Après une première journée de grève à la RATP et à la SNCF en octobre (qui s'était en fait étalée sur quatre jours), les salariés de ces deux entreprises publiques ont à nouveau fait grève pendant une dizaine de jours. Il peut paraître étonnant que cela n'ait pas duré plus longtemps, lorsque l'on sait que les syndicats promettaient de faire durer le "mouvement social" aussi longtemps que le gouvernement ne retirerait pas son projet de réforme de leur avantageux système de retraite. Mais les grévistes ne bénéficiaient pas du tout de la sympathie du reste de la population. Et surtout, les directions de la SNCF et de la RATP ont décidé d'ouvrir leur portefeuille pour offrir de généreuses compensations financières aux changements de régimes de retraite. Il n'est pourtant pas exclu que la grève reprenne, dans la mesure où le gouvernement ne retirera pas la réforme en question, alors que c'est bien là l'exigence des syndicats.

Le souhait de Nicolas Sarkozy qu'il n'y ait ni vainqueur, ni vaincu dans le conflit en cours apparaît assez naïve. Des syndicats comme SUD ou la CGT se considèrent exclusivement comme des forces de lutte, et continueront de brandir des menaces de grève tant que leurs innombrables revendications ne seront pas satisfaites. Le gouvernement s'est malgré tout montré assez bienveillant avec eux. Si les jours de grève ne sont plus payés, la charge représentée sur ceux du mois de novembre sera quand même étalée sur les feuilles de paie de décembre et de janvier, rendant plus indolore là grève pour les grévistes. Et alors que Nicolas Sarkozy avait promis le service minimum dans les transports en commun, ces derniers temps ont montré qu'il n'y avait rien de tel. Certes, la loi ne sera applicable qu'à partir du 1er janvier prochain. Mais fallait-il attendre aussi longtemps, plus de six mois après les élections, pour le faire appliquer ? Surtout que le texte en question est bien peu ambitieux. Cela se limite à déclarer 48h à l'avance si l'on fait grève, et à organiser un vote à bulletin secret pour prolonger la grève après huit jours de conflit. Il y a de quoi être circonspect sur les effets qu'auraient eus de telles mesures dans les dernières grèves. Cela peut permettre de mieux prévoir le trafic, mais les nuisances liées au manque de train, de bus ou de tramways demeurent. Ce qui se traduit par des rames encore plus surchargées que d'habitudes lorsqu'il y en a, l'impossibilité pour les personnes âgées de prendre les transports en commun lorsque le chaos règne comme ce fut le cas, de nombreux travailleurs ne pouvant se rendre sur leur lieu de travail et perdant ainsi des journées entières de salaire, des temps de transports démentiels pénalisant d'abord ceux qui vivent dans les banlieues, et d'une façon générale, la quasi impossibilité de se déplacer.

Entre les habituels retards, annulations et suppressions d'interconnexions, les usagers des transports en commun ont déjà l'impression d'avoir le droit à un service minimum permanent, même les jours de non grève. Pourtant les transports en commun servent l'intérêt général, c'est bien pour cela que la SNCF et la RATP sont des entreprises publiques. Si ce sont des services tellement indispensables à la communauté que l'Etat a cru bon de devoir les gérer lui-même, ce n'est certainement pas pour qu'ils ne soient pas assurés de façon périodique. Il faut en tirer les conclusions, et oser affirmer qu'il faut avoir une exigence de service maximum dans les transports en commun. Personne ne peut se permettre qu'ils ne fonctionnent plus. Cela a évidemment des conséquences : les grèves dans des services aussi cruciaux pour l'intérêt de la population ne doivent plus se traduire par des interruptions de service. Et si cela passe par des limitations du droit de grève, qu'il en soit ainsi. Le droit de grève est bien sûr reconnu par la constitution, mais dans ces termes : "le droit de grève s'exercent dans le cadre des lois qui le réglementent". Eh bien il est temps de le réglementer là où c'est vraiment nécessaire, c'est-à-dire lorsqu'il nuit à l'intérêt général.

La raison d'être de la SNCF ou de la RATP n'est ni d'être un investissement donnant droit à un rendement aux investisseurs, ni d'être un employeur. La raison d'être de ces deux entreprises est d'avant tout transporter les gens, ensuite les marchandises. Pour le métro, une solution pourrait être à terme l'automatisation de toutes les lignes parisiennes. La ligne 14 a prouvé sa force et son utilité pour les usagers ces dernières semaines. C'est un exemple à reproduire, et il est heureux que ce soit actuellement à l'étude pour un nombre croissant de lignes.