Il n'y a pas que Martine Aubry qui soit candidate à la prochaine présidentielle dans le Nord Pas de Calais. Il y aussi plusieurs habitants de Bauvin et de Provin, deux petites villes de ce département. Un photographe leur a proposé de mettre en image leurs envies de changement, comme s'ils étaient eux-même candidats. L'initiative est bienvenue : chacun doit pouvoir profiter de cette échéance électorale pour s'exprimer, et mettre en avant sa vision. Si on n'a pas les professions de foi, les affiches sont elles plutôt bien fichues. Dans la presse, les "candidats" s'expriment sur leurs motivations. Ils regrettent une classe politique qui ne tient pas ses promesses. Eux ont des priorités et des promesses simples, qu'ils tiendraient.

En fait, leurs slogans résonnent comme ceux que l'on voit sur bon nombre d'affiches de candidats professionnels. Une candidate souhaite "un new deal français", se représentant sous une pluie de billets. Elle affirme : "Les politiques ne s’occupent que des classes supérieures. Pour nous les pauvres, il n’y a aucune réforme. Je ne suis pas politicienne mais je suis sûre qu’en injectant de l’argent pour les couches les plus pauvres, on pourrait changer le monde !" Dans cet avis, il y a d'abord un constat : ceux qui se considèrent "exclus" ont par définition le sentiment qu'ils sont délaissés, qu'on ne s'occupe pas d'eux. L'ampleur de leurs difficultés les empêche de remarquer tout ce qui est déjà fait pour eux. En l'occurrence, les politiques s'occupent bien plus des pauvres que des classes supérieures, ne serait-ce que parce que les premiers sont plus nombreux. L'Etat français est déjà très redistributeur. Cela passe par la progressivité de l'impôt sur le revenu, la prime pour l'emploi, la Sécurité Sociale, le RSA... Et la législation est également très protectrice.

Un "new deal" viserait à relancer la croissance en injectant de l'argent public (provenant de l'emprunt) au sein des défavorisés. Concrètement, c'est la politique suivie par la France depuis 30 ans. La régularité de ces injections d'argent fait que l'économie s'est habituée à cet interventionnisme public, qui au bout du compte, n'a plus d'effet, si ce n'est d'augmenter la dette.

Les candidats du nord se rendront peut-être compte du problème que posent les promesses politiques. La promesse politique peut être plus ou moins concrète. S'il s'agit de la mise en place d'une mesure précise, le responsable politique est totalement coupable s'il n'essaye pas de la mettre en place. Mais s'il s'agit d'une vaste ambition, comme "pour une société plus ouverte" ou "réduire la pauvreté", alors la faute repose dans le slogan lui-même. Chacun veut réduire la pauvreté, mais ça reste un vœux pieux si on n'explique pas comment concrètement en même temps. Si ce n'est pas le cas, ce n'est même pas la peine de considérer qu'il s'agit d'une promesse politique. Un citoyen qui dit "moi, je réduirai la pauvreté", sans se rendre compte de tout ce que cela implique, risque de faire lui-même une promesse intenable.