Le mois dernier, la première pierre du siège d'ITER (sigle de "réacteur thermonucléaire expérimental international") a été posée. Le début de la construction des installations scientifiques devrait avoir lieu l'année prochaine. Elle durera plusieurs années, le début des opérations étant prévue pour 2019. Comme dans tous les grands projets d'envergure, il y aura probablement des retards. Ce sera difficile, ce sera long, ce sera coûteux. Autant en être conscient dès maintenant, ce projet apparaît comme un joyeux gouffre financier. Mais il s'agit là certainement de la plus belle opportunité du siècle, et peut-être même du millénaire.

Le champs de la recherche scientifique est presque infini, et si aucun domaine ne doit être négligé, nous devons quand même nous fixer quelques priorités. La santé, l'environnement et l'énergie sont les domaines de recherche dans lesquels nous avons le plus de besoins immédiats. Ils sont d'ailleurs liés entre eux : la façon dont nous produisons notre énergie a des impacts sur l'environnement, et un environnement dégradé est néfaste pour notre santé. Avec les technologies actuelles, nous approchons un cul de sac. Les énergies fossiles sont en quantités limitées, compliquées à obtenir géopolitiquement et entraînent une sévère pollution des airs, entraînant le réchauffement climatique. L'énergie nucléaire peut être risquée, les combustibles, encore abordables actuellement, ne sont pas inépuisables, et les déchets nucléaires nécessitent une gestion méticuleuse. Les énergies renouvelables sont peu développées : elles sont en général plus coûteuses, leurs possibilités sont limitées (on ne peut pas faire des barrages partout par exemple), et sont parfois sujettes à des oppositions incompréhensibles (comme dans le cas des éoliennes).

Les technologies nucléaires actuelles peuvent permettre de tenir le choc pendant que l'on développe davantage les énergies renouvelables. Mais il faudra quelque chose de plus fort pour que l'humanité puisse se développer harmonieusement sur le long terme. Et une voie particulièrement intéressante reste à explorer, celle de la fusion nucléaire. Théorisée en même temps que la fission nucléaire au début du XXème siècle, elle permettrait la création de réacteurs auto-entretenus où la fusion d'un plasma pourrait créer des quantités importantes d'énergies. Le combustible serait le deutérium, disponible de façon quasi inépuisable dans l'eau de mer par exemple. Le procédé n'entraîne aucun rejet nocif, apportant une réelle solution en matière d'environnements. De surcroît, le risque d'explosion serait nul, toute anomalie se traduisant par un refroidissement du plasma.

Le principal défi est en fait que l'installation produise davantage d'énergie qu'il n'en a eu besoin pour chauffer le plasma. Pour l'instant, les scientifiques n'y sont pas encore arrivé, mais c'est précisément le but d'ITER. Le projet est en effet dimensionné pour produire 10 fois plus d'énergie qu'il n'en nécessite, et permettra le développement de la technologie via de multiples expériences pendant 20 ans. Le travail de recherche à mener est colossal, et bénéficie pour l'occasion d'une coopération internationale inouïe. L'Union Européenne, les Etats-Unis, la Russie, la Chine, l'Inde, le Japon et la Corée du Sud sont tous partie prenante du projet. Les possibilités potentielles sont fantastiques pour l'humanité, et si aucune exploitation commerciale ne peut être envisagée avant les années 2040, il nous faut soutenir complètement ces perspectives d'avenir. C'est justement parce que cela prendra du temps qu'il faut commencer au plus tôt. Dès maintenant, la construction d'ITER apporte un bel espoir. D'ici la fin du siècle la science nous aura peut-être apporté une solution définitive à l'un des plus graves problèmes actuels de l'humanité.