L'art du rassemblement
Par xerbias, jeudi 26 avril 2007 à 21:52 :: Faits politiques :: #147 :: rss
Le premier tour passé, les deux candidats restants cherchent cette fois-ci à dépasser la barre des 50 %. Il leur faut donc récupérer les voix qui leur avait échappé au premier tour, de la part de personnes qui n'avaient pas été convaincues la première fois. Le Président de la République est au dessus des partis, il se doit d'être une figure représentant l'ensemble des Français. Voilà pourquoi le général de Gaulle avait voulu qu'il soit élu au suffrage universel, pour que ce soit la rencontre d'un homme et d'un peuple, manifesté par l'approbation de plus de la moitié des suffrages exprimés lors du scrutin. Les candidats doivent donc rassemblembler au delà de leur propre camp entre le premier et le deuxième tour, et concrètement, cela se traduit par un grand écart dans le champ politique à recouvrir.
De la part de Nicolas Sarkozy, la consigne était claire : dès son investiture le 14 janvier dernier à la Porte de Versailles, il annonçait à l'UMP "Je demande à mes amis qui m'ont accompagné jusqu'ici de me laisser libre, libre d'aller vers les autres, vers celui qui n'a jamais été mon ami, qui n'a jamais appartenu à notre camp, à notre famille politique qui parfois nous a combattu. Parce que lorsqu'il s'agit de la France, il n'y a plus de camp." Alors qu'il était très populaire à droite, il semblait vouloir dépasser ce seul horizon. En l'occurrence, nombreux sont ceux qui ont pensé qu'il essaierait de convaincre aussi à gauche, après un discours qui citait en des termes élogieux Jean Jaurès. Ce fut le cas, mais il ne s'est pas limité à cela. Il a aussi voulu ramener dans le camp de la droite républicaine ceux qui étaient tombés du côté du Front National, si nombreux en 2002. Cela fut à l'origine de ce qui a été perçu comme la droitisation de son discours. Il a aussi tenté de jouer la carte du centre, en mettant en avant les soutiens de Simone Veil et de Jean-Louis Borloo. Car il ne devait évidemment pas laisser trop d'espace au centre.
La montée de François Bayrou pouvait en effet être une menace pour lui, car il avait peu de chance de l'emporter face au candidat de l'UDF au second tour. Pour la candidate socialiste, François Bayrou était même une menace de premier tour, la qualification ne semblant pas assuré. La baisse de Ségolène Royal dans les sondages a d'abord profité à François Bayrou, bien plus qu'à Nicolas Sarkozy. Elle a voulu faire une campagne marquée par un socialisme vieillissant, partant du principe que Lionel Jospin avait été éliminé pour avoir voulu faire dès le départ une campagne de second tour. Ses erreurs, l'arrivée tardive de son projet et les péripéties de sa campagne l'ont amené à perdre du terrain qui a été récupéré par François Bayrou, qui voulait par raison tactique devenir le candidat de la gauche au deuxième tour, doutant du fait de pouvoir battre Nicolas Sarkozy au premier. Ainsi, de nombreux électeurs se classant à gauche ont été amenés à choisir le candidat UDF, provoquant la stupeur du Parti Socialiste qui l'attaquait durement, le qualifiait de candidat de droite, ce qui est censé être une injure chez les électeurs de gauche. Ségolène Royal avait même formellement refusé une alliance avec François Bayrou quand cela lui avait été proposé par certaines personnes de son camp. Par contre, François Hollande insistait très lourdement sur le vote utile, pour éviter que ceux qui avaient voté pour l'extrême gauche en 2002 oublient de porter leurs suffrages sur la candidate socialiste. Cela a bien marché, mais encore une fois cela a créé de l'espace pour François Bayrou.
Celui-ci n'est pas arrivé au second tour. Il est vu par les médias comme l'arbitre du match en cours, ce qui est ridicule car il ne vote par pour l'ensemble de ceux qui ont voté pour lui au premier tour. Mais cela fait que Ségolène Royal s'est découverte subitement centriste, prête à négocier son projet avec lui et à offrir des portefeuilles ministériels à l'UDF. Elle souhaite ainsi avoir une majorité qui rassemble tant les trotskistes (qui doivent être surpris par une telle tournure des événements) que les chrétiens démocrates, oubliant de ce fait tout ce qu'elle avait pu dire sur François Bayrou il n'y a ne serait-ce qu'une semaine. Du côté de Nicolas Sarkozy, le but est de garder ses électeurs du premier tour, tout en en gagnant lui aussi au centre. Il ne s'agit pas de gagner les faveurs de François Bayrou, qui cherche à s'opposer à lui dans son intérêt pour les prochaines législatives. Le but est surtout d'attirer ceux qui se considèrent comme autentiquement centristes (ce qui n'est pas forcément lié à François Bayrou) ou tout simplement les indécis qui avaient voté pour le candidat de l'UDF, pour éviter de choisir entre la gauche et la droite sans s'abstenir. Et non seulement Nicolas Sarkozy peut compter sur les propres composantes centristes de l'UDF, mais il apparait que l'UDF est bien historiquement un parti de centre droit, dans la mesure où la majorité de ses parlementaires choisissent le candidat de la droite face à celle de la gauche.
En fin de compte, il est obligatoire de chercher à ratisser vraiment très large lors de telles élections, quitte à perdre un peu de la cohérence de la majorité dégagée ou dans le projet proposé. Il est tout de même nécessaire de garder une certaine idée de la ligne que l'on suit, aussi large qu'elle soit. Au bout d'un moment, il n'est pas nécessaire de se perdre en tractations et de changer complètement de positions pour opérer ce rassemblement. La personnalité politique a davantage l'étoffe d'une personnalité d'Etat lorsqu'elle arrive à rester assez constant sur ses valeurs fondamentales, et rassemble en étant ouvert aux autres. Car l'électeur ne souhaite pas forcément quelqu'un qui ait des idées semblables aux siennes point par point. Il veut aussi porter à la tête de l'Etat un capitaine capable de garder la barre en pleine tempête. Plutôt que d'aller vers tout le monde, le rassemblement peut aussi se faire en laissant chacun venir vers soi.
De la part de Nicolas Sarkozy, la consigne était claire : dès son investiture le 14 janvier dernier à la Porte de Versailles, il annonçait à l'UMP "Je demande à mes amis qui m'ont accompagné jusqu'ici de me laisser libre, libre d'aller vers les autres, vers celui qui n'a jamais été mon ami, qui n'a jamais appartenu à notre camp, à notre famille politique qui parfois nous a combattu. Parce que lorsqu'il s'agit de la France, il n'y a plus de camp." Alors qu'il était très populaire à droite, il semblait vouloir dépasser ce seul horizon. En l'occurrence, nombreux sont ceux qui ont pensé qu'il essaierait de convaincre aussi à gauche, après un discours qui citait en des termes élogieux Jean Jaurès. Ce fut le cas, mais il ne s'est pas limité à cela. Il a aussi voulu ramener dans le camp de la droite républicaine ceux qui étaient tombés du côté du Front National, si nombreux en 2002. Cela fut à l'origine de ce qui a été perçu comme la droitisation de son discours. Il a aussi tenté de jouer la carte du centre, en mettant en avant les soutiens de Simone Veil et de Jean-Louis Borloo. Car il ne devait évidemment pas laisser trop d'espace au centre.
La montée de François Bayrou pouvait en effet être une menace pour lui, car il avait peu de chance de l'emporter face au candidat de l'UDF au second tour. Pour la candidate socialiste, François Bayrou était même une menace de premier tour, la qualification ne semblant pas assuré. La baisse de Ségolène Royal dans les sondages a d'abord profité à François Bayrou, bien plus qu'à Nicolas Sarkozy. Elle a voulu faire une campagne marquée par un socialisme vieillissant, partant du principe que Lionel Jospin avait été éliminé pour avoir voulu faire dès le départ une campagne de second tour. Ses erreurs, l'arrivée tardive de son projet et les péripéties de sa campagne l'ont amené à perdre du terrain qui a été récupéré par François Bayrou, qui voulait par raison tactique devenir le candidat de la gauche au deuxième tour, doutant du fait de pouvoir battre Nicolas Sarkozy au premier. Ainsi, de nombreux électeurs se classant à gauche ont été amenés à choisir le candidat UDF, provoquant la stupeur du Parti Socialiste qui l'attaquait durement, le qualifiait de candidat de droite, ce qui est censé être une injure chez les électeurs de gauche. Ségolène Royal avait même formellement refusé une alliance avec François Bayrou quand cela lui avait été proposé par certaines personnes de son camp. Par contre, François Hollande insistait très lourdement sur le vote utile, pour éviter que ceux qui avaient voté pour l'extrême gauche en 2002 oublient de porter leurs suffrages sur la candidate socialiste. Cela a bien marché, mais encore une fois cela a créé de l'espace pour François Bayrou.
Celui-ci n'est pas arrivé au second tour. Il est vu par les médias comme l'arbitre du match en cours, ce qui est ridicule car il ne vote par pour l'ensemble de ceux qui ont voté pour lui au premier tour. Mais cela fait que Ségolène Royal s'est découverte subitement centriste, prête à négocier son projet avec lui et à offrir des portefeuilles ministériels à l'UDF. Elle souhaite ainsi avoir une majorité qui rassemble tant les trotskistes (qui doivent être surpris par une telle tournure des événements) que les chrétiens démocrates, oubliant de ce fait tout ce qu'elle avait pu dire sur François Bayrou il n'y a ne serait-ce qu'une semaine. Du côté de Nicolas Sarkozy, le but est de garder ses électeurs du premier tour, tout en en gagnant lui aussi au centre. Il ne s'agit pas de gagner les faveurs de François Bayrou, qui cherche à s'opposer à lui dans son intérêt pour les prochaines législatives. Le but est surtout d'attirer ceux qui se considèrent comme autentiquement centristes (ce qui n'est pas forcément lié à François Bayrou) ou tout simplement les indécis qui avaient voté pour le candidat de l'UDF, pour éviter de choisir entre la gauche et la droite sans s'abstenir. Et non seulement Nicolas Sarkozy peut compter sur les propres composantes centristes de l'UDF, mais il apparait que l'UDF est bien historiquement un parti de centre droit, dans la mesure où la majorité de ses parlementaires choisissent le candidat de la droite face à celle de la gauche.
En fin de compte, il est obligatoire de chercher à ratisser vraiment très large lors de telles élections, quitte à perdre un peu de la cohérence de la majorité dégagée ou dans le projet proposé. Il est tout de même nécessaire de garder une certaine idée de la ligne que l'on suit, aussi large qu'elle soit. Au bout d'un moment, il n'est pas nécessaire de se perdre en tractations et de changer complètement de positions pour opérer ce rassemblement. La personnalité politique a davantage l'étoffe d'une personnalité d'Etat lorsqu'elle arrive à rester assez constant sur ses valeurs fondamentales, et rassemble en étant ouvert aux autres. Car l'électeur ne souhaite pas forcément quelqu'un qui ait des idées semblables aux siennes point par point. Il veut aussi porter à la tête de l'Etat un capitaine capable de garder la barre en pleine tempête. Plutôt que d'aller vers tout le monde, le rassemblement peut aussi se faire en laissant chacun venir vers soi.
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