Réflexions en cours

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mercredi 28 mars 2007

Devant l'assaut des délinquants

Dans la journée d'hier, un homme de 32 ans est contrôlé à la gare du Nord, dans l'espace entre les lignes de métro et de RER. Il n'est pas en règle, et agresse les controlleurs. Ceux-ci, appelant des renforts, le maîtrise fermement. Des passant de tous âges et de toutes origines observent la fin de la scène, et s'émeuvent contre la violence faite à l'homme, sans savoir ce qui y a mené. Dans l'agitation, des personnes commencent à agir de façon violente, en dégradant le matériel, en provoquant les forces de police qui arrivent en nombre et en agressant les voyageurs. Très vite, la scène se tranforme en ce qui est qualifié par les agences de presse d'émeutes, et l'occasion fait sortir de la foule tous les délinquants qui s'y fondent, ceux-ci se couvrant parfois de capuches, d'écharpes pour cacher leur visage, ou bien restent à visage découvert, étant sûrs de leur impunité, n'hésitant pas à piller des magasins, ce qui montre le peu de rapport entre la violence utilisée et le mécontentement initial. De leurs faits le chaos s'installe. De nombreux spectateurs y assistent médusés, et témoignent aujourd'hui dans la presse. Ils y accusent la police d'être trop violente, ou de n'avoir rien fait. Les CRS présents ont reçu la consigne de ne pas charger. Comme souvent dans ce type de manifestations violentes, les malfaiteurs sont prompts à se fondre à nouveau dans la foule et à se faire passer pour d'innocentes victimes. Et le risque est réel pour les forces de l'ordre de toucher une vraie personne innocente qui passe par là, ou bien de créer un mouvement de panique. En conséquence, les innocents sont laissés à leur sort face aux délinquants. Seule une douzaine d'entre eux seront d'ailleurs interpellés.

Le fait en rappelle beaucoup d'autres, comme les violences urbaines de l'automne 2005, et l'intervention de bandes violentes lors des manifestations étudiantes contre le CPE. A chaque fois, c'est le même type de personnes qui causent le trouble. Des délinquants qui sont fiers de venir de zones de non droit, et qui en conséquence haïssent la communauté. Ils n'ont aucune pensée politique : lors des émeutes de 2005, on a vu beaucoup de sociologues venir tenter d'expliquer le comportement de ces personnes, de façon plus ou moins convaincante. Mais les premiers concernés n'avaient aucune justification, si ce n'est le goût pour la violence. Un article de Libération.fr d'aujourd'hui nous procure le témoignage d'un "jeune lycéen de passage", ce matin, à la gare du Nord : «Hier, j’étais là. Moi, j’ai participé à la bataille parce que les contrôleurs et les flics prennent trop la confiance. J’ai suivi le mouvement, et je n’ai pas trop cherché à comprendre pourquoi.» Cela ne va jamais chercher plus loin.

Tous ceux qui avaient été arrêtés lors des émeutes de 2005 n'avait rien à dire pendant leur procès pour se défendre, si ce n'est que d'essayer de dire qu'ils n'avaient rien fait, qu'ils étaient venus juste pour regarder. Pas de revendication politique, ou même philosophique. Ce n'est donc ni mai 68, ni la révolution. C'est en fait la réaction de délinquants qui n'aiment pas le fait qu'on leur impose le respect de règles de vie en communauté. "Les flics prennent trop la confiance" se disent-ils, lorsque les forces policières viennent mettre à mal leurs activités illégales.

Il y a un autre problème actuellement, c'est que les délinquants semblent réussir à gagner la sympathie d'une partie de la population qui voient dans leurs méfaits un message, ou bien les considère comme des innocents injustement accusés lorsqu'ils sont arrêtés. Toujours le complexe de Jean Valjean. Il est incroyable aujourd'hui de voir plus d'interrogations sur le rôle qu'ont les policiers ces temps-ci que de condamnation vis-à-vis des malfaiteurs qui ont agit hier. Une partie de l'opinion voit des bavures partout, sans voir les délits. Cela légitime de fait le comportement de ceux qui agissent contre la société. La mort de deux adolescents en novembre 2005 a été considérée comme une bavure policière, dans le sens où les policiers n'ont pas mis tout ce qu'elles auraient pu mettre en oeuvre pour les sauver. Ils sont donc devenus des espèces de martyres commémorés, sans que personne ne s'atarde sur le fait qu'ils fuyaient bien les forces de police après avoir commis un cambriolage dans un local de chantier, comme l'a montré le rapport de l'IGS, et qu'ils se cachaient précisément d'elles en allant jusqu'à s'introduire dans un transformateur électrique, alors que le danger potentiel était clairement signalé. Celui des trois qui a survécu a d'ailleurs été arrêté quelques mois plus tard pour sa participation à de nouvelles violences.

Dans notre société, ce sont bien les policiers qui disposent de la force publique. Les bandes délinquantes ne reculent devant rien aujourd'hui pour préserver leur domination de territoires par la peur et la violence. Elles doivent être combattues, plutôt qu'acceptées. Et au moins faut-il accorder plus de crédits aux fonctionnaires, qui risquent leur vie tous les jours, qui tentent difficilement de ramener l'ordre sans faire de bavure en essayant de trouver le bon équilibre, qu'aux délinquants qui nous agresse collectivement.

Photo : Guillot/AFP

jeudi 22 mars 2007

Des médias moutonniers

La campagne présidentielle de 2007 est très différente de celle de 2002, tant elle semble mobiliser toute la France. Il faut dire qu'il y a cinq ans, le morne affrontement entre Jacques Chirac et Lionel Jospin avait provoqué l'indifférence, puis la stupéfaction lorsque le résultat final fut révélé. Cette fois-ci, on a la chance d'avoir un vrai débat de fond de par les thèmes abordés par les candidats, et par leurs propositions. Mais s'il y a du fond, il n'est pas toujours facile d'y avoir accès, tant le traitement de la campagne réalisé par les médias est de qualité variable. Que ce soient la presse, la radio ou la télévision, les médias ont l'avantage d'avoir la haute main sur le contrôle des informations, ce qui leur permet de répliquer immédiatement à toute attaque faite à leur encontre. A chaque fois que le travail des journalistes est critiqué par quelqu'un d'extérieur, ils se sentent souvent concernés en tant que groupe et répondent de façon corporatiste. Pourtant, ils gagneraient à écouter les critiques que l'on peut leur faire. La principale étant le fait qu'ils s'intéressent souvent beaucoup trop à l'écume des choses, au côté spectaculaire.

Du sang et des larmes, voilà ce dont ils sont friands. La culture auto-entretenue du scoop ou de l'événement les entraine à surmédiatiser des faits sortant de la banalité, mais qui ne touchent pas forcément au coeur des choses. Ainsi les journalistes politiques ont un grand tort, celui de vivre dans le microcosme politicien et d'être presque totalement déconnecté de la réalité du reste de la France. Heureux de pouvoir assister à des scènes qui ne sont pas accessibles à tous, ils se targuent de connaître les dernières rumeurs, les inimités entre personnalités politiques, les affrontements feutrés et en oublient de se pencher sur le travail que eux ne voient pas, dans le bureau de ceux qui agissent. Leurs articles relèvent donc de la chronique du microcosme, sans parler en fin de compte de vraie politique, des décisions prises. De même, ils ne jugent le succès qu'à l'aune des sondages, dont ils sont totalement dépendants pour savoir ce que peut penser le reste des Français. On est dès lors plus loin de la compétition sportive, où les journalistes décrivent les coups donnés et reçus, en regardant les sondages pour savoir qui mène, sans davantage de rigueur sur l'information en elle même. Car c'est bien la rigueur journalistique qui est à la peine.

Le concept d'honnêteté intellectuelle est souvent bien peu pertinent pour décrire les mécanismes de la rédaction d'un article. Trop souvent le journaliste donne son point de vue en même temps que le fait, tant et si bien que l'information devient le fait plus la façon dont il faudrait considérer le fait. Il se trouve que dès que l'on touche à l'"analyse" ou au "décryptage", on se vautre dans la subjectivité. Certes, il est impossible d'atteindre l'objectivité parfaite lorsqu'il faut rendre compte de quelque chose, mais au moins peut-on essayer de mettre des limites à ce degré de subjectivité. Et pour cela, il faut veiller à bien séparer le fait de l'opinion du journaliste. Evidemment, certains journaux ou magazines, tels que Libération, Marianne ou Valeurs Actuelles assument totalement leur subjectivité de traitement de l'information et n'essaient même pas de faire autre chose que d'interpréter des faits à la réalité devenue éloignée pour mieux servir la cause qu'ils défendent. Si le débat d'idées est toujours intéressant, il serait vain néanmoins de vouloir s'informer à propos de quoi que soit en lisant ces revues. Pour les médias qui se veulent soit neutre, soit d'une certaine honnêteté intellectuelle, il est nécessaire de séparer au maximum les faits bruts des commentaires qui peuvent éventuellement l'accompagner.

Même en opérant de la sorte, il n'est pas certain que la qualité de l'information soit suffisante. En effet, le choix des informations publiées est déjà le résultat d'une certaine orientation. Et c'est dans ce traitement différencié des faits que l'on peut chercher un autre degré de subjectivité. Beaucoup parlent de la main-mise de grandes entreprises sur les principaux médias, ce qui profiterait de fait aux patrons concernés dans la promotion de leurs idées. D'autres prennent également en compte que les journalistes sont très majoritairement à gauche, indépendemment de leur rédaction, et sont ainsi influencés par leurs convictions dans leur travail. On peut discuter du poids relatifs de ces deux facteurs, mais il reste que pour les médias qui se veulent neutres, il y a un autre facteur que la partialité de conviction qui entre en compte parmi les biais du traitement de l'information. Résultat de la concurrence entre médias ou effet de l'addiction à l'info "chaude" de la part des journalistes, il se trouve que les médias ont tendance à tous se jeter sur la même information, parfois très secondaire, plutôt que de se consacrer aux sujets fastidieux mais importants.

Ainsi, dans cette campagne, les médias ont pour leur majorité consacré un soin particulier à couvrir polémiques, sondages (parfois bidonnés, comme le montre le cas de l'institut CSA) et petites affaires issues des ragots imprimés par le Canard Enchainé. Pendant ce temps là, les candidats parlaient dans leurs discours de la plupart des grandes thématiques qui compteront pour les cinq prochaines années, et il faut remercier les quelques sources qui permettent d'en prendre connaissance, ainsi que les émissions qui se consacrent aux dossiers de fond, à l'instar de France Europe Express sur France 3. Parfois, il est nécessaire de chercher soi même les informations sur les sites ou les documents réalisés par les candidats. Lorsque ceux-ci sont interrogés par certains interviewers, ils ne peuvent éviter les trop nombreuses questions sur l'orientation des sondages, les petites luttes politiciennes qu'on leur prete, ou la dernière polémique qui agite les agences de presse, seuls thèmes qui intéressent vraiment les journalistes du microcosme, mais dont se moquent la plupart des Français.

Dès lors, ce n'est plus l'image de médias utilisés par tel ou tel groupe pour manipuler la population qui apparait. C'est plutôt l'image d'un troupeau de moutons qui saute aux yeux, tant ils semblent manquer de sang froid et de maîtrise d'eux même, préférant suivre aveuglement et collectivement le dernier fait qu'ils croient spectaculaires. Si l'un des moutons de ce troupeau entend un bruit qui attise sa curiosité, il changera de direction pour voir ce qu'il en est. Tous les autres, le voyant s'éloigner, prendront l'initiative de le suivre, perdant de vue le but où ils voulaient aller. Ils iront donc tous dans la même direction, oubliant rapidement le sens de leur démarche, et changeront à nouveau de direction dès qu'un autre mouton s'éloignera des autres pour une raison ou pour une autre. Mieux vaut ne pas se retrouver sous les pattes de ce troupeau de mouton, car ils écrasent sans finesse tel un rouleau compresseur chaque sujet qu'ils viendraient à aborder. Un troupeau livré à lui même, sans berger, et disposant d'une force terrifante, voilà la réalité du système médiatique actuel. Bien sûr, c'est le lot de la liberté de la presse. Il n'est pas question de vouloir les reprendre en main d'autorité, la liberté de la presse étant la liberté de dire ou d'écrire n'importe quoi, y compris sur des sujets sérieux. On ne peut pas dire que les médias s'en privent. Au moins n'est-ce pas trop que de demander qu'ils respectent ceux qui les lisent, écoutent ou regardent, en faisant un plus grand travail de rigueur vis-à-vis de l'information. Et que par exemple, ils citent davantage les propositions des candidats faites dans leurs discours, plutôt que de ne retenir que les attaques personnelles qui n'occuppent que quelques secondes sur une heure de vision des choses.

lundi 19 mars 2007

L'extradition de Cesare Battisti

Hier, Cesare Battisti a été arrêté au Brésil par la police locale, en vertu de mandat d'arrêt international lancé à son encontre, grâce à des informations provenant de la police française. Son extradition est demandée depuis des années par l'Italie, où il a été condamné il y a une quinzaine d'années pour complicité dans le cadre de plusieurs assassinats dans les années 70. En 2004, la procédure avait été enclanchée à son encontre, et il avait été soutenu de façon surprenante par une certaine partie des intellectuels et des personnalités politiques françaises. Aujourd'hui, on retrouve les mêmes pour le défendre et souhaiter qu'il ne soit pas extradé en Italie. Bernard Henri-Levy, Olivier Besancenot, Bertrand Delanoë ou même François Bayrou en font partie, ce dernier déclarant même en tant que candidat à l'élection présidentielle qu'il voulait que Cesare Battisti ait droit à un nouveau procès. Cesare Battisti a pourtant déjà eu le droit à son procès, et on ne peut pas vraiment dire qu'il ait été empêché d'y aller. Son absence était le résultat de sa propre volonté, de sa fuite permanente par rapport à ses responsabilités, à commencer par son évasion des prisons italiennes en 1981. Comment peut-on dire qu'un procès par contumace est injuste lorsque l'inculpé prend la fuite pour éviter de l'affronter ? Du reste, c'est tout de même de l'Italie dont il est question, un pays démocratique voisin membre de l'Union Européenne. Il n'y a aucun doute sur la légitimité de leur système judiciaire, et ce n'est certainement pas à la France de se mèler des affaires juridiques des pays démocratiques amis.

Il est troublant de constater que quelques Français semblent considérer l'Italie comme un pays qui ne serait pas assez mûr pour prendre ses propres décisions quant à son Histoire, ou de la considérer comme un pays qui serait presque dictatorial lorsqu'elle demande à faire appliquer une peine à ses criminels. Dans le cadre de l'Union Européenne, qui n'est constituée que de pays démocratiques alliés les uns aux autres, les procédures d'extraditions devraient être automatiques. Il était ainsi incompréhensible que la Grande-Bretagne ait refusé à plusieurs reprises l'extradition de Rachid Ramda, accusé d'avoir financé les attentats de 1995 en France, faisant que la procédure a duré une dizaine d'années au bout du compte. Et comment la France aurait-elle réagi si l'Italie avait accueillie Yvan Colonna ou Maurice Papon, les considérant comme des "réfugiés" alors qu'ils ont ou avaient à répondre de leurs actes devant la justice française ? La collaboration des polices et des justices européennes doit être un impératif, et à ce titre on peut aujourd'hui prendre comme exemple celle engagée entre la France et l'Espagne pour lutter contre le terrorisme basque.

Peut être faut-il voir dans les polémiques actuelles une certaine bienveillance de certaines personnes envers le terrorisme d'extrème gauche. La "doctrine Mitterrand", discours stupéfiant de l'ancien Président dénué de valeur juridique visant à protéger les criminels communistes italiens, est ainsi mis en avant pour affirmer que la parole de la France est engagée. C'est surtout lorsque la France refuse que la justice italienne fasse son travail, provoquant l'ahurissement de nos amis transalpins, qu'elle est mise à mal aux yeux du monde. Mais ce sont les mêmes qui défendent les anciens terroristes français d'Action Directe. En fin de compte, ce ne serait qu'une énième émanation du complexe de Jean Val Jean, qui consiste à croire que les criminels sont avant tout des victimes de la société, avec comme conséquence de rejeter la Justice.

Enfin, quelle présomption d'innocence peut on vraiment accorder à quelqu'un qui fuit son procès organisé dans un pays de droits ? La procédure par contumace relève alors de sa propre décision. Le cas est similaire à celui d'Yvan Colonna, qui essaie aujourd'hui de se faire passer pour innocent alors qu'il a soigneusement évité une justice pendant des années, alors qu'il aurait pu démontrer plus tôt sa non-implication dans les faits... s'il croyait vraiment que tel était le cas. L'affaire Battisti laisse en tous cas une certaine amertume, au vu de cette partie de l'"intelligentsia" française qui préfère la défense des criminels en fuite au déroulement de la Justice d'un Etat de droits.

mercredi 14 mars 2007

Quelques orientations pour les transports ferroviaires

Plusieurs types de transports sont de grandes sources d'émissions de CO2, comme les voitures ou les avions. Dès lors, il est opportun de favoriser ceux qui n'en émettent pas. De nos jours, les trains fonctionnent à l'électricité, qui, si celle-ci est produite à partir de centrales nucléaires ou d'érnergies propres, n'est pas susceptible de faire augmenter l'effet de serre. Voilà pourquoi le développement des transports ferroviaires est le type de chantier qu'il faut encourager. Plusieurs orientations peuvent lui être données, à commencer par le ferroutage. Chaque jour, des milliers de camions transportent des marchandises à travers l'Europe. Ceux-ci ne peuvent être totalement éradiqués, dans la mesure où un transport individuel comme un camion dispose évidemment de bien plus de souplesse qu'un train dont les destinations sont limitées aux rails posés. Les camions doivent donc se concentrer sur leur mobilité, pour acheminer les marchandises (disposées sous containers standardisés) depuis leur lieu de production (ou de stockage) aux gares de ferroutage, pour que d'autres puissent les emmener depuis les gares d'arrivée à leurs destinations finales. Les distances seraient plus courtes, le nombre de camions nécessaires moins élevé, et donc la pollution moins forte in fine. Les compagnies de transport routier seraient donc plus concentrées sur la desserte de zones géographiques spécifiques (ce qui permet le maintien d'entreprises locales), avec une logique qui reposerait moins sur les économies d'échelles, les chauffeurs routiers pourraient faire des trajets plus courts et donc avoir une meilleure vie de famille. Cela nécessite bien sûr que le réseau ferroviaire soit très dense à travers toute l'Europe, qu'il soit bien entretenu et que les entreprises l'exploitant soient fiables. Le contrôle de l'Etat est ici nécessaire.

D'une manière générale, il faut encourager l'expansion du rail. Il peut être utilisé tant pour les transports en commun de voyageurs que celui de marchandises. Les connexions entre réseaux nationaux doivent être nombreuses pour qu'il soit envisageable d'acheminer un container du Portugal à la Pologne, comme il est possible de le faire par la route. En ce qui concerne le transport de voyageurs, il est avéré que le train domine le marché des transports en commun par rapport à l'avion dès que le temps de trajet devient à peu près équivalent. Là encore, il n'y a pas de secret : les lignes à haute vitesse sont certes coûteuses, mais sont tellement fondamentales dans le cadre d'une politique des transports qu'elles doivent en être la priorité. Une priorité établie au niveau de l'Union Européenne. Cette dernière a un grand rôle à jouer : dans le financement et l'encouragement bien sûr, mais aussi dans l'établissement de normes permettant une certaine unité dans le réseau ferroviaire. Les pays doivent chacun se sentir concerné, car c'est à eux de mener la concertation locale nécessaire pour l'avancement des projets, pour que les régions traversées par les lignes soient bien convaincues par le facteur d'intérêt général qu'elles représentent. Le raccordement à haute vitesse de la France à l'Allemagne via le TGV Est, à l'Espagne à travers les Pyrénées ou à l'Italie via la ligne Lyon/Turin sont aussi essentiels pour l'Europe que le sont déjà Eurostar pour la liaison avec la Grande Bretagne, ou Thalys avec le Bénélux. La place géographique centrale de la France en Europe est souvent vantée, il faut donc l'assumer. Et ce d'autant plus que même en restant sur son territoire, les liaisons entre Paris, Bordeaux, Strasbourg, Rennes voir Nice ou Toulouse restent encore loin d'être achevées. Les technologies doivent également être mises à contribution : pour que le trajet entre deux villes dure moins de trois heures pour un voyageur, il faudra compter sur les performances des locomotives. Voilà un sujet sur lequel l'effort de recherche et de développement doit se révéler utile !

Le rail peut également être important dans les trajets plus courts, à travers le tramway, le métro où les lignes régionales. A cet égard, il faut se rendre compte que pour une ville comme Paris par exemple, plus les lignes de métro sont nombreuses et connectées aux autres transports en communs et centres de vie et d'activité, plus elles arriveront à faciliter la vie des voyageurs et à jouer un rôle dans la région. Certains problèmes d'organisation subsistent : en Ile de France par exemple, le fait que le réseau RER soit géré par la RATP ou la SNCF en fonction des morceaux de lignes force la mise en place d'interconnexions artificielles sur une même ligne (Gare du Nord pour la B, Nanterre Préfecture pour la A), ce qui ne fluidifie pas le trafic, bien au contraire, et même amène une différence de qualité de service. Si les lignes Transilien (celles aux départs des grandes gares nationales) peuvent éventuellement rester du ressort de la SNCF, tout le reste doit passer à la RATP. De tels cas peuvent être également à régler dans d'autres villes de France.

Enfin, et c'est fondamental, les transports en commun doivent être fiables, ce qui exclue les retards, et surtout les interruptions de service lors des grèves. Un tel effort dans la direction du rail n'a de sens que si l'on a la certitude que les trains fonctionnent sans interruption. Outre l'augmentation de la fréquence des passages et la mise en place d'un service de nuit, le service habituel doit être correctement assuré. Car ce qu'il y a actuellement doit déjà être considéré comme un service minimum, on ne peut envisager que le service soit moins important (y compris en temps de grève) sans endommager sévèrement la vie sociale et économique d'une région ou d'un pays. L'exploitation du réseau ferroviaire est fondamentale et doit être assurée en continu, ce qui veut dire qu'il ne faut laisser à personne la possibilité de perturber ce système. Actuellement, c'est l'une des principales faiblesses de ce mode de transport, pour veiller à l'intérêt général, la volonté publique doit faire en sorte que cette nuisance potentielle soit éliminée. Que cela passe par la concertation ou par une loi n'est que le dilemme sur le moyen d'y parvenir, mais il y a en tous cas une obligation de résultat.

lundi 12 mars 2007

La discrimination positive

Le communautarisme est clairement un facteur de division au sein de nos sociétés. En séparant les personnes en fonction de critères ethniques, on empêche la réalisation d'une cohésion entre tous, et fait prédominer les intérêts particuliers plutôt que la recherche de l'intérêt général. C'est la raison pour laquelle chacun doit n'être considéré qu'en tant que citoyen, et non en tant qu'originaire de telle ou telle origine. Dès lors, la discrimination positive apparait comme inopportune. Tout du moins dans la forme qu'elle a aux Etats-Unis. Là bas, il s'agit de laisser des places dans certaines entreprises ou services aux personnes minoritaires en termes ethniques, avec comme population visée les noirs, qui sont proportionnellement moins représentés dans les élites ou même les classes moyennes que les blancs. Aux Etats-Unis, la population est statistiquement distribué entre les caucasiens, les afro-américains, les latinos, les asiatiques, les amérindiens, etc. Ceux qui sont sous-représentés à un certain niveau se soient réservés des places, via des quotas, comme dans les universités où un effort de recrutement particulier est fait vis-à-vis des afro-américains qui auraient plus de difficultés à y rentrer selon les critères traditionnels, du fait de leurs origines souvent plus modestes qui leur donnent moins de chance d'ascension sociale, car la reproduction sociale existe là-bas comme ici. Un tel principe est difficilement applicable en France : la République reconnaît chacun de ses enfants comme égaux, et refuses toute discrimination, positive comme négative, car une fois la nationalité française acquise il n'est plus question d'ethnie. Tout le monde est Français et tous sont égaux en droits, un point c'est tout. En outre, on peut toujours se poser la question du mérite de ceux qui bénéficient d'un tel système, car cela laisserait un soupçon sur la légitimité de la place trouvée ou du diplôme acquis.

La discrimination positive est donc un concept fâcheux en France. Et pourtant Nicolas Sarkozy ose prononcer le mot en France lors de sa campagne présidentielle. Il y a pourtant une différence : la discrimination positive qu'il prône se fait en fonction d'autres critères que ceux de l'ethnie. Dans son discours de Périgueux du 12 octobre 2006, il explique : "Pour compenser la discrimination négative il faut de la discrimination positive. Je propose un volontarisme républicain qui passe du discours aux actes. Je ne veux pas faire une discrimination positive sur des critères ethniques qui serait la négation de la République. Mais je veux que sur la base de critères économiques, sociaux, éducatifs, on mette tous les moyens nécessaires pour combler des écarts qui sont devenus insupportables et qui mettent en péril la cohésion nationale." Des critères économiques, sociaux et éducatifs, voilà sur quoi serait fait une distinction, et des efforts supplémentaires seraient faits pour ceux qui sont les plus défavorisés en fonction de ces critères. Nulle mention d'ethnie, d'origine ou de couleur de peau. Il s'agit en fin de compte que de redonner des chances supplémentaires à ceux qui n'ont presques pas à l'origine, et par une action volontaire, amoindrir l'inégalité des chances criante qui existe entre les différents Français.

C'est donc bien une certaine équité qu'il s'agit d'améliorer via ce travail sur une égalité plus réelle des chances. Et toute distinction sur les ethnies ou d'autres critères est et doit rester en dehors du débat. S'il n'y a qu'un peuple français, il y a des inégalités entre ses citoyens qu'il faut corriger. Ces efforts doivent être faits au plus tôt, dès la jeunesse, et dans les territoires défavorisés, pour que ce soit dès la naissance que les espoirs d'ascension sociale soient améliorés.

vendredi 9 mars 2007

Désobeissance civile

En 1997, 66 cinéastes signaient un appel à la désobéissance civile vis-à-vis de lois sur l'immigration qu'ils n'appréciaient pas. Ces temps-ci, José Bové est candidat à la présidentielle tout en étant condamné à une peine de prison ferme, pour un acte d'arrachage qu'il justifie par la désobéissance civile. Aujourd'hui, des militants hostiles à la publicité pronent également la désobéissance civile pour se permettre de vandaliser le mobilier urbain. Le concept de désobeissance civil est donc utilisé en de multiples occasions pour justifier le non-respect intentionel des lois. Selon ses concepteurs, la désobeissance civile doit être non-violente, être en application de l'intérêt général et se faire de façon publique. Il n'est pas certains que tous les militants anti-pub agissent en accord avec la dernière de ces conditions. En outre, agir en fonction de l'intérêt général est évidemment nécessaire, mais l'intérêt général est justement défini par le débat démocratique : les lois sont l'application de débats et d'élections, ce qui leur donne une légitimité totale dans les régimes démocratiques. Ainsi, il pouvait être nécessaire aux soldats et aux ouvriers du IIIème Reich de lui désobeïr lorsqu'il leur faisait accomplir des tâches inhumaines car le régime avait perdu toute légitimité populaire. Tant que les élections sont tenues de façon régulière et transparente, par une constitution approuvée par la majorité, force doit rester à la loi.

La non-violence doit en outre être fondamentale. Cela vaut aussi pour les violences faites aux biens. Gandhi, qui a utilisé la désobéissance civile pour favoriser l'indépendance de l'Inde, a ainsi annoncé qu'il préférait se faire maltraiter par les forces de l'ordre plutôt que de riposter face à elles. Sit-ins, non coopération ou marches pacifiques étaient ses faits d'arme. Leur puissance symbolique était plus forte que les destructions. Si de nos jours les promoteurs de la désobeissance civile (ou civique) comptent aussi sur la force symbolique, elle est secondaire par rapport à leur satisfaction d'avoir participé à une destruction matérielle et donc bien plus effective que symbolique, et se serve du concept avant tout pour donner un semblant de légitimité à une simple illégalité.

Ils dénaturent ainsi un concept qu'il ne faut utiliser qu'en de graves situations, lorsque tous les autres recours ont été épuisés et que le pouvoir en place n'est plus l'émanation du peuple. Car ceux qui pronent actuellement le non respect des lois sont loin d'avoir épuisés tous les recours. Le fait est qu'ils sont tout simplement en minorité dans l'expression de la volonté populaire, et c'est bien ça qu'ils ne supportent pas. En refusant de se soumettre à l'intérêt général, tel qu'il est énoncé par la majorité de la population, ce sont eux en fait qui bafouent la démocratie. Leur autre tort est de se servir d'une justification aussi malhonnête dans leur cas que celle de la désobéissance civile.

lundi 5 mars 2007

De la légitime défense

Ce genre de faits divers revient assez souvent : des voleurs en commettant leur forfait font face à la riposte armée des agressés, et l'affaire tourne mal pour les malfrats. Lorsque ceux-ci viennent à mourir, celui qui a tiré est accusé d'homicide, et est généralement envoyé aux assises pour répondre de ses actes. Tel était le fond de l'affaire (vieille de huit ans) dans un procès qui a eu lieu à Nancy la semaine dernière, où un pharmacien avait tiré sur les deux braqueurs qui lui volaient sa caisse. L'un d'entre eux est mort, l'autre a réussi à fuir plusieurs mois. Le pharmacien avait tiré trois coups de feu, le premier lorsqu'ils étaient encore dans son officine, les autres à l'extérieur, où un passant a d'ailleurs été blessé et le chien de celui-ci tué. L'avocat du pharmacien a plaidé la légitime défense. Il se trouve qu'il faisait du tir sportif, alors que l'arme des malfaiteurs était factice. La semaine suivante, sa pharmacie fut incendiée par des inconnus. Une autre affaire, plus médiatisée, remonte à l'automne dernier. Un homme se fait molester lors du cambriolage de son appartement par trois malfaiteurs cagoulés. En se débattant, il réussit à récupérer l'arme de ses agresseurs, tire dans la direction de l'un d'entre eux qui tombe de la fenêtre en fuyant, et meurt. Lorsqu'il fut placé en détention provisoire, de nombreuses personnes se sont émues du fait qu'il n'est fait que répondre à une agression.

Dans les deux cas, la question de la légitime défense est posée. Celle-ci a une limite : nul ne doit faire justice soit même. On est bien loin des Etats-Unis, où le droit à la détention d'armes permet de répliquer de façon violente à une agression. En France, même lorsque des détenus s'évadent et restent à portée de tir, ou bien dans d'autres situations, il est interdit de se servir d'une arme à feu en direction de quelqu'un à part dans un cas particulier : il faut qu'il y ait une menace évidente et directe sur la vie. Cette doctrine vise déjà à rendre les situations difficiles moins dangereuses : s'il est entendu que personne (y compris chez les forces de l'ordre ou les agressés) ne fera usage de la force, les agresseurs s'en serviront moins eux-mêmes pour se protéger, agresser ou prendre la fuite. Il est vrai qu'avec le foisonnement des armes à feu aux Etats-Unis, les morts par balles y sont incroyablement plus nombreux qu'en France

Mais le principe vaut également dans les situations où aucune arme à feu n'est impliquée : si l'on blesse sérieusement un malfaiteur en tentant de se défendre d'une agression d'une quelconque façon, on ne coupera pas à une enquête appronfondie qui visera à vérifier que l'intégralité physique était bien menacée. Il peut paraitre paradoxal que l'agressé qui essaie de se défendre soit mis au ban des accusés. En l'occurrence, le pharmacien a été reconnu coupable d'homicide volontaire et a été condamné à cinq ans de prisons, dont deux fermes. Cela laisse l'impression que les victimes potentielles n'ont d'autres choix de plier, ce qui les met sur un pied d'inégalité avec leurs agresseurs qui se moquent de toutes façon des lois. Le principe relève en tous cas du droit fil de la doctrine juridique. D'une manière générale, seul l'Etat doit pouvoir user de la force. Voilà pourquoi la Justice ne se sert de son glaive qu'après avoir pesé le cas dans sa balance, selon l'allégorie. Il reste néanmoins une impression étrange, lorsque l'agressé ne peut se défendre, lorsque des émeutes éclates quand quelqu'un meurt en forçant un barrage de police, lorsqu'il y a des représailles à l'encontre de ceux qui dénoncent des activité délictueuses... La légitime défense, tout en restant mesurée, ne doit pas être élevée au rang de nouveau délit, alors que parfois le rapport de force semble si distandu entre victimes et agresseurs.

dimanche 4 mars 2007

Le juste prix d'une consultation

Actuellement, les médecins généralistes sont en grandes négociations avec caisses d'assurance maladie pour que soit revalorisé le prix de leurs consultations. Ils considèrent en effet que la médecine généraliste est désormais considéré comme une spécialité, et que donc le tarif des consultations doit être le même que les autres spécialistes. Ce serait le résultat de la réforme du parcours de soin, qui visait à réduire les dépenses de l'assurance maladie. Il n'y a pas si longtemps, la consultation chez le médecin généraliste coutait 100 francs. Lors de la campagne éléctorale de 2002, les médecins généralistes créaient de l'agitation pour que la consultation passe à 20 euros, ce qu'ils ont obtenu. Aujourd'hui, les scènes de la pièce qui se joue sont troublantes tellement elles sont l'exacte répétition de ce qu'il s'est passé il y a cinq ans. Mais cette fois-ci, c'est pour passer à 23 euros. Le but est explicitement de peser sur la campagne présidentielle, pour que le gouvernement pousse les caisses à revaloriser le montant de la consultation. Celles-ci sont bien évidemment reluctantes à toute augmentation, car c'est autant de dépenses supplémentaires que devra rembourser l'assurance maladie, alors que celle-ci est déjà en déficit depuis bien longtemps.

A l'heure où l'on ne parle que de faire des économies en matière de dépenses de soin, que l'on fait payer aux patients des franchises et qu'il paye de plus en plus de taxes pour tenter de rééquilibrer les comptes, que le remboursement de certains médicaments sont revus à la baisse, le but serait d'augmenter consciemment les dépenses de façon uniforme pour l'ensemble des médecins généralistes ? Il faut certes remarquer que l'ampleur de la revalorisation, si elle parait importante, l'est moins lorsque l'on fait le calcul pour comprendre quelle hausse annuelle moyenne cela représente en fin de compte. Mais il reste que le principe d'augmenter les dépenses de façon conséquente alors qu'il y a déjà un douloureux déficit est mal compris. C'est censé être la contrepartie des efforts faits par les médecins pour réduire justement les dépenses de santé, mais on peut s'interroger sur le besoin de mettre une motivation financière au soucis d'économie. D'une manière plus générale, il peut paraitre surprenant qu'une profession admirée pour ses efforts pour la santé des autres apparaisse très intéressée par sa rémunération. Certains répondent à ce type d'objection en disant que les médecins travaillent énormément, ce qui est vrai, et qu'ils ont fait de très longues études. On peut toutefois imaginer qu'ils savaient ce qui les attendait lorsqu'ils faisaient ces études. En outre, il faut remarquer qu'il n'y a pas vraiment de métier dans lequel neuf années d'études payent davantage que la médecine (même si les spécialistes gagnent davantage évidemment que les généralistes, et motive dans un sens l'actuelle revendication).

Ces négociations peuvent donc laisser un gout étrange dans la bouche des observateurs. Comme chaque question de budget, c'est une affaire de priorité. Les médecins généralistes doivent être valorisés, mais l'augmentation du tarif de leur consultation ne doit pas forcément dépasser l'inflation pour commencer. Ensuite, il serait plus opportun de trouver des façons de différencier la rémunération en fonction de certains critères. Par exemple, certaines localités rurales sont en déficit de médecins généralistes justement, alors qu'ils sont très représentés dans la région parisienne et sur la côte d'azur. Ne pourrait on pas récompenser en priorité ceux qui font le choix de carrières moins enthousiasmantes à première vue ? Vu les efforts demandés aux patients, il ne parait pas innoportun d'en demander également aux praticiens.

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