Réflexions en cours

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lundi 26 mars 2012

Absolument débordée

En 2010, la publication du livre "Absolument dé-bor-dée !" avait fait du bruit. Sa mise en cause des administrations territoriales, et plus généralement des fonctionnaires, était virulente. Le premier reproche était affiché dès la couverture : leur manque de vrai travail. A la lecture, ce livre interroge d'abord. Ce n'est pas un récit autobiographique, mais pas un roman non plus. L'auteur, écrivant sous le pseudonyme Zoé Shepard, appartient à la fonction publique territoriale et affirme retranscrire son quotidien dans ce livre, mais n'essaie pas de cacher que l'histoire qu'elle nous conte est très largement romancée. En tant que tel, il est par exemple difficile de croire qu'autant d'anecdotes navrantes s'accumulent en une si petite période de temps. On peut alors penser qu'elle les a regroupées pour rendre leur succession plus spectaculaires, et a parfois peut-être chargé le trait.

EN continuant ce livre, il devient évident que l'auteur a elle aussi un souci. Elle affuble ses collègues de divers noms, et liste impitoyablement leurs défauts, mais n'aborde pas vraiment sa propre nature profonde de langue de vipère, prête à dire les pires horreurs sur tous ceux dont elle partage les journées. Etre cynique, c'est vraiment donné à tout le monde, et ce n'est pas son style d'écriture qui la distingue. Un véritable écrivain aurait eu un regard malicieux et non purement cruel sur son environnement. Du haut de son complexe de supériorité, elle va tellement loin dans le mépris que ses cibles tendent à devenir plus sympathiques qu'elles. Qui n'a jamais fait d'erreur ?

A lui seul, ce livre ne signifierait donc pas grand chose. Ce qui est véritablement troublant, ce sont les suites qu'il a eues. En lisant ce livre, les employés du conseil régional d'Aquitaine (les collègues de l'auteur) se sont reconnus, et s'en sont émus. Deux constats s'imposent. Le premier, c'est que s'ils se sont reconnus, c'est que le portrait que Zoé Shepard faisait d'eux était donc fidèle. En effet, elle avait pris le soin de masquer l'environnement (en changeant les noms, et en plaçant l'action dans une mairie). Ne restait donc que la description des collègues et des anecdotes qui en découlent. Le deuxième constat est qu'en protestant, ils ont bel et bien prouvé leur stupidité. En effet, quelle envie pouvaient-ils avoir de signifier à l'extérieur de leur service la façon dont ils ont caractérisés ? Maintenant que l'anonymat que Zoé Shepard avait créé est tombé, tout le monde sait que le conseil régional d'Aquitaine est rempli d'un personnel incompétent.

Qu'il y ait des employés peu compétents ou peu productifs dans le service public n'est pas étonnant. Non seulement on peut en rencontrer lorsque l'on a à faire avec l'administration, mais en plus, il y en a également dans le privé. Néanmoins, s'il y en a trop dans une entreprise privée, les résultats de l'entreprise s'en ressentiront et sa survie sera menacée, alors que dans le public, tout est financé par l'impôt (ou la dette).

En fait, le vrai problème que montre ce livre, c'est l'empilement des collectivités locales, et leur obésité de plus en plus fréquente. Malheureusement, la décentralisation a favorisé la multiplication de ces collectivités, et elles ont tendance à s'attribuer des missions qui ne sont pas institutionnellement les siennes. Il y a les mairies, les collectivités de communes, les conseils généraux et les conseils régionaux... A chaque fois, une administration entière. Pour les ceux qui les dirigent, être à la tête d'une grosse administration est valorisant. Mais les effectifs sont gonflés à coup de cadres, bien au delà des besoins. On se retrouve donc avec du personnel théoriquement qualifié, coûteux mais structurellement désœuvré. C'est une source immense de déficits publics, et donc une source aussi considérable d'économies à réaliser. Si ce livre permet de faire comprendre cela à plus de gens, il aura été utile.

lundi 12 mars 2012

Enfin une réforme sérieuse du bac ?

Miracle au ministère de l'Education Nationale ! Un rapport des inspections générales dit enfin explicitement ce que tout le monde savait déjà : le baccalauréat ne sert plus à grand chose. Voilà ce qu'on feint de découvrir : "des modifications réglementaires ont joué un grand rôle dans l'amélioration des résultats". Les barèmes sont moins exigeants, les questions moins pointues, les TPE aident les candidats, les deux tiers des candidats au rattrapage sont repêchés, les points gagnés dans les épreuves facultatives sont multipliées... Autant de facteurs cités qui transforment le bac en une épreuve de moins en moins difficile. En même temps, il ne permet plus d'ouvrir l'accès aux formations supérieures : la grande majorité des admissions se font sur dossier scolaire, et la plupart des décisions sont prises avant même l'examen en lui-même.

En même temps, l'organisation des épreuves du baccalauréat est coûteuse. "57 langues peuvent être évaluées au bac alors même qu'elles ne sont pas toutes enseignées dans le système éducatif", note le rapport. Cela justifie pourtant la conception de plusieurs sujets par langue, et la recherche d'examinateurs extérieurs. Les options sont des gouffres financiers. Au final, cela fait donc un rapport qualité/coût particulièrement défavorable.

Heureusement, le rapport indique également des voies de réforme possible :
  • la suppression des épreuves de rattrapage
  • la diminution du nombre de langues pouvant être présentées. On garderait 12 langues européennes, 4 langues internationales et 8 langues régionales. Cela fait encore beaucoup.
  • moins valoriser les épreuves facultatives
  • mettre des notes éliminatoires pour les matières les plus importantes
D'autres paraissent plus fumeuses, comme lorsque le rapport évoque l'interdisciplinarité ou l'autonomie de l'étudiant, qui ne sont pas des concepts pertinents à ce point des études. On tombe dans le grotesque lorsque les questionnaires à choix multiples sont mis en avant, certainement car leur coût est le moins élevé. Si on ne doit donc pas tout garder, ce rapport est néanmoins une bonne base de départ, dont le principal mérite est de poser enfin un constat clair sur l'état du bac aujourd'hui.

mardi 6 mars 2012

Haro sur les classes moyennes

La France est endettée, et son déficit public annuel est très important. Trop important. Il doit être réduit. Normalement, ce devrait être un sujet de cette campagne présidentielle. Seulement, on ne parle quasiment pas de programmes de réductions de dépenses. En revanche, il y a du monde pour créer de nouvelles taxes et de nouveaux impôts. C'est la grande spécialité des socialistes, et ce même alors que la France a déjà un taux de prélèvements obligatoires parmi les plus hauts du monde. Ainsi, le Sénat, depuis qu'il est passé à gauche, a voté des taxes par dizaines. Et dernièrement, François Hollande est allé jusqu'à annoncer la taxation à 75 % des contribuables gagnant plus d'un million d'euros par an. C'est consternant pour plusieurs raisons.

Déjà, parce qu'avec cette annonce, François Hollande se renie lui-même. En janvier 2011, il expliquait qu'il n'était pas normal qu'il y ait un taux supérieur à 40 %, disant alors qu'au delà, ce serait "confiscatoire". Ce revirement a bien évidemment été opéré à des fins politiciennes et démagogiques. Le but, c'est d'accuser les riches, devenus boucs émissaires de la société, comme dans l'ancien temps marxistes. En confisquant 75 % des revenus supplémentaires, le signal est fort. A ce niveau là, pour montrer sa haine du succès, ça aurait été plus vite de promouvoir l'élimination physique des concernés par lapidation. C'est lamentable, et c'est oublier qu'en France, le problème, ce n'est pas qu'il y ait des riches, mais bien qu'il n'y en a pas assez.

Ensuite, François Hollande avait raison de dire il y a un an que des taux trop élevés ne feraient pas une grande différence au niveau des comptes de l'Etat. Et sur ce point là, même le PS en est conscient actuellement, alors qu'il continue de promouvoir cette mesure. Ce sont les riches qui ont le plus de possibilités pour échapper à l'impôt. Il y a l'exil fiscal, cher à certains soutiens médiatiques du PS. Il y a aussi les niches fiscales, qui permettent de réduire légalement les montants versés au fisc. Tout cela, ce n'est accessible qu'à ceux qui peuvent se payer des fiscalistes.

Au bout du compte, on veut augmenter les impôts. Mais attention, car n'est pas les riches qui vont les payer, puisqu'ils peuvent d'autant plus y échapper qu'ils deviennent délirants. Ce n'est pas les pauvres non plus qui vont les payer, puisqu'ils ne sont pas imposables. Ce sont donc les classes moyennes qui doivent supporter le poids de la dette, et à travers les augmentations d'impôts, elles doivent payer maintenant. En visant les riches, les socialistes manquent leur cible, et tant qu'ils voudront régler les problèmes à coup d'impositions, ils ne réussiront qu'à mettre les classes moyennes en coupe réglée. L'alternative, c'est bien de s'attaquer aux dépenses pléthoriques de l'Etat.

jeudi 1 mars 2012

Zéro enthousiasme

Depuis que Nicolas Sarkozy est officiellement candidat, la campagne est vraiment lancée et bat désormais son plein. C'est ce qu'attendaient tous les autres candidats, qui estimaient que cette absence limitait l'enjeu, et donc l'intérêt des électeurs. Eh bien nous y voilà donc. On peut maintenant se faire réveiller par la voix de Marine Le Pen, invitée à commenter l'ensemble de la matinale d'une radio, comme d'autres. Les candidats se succèdent dans les émissions, bénéficient d'un temps d'antenne important... et peinent toujours autant à susciter l'intérêt.

S'il y a bien quelque chose qui est frappant dans cette campagne, c'est l'absence totale d'enthousiasme de la part d'à peu près tout le monde. Certes, les candidats accomplissent le marathon habituel. Les journalistes semblent les seuls à se délecter des polémiques fréquentes qu'ils aident à entretenir. En dehors d'eux, ça n'accroche pas. Les émissions politiques de TF1 en prime time font un bide. Le favori des sondages, François Hollande, ne suscite l'adhésion de personne. On est loin du "désir d'avenir" qui avait porté en son temps Ségolène Royal, avec ses militants dévoués. La plupart des socialistes semblent eux-mêmes surpris de l'avoir comme candidat, alors que Dominique Strauss-Kahn était le plan initial. Il n'y a personne pour expliquer quelle est la raison d'élire François Hollande, si ce n'est qu'il ne s'appelle pas Nicolas Sarkozy.

La campagne de 2007 avait été très différente. A cette époque, on sentait une grande énergie de la part du PS, de l'UDF et de l'UMP autour de leur candidat respectif. Le débat était vif, et l'intérêt du public manifeste. Le taux de participation aux deux tours de la présidentielle avaient été très forts, et même les perdants avaient récoltés plus de voix qu'accoutumés. On ne voit pas comment un tel scénario peut se reproduire aujourd'hui. Si on devait comparer cette campagne à une autre, la référence serait plutôt celle de 2002 : les candidats sont connus, il n'y a pas de grand thème qui se dégage fortement, la campagne sert un peu de bruit de fond à l'actualité. Les sondages évoluaient alors lentement, mais de façon sensible, dans l'indifférence quasi-générale. Avec le résultat que l'on sait. Il serait préférable que le Président de la prochaine législature soit élu avec l'adhésion des Français sur son projet, ou au moins sur son nom. Mais on semble plutôt s'orienter sur un taux d'abstention inquiétant pour tout le monde.

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