Réflexions en cours

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mercredi 28 novembre 2007

Service maximum !

Après une première journée de grève à la RATP et à la SNCF en octobre (qui s'était en fait étalée sur quatre jours), les salariés de ces deux entreprises publiques ont à nouveau fait grève pendant une dizaine de jours. Il peut paraître étonnant que cela n'ait pas duré plus longtemps, lorsque l'on sait que les syndicats promettaient de faire durer le "mouvement social" aussi longtemps que le gouvernement ne retirerait pas son projet de réforme de leur avantageux système de retraite. Mais les grévistes ne bénéficiaient pas du tout de la sympathie du reste de la population. Et surtout, les directions de la SNCF et de la RATP ont décidé d'ouvrir leur portefeuille pour offrir de généreuses compensations financières aux changements de régimes de retraite. Il n'est pourtant pas exclu que la grève reprenne, dans la mesure où le gouvernement ne retirera pas la réforme en question, alors que c'est bien là l'exigence des syndicats.

Le souhait de Nicolas Sarkozy qu'il n'y ait ni vainqueur, ni vaincu dans le conflit en cours apparaît assez naïve. Des syndicats comme SUD ou la CGT se considèrent exclusivement comme des forces de lutte, et continueront de brandir des menaces de grève tant que leurs innombrables revendications ne seront pas satisfaites. Le gouvernement s'est malgré tout montré assez bienveillant avec eux. Si les jours de grève ne sont plus payés, la charge représentée sur ceux du mois de novembre sera quand même étalée sur les feuilles de paie de décembre et de janvier, rendant plus indolore là grève pour les grévistes. Et alors que Nicolas Sarkozy avait promis le service minimum dans les transports en commun, ces derniers temps ont montré qu'il n'y avait rien de tel. Certes, la loi ne sera applicable qu'à partir du 1er janvier prochain. Mais fallait-il attendre aussi longtemps, plus de six mois après les élections, pour le faire appliquer ? Surtout que le texte en question est bien peu ambitieux. Cela se limite à déclarer 48h à l'avance si l'on fait grève, et à organiser un vote à bulletin secret pour prolonger la grève après huit jours de conflit. Il y a de quoi être circonspect sur les effets qu'auraient eus de telles mesures dans les dernières grèves. Cela peut permettre de mieux prévoir le trafic, mais les nuisances liées au manque de train, de bus ou de tramways demeurent. Ce qui se traduit par des rames encore plus surchargées que d'habitudes lorsqu'il y en a, l'impossibilité pour les personnes âgées de prendre les transports en commun lorsque le chaos règne comme ce fut le cas, de nombreux travailleurs ne pouvant se rendre sur leur lieu de travail et perdant ainsi des journées entières de salaire, des temps de transports démentiels pénalisant d'abord ceux qui vivent dans les banlieues, et d'une façon générale, la quasi impossibilité de se déplacer.

Entre les habituels retards, annulations et suppressions d'interconnexions, les usagers des transports en commun ont déjà l'impression d'avoir le droit à un service minimum permanent, même les jours de non grève. Pourtant les transports en commun servent l'intérêt général, c'est bien pour cela que la SNCF et la RATP sont des entreprises publiques. Si ce sont des services tellement indispensables à la communauté que l'Etat a cru bon de devoir les gérer lui-même, ce n'est certainement pas pour qu'ils ne soient pas assurés de façon périodique. Il faut en tirer les conclusions, et oser affirmer qu'il faut avoir une exigence de service maximum dans les transports en commun. Personne ne peut se permettre qu'ils ne fonctionnent plus. Cela a évidemment des conséquences : les grèves dans des services aussi cruciaux pour l'intérêt de la population ne doivent plus se traduire par des interruptions de service. Et si cela passe par des limitations du droit de grève, qu'il en soit ainsi. Le droit de grève est bien sûr reconnu par la constitution, mais dans ces termes : "le droit de grève s'exercent dans le cadre des lois qui le réglementent". Eh bien il est temps de le réglementer là où c'est vraiment nécessaire, c'est-à-dire lorsqu'il nuit à l'intérêt général.

La raison d'être de la SNCF ou de la RATP n'est ni d'être un investissement donnant droit à un rendement aux investisseurs, ni d'être un employeur. La raison d'être de ces deux entreprises est d'avant tout transporter les gens, ensuite les marchandises. Pour le métro, une solution pourrait être à terme l'automatisation de toutes les lignes parisiennes. La ligne 14 a prouvé sa force et son utilité pour les usagers ces dernières semaines. C'est un exemple à reproduire, et il est heureux que ce soit actuellement à l'étude pour un nombre croissant de lignes.

jeudi 8 novembre 2007

Besoin d'équité en matière de retraites

En 1993, Edouard Balladur a fait passer les salariés du privé de 37 ans et demi de cotisation pour la retraite à 40 ans. En 2003, ce fut le tour du régime général de la fonction publique. Aujourd'hui, il ne reste plus que les régimes spéciaux. Ceux qui en relèvent continuent de cotiser 37 ans et demi (en théorie, car certains cheminots peuvent partir en retraite à 50 ans, ce qui ne garantit même pas une telle durée de cotisation), et voient leur pension calculée sur leur salaire des six derniers mois, contres les 25 meilleures années dans le privé. Les régimes spéciaux sont complètement déficitaires, ce qui signifie qu'ils sont renfloués par les régimes de ceux qui travaillent plus longtemps, et c'est bien ce qui est profondément injuste. Lorsque François Fillon, alors simple sénateur, avait lancé en 2006 qu'en cas d'élection de la droite à la présidentielle, elle réformerait les régimes spéciaux, les syndicats concernés s'étaient lancés dans une "grève préventive" à la simple énonciation de l'hypothèse. Cela laissait bien imaginer les troubles qui suivraient si le gouvernement aurait suffisamment de courage pour s'atteler à une réforme aussi nécessaire. En effet, une bonne partie des cheminots et leurs syndicats n'hésitent pas un instant lorsqu'il faut sacrifier l'intérêt général sur l'autel de leurs intérêts particuliers. Le but est alors de nuire à la société suffisamment (en faisant grève) pour que celle-ci tolère la nuisance habituelle qu'elle lui cause (par le maintien des régimes spéciaux). Ils profitent d'une forte capacité de nuisance pour se bénéficier de règles particulièrement inéquitables.

Voilà pourquoi il faut la faire, cette réforme des régimes spéciaux. Et puisque ceux qui la combattent veulent en profiter pour s'assurer d'une nouvelle période de blocages en tous genres, il faut également faire comprendre que l'ancienne ère de l'immobilisme doit désormais prendre fin. En matière de retraite, l'équité doit prévaloir. En 2008, il est prévu que les cotisations passent progressivement de 40 à 42 ans, toujours pour permettre le financement d'une population qui vit plus longtemps. Ce serait alors 42 ans pour tous. On peut imaginer certains aménagements pour ceux dont le travail est si pénible que leur espérance de vie en est réduite. De même pour les pompiers et les militaires, dont le métier est de risquer sa vie pour l'intérêt général. Ce n'est en tous cas pas le cas des salariés de la RATP ou de la SNCF, loin de là. Comme ils vivent aussi longtemps que tout le monde (voire même ont une espérance de vie légèrement supérieure), leur départ à la retraite à un âge aussi faible fait qu'ils ont les plus grandes durées de vie en retraite en France. Cela permet au passage de relativiser la pénibilité supposée des métiers qu'ils effectuent.

Mais si c'est 42 ans pour tous, cela ne saurait être plus pour certains s'ils ne le souhaitent pas. En 2003, à la suite des négociations entre le gouvernement et la CFDT, la réforme a stipulé le fait que pour ceux qui avaient commencé à travailler très tôt pouvaient désormais prendre leur retraite une fois ces 42 ans de cotisation atteints, l'âge de 60 ans atteint ou non. Cette mesure fut peut être coûteuse (par rapport aux rentrées financières qu'auraient représentées les années de cotisations nécessaires pour atteindre 60 ans), mais elle est parfaitement juste. A ce titre, elle ne saurait être remise en cause. François Chérèque, dirigeant de la CFDT, s'est insurgé à raison lorsque François Fillon a voulu mettre ce dossier sur la table. Parce que ce dont a besoin le système de retraites, c'est d'équité. Une équité qui fasse que chacun remplisse sa part du contrat, ce qui veut dire travailler plus pour les bénéficiaires des régimes spéciaux, et pouvoir partir en retraite pour ceux qui ont d'ores et déjà cotisé 42 ans.

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