Malgré les vagues de privatisations, un bon nombre d'entreprises françaises comptent toujours l'Etat au nombre de leurs actionnaires. Ces participations publiques passent par différents canaux. Il y d'abord l'Agence des Participations de l'Etat (APE), qui s'occupe des entreprises publiques. Il y aussi la Caisse des Dépôts et des Consignations (CDC), qui n'hésite pas à prendre des participations dans des entreprises privées, selon plusieurs critères. Le but est souvent d'aider au financement de PME non cotées, mais appelées à connaître une croissance forte. Des entreprises de services d'intérêt général ou de gestion immobilière peuvent aussi être financées par la CDC... Evidemment, ces participations ont vocation à être rentable et à rapporter de l'argent via les dividendes. Depuis 2008, la CDC passe aussi par le Fonds Stratégique d'Investissement voulu par Nicolas Sarkozy, à l'origine pour aider des entreprises à stabiliser leur capitalisation pendant la crise.

Mais lorsque l'on observe la liste (longue) des entreprises dans lesquelles l'Etat est actionnaire d'une façon ou d'une autre, on peut quand même se demander si elles sont toutes bien pertinentes. Il ne s'agit pas de remettre en cause une participation majoritaire dans l'opérateur de transports en commun Transdev, puisqu'il s'agit bien d'un service d'intérêt général. Mais comment justifier la possession de 15 % du capital de Renault ? Est-ce le rôle de l'Etat de construire des voitures ? Les circonstances historiques qui avaient permis la nationalisation de cette entreprise il y a de cela 66 ans ne sont absolument plus d'actualité aujourd'hui. CNP assurances est le premier assureur aux personnes en France, quel besoin d'avoir l'Etat comme actionnaire alors que le privé pourrait s'en occuper ? Le groupe de villages de vacances Belambra fut lancé après guerre en tant qu'association pour favoriser le départ en vacances, mais maintenant que l'actionnariat est majoritairement privé, la présence de l'Etat (40 % de l'actionnariat) ne se justifie plus vraiment. De même, les participations importantes de l'Etat dans des groupes aussi énormes que Eiffage ou France Telecom peuvent poser question.

Un exemple parmi d'autres permet de cerner le problème : Quick. Depuis quatre ans, la CDC possède 94 % de ce groupe de restauration rapide. Si Quick s'est développée sous forme de franchises, il est tout de même difficile de qualifier cette entreprise de PME. Avant d'être racheté par la CDC, ce n'était même pas une entreprise française, mais belge. Auparavant propriété du financier Albert Frère, ce n'était pas non plus une entreprise familiale. Et il ne s'agit pas d'implémenter une vision stratégique profitable à l'intérêt général. En effet, le fast food à base de hamburgers et de frites n'est pas exactement le produit équilibré à promouvoir par l'Etat, et comme on l'a vu récemment, la question de l'hygiène est problématique. Enfin, la stratégie d'entreprise fondée sur le communautarisme ne ressemble en rien à ce qui peut être souhaité par un gouvernement. Posons la question clairement : qu'est-ce que la CDC fait la dedans ?

Certains peuvent penser que ces participations sont aussi une façon de financer l'Etat, via les dividendes. Il faudrait voir quel est leur flux financier global, et si c'est bien le rôle de la CDC. Mais tous ces actifs immobilisés ne le sont pas ailleurs. Il est dès lors tout à fait légitime de se demander quelle est la pertinence de chacune de ces participations, et considérer que la revente de certaines d'entre elles pourrait financer l'investissement dans des infrastructures fondamentales pour notre avenir. Ce serait une bien meilleure solution que de faire un grand emprunt qui nous handicape pour longtemps.