Réflexions en cours

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dimanche 20 juillet 2008

L'esprit olympique perdu

Les Jeux Olympiques de Pékin débuteront dans moins de 20 jours maintenant. Ceux qui ont cru que la tenue des Jeux en Chine entraînerait une libéralisation du régime et un éveil démocratique se retrouvent gravement démentis par les faits. L'organisation des événements, la construction des infrastructures ou la préparation des athlètes ont été autant d'occasions pour les Chinois de prouver au monde entier que le gouvernement mettrai toujours en avant son intérêt d'Etat, une forme de nationalisme qui s'embarrasse peu des préoccupations populaires. Pour rendre Pékin présentable, tout est grossièrement caché, et la censure est plus que jamais à l'œuvre. A ce niveau-là, les spectateurs du monde entier seront traités comme la population locale, et ne pourra aucunement s'exprimer sur la politique. Quoi qu'il se passe, la conclusion pour l'Etat chinois sera que les Jeux se sont bien passés. Le black-out imposé sur le Tibet montre de quoi est capable ce régime pour appliquer sa volonté.

Le grand complice du régime chinois est bien sûr le Comité International Olympique, qui accepte tout dans une semblable volonté de voir les Jeux se dérouler sans anicroche et satisfaire ses généreux sponsors. Il est désormais prouvé que les valeurs olympiques ou même le souci de l'athlète ne sont que des préoccupations de façade pour cette institution, qui n'a plus désormais qu'un crédit relatif, celui d'un pur organisateur d'évènements lucratifs. Cela a au moins le mérite de la clarté. Pourtant, nombreux sont ceux qui croient encore à l'olympisme, une forme d'amour du sport qui n'a plus cours au sein du CIO. Pour ceux-là, plus qu'un spectacle sponsorisé, les Jeux Olympiques sont l'occasion d'une grande fête du sport, une communion planétaire autour du plaisir de se dépasser. Voilà pourquoi pour chaque édition des Jeux Olympiques, plusieurs pays sont candidats pour apporter cet esprit dans leur pays. Mais c'est le CIO qui décide, et ce sont les considérations financières qui priment, ainsi qu'une vision du monde très orientée. A ce titre, il est intéressant de noter qu'entre 1976 et 2012, les Jeux Olympiques se seront tenus neuf fois dans des pays anglo-saxons (quatre fois aux Etats-Unis, trois fois au Canada, une fois au Royaume-Uni et une fois en Australie), soit une fréquence d'une fois tous les quatre ans et demi, c'est presque une fois sur deux. Et les Etats-Unis sont à nouveau bien placés pour organiser les Jeux en 2016 ou 2018.

Le reste du monde doit donc se partager les rares occasions restantes. Il n'y a jamais eu de Jeux en Afrique ou en Amérique du Sud par exemple. Dans ce dernier cas, c'en est même troublant : un pays comme l'Argentine par exemple a les reins suffisamment solide pour accueillir les Jeux, ce qui a été prouvé par l'organisation d'un mondial de football, et est une vraie démocratie. Pourtant, elle n'a jamais été au devant de la scène. La France a fait bien des candidatures, à chaque fois reconnues comme de grande qualité, les dernières étant pour 2008 ou 2012. Elles ont pourtant à chaque fois été rejetée, en 2012, il a été préféré la force du "lobbyisme" du Royaume-Uni aux mérites du dossier, considéré comme le meilleur, présenté par Paris.

La France doit en tirer les conclusions, et plutôt que de se contenter de coller au mieux à l'esprit olympique traditionnel, doit privilégier le nouvel esprit olympique, celui des intérêts bien compris de chaque intervenant, de la manœuvre en coulisse et du contrat juteux. Vu qu'il ne semble pas possible que les Jeux d'été se déroulent deux fois de suite dans le même continent, il faut donc faire en sorte que les Jeux ne se déroulent pas en Europe avant la prochaine candidature française. Pour que ce laps de temps soit suffisamment long, il faudra donc laisser s'écouler deux olympiades pour porter une nouvelle candidature de Paris en 2024. De même, pour ne pas voir s'accuser de trop avoir les Jeux, il est hors de question de laisser s'organiser des Jeux d'hiver en France avant ceux d'été. Les quelques villes des Alpes qui souhaitent accueillir les Jeux devront attendre longtemps. La France pourra aussi veiller à accueillir plusieurs compétitions sportives internationales de toutes sortes dans les années 2010 pour montrer l'éclectisme de la France et ses capacités d'organisations (entendre "rendre des événements sportifs profitables") d'ici 2017, lorsque sera prise la décision pour 2024. Enfin, le Comité Olympique Français devra prendre ses responsabilités, et ne pas hésiter à négocier ses appuis dans le but d'en obtenir pour sa propre candidature. D'une manière générale, c'est un souci constant que la France doit avoir dans la défense de ses intérêts dès aujourd'hui, dans le but de l'accomplissement de sa volonté à terme.

La France est un pays de soixante millions d'habitants qui a recréé les Jeux à l'époque moderne, mais qui, en 2024, n'aura pas vu les Jeux Olympiques d'été se dérouler sur son territoire depuis un siècle. Le CIO représente une force hostile qu'il faudra surmonter pour permettre de redécouvrir d'y redécouvrir l'olympisme à ce moment là. Si la France échoue à nouveau malgré tout, elle pourra se poser la question de l'opportunité du maintien d'un tel consortium, et peut-être se consacrer définitivement à d'autres choses plus saines.

samedi 5 juillet 2008

La rencontre Sarko-Obama

En septembre 2006, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, rencontra le Président américain, George Bush, à la maison blanche. Ce dernier était, et reste d'ailleurs, une personnalité détestée en France pour l'ensemble de ses positions et de ses actes. Mais au delà de ça, c'était le rapprochement avec les Etats-Unis qui lui fut grandement reproché. Pendant la campagne électorale qui allait suivre, il fut accusé non seulement de vouloir faire les mêmes politiques que George Bush, mais aussi de voir le monde selon le prisme américain. Dans un pays réputé anti-américain comme la France, l'accusation pouvait être porteuse. Pendant ce temps-là, Ségolène Royal cherchait à organiser une rencontre médiatique avec Hillary Clinton, avec un double objectif : renforcer sa stature internationale et faire comprendre que l'accession des femmes aux plus hautes responsabilités politiques était une tendance mondiale. Cette fois-ci, c'est Hillary Clinton qui refusa la rencontre, de peur d'être associée à une personnalité si à gauche, et de plus dangereusement inconséquente.

Il était facile aux adversaires de Nicolas Sarkozy de s'en prendre à sa visite à George Bush, dans la mesure où celui-ci représente en quelque sorte l'incarnation de la droite américaine au pouvoir, une droite qui n'existe quasiment pas en France, et qui fait d'ailleurs peur. George Bush n'est d'ailleurs populaire dans aucun des pays de l'Europe occidentale. Mais à l'époque de cette visite, les médias ont totalement oublié de mentionner que George Bush ne fut pas la seule personne à qui Nicolas Sarkozy rendit visite. Il rencontra également Barack Obama, jeune sénateur américain, célèbre à la fois aux Etats-Unis et en France depuis son discours remarqué à la Convention démocrate de 2004. Depuis, Barack Obama s'est lancé dans sa propre campagne présidentielle. Sa jeunesse, sa nouveauté physique, son éloquence, son rejet de la guerre en Irak et son positionnement plus à gauche que Hillary Clinton pendant les primaire l'ont rendu populaire des deux côtés de l'Atlantique.

La France souhaite en fait unanimement ou presque la victoire d'un démocrate dans la course à la Maison Blanche. Mais les caractéristiques de Barack Obama le rendent particulièrement attractifs dans la mesure où il semble pouvoir s'accorder plus facilement avec les raisonnements tenus en Europe. Rares sont ceux qui critiqueraient Nicolas Sarkozy pour sa rencontre avec Barack Obama, s'ils en avaient eu la connaissance. Pourtant, Barack Obama, bien que relativement à gauche du parti démocrate, reste plus à droite que Nicolas Sarkozy, que ce soit en matière d'interventionnisme public (plus faible au final que dans le volontarisme sarkozyste) ou en termes de positions sur les sujets de société. Barack Obama s'est en effet exprimé pour un renforcement de la peine de mort ou pour le libre droit de détenir des armes à feu, deux choses inenvisageables en France. Si Barack Obama semble donc trancher avec les personnalités politiques américaines habituelles, son fond de proposition reste toujours conforme à ce qui acceptable dans le débat politique américain, et qui est souvent considéré comme hors de propos en France. Il faudra donc rester mesuré dans les appréciations visant à faire de Barack Obama un sauveur de gauche et de Nicolas Sarkozy un quasi-despote de droite, lorsque l'on compare leurs positions respectives.

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