"Dans les années 70, Nixon avait dit aujourd'hui, nous sommes tous keynésiens. Je rêve d'un jour où nous dirons aujourd'hui, nous sommes tous Autrichiens !" Ces mots marquaient un moment marquant du discours que Ron Paul prononçait le soir du caucus républicain en Iowa, il y a de cela deux semaines. Il faisait référence à l'école autrichienne économie, farouche partisane du libéralisme. Aux Etats-Unis, il en est lui-même le combattant le plus acharné. Représentant du Texas au Congrès, il s'est à nouveau présenté à la présidentielle cette année. En lice dans les primaires américaines, il est arrivé deuxième à la fois en Iowa et dans le New Hampshire, un résultat significatif. Il dépasse ainsi tous les candidats qui ont été plus en vue les mois précédents, mis à part Mitt Romney, le probable futur nominé.

Par rapport aux autres candidats, il a un mérite flagrant : celui de la cohérence. Ses convictions libertariennes ne font aucun doute, il ne saurait être accusé d'adopter une posture pour avoir des voix. D'ailleurs, il ne se fait probablement aucune illusion sur ses chances à la présidentielle. Il ne sera pas nominé, mais par rapport à il y a quatre ans, son score progresse, ce qui signifie que ses idées sont plus répandues. Il n'hésite pas à être à la marge de son parti sur des questions importantes. Toujours partisan d'un Etat le plus minimaliste possible, il se prononce contre les opérations militaires américaines à l'étranger, alors que se montrer belliciste est plutôt bien vu chez les autres candidats (cela prouve les capacités de commandant en chef).

Les années précédentes, d'autres candidats avaient obtenu un soutien fort des jeunes pour leurs engagements clairs et leur refus de la guerre en Irak. Howard Dean avait ainsi été un candidat démocrate influent pendant les primaires de 2004, pour ces raisons. C'est son opposition à la guerre qui permit à Barack Obama de se démarquer des autres sénateurs, qui s'y étaient presque tous montré favorables. Curieusement, de l'autre côté du prisme politique, les mêmes convictions (bien que pour des raisons différentes) apportent les mêmes effets. Les militants de Ron Paul sont dévoués et énergiques, bien plus que chez les autres candidats. Grâce à eux, il pourra continuer son plaidoyer du libertarianisme jusqu'à la fin des primaires, il est sûr qu'ils seront toujours là pour le soutenir. Son fils, Rand Paul, est d'ores et déjà sénateur, et s'apprête à poursuivre le combat quand lui, du haut de ses 76 ans, ne le pourra plus.

Aux Etats-Unis, le libertarianisme est toujours une idée neuve. Comme le fut le communisme chez nous, cette doctrine économique poussée à l'extrême offre une solution incroyable à tous les problèmes. Et comme toutes les utopies, elle ne pourra jamais être totalement appliquée. Mais il est déjà intéressant de noter qu'elle pourrait avoir de plus en plus d'influence dans les décennies à venir.