Réflexions en cours

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jeudi 21 septembre 2006

L'angélisme des juges face aux mineurs

Une nouvelle polémique vient d'éclater entre le ministère de l'Intérieur et le pouvoir judiciaire français. Nicolas Sarkozy a accusé les juges du tribunal de Bobigny d'avoir démissionné de leurs responsabilités, en ne condamnant aucun mineur à la suite des émeutes urbaines de la fin de l'année dernière. Les violences avaient pourtant été nombreuses dans le département de la Seine Saint Denis, et il reste l'un des départements les plus touchés par l'insécurité. Celle-ci est alimentée par une délinquance de personnes de plus en plus jeunes, connaissant bien ce que risquent les mineurs en cas de confrontation avec le système judiciaire français : c'est à dire pas grand chose. Si la jeunesse et un manque d'autorité peuvent expliquer voir excuser un acte d'immaturité, celui-ci peut être puni par une décision mesurée si le délit n'a comporté aucune violence. Pourtant, cette disposition a été étendue plus que de raisons par les juges pour enfants, qui pardonnent tout à des mineurs pourtant souvent multi-récidivistes. Dès lors, la justice française est considérée comme une plaisanterie par ceux-ci, et ils ne se privent donc pas de persévérer dans le non respect de la loi et de la société.

Les juges sont atteints, à l'instar d'une partie de la population française, de ce que l'on peut appeler "le complexe de Jean Valjean". Le héros du roman de Victor Hugo est quelqu'un d'honnête, de bon à la base, poussé à voler du pain pour nourrir sa famille, car étant trop pauvre pour pouvoir l'acheter, une pauvreté dont il n'est pas responsable. A l'instar de ce célèbre personnage de fiction, les délinquants sont donc considérés comme avant tout des victimes de la société, avant d'être vu comme des coupables. Si des circonstances atténuantes peuvent être retenues dans l'expression de la peine, elles ne doivent pas être le prétexte pour un pardon aussi rapide que facile. De nombreuses personnes sont aussi dans des situations difficiles, et restent honnêtes en toutes circonstances. Ne pas sanctionner, ne serait-ce qu'un minimum, un comportement fautif, revient à décourager ceux qui font le choix du respect de la société. De plus, dans le cas de la récidive, les circonstances atténuantes ne jouent plus : le coupable aura fait plusieurs fois le choix du non-respect de la loi, ce qui n'est pas admissible. Pour ne plus s'étonner de voir la criminalité et la délinquance augmenter, il faut donc en cesser avec l'angélisme au niveau des juges. Evidemment, cela demande également que les moyens nécessaires soient donnés aux systèmes judiciaires et pénitentiaires, pour qu'ils aient la possibilité d'exercer leur tâche en de bonnes conditions.

De même, il ne faut pas avoir peur de condamner des délinquants s'ils sont mineurs, quitte à leur faire purger leur peine dans des centres adaptés. Quelqu'un qui, à 14 ans, est capable d'actes fondamentalement hostiles et se montre dangereux pour les autres, sait bien que ce qu'il fait est mal. S'il a les moyens d'accomplir des actes délictueux, il doit être considéré comme pouvant assumer ses responsabilités, et doit répondre de son comportement comme tout à chacun. Ce n'est visiblement pas le cas aujourd'hui, puisque les syndicats de policiers et des préfets signalent que même si les délinquants sont arrêtés à force d'efforts, cela ne change rien, vu leur libération rapide par un système judiciaire parfois trop crédule. L'habitude d'avoir la larme à l'oeil face aux coupables permet d'oublier la douleur bien réelle des victimes. Un mineur qui brûle la voiture d'une famille aux revenus déjà très modestes sans aucune raison doit-il être pardonné ? C'est en tous cas ce qu'il se passe actuellement. C'est un problème, mais visiblement il est impossible d'en parler. Lorsque Nicolas Sarkozy a mis le doigt sur cette question, de nombreux représentants du système judiciaire l'ont accusé de ne pas respecter la séparation des pouvoirs et de haïr les juges. Le ministre de l'Intérieur est pourtant celui qui est responsable de la lutte contre l'insécurité, et lorsqu'il se fait l'écho de ses subordonnés les policiers qui font face aux difficultés de cette lutte jour après jour, il lui est demandé de ne pas intervenir.

La séparation des pouvoirs est un principe fondamental de notre République. Et si l'exécutif n'a pas le droit d'intervenir dans le domaine judiciaire, que celui-ci prenne au moins ses responsabilités dans la lutte contre la délinquance, car il ne doit pas oublier qu'il a aussi un rôle important à jouer.

jeudi 14 septembre 2006

Réformer les régimes spéciaux de retraite

La réforme des retraites a été l'occasion d'un débat difficile en 2003, notamment du fait que les régimes du secteur public devenaient réalignés avec ceux du privé, plus contraignants. En 1995, la question des régimes spéciaux, particulièrement favorables à ceux qui en bénéficient, et donc particulièrement coûteux, avait été posée, et était l'un des facteurs des manifestations et des grandes grèves de cette année là. En 2003, ce point fut donc soigneusement évité pour faire passer le gros de la réforme. Mais cela ne veut pas dire que la question ne se pose plus. Et c'est ce que rappelle François Fillon lorsqu'il déclare la droite devra réformer ces régimes spéciaux si elle vient à remporter les prochaines élections. Cela suppose donc que Nicolas Sarkozy soit le prochain Président de la République, et que donc ça n'arrivera pas avant juin 2007 en comptant les législatives, et que ce cas est de plus loin d'être certain.

Cela n'a pas empêché la CGT, par la voix du responsable du syndicat chez les cheminots, Didier Le Reste, d'annoncer immédiatement un mouvement de grève en représailles dès le mois prochain. Il faut dire que les employés de la SNCF, comme ceux d'autres grandes entreprises publiques, ont un régime de retraite particulièrement généreux, les permettant de partir en retraite des années avant le reste de la population, avec des pensions calculées sur les six derniers mois uniquement. Ce que les cheminots considèrent comme un acquis social, est effectivement la somme de dizaines d'avantages obtenus par le corporatisme le plus forcené et le recours systématique à la grève au mépris des clients et de la santé de l'entreprise. Il n'est donc qu'à peine étonnant qu'ils en soient à faire grève dès qu'il est mentionné par quelqu'un que leurs avantages pourraient éventuellement être remis en cause dans un cas de figure aussi lointain qu'incertain. Cela démontre l'état d'esprit qui règne chez certains d'entre eux. S'ils se positionnent à gauche, en professant la générosité à tout crin, il faut bien constater que cette générosité doit d'abord se faire envers eux. Et c'est donc par des justifications tirées de la lutte des classes qu'ils défendent leurs privilèges, nuisant en conséquence aux entreprises qui les emploient, à l'Etat qui doit couvrir les déficits ainsi générés et donc aussi aux clients/usagers qui paient plus chers pour entretenir le train de vie défendu par les syndicats, y compris par leurs impôts. C'est donc une belle leçon d'égoïsme qu'assènent des syndicats comme la CGT et SUD, ce qui est bien loin de "la défense du service public", utilisé comme prétexte pour se justifier auprès de la population qui souffre par leur faute.

Néanmoins, il faut avouer qu'ils sont nombreux à bénéficier de ces largesses extorquées à la communauté, remettre en cause celles-ci est donc dangereux d'un point de vue électoral. Dès lors, nous ne pouvons que reconnaître le courage de François Fillon sur ce point, ainsi que celui de Nicolas Sarkozy puisqu'il ne l'a pas démenti. Une telle réforme peut être difficile à mettre en oeuvre, de l'honnêteté est donc nécessaire pour oser l'annoncer longtemps en avance. Dans la mesure où ces régimes spéciaux sont néfastes à tous ceux qui n'en bénéficient pas, il est néanmoins possible qu'une majorité de la population appuie cette volonté de réforme.

dimanche 10 septembre 2006

Un parti écologiste

A l'université d'été de CAP 21, Corinne Lepage a appelé à une candidature unique écologiste à l'élection présidentielle. Cela fait suite à l'université d'été des Verts, où elle avait été invitée en compagnie de Nicolas Hulot, un autre candidat écologiste potentiel. Ces deux personnalités ne sont pourtant pas très bien vues par les militants du principal parti écologiste, les Verts.

Il faut dire que les Verts, à l'origine un mouvement dédié à la défense de l'environnement, s'est progressivement transformé en un parti dominé par l'idéologie gauchiste, perdant ainsi la neutralité originelle vis à vis de la gauche et de la droite. Les Verts portent désormais la responsabilité d'avoir fait de l'écologie un thème partisan, plutôt qu'un sujet pour lequel chacun doit s'impliquer. Cette évolution a été refusée par les anciens dirigeants verts Brice Lalonde et Antoine Waechter, qui ont en conséquence fondé leurs propres mouvements. Les Verts, qui en défendant une cause juste, celle de l'environnement, multipliaient les succès électoraux dans les années 80, sont devenus un parti miné par son éclatement en un nombre infini de tendances, suscitant peu d'intérêt des électeurs. Les Verts de Dominique Voynet et Noël Mamère sont devenus les défenseurs d'une politique "généreuse" mais irresponsable, parlant bien peu d'écologie, se permettant même de combattre l'énergie nucléaire, alors qu'elle permet au moins de ne pas émettre de dioxyde de carbone.

Les solutions défendues par les Verts ne sont souvent plus du domaine du possible, et sont de simples conséquences de leur idéologie post soixante-huitarde. Ce faisant, ils ne rendent pas service à la cause écologiste en se présentant comme ceux qui la défendent, alors que ce n'est plus le cas, ou tout du moins plus d'une façon sérieuse. Cela a favorisé l'apparition de mouvements écologistes indépendants, d'abord dissidents comme on l'a vu, mais aussi créés par des tiers, comme dans les cas de Corinne Lepage et de CAP 21. Leur voix est nécessaire pour rappeler à chacun l'importance de la prise en compte du facteur environnemental dans le développement des politiques, mais elle est polluée par celles des enfants maudits de l'écologie, les Verts. Pour ceux-ci, la question semble surtout de savoir s'il est opportun de se rallier à une candidature commune d'extrême gauche. Dès lors, il sera difficile de les ramener à la raison, et Corinne Lepage, ou d'autres, aura bien du mal à les faire adhérer à une candidature écologiste qui sortirait du cadre de la droite et de la gauche. Nous ne pouvons malheureusement que regretter une telle affiliation idéologique pour un parti qui aurait pu être utile, et souhaiter qu'un jour les Verts soient marginalisés par un mouvement écologique responsable d'une taille importante. En attendant, il ne faut pas oublier que c'est aussi la responsabilité des partis politiques traditionnels que de veiller à la préservation de l'environnement.

mardi 5 septembre 2006

De la double peine

Il y a peu de temps, un malfaiteur en cavale volait des voitures pour échapper à la police. Sa course folle s'est arrêtée lorsqu'il est tombé par hasard sur le dispositif important de sécurité déployé lors de la visite du Premier Ministre dans la région. Si l'anecdote parait amusante, elle mérite qu'on s'y penche de façon plus approfondie lorsque l'on apprend que le malfaiteur en question était déjà très connu de la police, de la justice et des médias, en ayant été au centre d'une ancienne polémique sur la double peine. Immigré algérien, il a eu six enfants avec une Française. En ayant été condamné à plusieurs reprises auparavant, il aurait du être expulsé de France. Mais il a fait jouer la corde sensible de l'opinion publique, en faisant valoir l'absence d'un père pour ses enfants s'il venait à être expulsé et ses liens forts avec la France. Le Ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy avait pris son cas en exemple pour supprimer la double peine, qui consiste à expulser les immigrés qui commettent des délits en France une fois qu'ils ont purgé leur peine de prison.

Elle a pourtant une justification : chaque immigré est un invité sur le territoire d'un pays dont il n'a pas la nationalité, et à ce titre il se doit d'avoir un comportement exemplaire. A quoi bon venir dans un nouveau pays si c'est pour ne pas en respecter les lois, et mettre à mal la vie de la société. Commettre un délit en étant étranger est donc une circonstance aggravante, vu que la confiance particulière que l'on a faite à l'immigré en le permettant d'être sur notre territoire n'est pas respectée. Comment justifier alors une présence supplémentaire si elle est négative ? C'est d'autant plus choquant dans le cas de récidivistes, comme c'était le cas pour cet homme. Certes, ses enfants grandiront en dehors de la présence paternelle. Mais si c'est pour le retrouver constamment en prison, cela ne change pas grand chose. Quant au lien sentimental avec la France, s'il permet d'y être irrespectueux des lois, alors il n'a aucune valeur. En outre, dans de nombreux pays démocratiques, la double peine est considérée comme parfaitement justifiée pour ces raisons. Il est alors difficile de voir la raison pour laquelle la France devrait se trouver en dehors de ce principe moral.

C'est qu'en fait ce terme même de "double peine" porte mal son nom. Il n'y a qu'une seule peine, celle purgée en prison. L'expulsion, elle, est une mesure de prévention qui devrait être automatique, au moins pour les récidivistes. Elle est le résultat de la rupture de la confiance accordée à l'immigrée, pas plus. Il n'y avait donc pas à reculer dans ce domaine.

lundi 4 septembre 2006

Place Jean-Paul II

Le parvis de Notre Dame vient d'être rebaptisé place Jean Paul II par le conseil municipal de la ville de Paris. Si l'UMP et le PS étaient d'accord sur cette décision, ce n'était pas le cas pour les Verts, le Parti Radical de Gauche, le Parti Communiste et plusieurs associations. S'il y eut une polémique, c'est que plusieurs raisons s'entremêlent.

Le premier argument est celui de la laïcité. La France est attachée à sa République laïque, et elle a été défiée à ce niveau là de façon régulière ces derniers temps. Certes, il y a déjà de nombreux lieux et rues qui ont été baptisés en hommage à des personnalités religieuses, et il ne s'agit pas de nier l'influence qu'a eu le catholicisme sur l'Histoire de la France. Mais alors que les controverses religieuses sont si fréquentes aujourd'hui, il faut s'en tenir à une stricte laïcité, pour la conserver comme le ciment qui fait le fondement de notre société depuis un siècle. Dès lors, il doit y avoir un dialogue et un respect pour les institutions catholiques comme pour toutes les autres religions. Mais il n'est pas nécessaire d'en valoriser une par rapport aux autres. La France a rendu hommage au pape Jean-Paul II lors de son décès, en étant fortement représenté à ses obsèques, et en mettant les drapeaux en berne, en considération d'un chef d'Etat ami mort dans l'exercice de ses fonctions. On peut considérer cela comme un traitement normal. Mais il ne faut pas en faire trop, surtout pour un représentant qui n'était que cela, contrairement à d'autres religieux qui se sont illustrés en dehors du cadre de l'Eglise, dans des organisations caritatives par exemple. Ainsi, cet hommage supplémentaire et superflu était une erreur.

D'autre part, même en dehors du souci de respect de la laïcité, on peut se poser la question de savoir s'il faut rendre autant hommage à Jean Paul II. Son long règne fut certes marqué par des réalisations considérables, il eut un rôle important pour la paix et dans la mise à mal du communisme institutionnel. En revanche, il ne prit pas toujours les décisions les plus sages, et cela se voit particulièrement dans son conservatisme religieux, se traduisant par une lutte décidée contre l'utilisation du préservatif, ce qui était irresponsable à l'heure de l'explosion de la mortalité due au SIDA. Il a également combattu l'avortement et l'homosexualité avec un même effort. Un bilan tâché donc, qui ne fut pas pris en compte dans la décision du Maire de Paris. Ce n'est d'ailleurs pas la première personnalité à qui l'on rend hommage de cette façon, sans regard vis-à-vis de la valeur des réalisations de celles-cI. Par exemple, était-il bien nécessaire qu'il y ait un lieu dans Paris nommé après Henri Krasucki, le leader syndical de la CGT ? Quant au quai François Mitterrand, rend-il hommage à l'homme, ce qui serait hautement discutable, ou bien seulement à la fonction présidentielle ? Ce serait alors une espèce de nécessité de circonstance qui voudrait que chaque Président de la Vème République ait un lieu dans Paris nommé à son nom. Mais François Mitterrand avait déjà la Grande Bibliothèque qu'il avait fait construire, comme le Musée du Quai Branly prendra probablement le nom de Jacques Chirac après la mort de ce dernier.

En dernier lieu, est-il bien utile de débaptiser des lieux aux noms bien établis juste pour rendre des hommages de forme à des personnalités disparues récemment, mais qui ne diront peut-être rien aux générations futures. Parfois, même les noms les plus forts ne dominent pas face aux appellations historiques. Ainsi, la place de l'Etoile ou l'aéroport de Roissy sont plus connus par ces dénominations que par le nouveau nom prestigieux qu'il leur a été attribué, celui de Charles de Gaulle. De même, le parvis de Notre Dame, immortalisé par Victor Hugo dans Notre Dame de Paris, sera certainement toujours connu sous ce nom là dans des dizaines d'années. Ce changement de nom apparaît donc vain autant que non justifié. Il n'est alors pas étonnant qu'il ait fait autant débat.

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