Le Pakistan vient de devenir une zone de combats militaires actifs, avec l'offensive menée par les troupes gouvernementales contre les talibans dans les régions situées à proximité de la frontière afghane. Ces régions sont connues depuis bien longtemps comme abritant des religieux particulièrement extrémistes, notamment car nombreux sont ceux qui agissaient auparavant en Afghanistan qui s'y sont réfugiés. Le fait est notable, car sous le précédent président pakistanais, Pervez Muscharraf, presque rien n'était fait, les Pakistanais se montrant peu motivés pour attaquer les talibans. Ils profitaient pourtant de l'alliance conclue avec les Américains, conclue au lendemain du 11 septembre 2001 : les Américains n'opéreraient pas militairement au Pakistan, et en contrepartie les Pakistanais s'occuperaient eux-mêmes des talibans. Des fonds américains leur ont été versés de façon inconditionnelle à cet effet, et ils ont obtenu une certaine tranquillité à l'époque où les Etats-Unis avaient tendance à envahir tout pays considéré comme trop menaçant.

Seulement, le Pakistan a préféré entretenir la perpétuelle hostilité avec l'Inde, une autre puissance frontalière. Cela est en continuité avec les différends conflits armés qui ont rythmé la vie de la région. Une guerre symétrique entre deux armées régulières a le mérite de la clarté, cela peut sembler plus séduisant que la guérilla, tout du moins pour les leaders militaires qui tenaient le pouvoir. Or les talibans deviennent de plus en plus ambitieux. Le pouvoir a longtemps eu tendance a s'accommoder de ces forces hostiles, quitte à ne plus contrôler du tout de vastes provinces. En février dernier, une trêve explicite a même été établie entre les deux camps : les talibans resteraient dans les régions qu'ils contrôlent, et laisseraient donc le reste du Pakistan tranquille, contre une permission d'établir des tribunaux islamiques dans ces zones-là.

Pour les Américains, il s'agit d'un camouflet discréditant toute leur politique concernant le Pakistan. Ce renoncement affiché est un non respect scandaleux des accords établis. Il n'est dès lors pas étonnant que Barack Obama et sa Secrétaire d'Etat Hillary Clinton mettent désormais la pression sur Asif Ali Zardari, le nouveau président du Pakistan, et l'ensemble des responsables pakistanais. Il est temps pour eux de vraiment de passer à l'action. L'administration américaine a donc forcé le Pakistan a prendre conscience de ses responsabilités. Car non seulement ces zones de non droit comme la région du Swat sont des lieux où le terrorisme prolifère, mais en plus si le Pakistan entier venait à tomber, c'est bien le contrôle de ses armes atomiques qui créeraient des difficultés insurmontables.

Trop souvent, l'opposition dans de tels pays se fait entre un pouvoir régulier modéré mais corrompu et un mouvement taliban jugé vertueux, car appliquant fidèlement une doctrine claire. Tel est le ressort qui a favorisé la popularité des talibans, hier en Afghanistan, aujourd'hui dans le Pakistan. Mais cela se traduit par une force qui est toujours utilisée pour s'en prendre à quiconque est jugé comme s'éloignant trop de leur doctrine. Ce totalitarisme doit être affaibli le plus possible, et en conséquence, il était vraiment devenu nécessaire pour le Pakistan d'utiliser ses options militaires pour reprendre le contrôle de son propre territoire.