses actions et ses prises de position, conquérant l'UMP, avant d'être reconnu comme le candidat naturel de son camp. Il aura mené une campagne de premier tour active, n'hésitant pas à être inattendu, réussissant même à reprendre l'initiative lorsqu'il semblait menacé par la montée de François Bayrou. Ce dernier aussi a été en campagne permanente ces cinq dernières années, et pendant ces derniers mois il faut avouer que celle-ci fut bien menée, en réussissant à se trouver un espace entre Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal. Il souhaitait éliminer la candidate socialiste au premier tour sans avoir besoin de l'attaquer, et il s'acharnait sur le candidat de la droite dans l'espoir de gagner les voix des déçus de la gauche et de remporter in fine la victoire au soir du deuxième tour. Il n'a pourtant pas pu montrer qu'il aurait une majorité pour l'accompagner en cas de victoire.

La cause de la réussite de François Bayrou se retrouve en grande partie dans les échecs de Ségolène Royal. Même en ayant atteint le second tour, elle manque toujours d'une stature d'éventuelle Présidente, ayant réussi à faire voter sur son nom à la seule raison du vote utile, en culpabilisant son électorat qu'il ferait disparaitre la gauche si elle venait à être éliminée. Au deuxième tour, elle misera probablement sur un vote de rejet sur la personne de Nicolas Sarkozy, plutôt que sur son propre projet. François Bayrou peut avoir une certaine influence sur l'issue du scrutin, mais il n'est pas plus propriétaire de ses voix que les autres. On peut penser que sa posture qui semblait promettre un minimum de risque à l'électeur a attiré des personnes qui étaient mitigés sur Nicolas Sarkozy ou Ségolène Royal. Ce fut ainsi plus un vote d'indécision voire de contestation qu'un vote d'adhésion. Dès lors, tous ces électeurs peuvent être convaincus par l'un ou l'autre des finalistes sans se référer à la décision du candidat centriste, qui aura une véritable influence que sur ceux qui adhéraient totalement à ses idées.

Mais pour les deux semaines à venir, c'est d'abord un choix clair qui est proposé aux Français. Le 6 mai, ils choisiront quel est le meilleur projet entre deux différents (l'un reposant sur l'Etat Providence, l'autre sur le travail), et décideront aussi quelle personne est la mieux qualifiée pour occupper le poste de Président de la République française. C'est un débat qui a été trop retardé, qui est nécessaire, et qui doit se passer sereinement. Car ce choix influencera à plus long terme que les cinq prochaines années.

vendredi 20 avril 2007

Les propositions de Nicolas Sarkozy

La campagne du premier tour touche à sa fin. Tout pronostic quant au résultat du scrutin de dimanche prochain est vain, tant il y a de facteurs à prendre en compte, et tant les sondages donnent des résultats contradictoires, alors qu'ils sont loins d'être fiable de toutes façons. La campagne officielle aura un peu refroidi l'entrain qui l'avait précédée. Mais d'une manière générale, cette campagne aura été aussi forte que dure. Forte, car au début de la campagne électorale un bon nombre de thèmes de fonds ont été abordés, avec des différences marquées entre la gauche et la droite. Dure, car ces derniers jours, tous ces thèmes semblent avoir été oubliés dans la mesure où une bonne partie des candidats et des médias semblent avoir décidé de ne plus se préoccupper que de la personnalité fantasmée d'un candidat, en l'occurrence Nicolas Sarkozy. On ne peut pas vraiment dire que quoi que ce soit lui aura été épargné : s'il est normal qu'il soit attaqué sur ses propositions, l'homme aura été la cible de l'extrème gauche, de la gauche, de François Bayrou (qui en fin de compte n'aura attaqué que le candidat de l'UMP), et évidemment de l'extrème droite. A chaque fois, la caricature aura fait figure d'argument, et ayant été donné favori à tort ou à raison, il aura la cible de toutes les attaques, malhonnêtes voire odieuses, comme on a pu le voir avec ce qu'il s'est passé sur internet.

A l'heure où les procès en sorcellerie abondent et où le croquemitaine semble être devenu une réalité dans les esprits de certains journalistes, il peut être bon de garder son calme face à la fureur pour mieux considérer les choses. On peut commencer par la question : que valent toutes ces attaques ? Rien, elles ne font que montrer l'acrimonie de personnes qui ne supportent pas le débat d'idées, et qui en viennent aux attaques ad hominem faute de pouvoir argumenter sur le reste. Elles peuvent néanmoins avoir une certaine efficacité, vu l'importance de la tentative de manipulation de foules qui est faite, il ne faut rien sous-estimer. Nous nous grandirions néanmoins si nous arrivions à nous concentrer sur ce qui est vraiment important dans cette campagne électorale, pour décider de la personne qui est la mieux qualifiée pour occupper la Présidence de la République. Et en premier lieu, les projets présentés par les candidats devraient être le critère de choix.

En l'occurrence, celui de Nicolas Sarkozy apparaît comme extrèmement fort. Dès lors, ce n'est pas étonnant que ses opposants souhaitent ne pas en discuter les propositions pour en rester au registre de l'insulte. En regardant dans le détail :

- il souhaite faire sortir l'Europe de la crise en concevant un nouveau traité simplifié, reprenant l'essentiel des mesures qui étaient décrites dans la première partie du Traité Constitutionnel Européen. En ne cherchant plus qu'à adopter rapidement un simple traité sur les institutions, la ratification par voie législative sera possible pour la France et surtout pour la Grande-Bretagne, qui aurait été un obstacle autrement difficile à l'adoption du Traité Constitutionnel Européen par tous les pays de l'Union Européenne. La solution présentée par Nicolas Sarkozy trouve aussi des adeptes dans le reste de l'Europe, et notamment en Allemagne. Ainsi, Angela Merkel préfère largement l'idée d'un traité simplifié à celle du rafraichissement du Traité de Nice, comme l'a présenté dernièrement le ministre néerlandais des Affaires étrangères. En outre, le gouvernement allemand est réticent à l'idée d'un échec à un éventuel nouveau référendum, qui tuerait définitivement l'Union Européenne.

- Nicolas Sarkozy est favorable au service minimum dans les services publics. On peut considérer qu'en effet, le minimum dans la défense d'un service public reste de l'assurer. Et il faut que les réformes soient négociées, et ne résultent plus de rapports de forces dont les perdants sont l'ensemble des Français.

- il est favorable au maintien de la Vème République, considérant que ce n'est pas en changeant de constitution, qui plus pour retrouver des institutions qui ont plongé la France dans le désarroi en 1940 et en 1958. C'est surtout la pratique qu'il faut changer, il est absurde de changer de navire lorsqu'il suffit de changer de capitaine.

- avec Christian Blanc il souhaite continuer la politique de pôles de compétitivité pour créer de nouveaux moteurs de croissance. En investissant dans la recherche et des universités réformées, les entreprises pourront accéder plus facilement à l'innovation et créer de nouveaux marchés.

- Jean-Louis Borloo a vu son projet social intégré dans celui de Nicolas Sarkozy. Cela se traduit par l'image des quatre piliers du plan "EFEL" du co-président du Parti Radical, avec des efforts particuliers en matière d'Emploi, de Formation, d'Equité et de Logement. L'influence de celui-ci est indéniable dans la conception du programme en direction des banlieues difficiles que présente Nicolas Sarkozy, pour permettre aux jeunes actifs qui y habitent de trouver un avenir.

- les régimes spéciaux de retraite seraient réformés si Nicolas Sarkzoy venait à être élu. C'est nécessaire dans un souci de viabilité économique et d'équité.

- il veut basculer une partie de la fiscalité sur le travail vers la pollution. En plus d'encourager les efforts environnementaux, cela permettrait de remettre les entreprises des différents pays dans une certaine équité dans la conquete du marché français.

- il est contre l'entrée de la Turquie dans l'Union Européenne, rappelant que la Turquie n'est géographiquement pas en Europe. En outre, tout projet d'intégration des politiques européennes serait vain dans le cas d'une telle adhésion.

- il est favorable à une politique d'immigration choisie, ce qui qui est une politique modérée entre deux extrèmes que sont l'immigration zéro et la régularisation systématique. A quoi bon émigrer en France, si c'est pour vivre dans une misère équivalente à celle de son pays d'origine faute de ne pouvoir trouver sa place dans la société ? Qu'il soit traité de raciste pour penser cela, alors que son père et son grand-père maternel étaient eux-mêmes des immigrés est ahurissant.

- il propose un modèle de croissance fondé sur le travail. Plutôt que de chercher à rationner les fruits de la richesse nationale, il considère qu'il faut en augmenter le nombre pour que tous puissent en bénéficier. Et le travail est créateur de richesse.

- il est favorable à une approche ferme en matière de lutte contre la délinquance, alors que le réflexe d'un grand nombre de personnes est d'abord de chercher une excuse à celui qui agit mal. Il en résulte un sentiment d'impunité encore trop présent, et qui permet toutes les tragédies.

C'est loin d'être l'intégralité de son projet, mais ces propositions montrent des choix, une volonté affirmée de changer les choses pour améliorer l'Etat de la France. Nicolas Sarkozy considère qu'en disant avant ce que l'on souhaite faire, la mise en oeuvre sera facilité en cas d'élection. Alors que les thèmes abordés sont graves et importants, ses contradicteurs souhaitent en rester aux attaques personnelles. Ce n'est pas forcément la meilleure fin de campagne possible.

Photo : Reuters

lundi 16 avril 2007

La campagne médiocre de Ségolène Royal

Ségolène Royal sera peut-être la prochaine Présidente de la République française. Si elle y parvient, ce ne sera pas grâce à sa campagne, dont le moins que l'on puisse dire à moins d'une semaine du premier tour est qu'elle a été médiocre. Elle avait réussi à obtenir l'investiture du Parti Socialiste car les adhérents croyaient qu'elle était la mieux à même de vaincre Nicolas Sarkozy, pas du fait de ses talents propres, mais uniquement en constatant qu'elle était populaire dans les sondages. C'est ainsi qu'elle fut désignée sur l'image qu'elle donnait. Pourtant, elle n'avait pas vraiment de ligne politique à défendre, et encore moins un programme à proposer aux Français. Pour s'en batir un elle s'est lancé dans ce qu'elle a appelé la "démocratie participative", une grande opération de boite à idées menée entre sympathisants du Parti Socialiste dans chaque section. Le processus était encore en cours lorsque la campagne a débuté, lancée par l'investiture de Nicolas Sarkozy qui avait marqué les esprits avec un grand discours fondateur à la Porte de Versailles. Ségolène Royal a voulu le contrer par une offensive médiatique, or l'absence de mesures à présenter aux Français la poussait à parler de façon creuse alors que son concurrent annonçait jour après jour les décisions qu'il souhaitait prendre. Elle voulut aussi se batir une stature internationale, en visitant la Chine notamment, mais à l'instar de ce qu'il s'était passé lors de son voyage au Proche Orient, elle s'est surtout illustrée par sa méconnaissance des questions internationales, par sa légèreté en fait. Tout cela s'est doublé d'une impressionnante série d'erreurs qui montraient au mieux de l'ignorance, au pire un manque de jugement. La sénatrice américaine Hillary Clinton, elle même en campagne présidentielle, a alors préféré annuler la rencontre qui était prévue entre elle et Ségolène Royal, de peur qu'elle apparaisse en train de la soutenir.

La présentation de son programme à Villepinte fut accueillie fraîchement par les Français : il s'agissait d'une grande liste de mesures qui se caractérisaient par l'appui sur l'Etat Providence, sans qu'il n'y ait de piste quant à leur financement. Le résultat de cette campagne chancelante fut la montée de François Bayrou dans les sondages, qui s'amplifia lorsque ces mêmes sondages le donnaient gagnant face à Nicolas Sarkozy dans le cas d'un très hypothétique deuxième tour qui les opposerait. Ainsi, les résultats dans les sondages, qui constituaient le point fort de Ségolène Royal, devinrent précisément son point faible. De plus, la méthode de gestion employée par la candidate s'est révélée problématique, causant bien des incompréhensions au sein du Parti Socialiste, poussant au départ le Secrétaire national du parti à l'économie, Eric Besson. Celui-ci avait notamment mal accepté le fait que Ségolène Royal promette solennellement à Nicolas Hulot de baisser la part de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité à 50 % dans 10 ans, alors qu'elle est de 80 % actuellement. Une telle baisse est non seulement très difficile à mettre en oeuvre économiquement parlant, mais elle aussi dangereuse pour l'environnement dans la mesure où elle entrainerait une augmentation de la production d'énergie thermique, résultant en une forte augmention des émissions de dioxyde de carbone.

Ainsi s'est déroulée la campagne de Ségolène Royal. Ces derniers temps, ne pouvant plus miser sur son propre programme, Ségolène Royal a préféré se contenter d'attaquer Nicolas Sarkozy. Ce n'est plus une campagne pour l'élire elle en tant que Présidente, c'est devenu une campagne pour empêcher Nicolas Sarkozy d'être élu. Le Parti Socialiste n'appelle plus à voter pour un projet de société, mais contre un candidat. Cela se couple avec la volonté d'en appeler au souvenir du 21 avril 2002, où Lionel Jospin avait été éliminé au premier tour au profit de Jean-Marie Le Pen. Le but est de s'appuyer sur la mauvaise conscience de ceux qui n'avaient pas voté pour le candidat socialiste pour qu'il y ait un candidat de la gauche de cette fois-ci. François Hollande en appelle au "vote utile" dès le premier tour, Ségolène Royal dit se battre "pour être qualifiée pour le second tour, pour arriver en finale", laissant penser qu'il s'agit d'un but en soi, et en arrive à affirmer "avoir besoin du vote des femmes", annonçant explicitement que son élection serait révolutionnaire du fait qu'elle en est une. En tant que politique à appliquer, c'est pour le moins limité. Le vote "contre" et les autres artifices qu'elle déploit peuvent très bien réussir, mais il restera qu'elle n'aura pas été élu pour ses compétences ni pour un projet pour la France. Et ce peut difficilement être de bonnes bases pour les cinq années à venir.

mercredi 11 avril 2007

Le choix des centristes de l'UMP

François Bayrou "ne représente pas tout le centre. Il ne représente que lui même", a dit Simone Veil en annonçant son soutien pour la candidature de Nicolas Sarkozy. Pour elle, "le véritable centre" est à l'UMP. C'est quelque chose que l'on a tendance à oublier, du fait de la campagne de François Bayrou qui essaie d'opposer son positionnement à celui des autres candidats. Or si Nicolas Sarkozy est un homme de droite, une grande partie de l'UMP est composé de centristes. C'est ce que le candidat de l'UDF n'arrive pas à avaler : pour lui, toute personne qui quitte l'UDF sort du centrisme. C'est loin d'être vrai : Pierre Méhaignerie, Philippe Douste-Blazy, Jean-Louis Borloo ou Simone Veil donc font partie de l'UMP sans n'ayant jamais renoncé à leur centrisme. Les centristes de l'UMP pèsent quotidiennement dans les prises de décisions, font partie du gouvernement, sont investis pour les législatives et sont encore appelés à jouer un grand rôle à l'avenir. Ils ont choisi la logique de l'union, en considérant que pour que leurs idées pèsent, il fallait qu'elles soient prises en compte en dehors du seul parti centriste. Car être centriste ne veut pas forcément dire être au milieu de tout pour mieux être acculé à l'immobilisme. Un centrisme pur et dur ne peut exister : la question se pose invariablement de savoir avec qui faire alliance si l'on veut gouverner. De ce choix, naît le centre gauche ou le centre droit, alors que l'"extrême centre" est une voie sans issue, en dehors du pouvoir car ne pouvant réunir de majorité. Les centristes français sont surtout des chrétiens démocrates ou des radicaux. Autrefois, les libéraux étaient également comptés dedant.

Les centristes de l'UMP ont fait le choix de s'allier avec la droite républicaine pour avoir suffisamment de poids pour une action commune. D'ailleurs, certains parmi l'UDF ont fait le même raisonnement ces cinq dernières années. Ainsi, Gilles de Robien, Christian Blanc ou André Santini ont décidé de soutenir Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle. Cela ne fait certes pas les affaires de François Bayrou, qui essaie de faire prévaloir par tous les moyens sa vision du centrisme, jusqu'à exclure de l'UDF un député (Pierre-Christophe Baguet) qui a eu le malheur d'avoir des opinions différentes des siennes, lorsque celui-ci choisit de soutenir Nicolas Sarkozy. Quoi qu'on essaie de nous faire croire, le centrisme d'action est au coeur du projet de l'UMP. Cela se traduit par un engagement européen fort, un souci constant de la laïcité, la mise en place des politiques de cohésion sociale de Jean-Louis Borloo ou celles de pôles de compétitivité de Christian Blanc. On peut regretter que François Bayrou, s'il avait des politiques tellement fantastiques à mettre en oeuvre, ait refusé de les appliquer ne serait-ce qu'en partie au cours des cinq dernières années, alors qu'il en avait la possibilité.

Le véritable est centrisme est à l'UMP, et on peut souhaiter qu'après les élections présidentielles, l'UDF se rappelle dans son ensemble de son rôle naturel au centre droit. Cette grande partie de l'UMP que font les centristes, cette grande partie des centristes qui se retrouve à l'UMP, et même des centristes qui n'en font pas partie, ont fait le choix de soutenir Nicolas Sarkozy au poste de candidat de Président de la République. C'est une décision forte qui pèse pour l'avenir et qui doit être prise en compte dans les échéances électorales actuelles.

vendredi 6 avril 2007

Les enjeux de la présidentielle

Dans un mois jour pour jour, les résultats du deuxième tour des élections présidentielles tomberont. Nous serons alors qui occuppera pour les cinq prochaines années le poste de Président de la République française. Logiquement, cela devrait influer sur les législatives qui suivront, définissant ainsi la politique à venir. L'enjeu est donc important, et cette campagne électorale intéresse beaucoup plus les Français que les précédentes. Elle est longue et mobilisatrice. On y aura vu à peu près toutes les figures imposées de ces périodes : des attaques plus ou moins dignes, des tentatives de manipulation à bases de rumeurs, mais aussi des discussions sur le fond, lorsque l'on se penche sur les propositions des candidats sans s'arrêter au traitement médiatique de la campagne. Ainsi l'électeur a la possibilité de faire un choix clair. Très souvent, il a surtout envie de changement : il n'est pas satisfait de la façon dont la France va, et souhaite qu'il y ait une action plus forte pour remédier à cela. Si on trouve facilement une majorité de personnes pour dire qu'il y a de nombreux problèmes, il est moins évident de trouver une majorité aussi nette pour s'accorder sur une même définition des problèmes en question, et évidemment sur les mesures à prendre.

Quels sont les problèmes dont souffre la France ? La liste peut être longue : un chômage plus élevé que la moyenne européenne, une pauvreté qui s'est installé chez certaines personnes qui ont pourtant un emploi, un pouvoir d'achat réduit par la hausse des carburants et de l'immobilier, des comptes sociaux déficitaires, un système éducatif qui apparaît inadapté, l'environnement qui est attaqué par la pollution, un problème d'intégration qui affaiblit le lien social, la lutte contre l'insécurité qui doit être continuée, des services public et des entreprises publiques mal gérées... Pour chacun de ces domaines, des réformes importantes sont à mener ou à poursuivre. Trop souvent, on s'est d'abord attaqué aux conséquences qu'aux causes, nécessitant de plus en plus de pansements pour reboucher des plaies qui s'agrandissaient d'autant plus qu'elles ne cicatrisaient pas. Car il fallait une certaine dose de courage pour s'attaquer à la racine du mal, courage que l'on a pas eu depuis des décennies, lorsque l'on a pas tout simplement encouragé involontairement, avec les meilleures intentions du monde, l'aggravation des causes de souffrance. Pourtant, autour de nous, les autres pays européens semblent être moins en difficultés que nous sur chacune de ces thématiques, ou tout du moins sur la plupart. Il faut dire que chez eux la volonté politique a été moins handicapée par un fond de misérabilisme qui nous est cher. Soit les populations étaient moins enclines que la notre à refuser en bloc tout changement, soit leurs responsables politiques étaient meilleurs pour faire passer leurs réformes, et convaincre du bien fondé de celles-ci, y compris lorsqu'elles peuvent être douloureuses de prime abord.

Voilà la question phare de cette campagne : les problèmes sont connus, ce sont les réformes à adopter et leur mise en oeuvre qui sont en discussion. Parmi les trois candidats dont on nous dit qu'ils peuvent emporter l'élection, l'une a pris le parti de poursuivre ce qu'il s'est fait depuis 26 ans : faire jouer l'Etat Providence pour donner l'impression que l'argent public va tout régler, sans s'attaquer au coeur des difficultés. Un autre souhaite mettre en oeuvre des réformes modestes en faisant le pari qu'elles seront adoptées parce que tout le monde finira bien par se mettre d'accord sur leur nature. Enfin, un candidat veut mettre en oeuvre des réformes fortes, avec une volonté forte de résultats y compris si un consensus est impossible à obtenir autour d'elles. Si ces candidats devront rendre des comptes quant aux politiques qu'ils appliqueront, les électeurs doivent dès à présent comprendre leur propre responsabilité quant à l'avenir de la France dans le choix qu'ils feront dans un mois.

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