Six heures. C'est le temps qui se sera écoulé entre l'entrée en fonction de François Hollande, et sa première promesse rompue. La promesse en question n'était pourtant pas bien veille. Elle ne datait que du mois dernier, quand le candidat avait déclaré, une semaine avant le premier tour, "je n’aurai pas autour de moi à l’Élysée des personnes jugées et condamnées". Il a pourtant nommé à Matignon Jean-Marc Ayrault, bel et bien condamné à six mois de prison avec sursis pour avoir confié un marché public à une personnalité proche du Parti Socialiste. Au moins, on sait à quoi s'en tenir sur la moralisation de la vie politique. Mais Jean-Marc Ayrault, ce n'est pas qu'une condamnation. Lui aussi n'a aucune expérience ministérielle, ce qui lui permettra de ne pas être meilleur que François Hollande. En revanche, son point fort, c'est qu'il sait parler allemand. C'est dommage que ce soit le Président où les ministres qui iront le plus souvent aux sommets européens, cela aurait pu être utile.

La composition du gouvernement obéit à une tradition française bien ancrée depuis toujours : être faite en urgence en moins de 36 heures, même lorsqu'on a une dizaine de jours pour la préparer. Observons là plus en détail sur quelques points :
  • Manuel Valls à l'Intérieur et Vincent Peillon à l'Education, ce sont deux nominations parfaitement logiques.
  • A l'instar de son alter ego Alain Juppé, Laurent Fabius est increvable, et réussit à décrocher à nouveau un gros ministère. Il se voit ainsi récompensé pour ne pas avoir obéi à François Hollande sur le Traité Constitutionnel Européen en devenant numéro deux du gouvernement et chargé des Affaires étrangères.
  • Marisol Touraine et Michel Sapin récupèrent le même ministère, les Affaires sociales.
  • En 2007, Ségolène Royal avait promis à Nicolas Hulot de nommer un vice Premier ministre chargé de l'Environnement. Nicolas Sarkozy avait promis de mettre à la tête d'un grand ministère de l'environnement un poids lourd politique, numéro deux du gouvernement. Ce fut d'abord Alain Juppé, puis Jean-Louis Borloo. Ce fut déjà un peu moins le cas avec Nathalie Kosciusko-Morizet, qui fut alors numéro quatre. Désormais, c'est donc une parfaite inconnue, Nicole Bricq, qui reprend l'Environnement, seulement huitième au rang protocolaire.
  • Arnaud Montebourg récupère un ministère au nom ronflant, le "redressement productif", qui n'est en fait que l'Industrie. Ce ne devait pas être un nom assez sexy.
Pour en revenir à la condamnation de Jean-Marc Ayrault, c'est vrai qu'il y a pire. Après tout, le PS soutient toujours sans sourciller Jean-Paul Huchon, qui lui a pourtant été condamné pour enrichissement personnel. Mais au delà de la promesse non tenue de François Hollande, on remarque quand même le deux poids, deux mesures de la gauche. Elle n'avait cessé de monter au front pour attaquer sur le plan du droit des membres du gouvernement qui n'avaient pas été condamnées, et contre lesquelles il n'y avait même pas de preuves le plus souvent. A contrario, le cas Jean-Marc Ayrault, c'est censé ne rien être du tout. En définitive, il faut savoir que pour la gauche, un coupable de gauche est forcément innocent, et un innocent de droite est forcément coupable.