Réflexions en cours

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mercredi 24 novembre 2010

Didier Le Reste retraité

Didier Le Reste, le dirigeant de la fédération des cheminots CGT, prend sa retraite. Il a 55 ans. Il a commencé à travailler à la SNCF comme contrôleur il y a 34 ans. S'il avait été conducteur, il aurait pu partir à l'âge de 50 ans. L'essentiel est d'avoir 25 ans de services. Cet exemple concret montre bien que la réforme des régimes spéciaux de fin 2007 n'a pas changé grand chose, seul le nombre d'années de cotisation pour avoir une retraite à taux plein ayant augmenté. Seulement, les décotes par année non cotisée sont faibles, et leur implémentation se fait sur une très longue période, jusqu'en 2024. Et la période de référence est toujours les six derniers mois, et non les 25 meilleures années, augmentant mathématiquement la pension.

Hors les concessions accordées par le gouvernement se sont révélées nombreuses, trop nombreuses. La cour des comptes et plusieurs parlementaires se sont exprimés sur le sujet, ayant remarqué que le coût de ces concessions effaçait en très grande partie les gains résultants de cette réforme. En somme, le compte n'y est pas. 500 000 personnes cotisent pour les régimes spéciaux, et 1,1 million de personnes en sont retraités. Les cotisations ne suffisent donc pas, et en ce qui concerne les pensions de la SNCF, elles sont financées à la fois par des transferts de l'Etat et par des cotisations patronales. Pour la SNCF, c'est un coût important, évidemment répercuté sur ses clients. Inutile donc de se demander pourquoi ses prix augmentent. Et c'est aussi une charge financière pour tous. Elle ne se justifie pourtant pas vraiment.

Plutôt que de faire de fausses réformes des régimes spéciaux, pourquoi ne pas tout simplement les supprimer ? S'il est normal que les militaires aient un régime adapté, les salariés de la SNCF et de la RATP sont des travailleurs comme les autres. Pourquoi continuer de traiter des entreprises publiques, chargées de délivrer un véritable service d'intérêt général à la population, comme des vaches à lait ? C'est bien sûr une question de capacité de nuisance des syndicats, qui sont fiers de protéger leurs corporatismes. Bernard Thibault, 51 ans, dirigeant de la CGT depuis 11 ans, mais toujours rémunéré par la SNCF, a encore quatre années devant lui avant de prendre lui-même sa retraite et passer le relais à un autre organisateur de grèves en chef.

mercredi 17 novembre 2010

Retour sur Knysna

Il semble qu'en fin de compte les 23 bleus de la dernière coupe du monde ne toucheront aucune prime, en renonçant à leurs droits à l'image tant pour la compétition en elle-même que pour les matchs de qualification. C'est tout à fait normal, pour deux raisons. D'abord d'un point de vue moral, vu qu'ils n'ont pas à être généreusement récompensés pour une prestation dans laquelle ils ont été pire que mauvais. Ensuite d'un point de vue économique : les droits à l'image sont la rémunération obtenue par les athlètes pour que les sponsors puissent se servir de leur image pour valoriser leur marque. En l'occurrence, l'image qu'ils ont donné a été si mauvaise qu'elle a pu dévaloriser celle des sponsors. Ceux-ci ont demandé réparation à la Fédération Française de Football, et ont obtenu des remboursements. Il était dès lors normal que la fédération ne souhaite pas verser quand même de l'argent qu'elle n'a plus à sa disposition.

L'équipe de France aurait quand même pu se passer de ses ultimes tergiversations. Lorsque Patrice Evra a annoncé qu'ils renonçaient à tout, cela n'aurait pas du aller plus loin. Le scandale n'était même pas qu'ils aient produit une mauvaise performance pendant les matchs. A l'instar de tous les sportifs, ou même de tous ceux qui font quelque chose, il arrive que cela ne fonctionne pas. Il est néanmoins préférable de mettre le maximum de chances de son côté, de travailler pour la réussite. Le terrain était déjà propice à la polémique, puisque le public avait le sentiment que ce n'était pas le cas, en maintenant un sélectionneur qui avait gravement échoué pendant l'Euro précédent, et avait obtenu la qualification de son équipe dans des conditions particulièrement douteuses.

Mais le psychodrame de Knysna était une pure folie. D'abord, les insultes proférées par un joueur envers l'autorité (en l'occurrence Raymond Domenech) n'ont pas été immédiatement sanctionnées. L'exemple est particulièrement terrible. Ensuite, la "grève" des autres joueurs dans le bus a été encore pire. En refusant de s'entraîner, ils ont définitivement montré qu'ils se moquaient de leurs performances, qu'ils n'avaient pas envie de se donner à fond. Et tout cela pour soutenir l'arrogance de leur camarade...

Cela a symbolisé d'une manière plus globale le sentiment de la part du public que le football, leur sport préféré, perd le sens des réalités et des exigences minimales. Les sommes d'argent dont il est question posent particulièrement problème. Les footballeurs sont extrêmement bien payés. Qu'elle en est la logique ? Normalement, cela se justifie car les footballeurs sont peu nombreux à faire tourner une industrie qui rapporte des dizaines de millions d'euros à chaque club. Il est donc logique qu'ils en reçoivent une part importante sous forme de rémunération. Mais en fin de compte, ce n'est pas vraiment le cas. Les salaires se justifient sur l'offre et la demande, où il y a une demande très forte pour quelques super stars seulement, réclamés par les supporters de plusieurs clubs. Les salaires de ceux-là explosent, sans que cela soit compensé par des revenus supplémentaires équivalents pour le club. Résultat, ils sont nombreux à être en déficits et à avoir toutes les peines du monde à équilibrer leurs comptes.

En France, le système est arrivé à une voie de garage : tous les clubs ont comme modèle économique de prospérer sur les transferts. Il consiste à former ou développer la valeur économique de joueurs pour pouvoir les revendre à des clubs étrangers (riches théoriquement, mais déficitaires eux-aussi) à bon prix. En conséquence, ils n'ambitionnent plus sérieusement de remporter les compétitions européennes. Les grands clubs européens, eux, sont dans une fuite en avant, en étant soutenus financièrement par des personnalités richissimes ou bien refusant de voir obstinément qu'un jour il faudra payer la facture. Et tout cet argent arrive dans la poche de footballeurs souvent jeunes, voire immatures, et dont certains perdent rapidement le sens des réalités. Il y a de quoi être circonspect. Qu'il y ait de l'argent dans le football n'est pas un problème en soi. Le fait que le modèle économique ne fonctionne pas et que les valeurs sportives soient oubliées en est un. Dans toute l'Europe, il doit y avoir davantage de fair play, non seulement sportif, mais aussi financier.

jeudi 11 novembre 2010

Blog de droite

Une fois n'est pas coutume, parlons de ce blog. Aujourd'hui, cela fait cinq ans que le premier article a été publié. Environ 500 articles ont été écrits depuis, soit à peu près deux par semaine en moyenne. Certaines périodes sont plus fastes, d'autres moins, cela dépend de l'inspiration.

Une fois n'est pas coutume encore, ce billet sera écrit à la première personne. Comme certainement pour tous les autres blogueurs, mes propres motivations sont assez égocentriques. Je m'occupe de ce blog avant tout pour ce que cela m'apporte. Il me permet de mettre en forme ma pensée, de garder des notes d'une actualité toujours fugace, de construire une réflexion, petit à petit, comme le titre du blog l'indique. Je le fais en ayant pleinement conscience que je puisse me tromper, et sur certains billets, je m'en rends bien compte a posteriori. Par contre, je dois avouer que je ne me suis jamais soucié de quelconques statistiques ou d'une éventuelle présence dans le classement truc ou machin.

Les billets que je rédige reflètent évidemment mes points de vue. Je considère qu'en toute chose, tout est question de dosage. Sur chaque dossier, il y a un éventail d'alternatives, plus progressives que binaires. Les solutions extrêmes ne sont jamais les bonnes, car elles rejettent une réalité qui n'est faite que de nuances. Dans le monde actuel, dans la France d'aujourd'hui, voila quels sont mes opinions sur les endroits où mettre le curseur :
  • Je suis un fervent partisan de la construction européenne, croyant même aux bienfaits d'une Europe fédérale. Cela n'est possible que s'il y a une adhésion citoyenne à un tel projet, ce qui n'est actuellement pas vraiment le cas.
  • Je suis contre le communautarisme. Au vu des expériences passées, je ne crois pas que le multiculturalisme soit une politique durable, alors que l'assimilation, lorsqu'elle est faite, montre des résultats bien plus encourageants.
  • En matière d'économie, la grande question est de savoir quelle doit être l'importance de l'implication de l'Etat. En France, aujourd'hui, je pense qu'elle est trop forte. La compétitivité des entreprises françaises est faible, il y a trop peu d'exportations et surtout d'investissements, l'esprit d'initiative est trop souvent réprimé, il y a une hostilité malsaine envers le travail, et les déficits publics passés nous handicapent sous la forme d'une dette pénible à supporter.
  • Je ne crois pas que les délinquants soient des victimes de la société, ils sont des coupables qui lui nuisent. Lorsque quelqu'un commet un délit, c'est sa décision, et il doit pouvoir en être tenu responsable.
  • Je considère que dans une démocratie, chacun doit pouvoir s'exprimer librement, et que les décisions reviennent aux représentants élus, en l'occurrence le Parlement et la Présidence de la République. Je souhaite que la Vème République dure le plus longtemps possible, pour préserver des institutions stables et fortes.
Au fil du temps, l'axe politique évolue. Telle position qui était à gauche il y a un siècle est à droite désormais. Aujourd'hui, la grande majorité de ceux qui défendent des positions semblables aux miennes se trouvent au centre droit ou à droite, alors que ceux qui ont des opinions adverses sont soit aux extrêmes, soit à gauche. Cela fait de facto que je suis quelqu'un de droite. En conséquence, le blog que je tiens est de droite également. C'est un constat.

Contrairement à d'autre personnes, je ne tire ni honte ni fierté excessive de mon positionnement politique. Je suis toujours étonné de voir des gens affirmer qu'être de gauche, c'est bien en soi, que la droite c'est le mal absolu, et se prévaloir de tous les excès verbaux pour se glorifier ou disqualifier celui qui ne pense pas de la même façon. Je pense, au contraire, qu'il est nécessaire d'avoir des avis argumentés différents, pour qu'il y ait plusieurs possibilités de positionnement du curseur. La diversité des positions politiques (hors extrêmes), les alternances occasionnelles du pouvoir et la Raison permettent à la démocratie de s'auto-corriger et de se frayer un chemin. En tenant ce blog, j'espère y participer modestement, à la mesure de mes moyens.

jeudi 4 novembre 2010

L'Enseignement de Langue et Culture d'Origine, ou le communautarisme institutionnalisé

Surprise en passant devant des écoles primaires de certains quartiers. A côté de l'entrée, sous verre, avec les papiers sur les menus de la cantine et l'élection des parents d'élèves, on trouve un texte en arabe. Heureusement, on en trouve une traduction un peu en dessous. Il explique aux parents les modalités pour inscrire ou réinscrire leurs enfants à l'Enseignement de Langue et Culture d'Origine (ELCO). En se renseignant sur Internet, on découvre ce que recouvre ce sigle discret. Il s'agit de donner des cours de langue et de culture étrangère aux enfants d'origine immigrée dans les locaux de l'école primaire publique. Ces cours sont assurés par des professeurs étrangers, rémunérés par les pays d'origine, avec un contrôle quasi nul de la part de l'Éducation Nationale, faute d'inspecteurs compétents en la matière. Lorsque les ELCO ont été mis en place dans les années 70, c'était à l'époque de l'immigration massive voulue par l'Etat. Celui-ci croyait que les immigrés repartiraient à terme dans leurs pays d'origine, et les ELCO avaient pour but de maintenir leurs enfants dans leur culture d'origine pour que ce retour se passe facilement. Des telles conventions avaient ainsi été signées avec plusieurs pays dont provenait l'immigration, leur donnant ainsi une délégation d'éducation.

Mais cela ne s'est pas passé ainsi. Dans leur très grande majorité, les immigrés ont choisi de rester en France. Pourtant, les ELCO n'ont pas cessé. Et bien loin d'aider les enfants à retourner dans le pays d'origine de leurs parents, ils contribuent surtout au développement de ces cultures en France. Leur logique est devenue totalement communautariste. Comme le montre le fait que l'on s'adresse aux parents avec leur langue d'origine, ils participent à la coexistence de plusieurs sociétés au sein d'un même pays, ne partageant pas la même langue et la même culture. Plutôt que de favoriser l'assimilation des enfants au sein de la communauté nationale, on les rejette indéfiniment dans d'autre cultures, les marginalisant de fait. Et c'est une politique opérée par l'Éducation Nationale, dans les école publiques et laïques.

La République sous-traite consciemment une partie de la formation de ses futurs citoyens à des pays étrangers. Voilà le genre de folies dont on peut difficilement s'étonner ensuite de payer les conséquences. Et de fait, les alertes ont été données de nombreuses fois, c'est même un thème récurrent des rapports sur l'intégration. En décembre 2003, le rapport de la commission Stasi sur la laïcité constatait par exemple que "sur fond de droit à la différence, on a glissé vers le devoir d'appartenance" et que "cet enseignement relève d'une logique communautariste". Il notait que ce dispositif allait "souvent à l'encontre de l'intégration des jeunes issus de l'immigration", ainsi que de la promotion de la langue française. La commission Stasi recommandait la suppression progressive des ELCO.

Encore à l'heure actuelle, dans un rapport que le Haut Conseil à l'Intégration s'apprête à remettre ce mois-ci au gouvernement, la question des ELCO est longuement abordée. Celui-ci note que les effectifs des élèves ne cessent de croître, notamment ceux d'origine algérienne ou turque. Il raconte également que, de façon quasi-unanime, les acteurs et partenaires de l'école "s’interrogent sur la pertinence du maintien d’un tel dispositif et considèrent, à juste titre, que les changements d’objectifs assignés à ces enseignements, l’usage qui peut en être fait par des familles ou des enseignants, les défauts de pilotage ont des conséquences négatives sur l’intégration des élèves qui en bénéficient." Le rapport poursuit en mettant en avant le risque "d’assister à un éloignement des valeurs républicaines alors que la mission de l’école est de les porter auprès des élèves pour qu’ils se les approprient. Susceptibles de renforcer les références communautaires, les ELCO peuvent conduire au communautarisme alors que la République qui doit être enseignée ne peut pas être un conglomérat de groupes. Certains interlocuteurs craignent même que certains ELCO deviennent des « catéchismes islamiques »."

A l'instar de la commission Stasi, le Haut Conseil à l'intégration préfère que l'enseignement de l'arabe soit assurée par des cours de langue vivante ordinaires, par des professeurs de l'Éducation Nationale. Pour les ELCO, sa conclusion est la suivante : "Depuis son premier rapport de 1991, le HCI a toujours préconisé la suppression des ELCO tant ils lui paraissent contraires à l’objectif d’intégration. Il renouvelle ici cette recommandation qu’il considère comme l’expression d’une volonté forte d’intégrer les populations immigrées à la société française".

Cela fait donc deux décennies que la suppression des ELCO est demandée pour favoriser l'intégration, mais cette promotion du communautarisme est toujours autant institutionnalisée. Si l'Éducation Nationale est consciente du problème, il semble que les diplomates soient réticents à leur suppression pour maintenir de bonnes relations avec les pays avec lesquels ces accords ont été conclus. Mais pour quel résultat ? Il y a déjà suffisamment de forces qui gênent l'assimilation des populations d'origine étrangère pour qu'il y ait une politique publique qui agisse consciemment en faveur du communautarisme.

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