Réflexions en cours

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dimanche 28 juin 2009

Transports du Grand Paris : du rêve à la réalité

Le 29 avril dernier, le Président de la République a prononcé un discours portant sur la constitution du "Grand Paris", reprenant ainsi les volontés de Christian Blanc, suite aux travaux de celui-ci et un concours international d'aménagement de la région parisienne. Le projet proposé a encore certains aspects imprécis, mais la vision d'ensemble est gigantesque. Il est question de créer ou de favoriser des pôles spécialisés sur tel ou tel domaine d'expertise, et d'en faire les points saillants de l'aménagement de l'Ile-de-France pour les décennies à venir. Le plus important dans ce schéma, c'est la constitution d'axes de transports pour relier ces différentes zones. A l'heure où la préservation de l'environnement est un enjeu fondamental, cet objectif peut difficilement être accompli avec davantage de routes. La vraie question est donc celle des transports en commun. Or ceux-ci sont déjà surchargés en Ile-de-France, l'urgence est donc déjà de mise.

C'est donc en matière de transports en commun que les annonces de Nicolas Sarkozy sont les plus spectaculaires. Alors que les projets Métrophérique, d'Arc Express ou de Tangentielles peinent à avancer, ils sont refondus dans le projet d'un réseau primaire aussi appelé "grand huit", pour la forme de double boucle autour de la capitale. La longueur de ce réseau est de 130 km, ce qui est énorme, avec comme objectif d'être terminé d'ici une quinzaine d'année, pour un coût de 35 milliards d'euros. Et dans de tels projets, le passé a montré que les retards et les surcoûts peuvent également être considérables. Il serait donc délirant de croire que tout se fera facilement, rapidement et en seul morceau.

Le métro automatique est roi dans ce projet, ce qui est une bonne chose, vu que ce système est bien plus fiable que l'utilisation de conducteurs s'avérant par expérience souvent bloqués dans des conflits sociaux. Mais pour une sécurité optimale, il est préférable que les voies soient souterraines, évitant l'influence de facteurs extérieurs pendant le trajet, comme la météo, les feuilles mortes ou des personnes égarées. Les chantiers prévus sont nombreux, et l'on ne peut attendre que tout soit accompli pour que de nouvelles lignes deviennent opérationnelles. Certains dossiers sont plus urgents que d'autres. La ligne 13 du métro parisien est complètement surchargée, et la jonction de deux voies au nord représente une difficulté considérable. La ligne 14, déjà automatique, pourrait très bien se prolonger dans cette direction. Alors que la région Ile-de-France se perd dans des considérations visant à faire passer la ligne 14 d'un côté puis de l'autre de la ligne 13, il est souhaitable qu'elle en reprenne plus simplement une des deux branches. D'après le projet présidentiel, la ligne 14 reprendrait celle qui va vers Saint Denis, afin de faciliter les trajets vers le pôle d'emplois en développement du Carrefour Pleyel. Cette opération ne nécessiterait que le creusement d'un tunnel de métro entre la gare Saint-Lazare et la station La Fourche. Cela aurait dû être fait depuis longtemps.

A partir de Carrefour Pleyel, une autre proposition pour soulager la ligne 13 est de créer une rocade entre ce quartier et la Défense, facilitant les trajets des habitants de Seine Saint-Denis travaillant dans le quartier d'affaires. Cette rocade aurait bien sûr vocation à s'inscrire dans les lignes circulaires autour de Paris, mais faute de pouvoir attendre, elle pourrait être la première partie ouverte aux voyageurs. Son tracé est susceptible de recueillir un consensus auprès des différents intervenants, tant cela fait longtemps que l'idée est dans l'air. L'arc pourrait ainsi relier le Stade de France, les stations de RER ou de métro Carrefour Pleyel, les Grésillons, Gabriel Péri avant de reprendre un morceau de ligne SNCF de banlieue existant déjà et passant par Bécon les Bruyères et Courbevoie, pour finalement arriver à la Défense.

A l'opposé, dans le sud est de la petite couronne, il est question que la ligne 14 soit également prolongée vers le sud, pour déservir l'aéroport d'Orly. Plutôt que de creuser un long nouveau tunnel, il serait plus simple de raccorder cette ligne à la branche de la ligne 7 qui va vers la station Villejuif - Louis Aragon. Un tramway d'ores et déjà en construction reliera cette station à Rungis et l'aéroport, un projet de métro est donc moins prioritaire pour ces emplacements.

A travers Villejuif, un arc de la circulaire est réclamé depuis des années par les élus de la Seine et Marne. Leur projet Orbival pourrait donc voir le jour, bien qu'en étant un peu plus au sud que le tracé qu'ils envisageaient dans leur croquis. A l'est, le but est de connecter les stations RER des radiales A, C, D et E. Mais la volonté présidentielle d'aller jusqu'à Noisy-le-Grand pour déservir la Cité Descartes projette un tracé éloigné et long, donc difficile à mettre en place. En revanche, à partir de l'ouest, le tracé sera plus simple en se rapprochant de Paris, passant par Arcueil - Cachan, la futur station Bagneux de la ligne 4, Châtillon Montrouge sur la ligne 13, Mairie d'Issy sur la 12, puis Issy Val de Seine sur la C, Marcel Sembat sur la 9, et ainsi de suite par la ligne 10 du métro, la ligne L du Transilien à Saint Cloud, avant éventuellement de rejoindre La Défense à nouveau.

D'autres morceaux de lignes voulues par le projet présidentiel paraissent difficile à mettre en place à moyen terme. Cela dépend en fait de leurs utilités réelles. Ainsi, on peut se demander s'il est bien nécessaire de recréer une ligne supplémentaire entre Roissy, le Bourget et Saint-Denis. Le projet actuel "Charles de Gaulle Express" reliant directement Roissy et le nord de Paris est déjà accueilli fraîchement. Par contre, un transport en commun lourd sur le Plateau de Saclay est indispensable si Christian Blanc arrive à y créer le grand centre universitaire et de recherche de ses rêves, le tronçon Massy-Saclay-Versailles devrait donc figurer parmi les priorités.

Enfin, la ligne A du RER est actuellement à bout de souffle suite à l'afflux de voyageurs. La ligne E devait l'aider en reliant l'Est de Paris à l'Ouest, mais en s'arrêtant à la gare Saint-Lazare, cet objectif est loin d'être accompli. Le projet de relier cette ligne à la Défense, puis à Mantes la Jolie via Poissy a 10 ans de retard, à cause de l'absence de réactivité de la région Ile-de-France. Il est plus que temps de creuser le tunnel permettant ce raccordement. Et ensuite, il sera nécessaire de commencer à étudier le raccordement des gares Montparnasse et Saint-Lazare pour une éventuelle ligne F du RER. Ce serait mieux de le faire avant que nouvelles congestions étouffent à nouveau les transports en commun franciliens.

Tout cela est inscrit dans le discours de Nicolas Sarkozy, mais il n'y a aucun doute sur le fait que tout ne pourra pas être fait à temps. Le rêve est séduisant, mais sa transcription dans la réalité pourrait être bien difficile. C'est pourquoi il faudra toujours garder en tête quels sont les projets prioritaires, et ceux qui relèvent de souhaits d'aménagements à plus long terme.

mardi 23 juin 2009

La réforme du CNRS

Le conseil d'administration du CNRS se réunit cette semaine pour se prononcer sur les réformes initiées par Valérie Pécresse au sein de cet organisme. Cela fait longtemps que celui-ci ne fonctionne plus de façon optimale, alors que ce sont ses présupposés même dont la pertinence peuvent être questionne. Doté d'un budget de plus de deux milliards d'euros, ce qui est colossal en France, le CNRS est devenu une administration énorme à l'efficacité incertaine et au caractère opaque. Son approche est totalement multidisciplinaire, et il y a bien peu de visibilité sur ce qu'il s'y passe précisément. Les chercheurs qui y œuvrent s'évaluent les uns les autres, permettant des situations confortables où les objectifs sont mal définis. D'une manière générale, la direction du CNRS a bien peu de prise sur la vie de celui-ci. Des doutes s'élèvent donc sur la façon dont sont utilisées les sommes dépensées par le CNRS, alors que la recherche française manque de moyens. Si Valérie Pécresse a obtenu des hausses importantes du budget de la recherche publique et des universités, il faudrait également veiller à ce que l'argent d'ores et déjà introduit dans le circuit soit employé au mieux. L'opposition d'une partie des chercheurs qui travaillent au CNRS à une évaluation plus neutre et mieux définie ne favorise pas cela.

En outre, la recherche pratiquée par le CNRS est trop souvent éloignée de certains débouchés qu'elle pourrait avoir. Les liens avec les entreprises restent faibles, et même combattus par certains pour des motifs idéologique (la haine ou le mépris envers le secteur privé, avec lesquels avoir une relation est toujours vécu comme une "privatisation" honnie). Il y a une réticence envers le transfert des connaissances dans les universités, tellement l'enseignement est vécu comme une contrainte pénible. Il serait pourtant utile que l'essentiel du travail de recherche français passe par les universités. Cela permettrait d'optimiser les moyens financiers et de multiplier les résultats provenant de la recherche scientifique. Las ! Tous ces rapprochements possibles sont vus comme autant d'attaques envers l'indépendance de la recherche. Mais est-il vraiment souhaitable que l'argent de la recherche publique soit dépensé sans contrôle, et sans préoccupation quant à ses effets ?

Une réforme du CNRS était donc nécessaire depuis longtemps. Ancien serpent de mer dont l'évocation même faisait l'objet d'une opposition systématique, cette réforme avait même été demandée par la Cour des Comptes. Comme l'amélioration de la recherche française était dans le programme du candidat Nicolas Sarkozy, la ministre Valérie Pécresse a depuis 2007 engagé une réforme basée sur des principes qui vont dans le bon sens.

Il est ainsi question de faire du CNRS une agence de moyens, en rendant aux universités le premier rôle dans l'organisation de la recherche. Par cet apport, le but est d'aider les universités à devenir des pôles de recherche plus importants, alors que le rôle des universités françaises a jusqu'à présent été trop effacé. Les transferts de technologies devraient en être également facilités. Au sein même du CNRS, l'établissement d'une dizaine d'instituts thématiques devrait permettre une clarification sur son action dans les différents domaines de recherches, tout en laissant possible les coopérations interdisciplinaires. L'évaluation se fera de façon plus attentive, sur des critères plus objectifs. Alors forcément, tout changement rencontre une résistance. Mais le conservatisme stérile doit-il vraiment être la voie privilégiée par ceux qui sont censés mettre leurs talents au profit de la découverte et du partage des connaissances ? Certes, cette réforme aurai dû être faite il y a longtemps. C'est pourquoi elle doit être mise en œuvre d'autant plus rapidement.

vendredi 19 juin 2009

A Rome, fais comme les Romains

A chaque fois que Barack Obama essaie de renouer les liens avec le monde musulman, il a une fâcheuse tendance à vouloir le faire sur le dos de l'Europe. Il est évidemment bien compréhensible qu'il promeuve ses intérêts dans ces pays, mais il n'est néanmoins pas nécessaire de nuire pour cela aux pays européens dans cet objectif. Cela avait été le cas lors de son voyage en Turquie, où il avait fortement incité l'Union Européenne à intégrer ce pays asiatique. Ce fut à nouveau le cas lors de son grand discours en Egypte. "Il est important que les pays occidentaux évitent d’empêcher leurs citoyens musulmans de pratiquer leur religion comme ils l’entendent - par exemple en dictant la manière dont une musulmane doit s’habiller. On ne peut pas déguiser l’hostilité à l’égard d’une religion sous le couvert du libéralisme." Tels furent les mots qu'il utilisa. Ce faisant, il a porté un jugement idiot sur laïcité, concept fondateur de la République française, et a surtout montré qu'il ne cherchait pas à comprendre ce qu'il se passait en Europe.

La question du voile islamique, puisque c'est de ça dont il est question, est celle de l'affirmation d'une appartenance religieuse dans la sphère publique. Dans un pays comme la France, si terriblement marqué par les guerres de religions de toutes sortes, une telle affirmation créé un malaise, car elle met en avant l'aspect religieux avant toute chose. Voilà pourquoi une loi a été passée sur le foulard à l'école. On ne peut nier qu'il y a une certaine préoccupation que les religions n'aient pas un rôle envahissant dans les institutions françaises.

Mais ces derniers jours, un autre attribut vestimentaire créé la polémique. A l'initiative d'un député communiste, des dizaines de députés de tous bords se sont prononcés en faveur d'une commission d'enquête sur les tenues cachant intégralement le corps et le visage, soit le niqab et la burqa. Si ces tenues sont d'origine étrangères, elles sont loin d'avoir le même rôle que le simple foulard. Ce dernier peut s'assimiler à une kippa ou à une croix chrétienne, alors qu'une burqa ne permet pas de voir un centimètre carré de peau, elle cherche même à effacer toute distinction entre les personnes, finissant par être un uniforme complètement déshumanisant. Il n'est d'ailleurs plus vraiment question de religion : le Coran n'oblige en rien de porter de telles tenues, qui sont surtout des créations de cultures locales du golfe persique ou de l'Afghanistan.

Le port du niqab ou de la burqa révèle en fait des cultures fondamentalement différentes, où la femme, perçue comme particulièrement inférieure à l'homme, ne se voit pas accorder le moindre droit à l'individualité en dehors de son domicile familial. Lorsque les talibans faisaient porter la burqa aux femmes afghanes, le monde occidental se scandalisait et chercher à les en libérer. Il peut donc sembler ahurissant qu'aujourd'hui dans des pays comme la France, de plus en plus de femmes portent la burqa. Plus qu'une conviction religieuse, le message transmis par ce phénomène est clair : que ce soit par leur propre volonté ou par celle de leur entourage, ces femmes s'inscrivent en dehors de la société française, n'ont pas vocation à en faire partie. Le fait que de telles cultures soient importées en France interpelle. Pourquoi ne pas plutôt essayer de se fondre dans la société, d'être assimilé au reste de la population ?

Que des cultures qui apparaissent comme troublantes pour les occidentaux prédominent dans d'autres pays est une chose, que ces même cultures soient implantés dans les pays occidentaux en est une autre. Dans ce deuxième cas, la population peut souhaiter que chacun se réunisse autour de certaines valeurs fondamentales. Et celles de la France apparaissent comme incompatible avec le port de vêtements aussi déshumanisants.

Il n'est donc pas étonnant que les députés se saisissent de ce problème. L'année dernière déjà, le Conseil d'Etat avait refusé la naturalisation d'une femme portant la burqua, par défaut d'assimilation. "A Rome, fais comme les Romains" dit l'adage. C'est en fait une règle fondamentale au moins pour les valeurs les plus essentielles, qui doit faciliter l'assimilitation de personnes venant de tous les horizons. Bien sûr, interdire le niqab et la burqa ne peut être solution à l'ensemble du problème. Mais leur apparition marque bien un constat d'échec, voué à être remis en cause.

lundi 15 juin 2009

S'opposer pour s'opposer

L'annonce de l'expression du Président de la République devant le Congrès de Versailles a plongé la gauche dans une polémique dont elle est coutumière. Rapidement, des voix se sont exprimées pour appeler au boycott de cette expression. C'est notamment la position des communistes, des Verts et de certains socialistes. D'autres sont restés plus modérés et se sont déclarés prêts à suivre la Constitution. C'est le cas des radicaux de gauche, et des socialistes restants. Ce sont bien ces derniers qui adoptent la meilleure attitude. Ecouter Nicolas Sarkozy ne veut pas dire lui obéir par la suite, et dans une démocratie, il est normal que les différents acteurs politiques parlent et s'écoutent, puisque cela fait partie du débat. Jusqu'à la dernière modification constitutionnelle, l'expression du Président devant le Parlement ne faisait pas partie des traditions politiques françaises. Elle est désormais possible suite à une décision du Congrès. Il est donc logique que ce même Congrès suive ses propre décisions.

En fait, pour les partisans du boycott, l'idée même d'écouter Nicolas Sarkozy est insupportable. Dans leur état d'esprit, tout ce qui ne relève pas de l'opposition systématique relève d'une intolérable compromission avec un pouvoir coupable. Et cette opposition s'exprime dans le fait d'avoir le comportement le moins constructif possible. On en arrive vite à une vision selon laquelle il faut s'opposer pour s'opposer, que c'est là l'unique rôle de la minorité dans le Parlement. Bien sûr, il est normal que la minorité contrôle le travail réalisé par le pouvoir en place et promeuve ses propres idées. Mais ce n'est pas cela qui est à l'oeuvre dans cette affaire. Il est ici question de s'opposer avant même que Nicolas Sarkozy ait pris la parole, avant même que l'on sache ce qu'il va dire. Aucune chance n'est laissée à l'expression, seuls prédominent le rejet et le mépris.

C'est en soi révélateur du manichéisme qui anime une partie de l'échiquier politique. La conviction d'être soi-même toujours systématiquement dans la Vérité pure, et que celui qui pense différemment est coupable de tous les maux est un comportement malheureusement très répandu, qui finit par nuire au débat démocratique et aux institutions. Mais ce complexe de supériorité a un autre effet, que la gauche semble ignorer : pour tous les modérés, y compris bien sûr ceux qui ne sont pas de droite, ces prédispositions au mépris sont ridicules et en disent long sur ceux qui les ont. En adoptant de telles postures, c'est en fait à elle-même que la gauche fait du mal en premier.

samedi 13 juin 2009

Dopage à gogo

L'ancien cycliste Laurent Fignon annonce dans un livre qu'il s'est dopé tout au long de sa carrière, que c'était et reste encore actuellement une pratique généralisée chez l'ensemble des coureurs. Cette déclaration peut surprendre, dans la mesure où le dopage est en temps normal un tabou dans ce milieu. Laurent Fignon, en tant que consultant pour la télévision, a lui-même souvent cherché à écarter d'un revers de main les débats sur le dopage, alors que les affaires n'ont pas manqué au cours de la dernière décennie. Le cycliste professionnel a parfaitement conscience du côté illégal et mal perçue du dopage, et a donc bien intériorisé qu'il fallait se taire ou tenir un discours le condamnant. Dans la pratique néanmoins, l'idée qui semble prédominer est qu'il est forcément nécessaire pour être à armes égales avec les autres coureurs. On se retrouve dans la situation du dilemme du prisonnier élargi à tout un groupe : il suffit qu'une personne se dope pour déculpabiliser toutes les autres.

Ceux qui se font prendre tentent soit de jouer aux étonnés, soit d'expliquer qu'ils ont fait comme tout le monde. C'est notamment le cas de Bernhard Kohl, troisième lors du tours 2008. Il explique aujourd'hui comment il a toujours eu recours au dopage, qu'il n'a fait que l'augmenter au fur et à mesure de sa carrière, et que les autres cyclistes ne peuvent tenir le rythme que grâce à cette aide. Il coopère aujourd'hui avec les autorités. Le fait qu'il ait réussi si longtemps à passer entre les mailles du filet montre que les contrôles ont plutôt tendance à laisser passer les coupables qu'à en créer de toutes pièces. Un coureur qui se révèle être positif sur un test lors d'une compétition longue est généralement dopé de bout en bout, et est contrôlé négatif à plusieurs tests avant d'être pris en faute. Cela explique que le dopage survive, alors que la multiplication des contrôles force les cyclistes à redoubler de prudence dans leurs pratiques.

Si Laurent Fignon peut se permettre de telles déclarations, c'est qu'il fait aujourd'hui face à la maladie. Dans un tel combat, ses anciennes tricheries lui apparaissent probablement comme des événements plus dérisoires. Pendant sa carrière, il avait été contrôlé deux fois positif, alors qu'il aurait dû l'être à chaque fois. A l'approche du Tour de France, le sujet revient immanquablement sur le tapis. L'édition 2009 aura probablement son lot de champions contrôlés positifs. Le public en est conscient, mais continuera de s'intéresser au Tour, ne serait-ce que pour les beaux paysages et l'animation créée par la caravane.

mercredi 10 juin 2009

Après les européennes

Le scrutin de dimanche aura eu des résultats aussi spectaculaires que faiblement représentatifs. Avec seulement 40 % de participation, les européennes confirment le fait qu'elles sont l'échéance électorale qui intéresse le moins la population. En conséquence directe, il serait bien présomptueux de tirer des tendances à long terme sur les positions respectives de telle ou telle force politique. Si les européennes sont importantes au vu du Parlement Européen, en terme de politique politicienne nationale, elles sont même anecdotiques. Les expériences passées le montrent.

En 1994, le Parti Socialiste souffrait une défaite lourde, avec 14 % des suffrages, à deux points seulement des listes des radicaux de gauche emmenés par Bernard Tapie et des villiéristes. A la présidentielle de 1995, Lionel Jospin arrivait au second tour, et tant les radicaux que les souverainistes n'avaient réussi à s'appuyer sur ce succès d'un jour. En 1997, trois ans seulement après ces européennes catastrophiques, le Parti Socialiste remportait les législatives.

En 1999, la liste socialiste fut celle qui remportât le plus de voix, celle conduite par Nicolas Sarkozy terminant à une humiliante troisième place, avec 12 % des suffrages. Le Front National était au plus bas à 5,69 %. Trois ans plus tard, la gauche fut éliminée dès le premier tour de la présidentielle, Jean-Marie Le Pen était au second tour, Jacques Chirac fut finalement réélu, et Nicolas Sarkozy prit son envol en devenant numéro deux du gouvernement.

En 2004, les socialistes triomphèrent à nouveau aux européennes, l'UMP ne recueillant que 16 % des voix. Et ce alors qu'elle avait déjà subi une défaite quasi-généralisée lors des régionales quelques mois auparavant. Cela n'empêcha la droite de gagner la présidentielle de 2007.

Il est donc inutile de projeter les résultats des dernières européennes sur la présidentielle de 2012. Si l'UMP et les Verts ont accompli de très bonnes performances électorales, et que le Modem et le Parti Socialiste sont dans un mauvais état, cela n'augure en rien leurs chances pour l'avenir. Il faut, en fait, analyser ces résultats uniquement en les comparant à ceux des précédentes européennes.

Historiquement, les partis les plus favorisés par les européennes sont ceux qui ont quelque chose à dire sur la construction européenne, en y étant particulièrement favorable ou défavorable. Le scrutin avantageait donc l'UDF et les Verts euro-enthousiastes, ainsi que les souverainistes eurosceptiques. Les résultats des socialistes et de la droite dépendaient davantage de la popularité du gouvernement du moment.

Cette année, le Modem, héritier de l'UDF, a bien peu parlé d'Europe. Ce fut un choix assumé par son dirigeant, François Bayrou, dans sa volonté de se poser comme l'opposant le plus virulent du Chef de l'Etat, oubliant pour ce faire ses anciennes convictions pro-européennes. Cette décision discutable, ainsi que son goût pour la paranoïa ont mal été perçus, d'où un score très faible de cette formation : 8,45 % en 2009 contre 12 % en 2004 et 9,28 % en 1999.

Ce furent les Verts qui bénéficièrent de cette déroute : le charismatique Daniel Cohn-Bendit assuma son positionnement fédéraliste de bout en bout, se concentrant toujours sur les enjeux européens, parvenant même à faire oublier une alliance contre nature avec José Bové. La liste Europe Ecologie attira de nombreux partisans de la construction européenne, rejoignant ceux qui étaient simplement préoccupés par l'environnement. Avec 16,28 % des suffrages, ils obtiennent leur meilleur score national, et l'on peut également constater le score honorable de la liste Alliance Ecologique Indépendante (3,23 %), renforçant l'idée qu'un positionnement écologique moins marqué idéologiquement attire plus facilement. Lorsque c'est Noël Mamère qui est en premier plan, l'idée de l'environnement s'efface derrière l'aigreur partisane de gauche, alors que la protection de la planète concerne tout le monde...

Même en additionnant les scores des listes Debout la République de Nicolas Dupont-Aignan et Libertas de Philippe de Villiers, cela dépasse à peine les 6 %. Les souverainistes restent donc globalement stables par rapport à 2004, bien loin de leurs scores de 1994 et 1999, ne bénéficiant pas d'un quelconque effet "référendum constitutionnel" auquel on aurait pu penser.

Le plus surprenant reste donc la bonne performance de l'UMP et la mauvaise du PS. La situation pouvait être vue comme semblable à celle de 2004, avec une opposition tirant les bénéfices d'un gouvernement peu populaire. Il s'avère néanmoins que l'électorat de droite reste relativement soudé derrière un gouvernement qui a moins peur de faire des réformes difficiles, alors que le Parti Socialiste ne peut plus se contenter d'attendre la défaite du camp d'en face, n'ayant plus aucun argument pour attirer les électeurs.

Si l'opposition systématique et le vote sanction ne sont plus des notions ayant cours, il se pourrait alors que les prochaines régionales se décident au vu des mérites respectifs des différentes listes et des projets proposés. Ce serait une évolution notable et positive.

jeudi 4 juin 2009

François Bayrou prêt à tout

Traditionnellement, les élections européennes étaient favorables pour l'UDF. Les chrétiens démocrates font parti des plus engagés lorsqu'il s'agit de défendre et promouvoir la construction européenne, et ce positionnement clair leur est favorable dans les élections où l'Europe est bien le principal sujet. Que ce soit en 1979, avec Simone Veil, en 1999 ou en 2004, à chaque fois que l'UDF faisait des listes indépendantes, cet engagement fort était revendiqué, et suivi de succès dans les urnes. Mais cette année, ce n'est plus le cas. Le Modem a remplacé l'UDF pour pouvoir organiser le culte de son président, François Bayrou. Le principal but de celui-ci est de se positionner comme le principal opposant au pouvoir en place pour pouvoir en prendre le relais. Les engagements européens sont bien loin. Il faut dire qu'il y a cinq ans, François Bayrou avait voulu faire bande à part au Parlement Européen pour éviter de siéger aux côtés de l'UMP, dont il était pourtant proche des idées sur biens des aspects. Les députés européens de l'UDF avaient donc crée un nouveau groupe, l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe. Cela devait crédibiliser son projet de réorienter son parti vers le concept de "démocrate". Mais hors le parti Italien Le Margherita (qui rejoindra d'ailleurs les socialistes à la prochaine législature), il ne s'est trouvé que des libéraux purs et durs pour l'accompagner.

Voilà donc cinq ans que le groupe qu'il a fondé prend des positions favorables au libéralisme économique, bien loin de celles prises sur la scène politique française. Le fédéralisme est oublié. Lorsqu'il lui est demandé de proposer un candidat alternatif à José-Manuel Barrosso, il en propose deux. L'un étant Mario Monti, ancien commissaire au marché intérieur, partisan de la dérégulation la plus totale et du refus de l'interventionnisme des institutions européennes. Les objectifs de projets politiques communs sont bien loin. Dès lors, il n'était plus étonnant qu'à l'instar de la plupart des autres partis politiques français, le Modem n'ait plus grand chose à dire sur l'Union Européenne à l'occasion de ces élections. La logique voulait que les débats soient recentrés sur le duel personnel dans lequel se considère être François Bayrou face à Nicolas Sarkozy.

Et si jamais le peuple a du mal à suivre face à ce changement d'orientation, à cette trahison envers ses propres idées, eh bien François Bayrou ne comprend pas. Et accuse, tout le monde, à tort et à travers, de tout faire pour l'empêcher sa destinée. Dans son esprit, il ne peut en être autrement. Hier, ce fut donc les sondages qui ont mis sur la sellette, pointés du doigts car faisant le jeu du pouvoir, lorsqu'ils ne sont pas positifs pour le Modem. François Bayrou ne tenait pas de tels propos, lors de la présidentielle de 2007, lorsqu'ils lui étaient largement favorables.

Mais aujourd'hui, les accusations se font plus graves, et d'un niveau effarant. Quand, sur le plateau de l'émission A vous de juger, le candidat vert Daniel Cohn-Bendit lui a dit qu'il ne serai jamais Président de la République, François Bayrou a répliqué en accusant son interlocuteur de pédophile, via la périphrase "je trouve ignoble d'avoir poussé et justifié des actes à l'égard des enfants que je ne peux pas accepter". Ce faisant, il tombe dans l'argumentaire jusqu'à présent réservé au Front National. Pour François Bayrou, tout est bon pour disqualifier un adversaire. Et recourir à une provocation spectaculaire a aussi comme utilité de le remettre au centre des médias. A ce niveau-là, c'est gagné. Mais cela en valait-il vraiment le prix ? Tout est-il possible pour satisfaire son ambition personnelle ? Par son comportement actuel, François Bayrou ne trahit pas seulement ses idéaux européens, mais aussi les principes éthiques qui lui ont certainement été chers un jour.

lundi 1 juin 2009

La Corée du Nord et sa bombe atomique

En l'espace de quelques jours, la Corée du Nord a procédé à un essai nucléaire, au tir de missiles balistiques et a déclaré se considérer en état de guerre avec la Corée du Sud. Il n'est pas encore question d'offensives armées à court terme, mais la Corée du Nord se montre particulièrement belliciste, se croyant, dans un délire nationaliste, capable d'affronter seule le monde entier. Son meilleur allié, la Chine, verrait ces mouvements d'un mauvais oeil. Elle ne fait pourtant pas grand chose pour les en empêcher. Les discussions à six entre les deux Corée, la Chine, la Russie, le Japon et les Etats-Unis sont très erratiques. Il y est surtout question d'aides à la population en échange d'apaisement de la part de la Corée du Nord en matière d'armement nucléaire. Il est pourtant difficile de croire que celle-ci abandonnera volontairement l'idée d'avoir sa propre bombe atomique.

Ces derniers soubresauts seraient la conséquence de l'affaiblissement physique du leader de la Corée du Nord, Kim Jong Il. Encore dépourvu d'héritiers, il chercherait à traverser cette passe politique délicate en montrant ses muscles au reste du monde, dans le but de faire diversion. La Corée du Nord ne peut attaquer la Corée du Sud ou le Japon avec des armes conventionnelles. Ce serait signer sa ruine immédiate : les Etats-Unis sont toujours présent au sud de la frontière, et sont prêts à agir en cas d'agressions dans ce genre. Si Kim Jong Il en prenait l'initiative, il verrait son pays envahi sans grande difficulté, et son règne prendrait fin rapidement. Avec la bombe atomique, la Corée du Nord s'exposerait tout autant, mais pourrait faire plus de dégât de son côté. Le rapport de force lui resterait encore défavorable, ce qui, rationnellement, devrait limiter la menace nord-coréenne en la matière. Mais en apparaissant comme un dictateur à moitié fou, que ce soit vrai ou non, Kim Jong Il montre qu'il est au dessus du sens commun, qu'il sera prêt à la destruction de son pays si cela peut l'arranger personnellement.

Comme dans toute négociation, il essaie de profiter au maximum de sa marge d'incertitude, soit le champ de décisions qu'il peut prendre et qui importe à ses interlocuteurs. La Corée du Nord est tellement faible que seule la bombe atomique peut lui servir de carte à jouer. Et en la montrant par intermittence, il essaie d'en tirer le maximum.

Lors de son dernier voyage en Europe, Barack Obama s'était exprimé en faveur de l'élimination de toutes les armes nucléaires dans le monde. C'est en effet souhaitable. Mais bien peu réaliste. La puissance de la bombe atomique est telle qu'elle déséquilibre les rapports de force. Si un seul pays dans le monde en a la maîtrise, il est potentiellement le maître de la terre entière. C'est ce qui c'est vu lorsque les Etats-Unis ont fait plier le Japon en quelques jours sans envahir ses îles principales. Jusqu'à présent, c'est l'équilibre de la terreur qui a permis d'éviter que des armes nucléaires soient à nouveau utilisées. Leur possession est d'autant plus intéressante qu'elles sont rares, car cela voudra dire que les possibilités de ripostes seront moindres. En conséquence, que ce soient pour les grands pays, les petits pays ou les groupes terroristes, la possession d'armes atomiques restera à jamais une tentation séduisante pour servir ses propres intérêts. Et c'est exactement ce que fait la Corée du Nord.

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