Au soir du second tour, les déclarations de la famille Le Pen et des responsables du Front National étaient aussi agressives que d'habitudes. Mais celle de Gilbert Collard se montrait un peu plus apaisée. Bien sûr, il a promis à cette occasion d'être un "casse-couilles démocratique" à l'Assemblée Nationale. Seulement, être casse-couilles, c'est ce qu'il a toujours été, il n'a pas attendu de faire de la politique pour commencer. Il vient d'être élu député du Gard sous l'étiquette Front National, mais son parcours politique a été très sinueux. Encore en 2008, il était président du Parti Radical de l'Allier, et avait été candidat à la mairie de Vichy. Il y a peu de lien entre le Parti Radical, mouvement centriste depuis une centaine d'années, et le Front National, parti politique ancré dans l'extrême droite. Alors est-ce que les convictions politiques de Gilbert Collard ont changé tant que ça en si peu de temps ? Pas vraiment : en fait, ce sont surtout les opportunités qui ont évolué.

Les partis radicaux de droite comme de gauche ont malheureusement en commun d'être des structures politiques "prêtes à l'emploi". On y trouve un nombre étonnant de militants, par rapport à d'autres formations qui font plus de bruit, mais peuvent compter sur moins de bras. Seulement, peu de personnalités émergent de l'appareil militant. En conséquence, ils accueillent volontiers des profils médiatiques qui se greffent à eux pour servir leurs intérêts. Les radicaux peuvent être une aide précieuse pour négocier avec le parti principal de droite ou de gauche, et permettent de monter des campagnes qui tiennent à peu près la route. Bernard Tapie ou Christiane Taubira se sont ainsi alliés avec les radicaux de gauche sur le tard, et Jean-Louis Borloo n'est entré au Parti Radical Valoisien que peu de temps avant d'en devenir le président.

Tel était certainement le cas de Gilbert Collard. Il voulait faire de la politique, le Parti Radical lui permettait d'en faire, c'est ce qui s'est passé. Visiblement, comme il connaissait Marine Le Pen, il s'est rendu compte qu'il y avait plus d'opportunités de ce côté-là, c'est ainsi qu'on l'a retrouvé comme soutien de la nouvelle présidente du FN. Du reste, toute sa carrière il a été l'avocat de causes médiatiques grotesques et la plupart du temps indéfendables. C'est exactement ce qu'est Marine Le Pen. Cela ne le change donc pas tant que ça. Mais au moins, sa carrière politique a enfin pu décoller, en recevant l'investiture FN (alors qu'il n'en est même pas membre) dans une circonscription bien éloignée de l'Allier, son précédent "terrain de jeu". Et grâce à une triangulaire, le voilà élu.

Dans l'hémicycle, il viendra donc faire le spectacle, dans l'espoir d'être dans le viseur des caméras. Mais sans responsabilité ni groupe parlementaire, il comprendra rapidement que c'est moins rigolo que ce qu'il pensait. Qu'importe, ça l'aura distrait, et ça fera bien sur sa carte de visite.