Réflexions en cours

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vendredi 29 février 2008

Forza Italia

L'Italie retourne à nouveau aux urnes. Deux ans seulement après les dernières élections générales, le système politique italien montre à nouveau son instabilité puisque n'arrivant plus à désigner un gouvernement ayant la confiance des deux chambres. Ce fait est intéressant à remarquer au passage, puisqu'il montre les effets peu attrayants de régimes où les "petits partis" se voient donnés trop d'importance. La leçon devrait être apprise de ce côté-ci des Alpes. Romano Prodi doit donc se retirer, mais il met en avant pour lui succéder le maire de Rome, Walter Veltroni. A la tête d'une coalition de centre gauche, ce dernier affrontera dans les élections d'avril Silvio Berlusconi, l'infatigable homme d'affaires entré en politique il y a de cela une quinzaine d'année. En 2006, Silvio Berlusconi était le Président du Conseil italien sortant, et ne fut battu que de peu. Cette fois-ci les sondages lui sont très favorables, et si sa coalition venait à l'emporter, ce serait la troisièe fois qu'il occuperait le poste de Président du Conseil. Pour beaucoup, il a pourtant une réputation sulfureuse, celle des milliardaires prêt à se servir des chaînes de télévision qu'il possède pour faire sa propagande politique, et de se servir de ses responsabilités politiques pour faire adopter des lois taillées sur mesure pour favoriser sa situation personnelle. A vrai dire, ce sont des faits. Mais si cela suffit à résumer Silvio Berlusconi, comment comprendre alors que les Italiens envisageraient sérieusement de le porter une troisième fois à la tête du pays ?

Le système politique italien force la création de coalitions. En l'occurrence, le parti fondé par Silvio Berlusconi, Forza Italia, a servi de base permettant le rassemblement de la droite et du centre droit italien à ses côtés, Silvio Berlusconi lui même ayant lui même des idées qui forment une synthèse des différents courants. Et de fait, la ligne politique prônée par sa coalition convient bien à de nombreux italiens. Deux partis s'en distinguent suffisamment pour se faire remarquer : l'Alliance Nationale, menée par le conservateur Gianfranco Fini, et la Ligue du Nord, parti nationaliste du nord de l'Italie, dirigée par Umberto Bossi. Pour le reste, Forza Italia rassemble essentiellement des chrétiens démocrates, des libéraux, des conservateurs, et quelques sociaux-démocrates (ou sociaux-libéraux, selon les appelations). La composition de Forza Italia est sensiblement la même que celle de l'ensemble de la droite, et c'est pour cela qu'à partir des années 90 il fut aisé pour les partis chrétiens-démocrates et libéraux de s'allier à lui. Les coalitions ont pu s'appeler Pole des Libertés ou Maison des Libertés, mais toujours est-il que le travail du Cavaliere a permis la montée en puissance d'un camp relativement uni, puissant lors des élections.

Il n'est dès lors pas étonnant qu'aujourd'hui, la fusion de Forza Italia et des autres partis de la coalition (sans la Ligue du Nord, mais avec les conservateurs de l'Alliance Nationale) soit envisagée, dans ce qui serait le "Peuple de la liberté". Le processus est actuellement en cours, et une victoire en avril signerait la réussite de cette fusion. Il est surtout très intéressant de remarquer la similitude de mouvements avec la France, où les partis de droite et de centre droit ont fusionné pour créer un parti se réclamant du peuple, rassemblement de chrétiens démocrates, de libéraux et de conservateurs. Le mouvement français suivait déjà le succès du Parti Populaire espagnol. Ainsi l'on s'aperçoit que dans les principaux pays d'Europe de l'Ouest (la situation allemande n'est pas très éloignée), il y a une certaine similitude de tendances et de pensée politique. Cela peut être caché en Italie aux observateurs par la personnalité de Silvio Berlusconi. Mais au delà des apparences, il y a la force d'un courant de pensée populaire en Italie comme en Europe.

lundi 4 février 2008

La fin de la publicité sur France Télévisions

Le 8 janvier dernier, dans une grande conférence de presse remplaçant la cérémonie des voeux aux journalistes, le Président Nicolas Sarkozy a annoncé la fin de la publicité sur les chaînes de France Télévisions. L'annonce a provoqué la stupeur dans le groupe concerné, tout le monde des médias et de la publicité, et a étonné dans toute la France. Il faut dire que personne ne s'y attendait. Le débat qui était alors en cours concernait surtout la redevance : les producteurs voulaient son augmentation pour que France Télévisions ait davantage de moyens à leur accorder, le groupe voulait soit son augmentation, soit un rallongement de ses écrans publicitaires, et le gouvernement avait pour consigne de ne surtout pas augmenter la redevance. En effet, alors que les questions de pouvoir d'achat sont devenues les plus importantes pour les Français, augmenter une taxe relève de l'absurde.

Ce jour-là donc, non seulement Nicolas Sarkozy n'a pas annoncé la fin de la redevance, mais il a demandé à ce que France Télévisions tire un trait sur ses ressources publicitaires. Le président du groupe, Patrick de Carolis, n'était pas au courant. La régie publicitaire de France Télévisions a appris brutalement qu'elle n'aurait plus de raison d'être l'année suivante. Voilà qui est violent pour des centaines de professionnels. Surtout que le motif de la décision est flou. En fait, elle n'est tout simplement pas justifiée. Qui était dérangé par la publicité sur France Télévisions ? Ceux qui sont énervés par la réclame, et changent de chaîne quand elle passe ? Ceux qui sont contre la société de consommation, et donc contre la publicité qu'ils accusent de manipuler les esprits ? Les premiers subissaient une gène bénigne, les seconds sont au bord de la société par leur jusqu'au-boutisme. La grande majorité de la population s'en moque, voyant la publicité comme un mal nécessaire parfois, ou comme une occasion de distraction d'autres fois.

Si l'ambition est de laisser des moyens constants à France Télévisions, et que la redevance n'est, heureusement, toujours pas augmentée, d'où proviendront les ressources ? D'une taxe sur la publicité allant sur les chaînes privées ? Ce n'est pas sûr que cela suffise pour compenser le manque à gagner du groupe public. On parle de plus en plus d'une taxe sur l'équipement audiovisuel, ou surtout sur la téléphonie. Cette dernière n'a que peu de rapport avec la télévision actuellement, mais comme c'est un secteur en croissance, la classe politique semble croire qu'il n'est pas assez taxé, et qu'il faut donc y remédier. Or les taxes sur ces entreprises seront directement répercutées vers le consommateur, les firmes concernées mettront un point d'honneur à souligner que l'augmentation de leurs tarifs n'est pas de leur fait, mais de la nouvelle taxe gouvernementale. Alors que la publicité permettait de financer des programmes sans que les fonds ne sortent de la poche des Français, le nouveau dispositif les mettra à contribution. La France n'est pourtant pas un pays qui peut se permettre d'accabler encore davantage sa population.

S'il fallait supprimer quelque chose, il aurait fallu commencer par la redevance. Celle-ci mécontente tous les téléspectateurs, qui considéreront toujours que les programmes à l'antenne ne valent pas l'argent qu'ils paient pour en y étant obligés. Il aurait été bien plus audacieux de mettre fin à la redevance qu'à la publicité, si on pouvait vraiment se permettre de supprimer quelque chose. Surtout que les salariés de France Télévisions Publicité sont jetés dans l'abîme par cette décision, alors qu'ils avaient un véritable savoir faire, une fonction dans le monde économique qui n'a, tout d'un coup, plus de raison d'être.

Faite pour marquer les esprits, cette annonce se révèle être un mauvais choix qui ternira le bilan de Nicolas Sarkozy. Celui-ci ne peut même pas dire qu'il le fait car il l'avait promis : rien dans son programme présidentiel ne le laissait le présager. Il n'a clairement pas été élu pour ça, ce n'est pas dans son mandat. Il lui reste pourtant bien des choses prévues à réaliser. Il a tort de vouloir s'éparpiller en en oubliant l'essentiel.

Photo : Reuters
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