En politique, être ambitieux est souvent en atout. Au moins pour le bien de sa carrière, c'est même une nécessité. Mais est-ce pour autant quelque chose de souhaitable ? La réponse est simple : il faut que l'ambition serve des convictions, et pas seulement une progression personnelle. Vouloir grimper les échelons sans vouloir par la même occasion servir l'intérêt général rend l'exercice vain, et celui qui l'accomplit méprisable. En affichant depuis longtemps son désir de devenir Président de la République, Nicolas Sarkozy a parfaitement assumé son ambition, et s'est ainsi exonéré de l'accusation d'hypocrisie. Jean-François Copé croit suivre cette démarche, en débordant à son tour de certitudes quant à son propre avenir présidentiel, n'hésitant pas à en parler dès maintenant. Certes, à ce niveau là au moins, on ne peut pas dire qu'il fasse de la langue de bois. Mais lorsque son action d'aujourd'hui n'est faite que dans un seul but, c'est à dire son propre avancement, en en oubliant l'intérêt de la France, il y a un vrai problème.

Jean-François Copé est devenu un symbole lorsqu'il décida d'entrer dans un cabinet d'avocats d'affaires. Il est désormais le symbole du politicien qui cumule les rôles jusqu'à l'excès. Député à l'Assemblée Nationale, il y a un rôle important en étant président de groupe (celui de l'UMP en l'occurrence). Il est aussi maire d'une ville d'une taille conséquente, Meaux. Et il est aussi président de communauté d'agglomération. Et il faut rajouter à cela le fait qu'il est conseiller régional (depuis sa campagne ratée pour les régionales en Ile de France en 2004). En sachant qu'il a aussi une famille, on se rend facilement compte qu'il n'a techniquement pas le temps pour bien assumer tous ces rôles. Et qu'après tout, d'autres pourraient s'en occuper sans que cela nuise à l'intérêt général. Dès lors, le rôle néfaste du cumul des mandats apparaît rapidement. Surtout qu'il ne serait pas envisageable à l'étranger. Les politiciens essaient tant bien que mal de le justifier en affirmant qu'être maire en plus d'être parlementaire permet de ne pas se couper de la vraie vie. Mais absolument rien ne condamne un parlementaire à se couper du peuple, et à abondonner sa circonscription. En fin de compte ce jeu apparaît pour ce qu'il est : le fait de miser sur plusieurs tableaux et de se garantir des rôles publics en cas de défaite à telle ou telle élection.

Aujourd'hui encore, nombreux sont les ministres ou secrétaires d'Etat à se présenter aux municipales. C'est leur droit, mais s'ils viennent à devenir maire, il faudra qu'ils en tirent les conséquences en abandonnant leur portefeuille. En fait, on peut envisager qu'un élu ait un job à plein temps, et éventuellement avoir un rôle consultatif, mais pas exécutif. Dans ce cas on peut être maire et conseiller régional ou général, à condition de ne pas avoir de responsabilités exécutives dans ces assemblées. Un parlementaire pourrait être également simple conseiller municipal. Ce serait le même cas que celui d'un travailleur ordinaire choisissant de s'engager pour la communauter à travers la vie publique en dehors de ces horaires de travail. Au delà, il y a un problème.

Pour avoir beaucoup cumulé, Nicolas Sarkozy ne risque pas de proner une attitude exemplaire sur ce sujet. Jacques Chirac avait également cumulé de façon improbable les postes de maire de Paris et de député de la Corrèze (en plus d'être président du RPR), mais cela ne l'avait pas empêché de vouloir de ses ministres le respect d'une règle de non cumul. Ségolène Royal, s'est retirée de son poste de député en ne se représentant pas, après avoir été élue présidente de région. Mais elle aura quand même cumulé trois ans, et si elle a fait cette promesse de non cumul, c'est bien parce qu'elle considérait ne pas arriver dans une situation où elle aurait du l'appliquer, pensant se faire élire à l'Elysée. D'une manière générale, presque personne n'évite le cumul. Et c'est encore un élément supplémentaire qui rend les Français circonspects quant à leur représentants politiques. Et dans les grands partis, ils ont peu le choix : à chaque fois, le candidat a déjà une responsabilité, mais ne promet jamais de la quitter en cas d'accession à une plus importante.

Photo : Reuters