L'ancien cycliste Laurent Fignon annonce dans un livre qu'il s'est dopé tout au long de sa carrière, que c'était et reste encore actuellement une pratique généralisée chez l'ensemble des coureurs. Cette déclaration peut surprendre, dans la mesure où le dopage est en temps normal un tabou dans ce milieu. Laurent Fignon, en tant que consultant pour la télévision, a lui-même souvent cherché à écarter d'un revers de main les débats sur le dopage, alors que les affaires n'ont pas manqué au cours de la dernière décennie. Le cycliste professionnel a parfaitement conscience du côté illégal et mal perçue du dopage, et a donc bien intériorisé qu'il fallait se taire ou tenir un discours le condamnant. Dans la pratique néanmoins, l'idée qui semble prédominer est qu'il est forcément nécessaire pour être à armes égales avec les autres coureurs. On se retrouve dans la situation du dilemme du prisonnier élargi à tout un groupe : il suffit qu'une personne se dope pour déculpabiliser toutes les autres.

Ceux qui se font prendre tentent soit de jouer aux étonnés, soit d'expliquer qu'ils ont fait comme tout le monde. C'est notamment le cas de Bernhard Kohl, troisième lors du tours 2008. Il explique aujourd'hui comment il a toujours eu recours au dopage, qu'il n'a fait que l'augmenter au fur et à mesure de sa carrière, et que les autres cyclistes ne peuvent tenir le rythme que grâce à cette aide. Il coopère aujourd'hui avec les autorités. Le fait qu'il ait réussi si longtemps à passer entre les mailles du filet montre que les contrôles ont plutôt tendance à laisser passer les coupables qu'à en créer de toutes pièces. Un coureur qui se révèle être positif sur un test lors d'une compétition longue est généralement dopé de bout en bout, et est contrôlé négatif à plusieurs tests avant d'être pris en faute. Cela explique que le dopage survive, alors que la multiplication des contrôles force les cyclistes à redoubler de prudence dans leurs pratiques.

Si Laurent Fignon peut se permettre de telles déclarations, c'est qu'il fait aujourd'hui face à la maladie. Dans un tel combat, ses anciennes tricheries lui apparaissent probablement comme des événements plus dérisoires. Pendant sa carrière, il avait été contrôlé deux fois positif, alors qu'il aurait dû l'être à chaque fois. A l'approche du Tour de France, le sujet revient immanquablement sur le tapis. L'édition 2009 aura probablement son lot de champions contrôlés positifs. Le public en est conscient, mais continuera de s'intéresser au Tour, ne serait-ce que pour les beaux paysages et l'animation créée par la caravane.