La Présidence de François Hollande s'ouvrira demain sur un symbole fort : il rendra hommage au grand promoteur de la colonisation au XIXème siècle, Jules Ferry, un authentique raciste. Le choix de Jules Ferry comme personnalité marquante au mieux relève de la mémoire sélective, au pire témoigne de valeurs profondément abjectes de la part du nouveau Président. En effet, pour toute personne qui connait un minimum l'Histoire de France, Jules Ferry c'est avant tout le grand architecte de la colonisation de l'Afrique et de l'Asie par la France à la fin du XIXème siècle, qu'il justifiait pour le prestige de la France, la nécessité d'ouvrir de nouveaux débouchés et la nécessité d'éduquer les "races inférieures". Tout cela est parfaitement connu, et il y a un an, la façon dont Jules Ferry a justifié la colonisation dans un long discours à l'Assemblée Nationale était déjà racontée ici-même, bien avant qu'il ne vienne à l'esprit de François Hollande de déposer des fleurs au pied de sa statue.

"Il faut dire ouvertement qu'en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures..." "Je répète qu'il y a pour les races supérieures un droit, parce qu'il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures..." Voilà comment Jules Ferry énonçait sans sourciller ses théories sur les races inférieures et les races supérieures (auxquelles il appartenait dans son esprit, naturellement). Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui reprochent encore à la France son passé colonial. Est-ce là la réponse du nouveau Président, montrer que pour lui, les théories racistes de Jules Ferry doivent être honorées, cinquante ans après la décolonisation ?

Le philosophe Luc Ferry a dit que, plutôt que rendre hommage à son homonyme Jules Ferry, François Hollande aurait mieux fait de rendre hommage à Georges Clemenceau, qui s'est fortement opposé à Jules Ferry et à la colonisation, car il ne croyait aucunement à l'existence de "races inférieures" et à la nécessité de faire la guerre à des peuples qui n'avaient rien demandé. C'est vrai. Et il y a bien une statue de Georges Clemenceau sur le parcours de François Hollande, sur les Champs Elysées, à Paris. Mais elle restera seule, quand un des plus grands représentants de la colonisation et du racisme en France se verra célébré par le nouveau Président, François Hollande, comme symbole de l'inflexion qu'il veut donner à son quinquennat.