La réforme des retraites a été l'occasion d'un débat difficile en 2003, notamment du fait que les régimes du secteur public devenaient réalignés avec ceux du privé, plus contraignants. En 1995, la question des régimes spéciaux, particulièrement favorables à ceux qui en bénéficient, et donc particulièrement coûteux, avait été posée, et était l'un des facteurs des manifestations et des grandes grèves de cette année là. En 2003, ce point fut donc soigneusement évité pour faire passer le gros de la réforme. Mais cela ne veut pas dire que la question ne se pose plus. Et c'est ce que rappelle François Fillon lorsqu'il déclare la droite devra réformer ces régimes spéciaux si elle vient à remporter les prochaines élections. Cela suppose donc que Nicolas Sarkozy soit le prochain Président de la République, et que donc ça n'arrivera pas avant juin 2007 en comptant les législatives, et que ce cas est de plus loin d'être certain.

Cela n'a pas empêché la CGT, par la voix du responsable du syndicat chez les cheminots, Didier Le Reste, d'annoncer immédiatement un mouvement de grève en représailles dès le mois prochain. Il faut dire que les employés de la SNCF, comme ceux d'autres grandes entreprises publiques, ont un régime de retraite particulièrement généreux, les permettant de partir en retraite des années avant le reste de la population, avec des pensions calculées sur les six derniers mois uniquement. Ce que les cheminots considèrent comme un acquis social, est effectivement la somme de dizaines d'avantages obtenus par le corporatisme le plus forcené et le recours systématique à la grève au mépris des clients et de la santé de l'entreprise. Il n'est donc qu'à peine étonnant qu'ils en soient à faire grève dès qu'il est mentionné par quelqu'un que leurs avantages pourraient éventuellement être remis en cause dans un cas de figure aussi lointain qu'incertain. Cela démontre l'état d'esprit qui règne chez certains d'entre eux. S'ils se positionnent à gauche, en professant la générosité à tout crin, il faut bien constater que cette générosité doit d'abord se faire envers eux. Et c'est donc par des justifications tirées de la lutte des classes qu'ils défendent leurs privilèges, nuisant en conséquence aux entreprises qui les emploient, à l'Etat qui doit couvrir les déficits ainsi générés et donc aussi aux clients/usagers qui paient plus chers pour entretenir le train de vie défendu par les syndicats, y compris par leurs impôts. C'est donc une belle leçon d'égoïsme qu'assènent des syndicats comme la CGT et SUD, ce qui est bien loin de "la défense du service public", utilisé comme prétexte pour se justifier auprès de la population qui souffre par leur faute.

Néanmoins, il faut avouer qu'ils sont nombreux à bénéficier de ces largesses extorquées à la communauté, remettre en cause celles-ci est donc dangereux d'un point de vue électoral. Dès lors, nous ne pouvons que reconnaître le courage de François Fillon sur ce point, ainsi que celui de Nicolas Sarkozy puisqu'il ne l'a pas démenti. Une telle réforme peut être difficile à mettre en oeuvre, de l'honnêteté est donc nécessaire pour oser l'annoncer longtemps en avance. Dans la mesure où ces régimes spéciaux sont néfastes à tous ceux qui n'en bénéficient pas, il est néanmoins possible qu'une majorité de la population appuie cette volonté de réforme.