Réflexions en cours

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lundi 22 janvier 2007

Les déficits américains

L'une des plus grandes menaces qui pèsent actuellement sur l'économie mondiale se trouve dans les déficits jumeaux américains : le déficit budgétaire est fort depuis l'arrivée de George W. Bush au pouvoir, vu la baisse des recettes engendrées par les baisses d'impôts et les hausses des dépenses demandées par la guerre, et le déficit de la balance commerciale s'aggrave d'année en année depuis les années 80, jusqu'à devenir un élément structurel de l'économie américaine. Ce déficit fait qu'il y a beaucoup de dollars qui arrivent dans les caisses des pays qui ont une balance commerciale avec les Etats-Unis. Ainsi, la Chine qui a une balance très excédentaire, utilise ces dollars pour épargner et acheter des bons du trésor américains, les titres de dettes les plus sûrs au monde. La mauvaise balance commerciale américaine permet donc de financer indirectement la dette publique de l'administration Bush. Les taux directeurs la Fed (banque centrale des Etats-Unis) étaient jusqu'à présents assez faibles, ce qui favorise la croissance américaine (et donc creuse le déficit commercial), mais en contrepartie cela favorise une baisse du dollar par rapport aux autres monnaies du monde, plus saines. Au fur et à mesure de l'augmentation de la dette américaine détenue à l'étranger et de la baisse du dollar, il y a de moins en moins d'intérêt à acheter ces bons du trésor. Tant et si bien qu'un jour le procédé pourrait s'arrêter, ce qui amènerait une très grande quantité de dollars sur le marché, le faisant s'écrouler de fait par rapport aux autres monnaies mondiales.

Avec ce décrochage de la monnaie américaine, la confiance dans le dollar s'évanouirait en bonne partie, et les risques de change deviendrait une charge importante pour l'économie mondiale. De plus, les biens et services étrangers verraient leur prix fortement augmenter pour les ménages et les entreprises américaines, et il n'y a pas assez de capacité de production pour que l'économie américaine puisse prendre la relève au pied levé, ce qui favoriserait une inflation forte. Pendant ce temps, la croissance des autres pays seraient atteintes par une baisse de la demande provenant d'Amérique. Avec la chute de la monnaie américaine, les pays qui ont leur monnaie fixé au dollar suivraient les mêmes affres. Bref, il y a largement de quoi faire une énorme crise économique au niveau mondial.

La question pour Ben Bernanke, gouverneur de la Fed, et pour les responsables économiques des autres pays concernés, et de faire face à ce mouvement inéluctable. Il serait souhaitable déjà de diminuer ces déficits progressivement. Ce sera difficile pour le déficit commercial, cela supposerait de calmer la croissance américaine, qui est justement l'un des moteurs de l'économie mondiale. Il faudrait aussi favoriser une croissance forte dans d'autres pays, et justement allumer d'autres moteurs pour rééquilibrer un peu les comptes. A ce titre, la Banque Centrale Européenne pourrait adopter une politique monétaire souple pour s'assurer que la croissance dans la zone euro soit forte. Enfin, il faudrait trouver un moyen d'amener la Chine à laisser flotter sa monnaie (peut être progressivement) afin que celle-ci se réévalue petit à petit à son juste niveau, et cela laisserait suffisamment de temps aux économies occidentales de reconstituer leurs forces pour répondre à leur demande intérieure. Cela ferait baisser de quelques points la croissance chinoise, mais celle-ci est si forte à l'heure actuelle que ça ne remettrait pas en cause la bonne santé générale de son économie. Cela nécessite peut-être des grandes conférences mondiales pour bien orchestrer tout ce processus, mais pour éviter les chocs violents il ne faut pas hésiter à se regrouper entre économies concurrentes. C'est en tous cas plus urgent que le cycle actuel de négociations de l'OMC...

mercredi 3 janvier 2007

Le bourbien irakien

L'arrivée d'une nouvelle majorité démocrate au Congrès américain ne semble pas avoir calmé les ardeurs de George Bush à guerroyer en Irak. Ni même d'ailleurs le rapport bi-partisan de l'Iraq Study Group, qui préconisait un retrait progressif des troupes américaines. Actuellement, tous les bruits venant de la Maison Blanche font état que celle-ci travaillerait sur un plan qui viserait à augmenter le nombre de soldats là-bas, car ce serait le meilleur moyen d'en finir avec la guérilla terroriste qui y sévit. La guerre serait gagnable, ce ne serait qu'une question de moyens. Le constat parait étonnant, tant il y a peu d'indications qui laisse penser cela. Le général américain s'occupant de l'Irak pense même que cela aurait l'effet inverse, dans la mesure où plus on laisse penser que l'Irak est occupé par une force étrangère, plus il y aura d'actions faites contre elle. Mais le général en question est sur le point d'être relevé, étant accusé d'être défaitiste.

Au moins reste-t-il l'explication qui consiste à dire que c'est la guerre civile en Irak, et que les Américains étant ceux qui l'ont permise, il est nécessaire qu'il reste au moins jusqu'à que celle-ci soit réglée. Mais il est bien difficile de voir un moyen qui permettrait cela, et il est douteux que l'envoi de troupes en plus aille vers la voie d'une solution. Mais c'est le dernier motif qui permette de justifier une présence américaine : après la neutralisation d'armes de destruction massive qui n'existaient pas, il y a eu la raison d'un remplacement d'une dictature par une démocratie (qui se révèle être inefficace, tant les élus sont divisés sur les mesures à prendre), c'est désormais la peur d'un chaos absolu qui nécessite l'engagement américain dans l'esprit de George Bush. Il n'est pas question de prendre la défense de Saddam Hussein, dictateur sanglant qui était bien un facteur d'instabilité dans la région. Mais sa destitution et sa mort n'ont rien réglé, et il semble même qu'elles ont créé plus de problèmes qu'elles n'en ont résolues. Les circonstances répugnantes de son exécution sont même de nature à favoriser une rancoeur des sunnites envers les chiites...

Toujours est-il que désormais George Bush agit explicitement contre l'avis de la population, et même de ses élites. Outre la commission Baker qui est bafouée, on trouve également de plus en plus de républicains qui souhaitent arrêter les dégâts sur le dossier irakien. Quant aux démocrates, ils sont désormais dans leur écrasante majorité hostiles à la guerre, et comptent bien faire campagne sur le retrait des troupes lors de la prochaine élection présidentielle si celui n'est pas encore engagé. Le mouvement en faveur du retour des boys dépasse désormais de loin les simples pacifistes béats, au fur et à mesure que l'incompréhension règne sur les raisons de l'engagement d'une telle guerre. Mais ce n'est pas l'administration Bush qui voudra s'y résoudre. Comme le font remarquer les humoristes américains : "quitter l'Irak reviendrait à perdre la guerre, or les soldats ne reviendront qu'à condition de gagner. Pour qu'ils puissent donc revenir, il faut donc qu'ils restent." Le mot "défaite" n'apparaît pas encore pour qualifier ce qu'il se passe en Irak pour les Américains. Mais tout le monde a conscience désormais qu'il s'agissait d'une erreur monumentale. Et croire que la guerre se calmera d'elle-même est bien naïf...

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