Un rappeur a déclenché la colère d'un certain nombre de personnalités politiques de par sa propension à évoquer de façon insistante sa volonté d'attaquer violemment et physiquement les femmes qui ne lui donneraient pas satisfaction sur le plan sentimental. Le clip d'une chanson en particulier avait attiré l'attention de la secrétaire d'Etat aux solidarités Valérie Letard, qui avait demandé que celui-ci soit retiré des sites l'hébergeant en ligne. L'événement attira les projecteurs sur le chanteur, dont la présence au Printemps de Bourges fut sujet à polémique. Dernièrement, il fut déprogrammé des Francofolies de la Rochelle, l'organisation de ce festival aurait été menacé de se voir retirer les subventions prévues par le conseil régional de Poitou-Charentes dans le cas contraire. Cet événement lança un nouveau débat sur la liberté d'expressions chez les artistes, plusieurs voix, à droite comme à gauche, estimant qu'il s'agissait là d'une censure visant à réprimer la libre expression.

Selon ces personnes, une communauté locale devrait subventionner un festival mais sans avoir droit de regard sur ce qu'il s'y passe. Le danger étant que l'argent public soit utilisé pour faire passer des messages à caractère politique. Mais l'on peut déjà se demander pourquoi un organisme public ne pourrait veiller à ce que les messages diffusés dans les enceintes qu'il soutient soient conformes à l'intérêt général ? Et si ceux qui financent de tels événements ne peuvent contrôler ce qu'il se passe, qui le fera ? A qui l'organisation rend-elle des comptes ?

Cette question des subventions publiques à l'art est de toute façon une question épineuse. L'art est le domaine le plus subjectif qu'il soit, et il est rare qu'une création récente fasse l'unanimité. Cela veut dire que l'argent des contribuables est souvent dépensé pour soutenir quelque chose qui ne plaît pas à une partie d'entre eux, sans que les retombées de cet argent dépensé ne soient manifestes. Le débat est miné, et d'une manière générale, c'est peut être le principe même des subventions publiques à la création artistique qu'il faudrait remettre en cause. La liberté d'expression doit être la plus grande possible pour un artiste. L'Etat, les collectivités locales ou tous les organismes publics ne peuvent se désintéresser de ce qui est fait avec l'argent public, qui manque déjà énormément. La liberté d'expression doit donc se faire en dehors du cadre de l'argent public.

La création artistique est trop abondante et mouvante pour que la puissance publique puisse voir à l'avance ce qui en restera à long terme. Il faudrait en fait définir la culture comme étant ce qui reste après la disparition des contemporains, et cela peut difficilement être anticipé efficacement. Voilà pourquoi les politiques culturelles publiques devraient être réorientées sur une ligne plus patrimoniale, c'est-à-dire la préservation du patrimoine et sa diffusion vers le plus grand nombre. Ses fers de lance naturels doivent en être les bibliothèques et les musées. Pour ce qui est de la création culturelle contemporaine, elle doit davantage dépendre du public directement. L'art doit vivre non pas de subventions arbitraires, mais de sa réception auprès de la population. C'est après tout, le meilleur moyen de lui assurer sa liberté.