Réflexions en cours

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dimanche 21 décembre 2008

L'influence du roi de Thaïlande

Alerte au Quai d'Orsay ! Fin novembre dernier, une crise politique étrangère a forcé le ministère des Affaires étrangères français à intervenir pour rapatrier ses ressortissants. Dans le cadre de manifestations contre le pouvoir en place en Thaïlande, des milliers de militants vêtus de jaunes ont bloqué le principal aéroport de Bangkok. La situation n'était à vrai dire pas vraiment dangereuse pour les touristes occidentaux, mais ceux venant de France se sont émus de leur impossibilité de rentrer chez eux pour cette raison, pointant le fait que d'autres pays avaient trouvé des solutions de secours pour leurs ressortissants. On peut se demander si les pays étrangers cherchent eux-mêmes à venir en aide à ceux qui sont souvent bloqués en France pour des raison habituelles, mais au delà du clin d'œil, on constate surtout l'aveuglement de nos touristes sur les situations locales des pays qu'ils visitent. Par dizaines de milliers ils découvrent chaque année les plages sublimes de l'île de Phuket, mais au delà de la drogue et de la prostitution qui constituent deux fléaux pour la Thaïlande, ils ignorent tout des situations politiques compliquées que traverse ce pays régulièrement. Le coup d'Etat militaire ayant écarté le Premier ministre Thaksin Shinawatra du pouvoir en septembre 2006 était déjà une bonne indication du climat tendu y régnant. Alors, que se passe-t-il en Thaïlande ?

La colère des "chemises jaunes" s'inscrit dans la suite directe des événements qui ont eu lieu depuis ce coup d'Etat. Le putsch contre Thaksin Shinawatra avait pour motif la corruption supposée de celui-ci, l'armée ayant alors décidée de protéger la Thaïlande contre sa mauvaise influence. De même, les "chemises jaunes" protestait contre l'action au gouvernement du Premier ministre Somchai Wongsawat, beau-frère de Thaksin Shinawatra, son hériter politique en quelque sorte. Ils obtinrent satisfaction, un nouveau Premier ministre, Abhisit Vejjajiva, venant du bord opposé, est désormais au pouvoir. Mais le facteur qui manque pour comprendre tous ces soubresauts politiques est l'importance du roi dans le système thaïlandais. Il n'est censé n'avoir qu'un rôle cérémonial, mais se retrouve au centre de tous les événements. Le roi actuel, Bhumibol Adulyadej, est au pouvoir depuis 1946. Il est resté en place malgré les nombreux coups d'Etat qui se sont succédés pendant cette période. Non seulement il ne les a quasiment jamais empêchés, mais il les a surtout souvent approuvés. Tout simplement parce qu'ils allaient dans le sens de sa volonté.

Le roi thaïlandais est une telle institution dans son pays qu'il est adoré par une bonne partie de la population et a une influence considérable sur les chefs militaires. Les charges de corruption reprochées à Thaksin Shinawatra étaient surtout le symptôme que l'homme n'était pas considéré comme assez royaliste. L'armée l'a délogé du pouvoir une première fois, les partisans du roi habillés de chemises jaunes ont délogé celui qui avait repris le flambeau la fois suivante. Le pays semble divisé entre partisans du roi d'un côté, et les partisans de Thaksin Shinawatra de l'autre, ces derniers arborant des chemises rouges pour leur part. Le rôle de la démocratie y est remis en question, dans la mesure où celle-ci n'est acceptée que dans la mesure où elle fournit des résultats conforme à la pensée du roi. Le crime de lèse-majesté est particulièrement grave en Thaïlande, et fait changer d'appréciation quant au rôle prétendument protocolaire normalement dévoué au roi. L'illusion peut subsister, mais les crises s'enchaînent pour cette raison.

La question qui demeure reste toutefois de l'avenir du système politique thaïlandais. A l'âge de 81 ans, le roi semble être proche de la sortie, qu'il le veuille ou non. Il n'a absolument rien préparé quant à sa succession, et de la nature de la personne qui lui succèdera, dépendra beaucoup l'évolution prochaine de la Thaïlande.

lundi 8 décembre 2008

L'Inde attaquée

La récente opération terroriste qui a eu lieu à Bombay ne peut laisser indifférent. L'Inde est loin d'être un pays fondamentalement pacifiste, en dépit de l'enseignement de Gandhi, mais les récentes violences ne peuvent être vues que comme des faits d'une gravité sans précédent. Les terroristes ont l'habitude de commettre leurs crimes en faisant exploser des bombes auprès de la population afin de répandre la terreur. Cette fois-ci, ils sont arrivés en grand nombre, tirant sur tout le monde sans distinction, dans le seul but de tuer et de créer la terreur. A 10 personnes, ils ont pris la vie de 164 Indiens et en ont blessés des centaines d'autres. Tout cela dans la première ville de l'Inde, Bombay, la capitale économique et touristique. Neuf des des terroristes ont été tués par les forces de l'ordre indienne, le dernier a été capturé vivant. Mais ces événements ont duré plusieurs jours, au cours desquels l'armée indienne est intervenue pour sauver les otages, sécuriser les zones et supprimer la menace. Au final, l'Inde a bien fait face à un acte de guerre.

Un acte de guerre qui n'est l'œuvre d'aucun pays. Le terme de "11 septembre indien" a été lancé. Cela a une certaine pertinence : un commando prêt à mourir débarque dans la plus grande ville pour y semer la désolation, avec des actes dont la portée fait penser à des opérations de guerre, mais sans être les soldats d'une quelconque armée officielle. Sur ces aspects-là, novembre 2008 rejoint septembre 2001. De tels méfaits demandent bien une préparation minimale, qui doit forcément s'accomplir quelque part. Pour le 11 septembre 2001, le plan avait été conçu par Al Quaida, une organisation dont le chef et des camps d'entraînement étaient hébergés en Afghanistan, par le régime taliban. Celui-ci et Oussama Ben Laden avaient d'abord démentis être impliqués dans la tragédie américaine, avant de le reconnaître (et de s'en vanter) plus tard, les preuves étant établies. La colère venue des Etats-Unis s'est abattue sur l'Afghanistan, et si les talibans continuent d'être actifs sans être au pouvoir, Al Quaida n'y a plus vraiment son refuge. Nombreux sont ceux qui pensent que tous les démons de l'Afghanistan se sont repliés dans le nord du Pakistan, une zone que l'armée pakistanaise ne contrôle pas, si jamais elle le souhaitait.

Les terroristes de Bombay venaient eux aussi du Pakistan, même si leur appartenance aux mêmes organisations que celle d'Oussama Ben Laden est loin d'être claire. D'une manière générale, le fondamentalisme musulman est un problème central pour le Pakistan. La démocratie pakistanaise, qui a permis de faire partir le général Pervez Musharraf du pouvoir pour y mettre le veuf de Benazir Bhuto, Asif Ali Zardari, reste assez faible. Il y a une forte agitation sociale extrémiste qui menace constamment le régime en place et qui risque d'instaurer la charia. Le travail des dirigeants pakistanais est celui d'équilibriste, à contenir les influences islamiques d'une part, et d'autre part rester de bonnes relations diplomatiques avec l'occident d'autre part.

La rivalité entre l'Inde et le Pakistan est forte, les tensions entre les musulmans et les hindous dans la région étant déjà une source de préoccupation à l'époque de la domination britannique. Au-delà des questions nationalistes se posant sur le territoire du Cachemire, ces opérations terroristes semblent augurer de nouveaux conflits qui ressembleraient à une guerre de religion. L'Inde tient le Pakistan comme responsable de ce qu'il s'est passé, mais le Pakistan condamne les actions des terroristes et affirme ne pas les avoir favorisés. Evidemment, ce que le Pakistan aurait du faire, c'est de les en empêcher lorsqu'elles se préparaient. Quand bien même le Pakistan en aurait la volonté, il est loin d'être certain qu'il en aurait la capacité. Au final, l'aggravation brusque des crimes accomplis par des fondamentalistes musulmans en Inde augmente le risque d'un terrible conflit dans cette poudrière. Et la menace extrémiste demeure vive, partout dans le monde.

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