Réflexions en cours

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vendredi 29 décembre 2006

Les ambitions de Michèle Alliot-Marie

En refusant de briguer l'investiture UMP (ou le "soutien logistique et financier" du parti, comme elle souhaite le désigner), Michèle Alliot-Marie semble renoncer à la présidentielle. Pourtant, elle affirme qu'elle considère toujours une candidature hors parti. Mais si elle n'a pas l'investiture de la droite, cela voudra nécessairement dire que si elle se présente en dehors, il y aura au moins deux candidats qui en seront issus. Pour quelle utilité ? Diviser pour mieux régner ?

Une double candidature de l'UMP est le souhait de Jean-Marie Le Pen, qui table ouvertement sur une élimination de la droite au premier tour de la présidentielle, en comptant gagner l'élection face à Ségolène Royal. Le risque n'est pas mince, et c'est la raison pour laquelle cette candidature de Michèle Alliot-Marie serait jugée sévèrement par la droite, voire par tout à chacun. Surtout que son intervention n'apporte pas grand chose. Les "forums" de l'UMP dont elle avait demandé l'organisation ont montré les différences en fin de compte minces qu'elle avait avec Nicolas Sarkozy. Alors, que reste-t-il qui puisse justifier une candidature de sa part ? Ce n'est donc pas un projet de société fondamentalement différent ou incompatible développé par l'UMP. Une haine personnelle pour Nicolas Sarkozy ? Ce serait plutôt la raison qui motiverait Dominique de Villepin, autre personnalité à croire seule en sa destinée personnelle. Il ne reste plus qu'une ambition personnelle, d'autant plus folle qu'elle se fait sans le soutien de qui que ce soit. Il est en fait peu probable qu'elle se lance en fin de compte dans une candidature solo, mais toute la séquence de ses hésitations sur une éventuelle aventure solitaire et dangereuse laisse une étrange impression. Car si c'est une personne qui a de nombreuses qualités, la façon dont elle est intervenue donne l'image de quelqu'un soucieux avant tout de sa propre personne, à l'ego mal mis en avant. Ce n'est certes pas nouveau en politique, mais là c'est vraiment maladroit et absurde.

jeudi 21 décembre 2006

Le cours du yuan

Les Etats-Unis ne réclament que cela à la Chine : qu'elle réévalue sa monnaie. En effet, lorsque les Etats-Unis connaissent des déficits commerciaux records, ce sont les excédents commerciaux chinois qui explosent. Selon la théorie des marchés, l'ajustement devrait se faire par une baisse du dollar et une hausse du yuan, la monnaie chinoise. Si le dollar est bien orienté à la baisse (par rapport aux autres monnaies comme l'euro), le yuan, lui, ne bouge pas. Car l'Etat chinois aide massivement la stabilité du cours de sa monnaie, alors qu'il devrait augmenter fortement. Ce faisant, elle bénéficie toujours d'un avantage prix pour ses produits, ce qui créé de fait une concurrence commerciale déloyale qui empêche un rééquilibrage des échanges. En effet, si le dollar venait à baisser et le yuan à augmenter, la marchandise chinoise deviendrait moins attractive comparativement parlant. Cela voudrait aussi dire une croissance moins forte pour l'économie chinoise, alors que celle-ci est énorme (plus de 8 % par an depuis des années). En maintenant sa monnaie à un cours artificiel, la Chine joue bien en dehors des règles du commerce mondial.

La Chine, elle, affirme que ce protectionnisme de sa part est parallèle à celui affiché par les pays occidentaux vis-à-vis de sa marchandise. C'est prendre la conséquence pour la cause. En outre, cet argument parait surréaliste quand on sait que la Chine est un pays qui utilise beaucoup le protectionnisme en bonne et due forme pour défendre ses intérêts nationaux. Par exemple, pour s'implanter en Chine, la plupart des entreprises sont obligées d'être acceptées par l'Etat chinois, de faire des joint-ventures avec les entreprises nationales et de faire des transferts de technologie qui creusent leur propre perte. En fait, les termes du contrat sont léonins, et la Chine semble bien décidée à écraser par toute sa taille et sa puissance le commerce occidental. Actuellement, les industriels occidentaux ne voient dans la Chine qu'une possibilité de bas coûts et un gros marché potentiel. Très bientôt, ce sera leur concurrent le plus dangereux, et ce d'autant plus qu'il ne respecte pas les règles. Si la Chine a bien le droit de profiter du commerce mondial, il faut néanmoins veiller à ce que les lois du marché dont elle bénéficie soit aussi appliquée à son désavantage lorsqu'elle est en tort.

vendredi 15 décembre 2006

La parité en politique

Fallait-il une loi pour qu'il y ait la parité entre hommes et femmes dans la vie politique (en fait, qu'il y ait autant d'hommes que de femmes à chaque niveau) ? Non. Il est évidemment nécessaire qu'il n'y ait aucun critère qui soit discriminant à l'un ou l'autre des sexes dans les règles démocratiques, mais faire une loi car un genre est sous représenté, c'est aller bien au-delà.

Pour quelle raison n'y a-t-il pas assez de femmes dans les postes de pouvoir politique ? L'argument le plus entendu est que les politiciens seraient machistes, qu'ils feraient tout pour bloquer l'ascension de femmes qu'ils tiendraient dans leur globalité que pour peu de chose. On ne peut certes pas rejeter en bloc la possibilité de l'existence de machistes dans les partis politiques. Mais dans le jeu démocratique, nul n'est inamovible, personne n'est irremplaçable : si les femmes étaient tenues à l'écart du pouvoir explicitement, elles pourraient à loisir se faire élire directement par le peuple pour renvoyer chez eux de tels indélicats sexistes. En on est quand même pas là. Peut être faut-il se poser une autre question : quelle est la proportion de femmes parmi les adhérents aux partis politiques ? Ce n'est pas la même que celle de la population. En fait, les partis se félicitent du fait qu'actuellement leurs nouveaux adhérents sont moins masculins qu'avant, avec une part d'hommes supérieure à 60 % tout de même. Cela montre qu'il n'y pas autant de femmes que d'hommes qui dès le départ adhèrent à un parti politique. Pourtant, l'adhésion est ouverte à tous, il suffit de faire la démarche. L'explication pourrait se trouver dans l'oeuvre de Pierre Bourdieu : la socialisation des petites filles développerait moins leur goût pour le pouvoir, ce qui donnerait à l'âge adulte un attrait moins prononcé pour les postes à responsabilité en milieux hostile, via une réticence à la confrontation. Dès lors, elles sont moins nombreuses à rechercher le pouvoir en lui-même, surtout que les codes du milieu ont été écrits de façon masculine.

C'est donc un handicap de départ auquel il faut s'attaquer dès son origine, en incitant les filles à prendre part aux responsabilités, en leur faisant comprendre dès leur jeunesse qu'elles ont un rôle à jouer. Elles peuvent prendre conscience de ça plus tard aussi, et si l'on peut se réjouir qu'elles soient de plus en plus nombreuses à s'impliquer dans ces affaires, on regrette toujours qu'elles ne soient pas autant que les hommes à faire la démarche, à faire candidature pour une responsabilité, à prendre les initiatives qui les mettent devant l'affiche... Car sans se leurrer, ce sont là bien les moyens qui permettent d'arriver au pouvoir. Créer une loi pour arriver à un effet équivalent ne fait que créer un doute sur la légitimité d'un ou d'une parvenu(e), alors que sans le résultat ne pouvait être le résultat que de faits d'armes.

Cette vision dure et cynique de la politique peut sembler répulsante, mais il faut bien avouer que c'est celle qui prédomine depuis toujours. Ces règles n'ont pas lieu qu'en politique d'ailleurs, il en va ainsi également dans le monde des affaires. Les femmes sont en effet moins nombreuses à s'engager dans les filières qui permettent d'arriver le plus souvent au sommet des entreprises. En conséquence, là où il y un vrai problème de discrimination, c'est qu'à poste et compétences égaux le salaire ne soit pas le même entre un homme et une femme. Etablir la proportion de femmes dans les directions générales n'est pas suffisant pour établir une discrimination, puisqu'une femme, par les images qu'elle se représente, peut être la première à atténuer ses ambitions. Voilà quel est le domaine sur lequel il faut travailler désormais, maintenant qu'il n'y a plus de règles discriminantes. Il faut autant changer la mentalité de la femme peu ambitieuse que celle de l'homme machiste.

mardi 12 décembre 2006

Israël, puissance nucléaire ?

Lors d'une interview à la chaîne d'information allemande N24, le Premier ministre israélien Ehud Olmert a cité comme exemples de pays qui ont l'arme nucléaire la France, les Etats-Unis, la Russie et Israël. Pour ce dernier pays, cette déclaration est assez surprenante, dans la mesure où l'Etat hébreu n'a jamais reconnu formellement détenir la puissance atomique comme arme stratégique. En tant que Premier ministre, Ehud Olmert est le mieux placé pour savoir si son pays a oui ou non la bombe nucléaire. Et cette interview apparaît alors comme une annonce officielle, un changement par rapport à la situation antérieure, bien que nombreux se doutaient de cet état de fait. Pourtant, une porte-parole israélienne a immédiatement démenti le fait que ce soit une annonce, en décrivant un lapsus dans la bouche d'Ehud Olmert. Puis l'administration israélienne est revenue à sa politique d'ambiguïté, refusant de confirmer ou de démentir la possession de telles armes, se contentant de dire "Israël ne sera pas la première puissance nucléaire de la région".

Ambiguë, certes, mais en même temps très claire. Il n'est en effet pas difficile d'interpréter cette position. Le principal intérêt de posséder la bombe atomique n'est pas son utilisation éventuelle, mais la simple menace qu'elle représente. C'est alors un jeu psychologique : dans une opposition entre un pays qui en dispose et un qui n'en dispose pas, ce dernier se verra systématiquement perdant et craindra de se voir annihilé en cas de guerre. Ce fût le cas du Japon en 1945. Pour écarter cette menace, il cherchera à acquérir lui-même la bombe atomique, pour dissuader son adversaire d'en faire usage, sous peine de connaître le même sort. Israël est un pays qui n'a jamais été accepté de sa région, et l'Iran proclame encore désirer sa destruction complète, tout en cherchant à construire son propre arsenal nucléaire. Il serait naïf pour Israël de croire qu'une telle situation n'arriverait jamais. En tant qu'Etat démocratique et responsable, il est conscient qu'il serait criminel de vouloir régler ses conflits par le feu nucléaire. En outre, si Israël venait à représenter une menace d'annihilation claire pour ses voisins, cela les encouragerait fortement à développer au plus vite leurs propres forces pour rétablir un équilibre, ce qui serait contre productif in fine pour Israël. Mais celui-ci doit être prêt si l'un d'eux prend l'initiative d'acquérir la puissance nucléaire, car le risque d'utilisation n'est pas mince. Les recherches en la matière sont longues, et il faudrait être réactif dans cette situation. La position d'Israël est donc d'être prêt, d'avoir la puissance nucléaire dans une optique défensive, et sa possession sera annoncée en réaction d'une éventuelle annonce d'un Etat voisin d'acquisition de la technologie nucléaire militaire, pour le dissuader de l'utiliser à son encontre. Israël sera donc immédiatement le deuxième pays à être une puissance nucléaire dans la région. Mais dans les faits, Israël l'est depuis longtemps, par mesure de sécurité...

dimanche 10 décembre 2006

La stratégie du miroir

A l'issue des primaires socialistes, Ségolène Royal est désormais la candidate officielle du PS. En obtenant 60 % des voix et sa désignation au premier tour, elle montre une main mise forte sur son parti. Dominique Strauss-Kahn, candidat d'une ligne clairement sociale démocrate finit deuxième, malgré son expérience et sa stature d'homme d'Etat. Ou plutôt du fait de son expérience et de sa stature d'homme d'Etat. Et d'après le traitement que lui réserve Ségolène Royal depuis sa désignation, celle-ci n'a aucune envie de voir son ancien adversaire jouer un quelconque rôle dans sa campagne présidentielle, ne souhaitant que le marginaliser. Même sort en vue d'ailleurs pour le troisième, Laurent Fabius, tenant d'une ligne très à gauche au sein du PS. Seul ténor socialiste à trouver grâce aux yeux de Ségolène Royal : Jack Lang, qui a eu le mérite de mettre fin à sa propre candidature prématurément après avoir dit qu'il irait jusqu'au bout, de l'avoir rallié après avoir écrit un livre virulent envers la candidate, et de lui promettre une nouvelle crédibilité sur le plan international contre l'obtention d'un prestigieux ministère.

Mais alors, si Ségolène Royal n'est ni vraiment à gauche, ni sociale démocrate, qu'est-elle ? C'est bien simple : elle de votre avis. Tout son discours repose sur la "démocratie participative", qui suppose que les milieux politiques doivent se contenter d'écouter les demandes du peuple et de les exécuter, partant du principe que les citoyens sont les meilleurs experts de ce qu'ils vivent. Dans ce cas, pourquoi il y a-t-il des "personnes ressources" dans son équipe, qui jouent le même rôle que les experts traditionnels ? Ceux-ci doivent certes avoir moins d'importance au sein de cette campagne que dans les autres. Car toute la stratégie de Ségolène Royal consiste à faire croire aux gens qu'elle est comme eux et qu'elle pense la même chose qu'eux. Cela s'applique à tous ses auditoires : si la méthode connaît pour l'instant un certain succès auprès des citoyens français, elle est appliquée avec moins de bonheur à l'étranger. Ainsi, lors de sa récente visite au Proche-Orient, Ségolène Royal s'est contentée de rendre visite à tous les intervenants sans distinction de prise de position pour affirmer son accord avec eux. Justifiant les survols des forces françaises au Liban par Tsahal et demandant à la fois leur arrêt, elle n'a pas hésité à se montrer parfaitement contradictoire dans une région où la subtilité est de mise. Sa volonté d'apparaître d'accord avec tout le monde est même allée jusqu'à approuver les paroles d'un député du Hezbollah, notamment lorsque celui-ci évoquait les Etats-Unis d'après elle, alors que celui-ci venait de les comparer ainsi qu'Israël à des nazis. Il lui fallut 24 heures pour comprendre ce qu'elle avait dit.

Se trouve ainsi illustrée ce que l'on peut appeler la stratégie du miroir. Faute de fond, elle doit apparaître comme une espèce de pâte à modeler informe mais de belle couleur, dont chacun croit qu'elle deviendra ce qu'il souhaite. En se reconnaissant en elle, ses partisans ne font que voir un miroir qui reflètera toutes les images, même les plus antinomiques. Il y a ainsi une tromperie, puisque si elle reflète autant de visages que ceux qui la regardent, elle sera bien obligée de n'en garder qu'un en cas de réussite électorale, décevant tous les autres qui avaient mal cru trouver quelqu'un à leur goût. A moins évidemment qu'en gardant cette posture, la France ait le droit de cinq années de présidence informe. Mais si la stratégie est vouée en cas d'échec si l'on dépasse le seul cadre de l'élection, elle connaît indéniablement un certain succès actuellement. Si son élection n'est certainement pas souhaitable, le risque est fort néanmoins qu'elle se réalise. Cela ne doit en aucun cas sous-estimé. Et ce d'autant plus que cette stratégie lui permet également de repousser des critiques légitimes. Ainsi, ses concurrents à l'investiture socialiste ont découvert qu'ils ne pouvaient mettre en exergue le fait qu'elle soit incompétente : ceux qui se reconnaissaient en elle considéraient du même coup que c'était eux aussi qui étaient dépréciés. Il faudra donc bien démontrer que cette posture de reflet est tout à fait artificielle pour lutter efficacement contre la candidate socialiste.

Remarquons tout de même que si Ségolène Royal a tendance à être d'accord avec tout le monde, il est une catégorie qui fait exception : ses opposants politiques. Que ce soit au sein de la droite, à qui elle refuse de parler, ou bien au sein de son propre parti, comme ses concurrents à l'investiture socialiste ont découvert sa rancune tenace, conséquence du fait d'avoir osé s'opposer à elle. Dès lors, c'est bien sur la personnalité de la candidate que l'on peut se poser la question. Car si elle se montre comme l'apôtre de la démocratie participative, elle refuse obstinément les critiques et les objections, aussi légitimes et constructives soient-elles. Ségolène Royal ne sait pas où elle va, mais elle y va tête baissée. Et si sa stratégie du miroir peut se montrer efficace électoralement parlant, on ne peut que la craindre pour l'avenir de la France.

samedi 9 décembre 2006

Destination Mars, étape sur la Lune

Pour une fois, pensons à très long terme. En décennies, ou même en siècles. Dans le futur lointain, il faut le reconnaître, on aura déjà de la chance si l'humanité subsiste dans une biosphère saine, vu les efforts qui restent à accomplir en matière de sauvegarde de l'environnement. Mais prenons comme hypothèse que ce sera le cas, grâce à la raison de chacun et aux progrès technologiques. Dans ce cas, on peut penser que le genre humain continuera à croître, et que la Terre se fera bien petite pour autant de monde. Et nous regarderons en direction des étoiles, songeurs. Blaise Pascal se disait effrayés par les deux infinis, l'infiniment petit d'une part, l'infiniment grand d'autre part. Pour ce dernier, il reste un vertige à imaginer la taille de l'univers, pour ce qu'on en connaît. Et se forme alors l'envie d'explorer, de découvrir, de conquérir ce qui se trouve en dehors de notre planète. Plus de trente ans après la dernière expédition sur la Lune, la Nasa vient d'annoncer récemment la reprise de voyages en direction du satellite, pour y former une base sur le pôle sud. Ce serait alors un premier jalon avant d'entreprendre une expédition humaine sur Mars. Nous y avons déjà envoyé Pathfinder, un robot, pour tâter le terrain de prêt. Assurer un aller-retour d'humains sur la planète rouge tout en garantissant leur survie est certes une autre paire de manches, mais Mars n'est pas si loin que ça, et à l'échelle d'une vie on peut espérer solidement que cet objectif soit réalisé.

Mais à très long terme, on peut vouloir davantage que de rendre de simples visites aux astres, et l'on pourrait être tenté de vouloir y rester. Sur Mars, cela passerait d'abord par la constitution de bases, comme celles que l'on va installer sur la Lune. Mais l'idéal serait d'en faire une deuxième Terre, pour pouvoir y vivre à l'air libre. Gros problème : l'atmosphère martienne est loin d'être hospitalière, c'est le moins que l'on puisse dire. De ce fait, il y aura beaucoup de choses à changer : que l'atmosphère soit respirable donc, qu'il y ait de l'eau liquide, de la terre fertile, une gravité semblable à celle terrestre, un climat tenable au moins en certains endroits... Il est alors évident que tout ce gigantesque travail de terraformation prendrait des décennies, et même des siècles. Raison de plus pour commencer au plus tôt. Pour l'instant, l'heure est à la recherche. Evidemment, la recherche publique doit d'abord se concentrer sur des problèmes urgents et concrets, comme la santé et l'énergie. Mais la conquête spatiale peut venir ensuite, surtout que la recherche qui est menée en sa faveur peut avoir des retombées positives en matières d'innovations en terme de produits. La terraformation peut également être vu comme un moyen de remodeler un environnement hostile, ce qui pourrait faire de la Terre une planète plus accueillante pour la vie, via une meilleure protection de son atmosphère par exemple. S'il n'est pas à strictement parler prioritaire, l'effort fait vis-à-vis de la conquête spatiale au sens large du terme doit être pris en considération, afin de ne pas risquer que la question devienne urgente, sous-entendant qu'il serait trop tard.

Evidemment, aujourd'hui, le thème apparaît farfelu. Mais les nombreux progrès que nous avons enregistrés en la matière jusqu'à présent doivent nous encourager à persévérer, pour que l'effort ne soit pas interrompu.

jeudi 7 décembre 2006

Iraq Study Group : le désaveu

La violence règne en Irak, et lorsque ce ne sont pas les militaires occidentaux qui sont la cible de terroristes, c'est la population civile qui est attaquée dans le cadre d'une guerre civile qui commence juste à dire son nom. Chaos est le mot qui semble le mieux décrire la situation irakienne actuelle, et fiasco est celui le plus apte à caractériser le résultat de l'intervention américaine dans ce pays. Il est d'ailleurs assez troublant de constater les similitudes qui existent entre l'Irak d'aujourd'hui et le Vietnam du début des années 70, la question de l'opportunité du maintien des troupes américaines se posant presque dans les mêmes termes. Il suffit de lire les archives en ligne du magazine Time pour s'en rendre compte. La situation semble si critique que même certains anciens faucons expriment publiquement leurs doutes sur ce qu'il s'est fait là bas. Ainsi, Richard Perle, considéré comme l'un des plus grands faucons américains ayant poussé à l'invasion de l'Irak, déclare désormais que s'il avait su ce qu'il se passerait, il aurait été contre, et met en cause l'administration Bush pour le mauvais déroulement des événements, oubliant au passage de faire sa propre autocritique.

La situation n'est plus vraiment tenable, et si les Républicains avaient réussi à confiner ce débat lors des dernières élections présidentielles, il était au coeur des dernières élections de mi-mandat. La défaite importante subie par les Républicains confirme le fait que les Américains voient désormais la guerre en Irak comme une préoccupation majeure, et on ainsi signifié à George Bush qu'ils n'entendaient plus que l'administration se contente de "garder le cap" comme elle se contentait de le faire, mais souhaitaient bien qu'une nouvelle direction soit donnée à cet engagement, afin de sortir de ce bourbier. Pour cela il faut déjà reconnaître la gravité de la situation. Or George Bush et son équipe avaient une vision adoucie, voire euphorique des événements, et se contentaient de retenir les points positifs et les améliorations tout en ayant une lecture idéologique de la situation, la même idéologie que celle qui les avait amenés à la guerre, et qui se révélait assez éloignée de la réalité. Le fait de devoir faire avec un Congrès démocrate les a forcés à prendre en compte de nouvelles vues et à prendre au sérieux les faits. Ainsi, Donald Rumsfeld, l'un des principaux artisans de cette guerre, a été contraint de démissionner. Son successeur, Robert Gates, admet ne pas croire que la guerre est actuellement en passe d'être gagnée. Et la commission bipartisane formée au printemps dernier pour fournir des solutions se retrouve au centre de la scène.

L'Iraq Study Group, présidée par le Républicain James Baker et le Démocrate Lee H. Hamilton, fournit dans son rapport à la fois un constat que des préconisations. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le constat est violent, bien éloigné de la situation optimiste décrite par l'administration Bush. En ligne de mire, l'effondrement de ce qu'il reste de l'Etat irakien, une catastrophe humanitaire, l'intervention de pays voisins, une guerre civile totale, l'utilisation de ce pays comme base pour Al Qaeda qui aurait remporté la bataille d'opinions, et évidemment une perte d'influence des Etats-Unis. Ce devrait être le pire cauchemar de l'héritage que peut donner un mauvais Président américain. Les préconisations sont elles aussi bien éloignées de ce que l'administration Bush s'est déclarée prêt à faire jusqu'à présent. Si ce sont des mesures très forte, la commission estime néanmoins que même en les adoptant il n'est pas sûr que l'on puisse se sortir d'une telle situation. En fait, bien que les raisons d'entrer en guerre ne soient pas invoquées, on peut lire en filigrane dans ce constat et ces préconisations un désaveu complet de la politique étrangère de George Bush. Dès le constat en fait, on comprend que l'optimisme affiché par celui-ci quant à la possibilité à remporter une guerre facilement avec l'appui de la population était totalement illusoire. C'était pourtant l'un des plus grands arguments à l'entrée en guerre (pour régler le problème des armes de destruction massive qui se sont révélées inexistantes), et les Républicains ont tenté de maintenir l'artifice jusqu'à présent. Ensuite, chacune des préconisations est une rupture par rapport à la politique existante, faisant comprendre que celle-ci était inappropriée.

La commission suggère ainsi une forte concertation avec tous les voisins de l'Irak pour calmer la situation géopolitique du pays. Cela change, déjà car les équipes de George Bush n'ont pas toujours été de grands adeptes de la concertation. Ensuite, la perspective de demander des faveurs à des pays hostiles comme la Syrie ou l'Iran montre à quel point on est loin de l'effet domino positif qu'était censé produire l'introduction d'une démocratie au Moyen Orient. En fait, il semble surtout que l'intervention en Irak affaiblit le camp de la démocratie plus qu'autre chose... Le processus de paix entre Israël et ses voisins doit être relancé selon le rapport, ce qui rappelle que rien n'a vraiment été tenté depuis Bill Clinton dans la région, notamment vu la lecture binaire du conflit que semble en faire George Bush. La commission Baker-Hamilton appuie fortement sur la nécessité d'engager un retrait des forces armées américaines, pour laisser l'initiative aux forces irakiennes fraîchement crées. Pour l'instant, elles sont encore minées par les divisions internes, reproduisant les conflits entre groupes religieux. C'est là la décision de Donald Rumsfeld de dissoudre l'armée irakienne existant sous Saddam Hussein qui est mise au pilori : le fait d'en recréer une ex-nihilo avec des cadres peu solides favorise des forces faibles. Le rapport insiste néanmoins sur la nécessité pour les Irakiens de se prendre en main, ce qui laisse quand même une étrange impression de laisser aux hôtes le soin de régler les difficultés que les visiteurs ont créées en s'invitant. Mais il faut rester pragmatique, et il est vrai que l'on peut douter que les Américains puissent régler quoi que ce soit avec leur armée aujourd'hui, c'est en fait plutôt contre productif. Les forces américaines ainsi libérées pourraient aussi apporter des renforts en Afghanistan, où l'intervention était bien plus légitime. Le retrait américain apparaîtrait alors comme d'autant plus rapide que le gouvernement irakien continuerait à ne pas assumer ses responsabilités en s'enfferrant dans de vains conflits ethniques et religieux.

En somme, le rapport se veut réaliste dans la mesure où les Etats-Unis se voient obligés de sortir d'une situation déplorable qu'ils ont créée, mais ils ne peuvent revenir en arrière. Il sera en particulier extrêmement difficile pour George Bush d'organiser lui-même le retrait de ses troupes en 2008, car ce serait reconnaître qu'il avait tort sur toute la ligne. Ne nous y trompons pas, l'Histoire jugera très sévèrement cette intervention, et il est bien possible que George Bush apparaisse à l'avenir comme le Président américain ayant eu les actions les plus néfastes en matière de politique étrangère de l'Histoire de son pays. Le fait que ce soit James Baker, un ancien Secrétaire d'Etat de son père, qui soit obligé de le sortir de là, fait apparaître encore plus clairement la gravité de la situation. Avec la moitié des membres de cette commission provenant de son propre camp, George Bush ne pourra plus balayer les critiques d'un revers de main. On peut même sentir une certaine nécessité morale pour George Bush à appliquer ces recommandations, si désagréables soient-elles pour lui. Ses deux dernières années à passer à la Maison Blanche seront certainement dures à vivre pour lui.

lundi 4 décembre 2006

Mieux enseigner

La vidéo cachée de Ségolène Royal sur les professeurs avait remis temporairement (et bien malgré eux) ceux-ci sur le devant de la scène. Il reste au moins la certitude que l'Education est un thème qui ne devra pas être négligé dans la campagne électorale qui s'engage. Les enseignants se disent souvent désemparés face à des élèves difficiles, une hiérarchie incompréhensible, des parents trop ou pas assez présents, et surtout ce qu'ils ressentent comme un manque de respect généralisé vis-à-vis de leur catégorie. De par leur nombre, ils sont connus : tout le monde en a eu lors de ses études, et on les rencontre à nouveau lors de la scolarité des enfants. De ce fait, leur travail est constamment évalué, à l'aune du souvenir qu'on en a, ou de ce qu'ils font avec les élèves actuels. Les enseignants vivent très mal les critiques que peuvent leur faire les parents d'élèves, elles leur donnent l'impression d'être déjugés dans le travail qu'ils font. Ils disent aussi se sentir seuls dans l'exercice de leur responsabilité. C'est aussi parce qu'ils vivent mal aussi les critiques que peuvent leur faire leurs collègues, et qu'ils n'osent pas demander conseil auprès d'eux, de peur de passer pour quelqu'un qui n'y arrive pas. Ils se sentent donc désemparés, en étant pourtant sûrs de la qualité de leur travail. Ainsi, lorsque l'on parle de réformes ou d'idées nouvelles pour modifier les conditions d'enseignement, ils y réagissent souvent de façon hostile, en considérant qu'ils défendent ainsi leur profession.

Ils seraient alors les seuls à être parfaits, au milieu du chaos de l'Education Nationale ? Comment vouloir que les choses changent, sans changer d'éléments précis ? Au moins peut-on reconnaître que tous les professeurs ne sont pas tous individuellement des être idéaux et parfaits. Par expérience, on peut penser qu'il y a grossièrement dans ce corps un tiers de professeurs admirables, excellents pédagogues, des hommes et des femmes qui s'engagent sans compter dans leur tâche et qui correspondent à la description du professeur socle de la République. Grossièrement également, il y a un tiers de professeurs honnêtes, qui font assez bien leur métier, et qui contribuent efficacement à l'éducation des jeunes Français. Mais il reste aussi un tiers de professeurs vraiment dépassés, avec ou sans le souci du métier, qui apportent trop peu à leurs élèves. Il faut le reconnaître, car les réalités des enseignants ne sont pas toutes les mêmes.

On peut penser à plusieurs thèmes pour améliorer le fonctionnement de l'Education Nationale. Pour commencer, tous les jeunes professeurs mettent en cause de façon unanime leur formation, leur passage à l'IUFM ne le préparant pas de façon efficace à leur métier. La faute en revient au pédagogisme de façon théorique plutôt que pratique. Avec les cours expliquant comment apprendre aux élèves telle ou telle matière, doivent aussi figurer de façon générale "comment apprendre aux élèves", ou plus crûment, comment tenir et gérer une classe. Lorsque l'on apprend que ceux qui donnent des cours en IUFM n'ont parfois jamais eu d'expérience concrète d'enseignement, on ne peut qu'être effrayé sur la faillite de cette institution.

La formation ne doit d'ailleurs pas être uniquement une étape de début de carrière pour les professeurs : celle-ci doit se faire tout au long des années de façon continue, mais évidemment en dehors des périodes de cours. Car l'absentéisme est déjà une difficulté en soi de l'Education Nationale, particulièrement dans le secondaire. A ce titre, les remplacements au sein d'un même établissement initiés par Gilles de Robien vont dans le bon sens, et mériteraient d'être davantage acceptés par le corps enseignant. Mais les professeurs craignent souvent que leur classe soit prise par un autre enseignant, encore une fois de peur de la comparaison, du jugement. Celui-ci ne doit pourtant pas être redouté, vu que cela permet l'amélioration.

De même, les relations avec les parents d'élève ne gagnent pas à être tendues. Les professeurs se plaignent de devoir régler en classe les difficultés des familles, et de devoir apprendre aux élèves ce que les parents ne leur apprennent pas malgré leur rôle. Plutôt qu'une concurrence, n'est-ce pas une collaboration qui devrait avoir lieu ? En fait, les enseignants se plaignent également d'avoir des difficultés à rencontrer les parents d'élèves en difficulté. Et il est vrai que les premiers n'ont pas à assumer seuls toutes les charges de ces derniers.

Enfin, et surtout, il est vraiment souhaitable que les professeurs soient évalués plus souvent. Leur supérieur hiérarchique étant justement l'inspecteur d'académie, et non le directeur/proviseur/principal de l'établissement où ils enseignent. IL est donc sain qu'ils voient leur hiérarchie directement régulièrement. Cela permet de constater un travail bien fait, ce qui mène alors à des augmentations de salaire plus légitimes que la simple ancienneté. Cela permet également de recadrer un travail qui ne va pas. A ce titre, pour que le cours auquel assiste l'inspecteur soit représentatif, il convient de réhabiliter l'inspection surprise. En effet, aujourd'hui, les inspections étant planifiées et communiquées à l'avance, les cours concernés sont préparés d'une façon différente, et ils s'adressent alors davantage à l'inspecteur qu'aux élèves, ou en tous cas ils ne se déroulent pas de façon ordinaire. Des inspections plus fréquentes et non planifiées sont donc souhaitables pour coller au plus près des différentes réalités des enseignants. Et tout cela ne peut que favoriser un meilleur enseignement.

vendredi 1 décembre 2006

Les droits de succession

Il est une mesure à laquelle Nicolas Sarkozy tient particulièrement : l'allègement voire la suppression des droits de succession au sein de la famille proche. Son raisonnement est le suivant :"Il est légitime de vouloir léguer les fruits d'une vie de travail à ses enfants". Certes. Mais une telle mesure ne se justifie pas vraiment économiquement parlant, et est même contraire au principe d'égalité des chances. C'est la raison pour laquelle elle n'est pas souhaitable.

Comme lui faisait remarquer l'économiste Elie Cohen sur le plateau d'Arlette Chabot de France 2, la situation financière de la France est exsangue. Son déficit entre à peine dans les limites du Traité de Maastricht, et sa dette est énorme, ce qui fait payer une charge d'intérêts lourde chaque année aux Français. Le budget est le levier d'action principal d'un gouvernement, il convient donc d'être particulièrement précautionneux sur le choix des priorités à appliquer. Dès lors, il est difficile d'affirmer qu'une telle suppression de droits de succession soit particulièrement utile d'un point de vue économique. En effet, la théorie keynésienne affirme qu'une politique de relance de la croissance peut être amené par une redistribution des revenus vers ceux qui ont la propension à consommer la plus forte. Une baisse des droits de succession pourrait selon ce principe augmenter le revenu disponible à la consommation des héritiers. Mais ceux-ci ont-ils vraiment une propension à consommer forte ? On peut en douter. La théorie du cycle de vie des ménages de Franco Modigliani (prix Nobel d'économie en 1985) affirme qu'un ménage n'a pas les mêmes niveaux d'épargne ou de consommation selon son âge. Cela se comprend aisément : lorsqu'il entre dans la vie active, qu'il s'installe, donne naissance à des enfants et acquiert un logement, un ménage s'endette fortement alors que ses revenus sont souvent faibles. Par la suite, au fil des années, leur consommation augmente moins que leurs revenus, et leurs emprunts se remboursent, tant et si bien qu'ils commencent à épargner en prévision de leur retraite. Une fois celle-ci arrivée, les ménages épargneront moins vu une baisse de leurs revenus, mais le patrimoine est souvent déjà constitué sous la forme d'un logement et de biens d'équipement.

Avec l'allongement de l'espérance de vie, les décès arrivent de plus en plus tard, et c'est heureux. Mais il se trouve que les enfants héritent de leurs parents dans la période de leur vie où ils n'ont pas la plus grande utilité de cet héritage. Au moment de l'héritage, les descendants sont en effet à la fin de leur vie active, ou bien même déjà en retraite. Ces transmissions de patrimoine seraient plus utiles lorsque les enfants sont encore en période de vache maigre, qu'ils ont du mal à s'en sortir, et qu'ils ont en conséquence une propension à consommer très forte : une très grande partie de leurs revenus sera transformé en consommation, ce qui devrait bénéficier à la croissance économique. Evidemment, lorsque leurs enfants débutent dans la vie active, les parents ont besoin de cette épargne pour préparer leur retraite. Le mécanisme qui aurait le plus de sens serait alors une transmission des grands-parents vers leurs petits enfants, que ce soit par un don de leur vivant, ou de moindres droits de succession si l'héritage est transmis en "sautant" le chaînon des enfants au moins en partie pour arriver directement aux petits enfants qui eux commencent leur vie active. Quoi qu'il en soit, il faut bien rester conscient qu'il faut être particulièrement sourcilleux sur les baisses d'impôts à accorder, et d'autres champs sont aussi à explorer : la défiscalisation des énergies propres peut être coûteuse, mais très utile pour la société.

Car il reste un problème moral dans la transmission de l'héritage : les droits de succession permettent une certaine redistribution des revenus, ou des patrimoines. Tout le monde n'a pas la chance d'avoir des parents ou même des grands-parents qui ont bien réussi dans la vie, et si le succès n'est en aucun cas quelque chose dont il faut avoir honte lorsqu'on a travaillé dur pour l'obtenir, profiter de celui de son ascendance sans rien y avoir fait pour y contribuer est moins légitime. C'est même en forte contradiction avec le principe d'égalité des chances qui doit être la principale égalité à rechercher en matière sociale. Les mécanismes de transmission des capitaux culturels et sociaux sont déjà suffisamment déséquilibrés au sein de la société française pour que s'y rajoutent des transmissions sans frein des capitaux économiques, sans aucune égalité ni même équité. Ce serait encore une fois faire gagner qui n'ont que le mérite d'être bien né. Alors certes, chaque parent souhaite que ses enfants aient une meilleure vie que lui. Mais le meilleur moyen pour y arriver serait de les encourager à créer eux-mêmes les conditions de leur propre succès.

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