Réflexions en cours

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jeudi 30 juin 2011

Deux poids, deux mesures en matière d'otages

Aujourd'hui, chacun se réjouit du retour en France de Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier. Leurs 18 mois de captivité ont du paraître bien long aux journalistes de France 3. Mais si on se réjouit pour eux, il est difficile de ne pas noter qu'on se réjouit différemment pour eux que pour d'autres otages. Et quand on dit "d'autres otages", on veut dire des otages non journalistes. La différence de traitement est flagrante, non seulement pendant la libération, mais également pendant la captivité. Pour les deux journalistes, le public a eu le droit à de nombreuses manifestations de soutien, avec grandes banderoles sur les bâtiments, rappel de leur captivité chaque semaine sur les antennes, et hier, un logo spécial fut même affiché en permanence dans les programmes de France 3. On peut douter de l'efficacité d'une telle méthode : d'un côté, les otages, s'ils en ont vent, peuvent se sentir soutenus. De l'autre, les preneurs d'otages voient leur position renforcée, leurs captifs ayant une valeur plus affirmée, ils peuvent se montrer plus exigeants.

Se pose alors toutes les questions sur la satisfaction des revendications. Ici, il semble bien qu'ils aient été libérés car les revendications des talibans ont été satisfaites, ce qui implique la libération de talibans emprisonnés, et le versement de rançons. Le procédé est parfaitement détestable, car cela montre évidemment la voie pour d'autres prises d'otages. Déjà que les circonstances de la capture des deux journalistes restent contestables, il n'y a rien de réjouissant à l'idée que leur libération ait été obtenue en faisant preuve de faiblesse.

Quoi qu'il en soit, la médiatisation des otages est un procédé à géométrie variable. A l'heure actuelle, des ingénieurs et des humanitaires restent en captivité en Afrique, sans qu'il y ait le dixième du ramdam médiatique fait pour les journalistes ou d'autres personnalité connues. Ingrid Betancourt ou des grands reporters peuvent bénéficier de relais d'opinion (quelques soient les risques pris consciemment), mais toute cette sollicitude s'évanouit pour ceux qui ne sont connus de personne. Alors bien sûr, on se réjouit de la libération d'otages, mais on ne peut s'empêcher de constater le deux poids, deux mesures en la matière, et de rester songeur au fait que ce qui est bon pour certains semble être inutile pour d'autres.

mardi 28 juin 2011

Le candidat du second choix

Après un suspense insoutenable, Martine Aubry a déclaré ce matin sa candidature à la prochaine élection présidentielle. Cela nous donne donc cinq candidats socialistes à la primaire, mais d'eux d'entre eux n'avaient pas prévu de se présenter il y a encore quelques mois. En effet, avant l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn, celui-ci était déjà donné comme le candidat évident des socialistes, les manœuvres étant mêmes fortes pour éliminer toute forme d'opposition à la primaire. En restant à New York plusieurs années, DSK avait eu le mérite de ne pas prendre position et de rester éloigné des marasmes du PS. Ce faisant, sa position était plus forte que cinq années auparavant, et sa popularité lui promettait des résultats électoraux inespérés en 2012. Peu avant qu'il n'annonce sa candidature sous les tambours et les trompettes, de nombreuses personnes agissaient déjà pour créer un mouvement d'opinion puissant pour le porter jusqu'à l'Elysée.

Dans ce cadre là, le rôle de la première secrétaire du Parti Socialiste était loin d'être neutre. Elle ne cachait pas avoir formé un pacte avec le directeur du FMI pour qu'ils ne se présentent pas l'un contre l'autre. Et comme DSK était décidé à se présenter, cela signifiait que Martine Aubry acceptait avec joie de ne pas se présenter. Pas forcément inactive, son rôle aurait été différent : tenir le parti pendant l'élection, puis occuper Matignon une fois Dominique Strauss-Kahn triomphalement élu. Mais lorsque ce dernier fut mis subitement hors jeu, le sol s'est dérobé sous ses pieds. Une bonne partie des soutiens de DSK comme ses propres amis sont alors venus naturellement à Martine Aubry : à la fois de par sa position au PS et par son statut de numéro 2 de cette alliance, c'était à elle de reprendre le flambeau. Peu importe que son positionnement politique soit bien différent que l'ex-ministre des finances. La plupart des soutiens du duo s'en soucient peu, et veulent surtout éviter leurs propres épouvantails : François Hollande et Ségolène Royal.

Sans Dominique Strauss-Kahn, le Parti Socialiste est donc condamné à faire avec des candidats qui auraient du rester dans l'ombre. Celui qui sera désigné ne sera qu'un candidat de second choix par rapport à celui qui s'imposait facilement. Et ce choix n'a rien d'évident.

François Hollande a soudainement le vent en poupe. Il a réussi à se donner une image d'homme raisonnable, mais son discours est encore ignoré, et il aura du mal à s'appuyer sur son bilan.

Arnaud Montebourg pense que son tour est venu. Il parlera à nouveau de son obsession pour la VIème République. Il parlera probablement moins de sa haine pour le cumul des mandats, vu qu'il est désormais cumulard lui-même. Qu'à cela ne tienne, il a une nouvelle marotte : le protectionnisme.

Manuel Valls a décidé de se présenter en constatant l'absence de Dominique Strauss-Kahn, considérant que quelqu'un devait représenter une approche moins dogmatique et plus réaliste de la sécurité et de l'économie au sein du PS. Seul problème : son parti le hait.

Ségolène Royal n'a jamais douté d'elle-même, et pense pouvoir renouveler ses exploits de 2007. A priori, la gauche a fini par se rendre compte de l'inanité de la présidente de la région Poitou Charentes, et regrette amèrement d'avoir cru en elle. Aujourd'hui, seuls quelques fanatiques continuent à croire en elle, mais après tout, vu qu'elle emporta largement la primaire il y a quatre ans, nous ne sommes à l'abri de rien.

Martine Aubry, enfin, se retrouve sur le devant de la scène malgré elle-même. On comprend les raisons qui la poussait à ne pas y aller. Et si l'on doutait de son manque d'enthousiasme, il suffit pour le constater de voir sa déclaration de candidature, sans aucune éloquence, et surtout sans âme.

Tous ces candidats ont probablement moins de casseroles que Dominique Strauss-Kahn. Mais s'ils n'en ont pas les défauts, ils n'en ont pas non plus les qualités. Et lorsqu'ils feront campagne, et même s'ils viennent à arriver au pouvoir, ils ne pourront éviter les comparaisons avec une hypothétique candidature ou présidence Strauss-Kahn. Le Parti Socialiste a des candidats de second choix, mais on pourrait également avoir un Président de la République de second choix.

lundi 27 juin 2011

La nouvelle farce du baccalauréat

On le savait déjà, le baccalauréat ne vaut plus grand chose. Mais s'il restait quelqu'un à convaincre, les derniers événements ont fini de le démontrer. Le premier exercice de l'épreuve de maths du bac scientifique avait "fuité", publié la veille sur un forum internet, mais circulant entre élèves depuis une dizaine de jours auparavant. Si le ministère en avait été informé la veille, il aurait fait donner les sujets de secours, mais la tricherie s'étant révélée après l'épreuve, il ne fut décidé que d'annuler ce premier exercice. En théorie, le ministère aurait pu annuler l'ensemble de l'épreuve, mais la perspective de devoir réorganiser en urgence une nouvelle épreuve pour plus de 150 000 candidats s'annonçait comme un cauchemar logistique et financier.

On aurait trouvé des candidats mécontents de devoir repasser cette épreuve. Mais à la place, on a trouvé des candidats mécontents de voir le premier exercice annulé. Et pour cause. Le premier exercice était d'une facilité risible, et constituait quatre points de donné à tous les candidats. Ce lamentable épisode aura attiré l'attention de la population sur un exercice ahurissant de simplicité, pourtant donné à l'épreuve de mathématiques du baccalauréat "scientifique". Les premières questions de cet exercice de probabilités ne demandent au candidat que de lire l'énoncé. La suite ne demande que des connaissances de base dans la discipline, et un niveau de réflexion digne d'un collégien. On ne demande plus au candidat de donner un résultat : il est donné. On ne lui demande que de le montrer. Et, on s'en rappelle, ça c'est l'épreuve pour les "scientifiques", les lycéens censés êtres les plus pointus en mathématiques.

Cela pourrait certes être encore pire : dans l'épreuve de mathématiques de la série Economique et Sociale, un exercice entier est un questionnaire à choix multiple, où à chacune des quatre questions, trois réponses sont données. Il suffit d'indiquer la bonne. Il est bien précisé qu'"aucune justification n’est demandée" et qu'"une réponse fausse ou l’absence de réponse ne rapporte ni n’enlève aucun point". Bref, le hasard peut ici faire gagner des points (l'espérance d'un choix aléatoire des réponses est de 1,33 point), même si les questions ne présentent il est vrai aucune sorte de difficulté. Dans les matières non scientifiques, si les dissertations sans document sont encore proposées, elles ne sont plus vraiment obligatoires.

Le bac est donc de plus en plus un diplôme dévalué, et suit en cela le mouvement initié par le brevet des collèges (qui, en fin de compte, n'atteste aujourd'hui que le fait de savoir lire, écrire et compter). "Diplôme universitaire", le baccalauréat devrait normalement privilégier la réflexion dans chacune de ses épreuves, dans chacun de ses exercices. Mais les énoncés bienveillants et les commissions d'harmonisation complaisantes ont pour objectif de maintenir un taux de réussite élevé. Avec les consignes données par Luc Chatel sur la correction de l'épreuve de maths scientifique, les candidats n'ont bien sûr rien à craindre de la suppression de ce fameux exercice.

On peut supprimer le brevet des collèges et garder le bac si l'on veut, mais ce qui apparait, c'est que celui-ci ne saurait suffire comme examen d'entrée aux universités, où le niveau est bien plus élevé. Avec chaque année qui passe, on se rend compte davantage de la nécessité d'instaurer une véritable sélection à l'entrée des universités.

dimanche 26 juin 2011

Le projet de paix perpétuelle de Kant

En 1795, après que l'Europe se soit embrasée à l'occasion des guerres révolutionnaires, Emmanuel Kant publie un très court ouvrage, ou plutôt une brochure, énonçant un projet de paix perpétuelle. Il y explique chacun des points qu'il mentionne, et évidemment, pour qu'un traité de paix ait une telle portée, il faut qu'il s'adresse à tous les pays ensemble, plutôt que de n'être qu'un traité de paix bilatéral. Il commence par des articles préliminaires :
  1. Nul traité de paix ne peut être considéré comme tel, si l'on s'y réserve secrètement quelque sujet de recommencer la guerre.
  2. Aucun État indépendant (petit ou grand, cela ne fait rien ici) ne peut être acquis par un autre, par voie d'héritage, d'échange, d'achat ou de donation.
  3. Les armées permanentes doivent entièrement disparaître avec le temps.
  4. On ne doit point contracter de dettes nationales en vue des intérêts extérieurs de l'État.
  5. Aucun État ne doit s'immiscer de force dans la constitution et le gouvernement d'un autre État.
  6. Nul État ne doit se permettre, dans une guerre avec un autre, des hostilités qui rendraient impossibles, au retour de la paix, la confiance réciproque, l'emploi d'assassins, d'empoisonneurs, la violation d'une capitulation, l'excitation à la trahison dans l'État auquel il fait la guerre, etc...
Le cœur du projet tient en trois articles, trois principes indispensables, le non respect de l'un suffisant à faire s'écrouler l'édifice.

D'abord, "la constitution civile de chaque État doit être républicaine", ce qui suppose la liberté des membres de la société, la soumission de tous à une législation unique et commune et la l'égalité de tous les citoyens. Le terme "républicain" (ici, où il y a séparation des pouvoirs) est utilisé comme antonyme de "despotique" (où la volonté particulière se substitue à la volonté publique), le terme de démocratie n'est pas retenu, mais une république ne peut être qu'une démocratie représentative (l'adjectif est important pour permettre cette séparation du pouvoir). Dans cette logique, le peuple pèse lui-même les graves conséquences d'une entrée en guerre dans la mesure où c'est lui qui combattra et subira, et ne prendra donc pas ce genre de décisions à la légère.

Ensuite, "il faut que le droit des gens soit fondé sur une fédération d'États libres". Il ne s'agit pas de faire un seul État, mais de les réunir les peuples indépendants dans une fédération. De la même façon qu'on sort de la barbarie en acceptant la contrainte légale (et préférer ainsi une "liberté raisonnable" à une "folle liberté") au sein des États, les États doivent eux-mêmes accepter cette même contrainte légale entre eux. On se fait la guerre pour des questions de droit, mais la guerre ne les règle pas. Une alliance de paix entre républiques garantirait l'absence de guerres.

Enfin, "le droit cosmopolitique [commun à tous] doit se borner aux conditions d'une hospitalité universelle". Ici, l'hospitalité est défini comme le droit qu'a tout étranger de ne pas être traité en ennemi dans le pays où il arrive, et comme un droit de visite (et non un droit à être admis au foyer). C'est nécessaire pour établir des relations amicales entre les peuples.

Par la suite, Emmanuel Kant revient sur les façons de procéder pour arriver à de tels buts. En philosophe politique, il considère que les difficultés de mises en place d'une république peuvent être surmontées en faisant en sorte que les penchants personnels contraires se fassent obstacles de telle façon à ce qu'ils ne gênent pas la conduite publique. On en déduit que la meilleure façon est de les incorporer au mécanisme institutionnel, ce qui justifie les contre pouvoirs. Il conclue assez longuement sur la nécessité pour les représentants de consulter les philosophes, mettant un avant qu'il est possible de concilier politique et morale (un thème sur lequel il revient dans d'autres ouvrages).

Ce projet de paix perpétuelle a très certainement inspiré le Président américain Woodrow Wilson lorsqu'il désira créer la Société Des Nations en sortant de la première guerre mondiale. On y retrouve l'idée de la fédération, du cadre supra-étatique dans lequel se retrouvaient les différentes nations. L'ONU en est le successeur. Néanmoins, on n'y compte pas que des "républiques" (ou démocraties représentatives), et c'est bien là la principale cause de son efficacité très relative. L'Union Européenne, en revanche, a réussi à réunir les trois principes fondamentaux évoqués par Emmanuel Kant. Celui-ci mettait lui-même en avant l'efficacité du commerce pour diminuer les tensions guerrières, et avec la Communauté Économique Européenne, c'est cet angle là qui fut privilégié. 50 ans après, le résultat est magnifique, et on peut aujourd'hui rêver à une paix perpétuelle, au moins entre les États membres de l'Union.

jeudi 23 juin 2011

Le difficile chemin de la Serbie vers l'Europe

Avec les arrestations de Ratko Mladic et Radovan Karadzic, la Serbie a levé deux obstacles à une adhésion à l'Union Européenne, adhésion qu'elle recherche. Dans ce genre de conditions, il reste encore Goran Hadzic, l'ancien leader des Serbes de Croatie, qui est toujours recherché par la justice internationale. Une fois qu'il sera capturé, s'ouvrira pour la Serbie... tout un nouveau champ d'obstacles. Sa voisine la Croatie, elle, adhérera bientôt à l'Union Européenne. Les négociations sont désormais bien avancé, et l'adhésion devrait être pour juillet 2013. Ce sera peut-être le dernier pays à adhérer avant longtemps.

Contrairement à la Turquie, la Serbie et les autres pays des Balkans ont vocation à adhérer un jour à l'Union Européenne. Géographiquement, ce sont des pays européens. Ils peuvent donc légitimement aspirer à rejoindre l'Union, qui s'adresse à toute l'Europe. Mais l'Union Européenne subit une crise de croissance. Le Traité de Lisbonne a permis de sortir des difficultés institutionnelles, mais l'adhésion de 10 pays en 2004, puis d'encore deux autres en 2007 a rendu la situation compliquée. Les pays de l'Europe de l'est ont posé de nouveaux défis pour l'esprit européen, en privilégiant l'aspect purement libéral de l'Union plutôt que le projet politique. En acceptant l'adhésion de Chypre alors que ses problèmes géographiques et géopolitiques ne sont pas réglés, l'Europe a fait sienne ces difficultés, sans vrai espoir de règlement rapide. Les adhésions roumaines et bulgares s'avèrent aujourd'hui particulièrement, la criminalité et la faiblesse économique de ces pays les mettent à la marge, et demandent des mesures spéciales pour qu'elles n'impactent pas le reste du continent.

A priori, la Croatie ne posera pas de tels problèmes. Tout laisse actuellement penser que ce nouveau membre sera aussi apprécié que la Slovénie, autre pays de l'ex-Yougoslavie qui a adhéré en 2004 et qui a adopté l'euro en 2007. Pour la Serbie, c'est une autre paire de manches. Culturellement, le pays est assez proche de la Russie (les liens historiques et religieux sont forts). La criminalité y est toujours importante, et l'économie, bien qu'en croissance, reste relativement pauvre. Le PIB par habitant y est faible, et le taux de chômage tourne autour des 14 %.

Enfin, on ne peut pas vraiment dire que la Serbie ait définitivement mis derrière elle toutes les tensions nationalistes qui ont ravagé le pays autrefois. Elle ne reconnait pas le Kosovo, et le souvenir de tous ces conflits entraînent des sentiments équivoques. La Bosnie Herzégovine connait des affres semblables, et on se demande parfois si des déplacements de population ne seraient pas l'ultime solution pour régler définitivement ces questions. Ce fut le moyen employé par les Alliés à la fin de la seconde guerre mondiale pour désamorcer les nationalismes, mais la Yougoslavie y avait échappé en se libérant seule de l'oppression nazie.

En fait la question d'une adhésion serbe se pose surtout car c'est le souhait du Président de la République serbe, Boris Tadic. Il est considéré comme pro-occidental parmi les politiciens serbes, et c'est évidemment vu comme une bonne nouvelle dans l'Europe occidentale, qui l'encourage. Néanmoins, les fondamentaux serbes tiennent ce pays encore très éloigné de l'Union Européenne, et Boris Tadic entame un travail de fond qui prendra certainement encore plus d'une décennie, si tout se passe bien.

lundi 20 juin 2011

Mon programme pour 2012

Comme promis, voici donc mon programme pour les élections présidentielle et législatives de 2012. A priori, mon nom ne sera sur aucun bulletin de vote, mais j'aimerais que le plus grand nombre possible de ces mesures y soient défendues, puis appliquées lors de la prochaine législature. Ce programme est un souhait : il s'intéresse moins au fait que les conditions soient réunies pour être appliqué, et plus au fait qu'il serait nécessaire pour la France de les appliquer. Contrairement aux programmes présidentiels traditionnels, il promet bien peu de lendemains qui chantent et de mesures qui bénéficieront directement à l'électeur. Dans la situation actuelle de la France, il faut mettre en œuvre des changements qui ont trop longtemps retardés, et qui sont donc d'autant plus difficiles.

Et de fait, il s'agit ici d'un programme de rigueur budgétaire et sécuritaire. Budgétaire, car nos déficits publics sont trop important depuis trop longtemps, et qu'ils nuiront de plus en plus à l'avenir de la France. Sécuritaire, car la sécurité n'a pas à être un vilain mot, et le respect des lois est la condition de la vie en société. Sur l'économie et l'emploi, la mesure phare de ce programme est la TVA sociale, une véritable solution potentielle qui n'a pas encore été tentée actuellement. Mais en tout, il y a là 76 mesures, chacune ou presque s'appuyant sur un billet de ce blog pour en développer le propos. Elles sont regroupées par ministère de compétence :

Premier ministre
- Institutions et relations avec le Parlement

Economie et finances
- Politique économique
- Budget

Intérieur
- Sécurité
- Immigration

Justice

Affaires étrangères

Défense

Transport et environnement

Affaires sociales

Education Nationale

Enseignement supérieur et recherche

Santé et sports

Agriculture

Culture

Toutes ces mesures sont en libre service : candidats, n'hésitez pas à les prendre à votre compte ! Ce sera en tout cas mon modeste apport au débat de 2012. J'encourage ceux qui liront ce billet à me faire savoir ce qu'ils en pensent, et à proposer eux-aussi, sur leur blog ou par n'importe quel moyen, leur propre programme !

dimanche 19 juin 2011

La France n'a pas besoin de cannabis

Il y a d'abord eu Stéphane Gatignon, le maire d'une ville de Seine-Saint-Denis, qui a demandé la légalisation du cannabis pour diminuer le trafic. Il y a également eu l'ancien ministre socialiste Daniel Vaillant, qui a à nouveau demandé la création d'une filière d'Etat. C'est ensuite une partie de la gauche qui n'a pas fermé la porte à de telles éventualités, Martine Aubry et François Hollande en tête. Enfin, hier, nous avons eu le droit au coup médiatique du bien peu subtil "appel du 18 joint". De tout cela, on arrive à une situation assez claire : les fumeurs de cannabis veulent pouvoir fumer ouvertement, et la gauche aimerait récupérer les voix de ces électeurs. On ne s'intéresse plus aux effets de la consommation de cannabis, on préfère désormais mettre l'accent sur la façon d'en contrôler les répercussions...

Les arguments des partisans du cannabis sont d'une grande vacuité. En premier lieu, il y l'argument de la sécurité publique : la pénalisation du cannabis entraînerait des trafics et de la criminalité. Sa légalisation permettrait d'assainir la situation. C'est oublier que le cannabis n'a rien d'une fatalité. S'ils sont si concernés par la sécurité publique, les consommateurs de cannabis peuvent commencer par respecter la loi, et ne plus en consommer. Si l'on accepte de passer par des filières illégales pour s'approvisionner, on justifie à peu près tout. Un tel raisonnement sur le cannabis peut s'appliquer à toutes les drogues, même l'héroïne ou la cocaïne. Et ceux qui revendent actuellement du cannabis pourront très bien se reconvertir dans la vente d'héroïne s'il y a une opportunité commerciale. D'ailleurs, l'"appel du 18 joint" demande autant la "dépénalisation de l'usage de toutes les drogues" que la légalisation du cannabis, montrant bien qu'ils n'ont aucune limite en la matière.

La vraie question est donc de savoir si nous avons besoin de davantage de drogues. Un argument souvent répété est que si le tabac et l'alcool sont légaux, le cannabis devrait l'être également. Or il y a une différence entre les deux : le tabac et l'alcool n'ont jamais été interdits, et il est déjà extrêmement compliqué d'en limiter la consommation. On peut vouloir interdire le tabac pour des raisons de santé publique par exemple, mais cela demanderait un travail s'étalant sur des décennies pour changer les habitudes culturelles. Il est donc hors de question de rajouter à cela les dangers du cannabis, qui doit toujours rester interdit. Le dépénaliser ou le légaliser enverrait le mauvais message, celui d'une politique montrant que c'est acceptable, alors qu'il doit être combattu. Les Pays-Bas se mordent aujourd'hui les doigts de l'avoir légalisé, le pays étant devenu une plaque tournante européenne du trafic de toutes les drogues. Revenir en arrière leur apparaît très compliqué. Ce n'est pas exactement le genre d'exemple à suivre.

Les discours visant à montrer que le cannabis est très répandu, et donc acceptable, ne sont donc pas opportuns. Il faut au contraire cesser cette bienveillance envers cette drogue (et toutes les autres) pour que les plus jeunes n'aient aucun doute au moment où ils y sont confrontés, et la refusent d'un "non" très simple. Il ne faut que ceux qui s'excluent du groupe soient ceux qui refusent de prendre de la drogue. Chacun doit bien comprendre que ce n'est pas quelque chose acceptable pour que la consommation diminue.

vendredi 17 juin 2011

Le démantèlement des grands navires

En 2006, le porte avions français décommissionné Georges Clemenceau partit pour l'Inde afin d'être démantelé. Des associations écologistes s'opposaient à ce démantèlement en Inde, le navire posant des risques pour les travailleurs indiens, les chantiers n'étant pas suffisamment sécurisés. Au terme d'une pantalonnade, le Clemenceau fut rejeté par l'Inde, et il dut revenir en France. Ce démantèlement est en cours depuis 2009 dans un chantier anglais qui a du s'adapter pour l'occasion. L'affaire avait révélé les difficultés européennes à démanteler des navires de taille importante. En 2010, le ministère du développement durable expliquait sur son site "le nombre de chantiers de démantèlement de navires dans l’Union européenne a diminué au cours de ces vingt dernières années, et la capacité est désormais insuffisante pour le recyclage des grands navires marchands battant pavillon des Etats membres de l’Union européenne ou détenues par des sociétés de l’UE."

A la suite de l'affaire du Clemenceau, Matignon avait créé une Mission interministérielle sur le démantèlement des navires civils et militaires en fin de vie (MIDN). Elle avait rendu son rapport en 2007. Le constat de base est assez clair : les navires sont envoyés de plus en plus tard à la démolition, et plus de 90 % du marché se trouve en Asie, une région où les pratiques sont peu respectueuses des normes en la matière. Le Bangladesh en a à lui seul 70 %. Pour des raisons techniques, il est impossible pour les armateurs européens de dépolluer complètement un navire avant de l'envoyer se faire démanteler en Asie. En effet, cela remettrait en cause sa structure, et il doit rester en un seul morceau pour faire le trajet. En outre, ces deux opérations successives (dépollution puis démantèlement) coûtent plus cher que si elles sont intégrées en une seule. Le démantèlement de navire permet d'activer des filières de recyclage, et la revente des métaux est une source de revenus en soi.

Les chantiers européens de démantèlement sont bien adaptés pour les petits navires qui ne pourraient de toute façon tenir la distance jusqu'à l'Asie. Pour les navires de taille importante, le marché ne nécessite pas de subventionner de nouvelles capacités industrielles d'après le rapport de la mission interministérielle. Le secteur privé pourrait parfaitement développer de nouveaux projets industriels européens. En France, nos chantiers de construction de navires sont à la peine, il y a donc des opportunités en termes géographiques (proximité du démantèlement, infrastructures côtières) et d'emploi. Ne serait-ce que pour le démantèlement des navires étatiques, il y a tout une filière à développer rapidement. C'est donc une activité à favoriser sur la côte atlantique française, par le regroupement de groupes européens et la reconversion d'infrastructures.

mercredi 15 juin 2011

La vraie leçon de l'"affaire" Luc Ferry

Plutôt que de balancer des "révélations" très médiatisées sur le plateau de Canal Plus, Luc Ferry aurait mieux fait de la fermer. C'est en tout cas ce qu'il doit se dire actuellement, alors que la presse s'est remise à enquêter sur son cas personnel. On a ainsi découvert qu'il était rémunéré par l'Université Paris VII alors qu'il n'y fait pas cours. A la place, il est président du Conseil d'Analyse de la Société, organisme héritier du Commissariat au Plan. Hors avec la loi récente sur l'autonomie des universités, de telles décharge d'enseignement ou de détachement de personnel doivent faire l'objet de convention. Celle concernant Luc Ferry n'ayant pas été adoptée "pour des raisons administratives", il y avait donc un problème. Matignon a donc décidé de régler la facture en guise de dédommagement.

En tant que tel, cette affaire Luc Ferry n'est pas un scandale. D'un point de vue juridique, il n'y a rien d'illégal, et la question est réglée. Luc Ferry ne peut être accusé de malhonnêteté. Cela dépasse en fait son cas personnel : le problème est plus vaste. C'est celui de tous ces détachements, décharges, délégations ou mises à disposition, qui permettent à des fonctionnaires d'être rémunérés par leur corps d'origine comme s'ils continuaient d'occuper leur poste, alors qu'ils vont en occuper un autre ailleurs. Tous ces régimes sont très élastiques et assez généreux. Luc Ferry a ainsi pu toucher une rémunération supplémentaire de la part du Conseil d'Analyse de la Société, alors qu'il était déjà payé par son université d'origine. Ce matin encore, le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault rappelait sur RTL qu'il était payé par la SNCF au titre d'une délégation, à l'instar de nombreux autres responsables syndicaux issus d'entreprises publiques, alors qu'il travaille à temps complet pour son syndicat.

Tous ces mécanismes sont-ils vraiment utiles ? On peut en douter. D'un point de vue moral, ils ne se justifient pas en tout cas. Si un fonctionnaire doit changer de poste, il faut qu'il y ait le mouvement administratif associé. Luc Ferry aurait du être employé directement par l'organisme qu'il préside, et Bernard Thibault devrait être rémunéré par la CGT. En fin de compte, ce n'est ni plus ni moins qu'un changement d'emploi. Des nouveaux contrats doivent donc être signés. Si des fonctionnaires veulent revenir dans leur administration d'origine après l'avoir quitté, ils peuvent tout à fait signer un nouveau contrat pour occuper le même poste.

Plutôt que de laisser perdurer tous ces dispositifs qui entretiennent l'opacité et les difficultés administratives (comme on l'a vu cette semaine), l'Etat ferait mieux d'y mettre fin. Cela simplifierait considérablement la gestion des ressources humaines de nombreuses administrations. Et puis, pendant qu'on y est, on pourrait également se débarrasser des commissions coûteuses et surabondantes telles que le Conseil d'Analyse de la Société...

mardi 14 juin 2011

Faciliter le don de gamètes

Les couples qui veulent avoir des enfants mais n'y arrivent pas par leurs propres moyens sont bons pour un chemin de croix. L'adoption est un processus extrêmement complexe : les candidats à l'adoption doivent d'abord obtenir l'agrément du président du Conseil Général sur la base de l'avis d'une commission d'agrément, disposant elle-même d'évaluations sociales et psychologiques de la famille accueillante. Autant de bureaucratie alors qu'il s'agit de donner normalement une famille à des orphelins, ce n'est pas forcément nécessaire. Après tout, on ne demande pas d'évaluations sociales et psychologiques des couples qui ont des enfants naturellement. Parfois même, ils ne font pas exprès d'en avoir...

Il y a d'autres solutions en dehors de l'adoption. En France, les mères porteuses sont complètement interdites. Mais même le don de gamètes est compliqué. Chaque année, des milliers de couples souhaitent se tourner vers cette voie, mais la demande est bien plus forte que l'offre. En conséquence, les temps d'attentes peuvent être très longs, et le sont encore plus pour les ovocytes : jusqu'à plusieurs années. Les autorités médicales expliquent que la pénurie de donneurs de sperme et d'ovocyte résulte d'une mauvaise information du public. Néanmoins, les conditions imposées sont très restrictives. Il faut avoir moins de 45 ans pour les hommes, moins de 37 ans pour les femmes, être déjà parent et avoir l'autorisation du conjoint. Sachant que l'âge de la première naissance tend à être de plus en plus tardive, cela réduit naturellement la population concernée.

Bien sûr, introduire une rémunération serait la meilleure façon de motiver les donneurs potentiels. Cela se fait dans d'autres pays, mais c'est en contradiction totale avec la notion de "don" : ce serait alors une vente, et le problème éthique est notable. Seulement, les restrictions aux dons sont loin d'être aussi nécessaires, même sur le plan de l'éthique. Il n'y a pas de raison pour que des couples aient à attendre plusieurs années pour obtenir un don de gamètes, et il n'y a pas de raison non plus pour forcer les donneurs potentiels à être déjà parent. Assouplir ces règles ferait donc des milliers de familles heureuses, et cela, sans rien coûter à personne.

lundi 13 juin 2011

Un ministère des finances européen ?

En recevant le très réputé prix Charlemagne, le gouverneur de la Banque Centrale Européenne Jean-Claude Trichet a plaidé en faveur d'un ministère des finances européen. Avec la monnaie unique, la mauvaise gestion des finances publiques d'un pays de la zone euro a des conséquences pour ses voisins : les déficits publics entraînent la création d'emprunts qui mettent à mal la stabilité de la monnaie. Un ministre des finances européen pourrait alors surveiller les budgets des pays de la zone euro et prendre les décisions pour un pays qui serait gravement en difficulté. Et même avant la création d'un tel ministère, Jean-Claude Trichet considère qu'un tel mécanisme devrait être mis en place. Faire gérer ses finances publiques par quelqu'un d'un autre pays a de quoi faire grincer des dents. Le budget de l'Etat est une décision régalienne, et ce serait certainement vu comme une perte de souveraineté sur un élément déterminant de la vie d'un pays.

En soi, le raisonnement n'est pas absurde. Dès le départ, la création d'une monnaie unique pour plusieurs pays a supposé la création d'une direction commune de la politique économique. C'était la raison d'être du Pacte de Stabilité et de Croissance et des critères de convergence inscrits dans le Traité de Maastricht. Ces critères n'ont pas été assez respectés par le passé, et c'est pourquoi on étudie désormais des manières de le rendre plus contraignant. La Grèce, qui pose tant de problèmes actuellement, n'avait de toute façon rejoint l'eurozone qu'en 2001 (contre 1999 pour les autres pays), et cela en falsifiant ses comptes publics. Un ministre des finances européen n'aurait pas vraiment pu mieux s'en rendre compte que les institutions européennes actuelles.

En l'état, il est peu probable qu'une telle innovation institutionnelle puisse être adoptée ces temps ci. La question de la légitimité d'une telle direction européenne se poserait immédiatement. Dans l'idée de la construction européenne, il n'y a pas de vraie perte de souveraineté, mais seulement celle d'un partage de souverainetés. Nous mettons tous ensemble en place des règles communes, qui s'appliquent à nous tous. Là, ce serait une contrainte supplémentaire, considérée comme venue de l'extérieure, et où le pays "repris en main" n'aurait pas grand chose à dire. D'ores et déjà, la Commission Européenne est critiquée pour n'être pas issue de l'expression démocratique (elle est bien plus choisie par le Conseil Européen que par le Parlement Européen)...

Il est facile de critiquer l'euro et les contraintes qu'il apporte. Mais depuis la première guerre mondiale et la disparition de l'étalon-or, la question des changes est un problème économique majeur pour l'ensemble des pays de la planète. Il suffit de voir l'effet qu'ont les variations de l'euro avec le dollar, ou bien la surévaluation du yuan, pour se convaincre que les taux de change flottants sont difficilement une solution pleinement satisfaisante. L'euro a permis une stabilité totale pour le commerce entre pays qui échangeaient le plus les uns avec les autres qui sont en Europe. Il y a encore des difficultés certaines, mais le progrès est là. Ensuite, il faudrait en effet une véritable politique économique commune. Qu'un ministre des finances européens se transforme en père fouettard est néanmoins probablement contre-productif.

A vrai dire, il n'y a pas vraiment d'exemple d'un tel dispositif. Aux Etats-Unis, l'Etat fédéral n'a même pas à se soucier des finances publiques de chacun de ses Etats alors que ceux-ci sont souvent en déficits et endettés. Il est vrai que l'Etat fédéral américain a une autre envergure financière que les institutions de l'Union Européenne. Quoi qu'il en soit, un nouveau bond fédéral en Europe ne saurait se faire sans l'adhésion de la population : plutôt que de le lui imposer, il faudrait que ce soit elle qui le demande.

dimanche 12 juin 2011

Que faire et avec qui ?

D'ici un an, nous aurons donc un nouveau gouvernement. C'est une échéance importante, qu'il faut préparer. Quelle que soit l'appréciation que l'on ait du gouvernement actuel, en mai prochain, il faudra prendre le relais pour donner un nouvel élan à la France. Alors que les candidats à l'élection présidentielle commencent à se déclarer, chacun peut tenter d'apporter sa pierre à l'édifice. Avant de se poser la question d'une personnalité, quel mouvement d'idées voulons-nous voir au pouvoir ?

Au cours des quatre dernières années, j'ai consacré de nombreux articles de ce blog à l'analyse des courants de la droite et du centre droit français et européens. J'ai déjà expliqué les raisons qui font que ce blog est de droite. Et dans une série d'articles, j'ai exposé mes souhaits quant aux partis pris du mouvement politique que je voudrais voir au pouvoir : un parti populaire, européen, démocratique, pragmatique, protecteur de l'environnement, respectueux d'une certaine éthique, insistant sur le nécessaire respect de la loi, promouvant la valeur du travail et favorable à l'innovation. Chacun jugera de lui-même si un tel parti existe, ou existera d'ici un an...

Quoi qu'il en soit, la question du programme à appliquer se pose également. Pour ma part, depuis très longtemps insatisfait du cours général des choses, j'ai déjà tenté à quelques reprises d'écrire un programme politique, ou tout du moins une liste de mesures que j'estime nécessaires. A chaque fois, je ne suis pas allé bien loin, constatant que les idées ne venaient qu'au fil de l'actualité (qui rappelle régulièrement quels sont les problèmes qui se posent). C'était donc l'un des objectifs de ce blog : en y suivant l'actualité, j'ai accumulé les prises de positions qui, ma foi, peuvent former une ligne d'action utilisable par qui voudra. J'en ferai donc un récapitulatif d'ici une dizaine de jours, et ce sera ma contribution personnelle à la prochaine campagne électorale.

mercredi 8 juin 2011

L'ancrage à gauche de l'écologie

Il a suffi que Nicolas Hulot avoue avoir envisagé ne serait-ce qu'un instant une alliance avec Jean-Louis Borloo, pour qu'il soit assailli d'attaques. "Comment ? Celui qui voudrait être le candidat des écologistes a frayé avec un suppôt de Sarkozy ? Voilà bien la preuve qu'il faut un candidat résolument à gauche. En fait, plus c'est à gauche, mieux c'est..." Avec un tel réflexe, on se rend ô combien les Verts ont peu changé en se renommant "Europe Ecologie". Les nouveaux militants n'y sont acceptés qu'à condition qu'ils respectent la doctrine des Verts, à savoir être à gauche et instrumentaliser les thématiques environnementales. C'est une attitude bien dommageable, et en premier lieu pour l'écologie elle-même. En en faisant un combat partisan, les Verts en éloignent une part importante de la population. Lorsqu'ils ont fait le choix, avec Dominique Voynet, de s'inscrire dans le clivage droite/gauche, ils se sont condamnés à avoir une approche partisane de l'écologie. Une mesure favorable à l'environnement, si elle était prise par la droite, restait fondamentalement mauvaise. Une mesure nuisible à l'environnement, si elle était prise par la gauche, devenait acceptable. Voilà où est passé la crédibilité du mouvement écologiste, qui a coulé lors de la dernière présidentielle.

L'écologie n'est pourtant pas une question fondamentalement de gauche. Elle concerne chacun, et historiquement, la gauche n'a pas un meilleur bilan que la droite en la matière. L'écologie n'est absolument pas incompatible avec la droite : le développement durable peut représenter des opportunités économiques pour le secteur privé, et celui-ci n'a pas intérêt à voir l'environnement se dégrader. En fait, c'est surtout une question de long terme.

Un point qui reste à discuter et la relation entre la mondialisation et la protection de l'environnement. Le libre échange favorise-t-il une course au moins disant environnemental ? En Chine, on s'est montré jusqu'à présent que modérément soucieux vis-à-vis de ces thèmes, les priorités étant ailleurs. Ce pays a des coûts moins élevés sur le marché mondial, les normes environnementales étant moins développées, entre autres raisons. Il y a donc un dumping environnemental qui attire les productions du monde entier. Les conséquences sont elles aussi mondiales : les émissions de CO2 provoquent un effet de serre qui concerne tout le monde, sans distinction de frontières...

Pourtant, il n'y a pas besoin de libre échange pour polluer. L'URSS, bien moins intégrée dans les échanges mondiaux, n'en polluait pas moins l'environnement, étant peu incitée à y faire attention. Le vrai problème est plutôt celui du développement économique : un pays pauvre voit moins l'écologie comme une priorité que les pays développés, c'est plutôt considéré comme un luxe. Et pour ces pays, le libre échange est généralement un moyen de sortir de la pauvreté justement.

L'écologie n'est donc en aucun cas une thématique de gauche plus que de droite. Le vrai rôle des écologistes, c'est de pousser les dirigeants politiques à se saisir davantage de ce thème. C'est exactement ce qu'avait réussi à faire Nicolas Hulot en 2007. En se laissant récupérer par les Verts, dont le message est depuis longtemps définitivement brouillé par l'insistance sur les questions sociales, il perd une partie de son originalité. Si le but est de transformer l'accompagnement vers l'écologie en une intransigeance doctrinaire, le combat pour la défense de l'environnement sera une nouvelle fois perdu.

jeudi 2 juin 2011

La meilleure réforme du quinquennat

Pendant la dernière campagne présidentielle, quand Nicolas Sarkozy présentait son programme, il ne disait pas que le paquet fiscal serait le changement le plus fort qu'il apporterait. Il déclarait par contre que la réforme des universités serait l'œuvre marquante de son quinquennat. Et en cela, il avait raison. Devenue ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse a eu à faire à une forte opposition. Les universités, toujours promptes à se "mobiliser", furent bloquées à plusieurs reprises par des groupuscules d'extrême gauche dénonçant pèle mêle la privatisation des facultés, leur destruction, le manque de moyen, la droite, etc. Derrière cela, il y avait une véritable réforme importante, celle apportant l'autonomie aux universités. C'est ce qui leur manquait pour pouvoir recommencer à avancer. A sa suite, les universités se voient progressivement octroyées le pouvoir de gérer leur finance, leur personnel et leur patrimoine immobilier. C'est un véritable progrès qui permet aux universités d'innover, de prendre des initiatives, et d'être gérées au plus près de leurs projets.

Malgré l'opposition féroce à cette loi au moment de cette loi, elle est désormais saluée presque unanimement. Même les socialistes reconnaissent aujourd'hui le besoin de davantage d'autonomie pour les universités. La question des moyens fut également au centre des débats. Les universités ont souvent été négligées. Pour certains responsables, cette situation était la conséquence de décisions conscientes, car pour beaucoup d'entre eux les universités étaient devenus une terre stérile, où les investissements seraient gâchés à cause de leur mode de gouvernance hérité de mai 68. Nous avons donc maintenant des décennies de retard d'investissement, sensible notamment au niveau du patrimoine immobilier.

Ce point a également été abordé par le gouvernement, à travers le Plan Campus. La vente de 3 % du capital d'EDF a apporté une manne financière utilisée à cet égard. Plutôt que d'être saupoudrée un peu partout, le gouvernement en a profité pour favoriser le rapprochement d'établissements à travers des "campus". Ces milliards d'euros ont donc été attribués à 12 projets emblématiques, ce qui permit par exemple le regroupement de l'université de Strasbourg.

Au delà de ça, l'intégration de la recherche publique française dans l'économie et son financement ont été des buts recherchés par l'établissement d'Instituts de Recherche Technologique. Ces Instituts, encore en cours de constitution, visent à rapprocher recherche publique et recherche privée, à travers des projets de coopération thématiques reposant sur la base des pôles de compétitivité. Grenoble verra ainsi s'ouvrir un Institut de Recherche sur les nanotechnologies, financé tant par le public que le privé. Il devrait y en avoir huit à terme.

On l'a vu, au cours de ces quatre dernières années, Valérie Pécresse n'a pas chômé. Bien sûr, il reste encore des évolutions significatives à accomplir. Il serait par exemple judicieux de mettre en place la sélection à l'entrée des universités. Mais le gouvernement n'aura pas à rougir de son action sur l'enseignement supérieur, il aura donné des bases solides pour son développement. Il ne s'agit pas là de mesures spectacles, les conséquences ne se feront sentir que sur le long terme, d'ici encore plusieurs années. Néanmoins, le terrain est désormais prêt pour qu'il y ait des universités bien plus performantes qu'actuellement.

mercredi 1 juin 2011

L'effet de cliquet

Pour favoriser la croissance économique française, la principale recette de la gauche, et même d'une bonne partie de la droite, c'est de vouloir relancer la consommation. Pour 2012, les socialistes prévoient que la croissance sera relancée par la hausse du pouvoir d'achat qu'ils prévoient. En 2007, le paquet fiscal de Nicolas Sarkozy avait pour but de relancer la croissance par l'augmentation du pouvoir d'achat généré. En 1997, la semaine de 35 heures devait améliorer les conditions de vie des Français, la hausse globale des revenus en découlant devant favoriser la consommation, et donc la croissance. En 1981, la relance socialiste basée sur la stimulation avait été un terrible échec. A la base, tout cela est l'application de principes keynésiens stipulant qu'une relance de la demande permettra le retour de la croissance économique. Par le mécanisme du multiplicateur, de l'argent injecté par l'Etat dans l'économie générera une activité économique supplémentaire bien supérieure au montant initial. L'idée d'une sortie de crise "par le haut" fut au centre du New Deal de Franklin Roosevelt, et s'imposa dans les esprits après la seconde guerre mondiale.

La conclusion qu'en ont tiré bon nombre de responsables politiques est qu'il suffit donc que l'Etat relance la consommation pour permettre l'accélération de la croissance économique. D'une part, les électeurs sont contents parce qu'ils consomment plus, d'autre part, l'ensemble de l'activité économique en profite par répercussion. D'une manière générale, tout ce qui améliorera directement les conditions de vie de la population sera vu de façon positive. Cela se comprend aisément. Mais est-ce que l'effet est aussi positif que ça ?

Les accords de Grenelle de mai 68 prévoyaient ainsi une augmentation forte des salaires (+ 10 %, et + 35 % sur le salaire minimum) et une quatrième semaine de congés payés. Ce choc brutal sur l'économie ne put être absorbé sans une dévaluation importante l'année suivante, et les gains de pouvoir d'achat furent rapidement effacés par l'inflation générée. L'augmentation du nombre de congés aboutit également à une augmentation du coût du travail, et il n'est dès lors pas étonnant qu'après un autre choc de la même nature en 1981, le chômage augmenta fortement.

L'appareil productif français n'est pas en mesure de répondre pleinement à une augmentation de la demande intérieure. En outre, la menace de l'inflation et du chômage pousse les ménages à ne pas consommer inconsidérément, la consommation française étant déjà à un niveau très convenable. Il peut y avoir des cas où une relance économique fondée sur la demande peut être pertinente, mais ce n'est pas vraiment le cas pour la France depuis plus de trente ans. Une bonne partie des "mesures prises" ne font que handicaper l'appareil industriel français sans que cela ait des répercussions en terme de croissance.

Sans tenir compte des conséquences économiques à long terme, les politiciens préfèrent promettre des cadeaux aux électeurs, afin de bénéficier de retombées à court terme. Le plus problématique dans tout cela, c'est qu'il est absolument impossible de revenir en arrière, quelque soit les enjeux. Tout le discours sur les "acquis sociaux" vise à empêcher formellement tout recul, quitte à sacrifier l'avenir. C'est exactement le principe du cliquet, ce mécanisme visant à empêchant tout retour en arrière. Il peut apparaître rassurant, mais se priver de choix reste suicidaire. On l'a vu pendant la réforme des retraites. Il est extrêmement compliqué de revenir à un âge de départ à la retraite de 65 ans (pour l'instant, il n'est qu'à 62). Si François Mitterrand n'avait pas voulu baisser l'âge de départ à la retraite, les problèmes actuels de financement des retraites ne se poseraient pas de la même façon. Il semble impossible de le faire remarquer, l'effet de cliquet bloquant toute adaptation aux changements du monde. Au moins peut-on être plus précautionneux avant d'en rajouter davantage.

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