Réflexions en cours

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lundi 8 octobre 2007

Le Grenelle de l'environnement

Le poste devait revenir à Alain Juppé, mais c'est en fin de compte Jean-Louis Borloo qui s'y colle. La défaite de l'un et l'infortune de l'autre ont abouti à cette situation, où Jean-Louis Borloo obtient une promotion en devenant numéro 2 du gouvernement, mais bien malgré lui, dans la mesure où il aurait préféré rester à Bercy pour tenter d'appliquer le plan "EFEL" qu'il défendait pendant la campagne présidentielle, reposant sur l'emploi, la formation, l'équité et le logement. A ses côtés dans son nouveau ministère, Nathalie Kosciusko-Morizet lui a été adjointe en tant que secrétaire d'Etat chargée du développement durable. Elle aurait pu sans problème récupérer le poste complet de ministre de l'environnement si Nicolas Hulot n'avait pas décidé de faire de ce dossier un enjeu de premier plan, en menaçant de se présenter s'il n'obtenait pas des garanties des autres candidats sur la volonté d'appliquer une politique écologiste ambitieuse. A ce titre, Nicolas Hulot avait promis, non pas un vice Premier ministre comme Nicolas Hulot le réclamait, mais un ministre d'Etat chargé de l'environnement, des transports, de l'équipement et du développement durable, numéro deux du gouvernement, un ministère occupé par un poids lourd de la politique française pour qu'il ait suffisamment d'autorité pour faire avancer les dossiers, et en premier lieu celui du Grenelle de l'environnement.

Ce chantier s'organise en trois étapes : une consultation entre partenaires sociaux d'abord (réunissant l'Etat, les ONG, les collectivités locales, les syndicats de salariés et les entreprises), une consultation de l'ensemble des Français ensuite (via des forums en région et sur internet), puis la prise de décisions au bout du compte, ce qui devrait se traduire par des lois et des protocoles. Actuellement la phase de consultation du public est en cours, mais celle-ci est bien discrète. Pourtant, il y a vraiment matière à débat. De nombreux points sont encore loin d'être tranchés. Et ce d'autant plus que les groupes de travail de la première étape n'ont pas pu se mettre d'accord sur des questions pourtant essentielles. Par exemple, le groupe de travail sur la lutte contre les changements climatiques et la maîtrise de l'énergie n'a trouvé aucun consensus sur le nucléaire. Certains souhaitent l'arrêt des recherches, d'autres au contraire veulent profiter du fait que l'énergie nucléaire n'émet pas du tout de dioxyde de carbone pour lutter contre l'effet de serre.

Sur ce point précis, il faut en effet parer au plus urgent. Les questions de déchets nucléaires ne sont pas à prendre à légère, mais actuellement, la nuisance est aussi faible qu'elle apparaît comme durable. En revanche, les centrales thermiques provoquent une nuisance forte, et immédiate. Même si la Terre a une capacité de récupération (limitée) face au dioxyde de carbone, il est bien possible que l'on n'ait pas la faculté de voir ce que cela donne dans la durée, vu les catastrophes qui sont en cours et qui ne feront que prendre de l'ampleur. Certains écologistes voient depuis des décennies la solution miracle dans les énergies renouvelables. Leur développement est en effet nécessaire, mais leur application n'est pas toujours simple. La France a de moins en moins d'endroits disponibles pour construire des centrales hydrauliques, celles-ci changent également la forme de l'environnement local, et il y a même des écologistes auto-proclamés qui s'insurgent contre les éoliennes qui gâcheraient le paysage de leur région. Il y a également des problèmes de coûts, que tout le monde ne souhaite pas assumer. Le Grenelle de l'environnement propose actuellement de faire passer la part des énergies renouvelables dans la production d'électricité française de 9 % à 20 % d'ici 2020. L'objectif est louable, et s'il est réalisé, doit permettre de faire diminuer en premier lieu la part de l'énergie issue des centrales thermiques. Il serait scandaleux que se répète en France l'absurdité qui a eu lieu en Allemagne, qui a cru naïvement que c'est l'énergie renouvelable qui prendrait le relais des fermetures de centrales nucléaires, alors que ce sont surtout les centrales à fuel et à charbon qui furent davantage sollicitées.

Les domaines de réflexion et de débats sont nombreux dans ce Grenelle de l'environnement. Le but étant justement de prendre en compte tous les aspects du problème. On y croise notamment les questions de la maîtrise de la consommation d'énergie, des OGM, du traitement des déchets, de la biodiversité ou de la recherche. A chaque fois, il y a débat, comme sur la question de l'avenir du nucléaire. Malheureusement, ce débat n'est pas forcément spectaculaire, et ne se retrouve donc pas autant à la une de l'actualité qu'il le mériterait. C'est pourtant un champ que chaque citoyen doit s'approprier.

samedi 6 octobre 2007

La ligue de football contre Canal Plus

Les grandes manœuvres ont commencé pour l'achat des droits de diffusion de la Ligue 1 de football français. Historiquement, Canal Plus en est le diffuseur, ayant été, à sa création, la seule chaîne de télévision voulant les acquérir. Mais l'arrivée de TPS sur le marché avait permis une concurrence effrénée avec Canal Plus sur les droits télévisés du sport et du cinéma, ce qui se traduit par une forte hausse des sommes nécessaires pour l'achat des droits de diffusion de la Ligue 1. Chaque renégociation du contrat a été l'occasion de coups spectaculaires et de polémiques. Les précédents rebondissements ont vu TPS l'emporter sur Canal Plus lors des enchères, pour au final accepter un partage des lots, puis le contrat suivant fut contesté en justice, favorisant une prolongation au bout du compte du contrat précédent à la suite d'un arbitrage, et le coup final fut la mise sur la table de 600 millions d'euros par an pour diffuser la ligue 1, une somme estimée pharamineuse à l'époque, pouvant même mettre en danger la survie de Canal Plus. Ce coup de poker devait en fait priver TPS d'un programme fort, pour ensuite l'acculer à la fusion. C'est, bon gré mal gré, ce qui s'est produit, et la forte croissance du nombre d'abonnés de Canal Plus a permis de digérer ce coût important.

La Ligue de Football Professionnel (LFP) qui commercialise ces droits, prépare actuellement le prochain appel d'offre. A priori, avec la disparition de TPS, Canal Plus doit être moins inquiet de la concurrence pour l'acquisition des droits de la Ligue 1. Et ce d'autant plus que ses autres concurrents sur la télévision à péage déclarent ne pas être intéressés. Vivendi, la maison mère de Canal Plus, a demandé à sa filiale de réaliser des synergies suite à la fusion avec TPS, pour que l'opération puisse être largement rentable. Les dirigeants de Canal Plus comptent donc bien réaliser de substantielles économies sur l'achat des droits de la Ligue 1, qui avaient été surpayés la fois précédente. Seulement la LFP ne l'entend pas de cette oreille. Elle croît dans un incroyable élan de naïveté pouvoir faire encore plus monter le niveau de ces droits, et rendre ainsi les clubs de football français plus riches. Or non seulement la fusion des deux concurrents d'hier fait qu'il y a une moindre motivation de la part des diffuseurs à augmenter l'enveloppe prévue, mais l'intérêt de la compétition ne le mérite tout simplement pas.

Lorsque Canal Plus a débloqué 600 millions d'euros pour ce poste de budget il y a trois ans, il justifiait son geste en expliquant que cette rentrée d'argent permettrait aux clubs de se développer, de devenir plus compétitifs et donc d'améliorer la qualité du spectacle proposé. Rien de tout cela ne s'est produit. Bien au contraire. Les années passent, et la médiocrité des clubs français est une évidence de plus en plus flagrante. Cela fait désormais six saisons qu'un seul club (Lyon) domine outrageusement le reste de la Ligue 1, faisant perdre tout suspense à la compétition dès l'automne. De plus, ce club n'a jamais été capable de dépasser les quarts de finale en Ligue des Champions, démontrant ainsi la grande faiblesse du championnat français : si l'OL est un géant en France, mais un nain en Europe, qu'est-ce que cela dit sur les autres équipes françaises ? Aujourd'hui, des clubs comme l'Olympique de Marseille ou le Paris Saint-Germain sont mal en point dans le classement, alors que ce sont des clubs comme Nancy ou Le Mans qui sont aux premières places, alors qu'elles ont bien moins de supporters. Dès lors, l'intérêt en pâtit grandement. La France n'a plus de grands clubs à part Lyon, qui est si faible en comparaison des grands clubs européens. Chaque année, les rares joueurs qui ont brillé en Ligue 1 partent à l'étranger. Le résultat est visible en sélection nationale : actuellement, parmi les joueurs titulaires de l'équipe de France seul le gardien joue en Ligue 1. De plus, le meilleur joueur incontesté de Ligue 1, Juninho, n'est même pas titulaire dans son équipe nationale, le Brésil. Où est donc passé alors l'argent fourni par Canal Plus aux clubs ? Ce mystère doit bien être résolu avant qu'un nouveau contrat soit passé.

Et de façon stupéfiante, le président de la LFP Frédéric Thiriez et certains dirigeants de clubs, comme Jean-Michel Aulas pour Lyon, souhaitent que les montants évoluent encore à la hausse, en évoquant le chiffre absurde de 750 millions d'euros. Il n'y a strictement aucune raison pour qu'un tel mouvement soit fait, surtout pour une compétition aussi fade et décevante. Ces gens vivent visiblement dans un rêve éveillé, prenant leurs désirs pour des réalités et croyant que les réticences de Canal Plus avant le début des enchères ne sont que des astuces de négociations. Il faudra pourtant bien qu'ils retournent à la réalité. Et s'expliquent sur ce qui s'est passé ces dernières années et dont ils sont responsables, car le résultat final est que cela a bien nui au football français.

Photo : Reuters
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