En septembre 2006, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, rencontra le Président américain, George Bush, à la maison blanche. Ce dernier était, et reste d'ailleurs, une personnalité détestée en France pour l'ensemble de ses positions et de ses actes. Mais au delà de ça, c'était le rapprochement avec les Etats-Unis qui lui fut grandement reproché. Pendant la campagne électorale qui allait suivre, il fut accusé non seulement de vouloir faire les mêmes politiques que George Bush, mais aussi de voir le monde selon le prisme américain. Dans un pays réputé anti-américain comme la France, l'accusation pouvait être porteuse. Pendant ce temps-là, Ségolène Royal cherchait à organiser une rencontre médiatique avec Hillary Clinton, avec un double objectif : renforcer sa stature internationale et faire comprendre que l'accession des femmes aux plus hautes responsabilités politiques était une tendance mondiale. Cette fois-ci, c'est Hillary Clinton qui refusa la rencontre, de peur d'être associée à une personnalité si à gauche, et de plus dangereusement inconséquente.

Il était facile aux adversaires de Nicolas Sarkozy de s'en prendre à sa visite à George Bush, dans la mesure où celui-ci représente en quelque sorte l'incarnation de la droite américaine au pouvoir, une droite qui n'existe quasiment pas en France, et qui fait d'ailleurs peur. George Bush n'est d'ailleurs populaire dans aucun des pays de l'Europe occidentale. Mais à l'époque de cette visite, les médias ont totalement oublié de mentionner que George Bush ne fut pas la seule personne à qui Nicolas Sarkozy rendit visite. Il rencontra également Barack Obama, jeune sénateur américain, célèbre à la fois aux Etats-Unis et en France depuis son discours remarqué à la Convention démocrate de 2004. Depuis, Barack Obama s'est lancé dans sa propre campagne présidentielle. Sa jeunesse, sa nouveauté physique, son éloquence, son rejet de la guerre en Irak et son positionnement plus à gauche que Hillary Clinton pendant les primaire l'ont rendu populaire des deux côtés de l'Atlantique.

La France souhaite en fait unanimement ou presque la victoire d'un démocrate dans la course à la Maison Blanche. Mais les caractéristiques de Barack Obama le rendent particulièrement attractifs dans la mesure où il semble pouvoir s'accorder plus facilement avec les raisonnements tenus en Europe. Rares sont ceux qui critiqueraient Nicolas Sarkozy pour sa rencontre avec Barack Obama, s'ils en avaient eu la connaissance. Pourtant, Barack Obama, bien que relativement à gauche du parti démocrate, reste plus à droite que Nicolas Sarkozy, que ce soit en matière d'interventionnisme public (plus faible au final que dans le volontarisme sarkozyste) ou en termes de positions sur les sujets de société. Barack Obama s'est en effet exprimé pour un renforcement de la peine de mort ou pour le libre droit de détenir des armes à feu, deux choses inenvisageables en France. Si Barack Obama semble donc trancher avec les personnalités politiques américaines habituelles, son fond de proposition reste toujours conforme à ce qui acceptable dans le débat politique américain, et qui est souvent considéré comme hors de propos en France. Il faudra donc rester mesuré dans les appréciations visant à faire de Barack Obama un sauveur de gauche et de Nicolas Sarkozy un quasi-despote de droite, lorsque l'on compare leurs positions respectives.