La rentrée parlementaire de l'Assemblée Nationale a été avancée de quelques jours avec une session extraordinaire. Certains députés s'en émeuvent, se plaignant pèle mêle de ne pas avoir suffisamment de temps pour travailler sur les textes ou pour s'occuper de leur circonscription. En fait, ce problème de contraintes horaires se pose surtout pour les députés qui cumulent les fonctions et qui n'ont donc pas le temps de tout faire avec application. Mais du côté du Sénat, il n'y aura pas de session extraordinaire : il faudra d'abord attendre que les élections sénatoriales aient lieu, elles doivent avoir lieu le 21 septembre prochain pour une partie d'entre eux. Ils devront ensuite désigner le nouveau président de la haute assemblée, un poste prestigieux pouvant éventuellement servir de chef de l'Etat intérimaire en cas de vacance du pouvoir.

Le Sénat a récemment été sous les projecteurs avec la dernière réforme institutionnelle. Cela fait longtemps que la gauche accuse le Sénat d'être une institution illégitime car structurellement à droite selon eux. La gauche voulait donc de nouvelles règles d'élections des sénateurs la favorisant. Pourtant, en septembre prochain, le nombre de sénateurs socialistes devrait augmenter sans aucun changement de règles. Les victoires de la gauche dans les élections locales lui ont permis de peser davantage dans le corps des grands électeurs votant pour élire les sénateurs. Il est ainsi possible que le Sénat passe à gauche dans un avenir proche. On peut alors parier que la gauche se sentira immédiatement moins pressée pour remettre en cause le rôle du Sénat. Dans les années 30 déjà, les radicaux dominaient le Sénat, avant que ce ne soit les centristes d'une manière plus générale pendant la IVème République et au début de la Vème. Le Sénat centriste s'était opposé à la réforme constitutionnelle du général De Gaulle visant à faire élire le Président de la République au suffrage universel. Celui-ci avait voulu se débarrasser de cette force hostile en projetant de transformer le Sénat en une sorte de vaste Conseil Economique et Social, l'une des propositions de son référendum de 1969 qui échoua. A l'époque, les socialistes s'étaient d'ailleurs opposés à la réforme. Maintenant que ce sont des sénateurs issus des sensibilités gaullistes qui contrôlent le Sénat, ceux-ci ne souhaitent plus qu'on y touche.

Si la droite et le centre droit devraient sauver leur majorité cette fois-ci, reste donc la question de la présidence pour les trois prochaines années. Jean-Pierre Raffarin et Gérard Larcher semblent être les deux favoris, reproduisant l'affrontement entre centristes et gaullistes au sein du Sénat qui l'a relativement marqué ces dernières décennies. Gérard Larcher peut avoir fait de la conquête du plateau l'objectif de toute une vie, Jean-Pierre Raffarin peut pertinemment faire remarquer que les personnalités politiques de l'UMP qui occupent des postes influents appartiennent tous à une seule sensibilité politique, et que cela créé un déséquilibre. Néanmoins, le premier objectif de l'affaire est surtout de s'assurer que Christian Poncelet ne soit pas reconduit. Celui-ci a 80 ans et perpétue à merveille l'image d'une chambre en pleine léthargie tout en croyant pouvoir faire oublier la transparence de dynamisme de sénateurs usés grâce à des opérations de communication coûteuses. A ce titre, le prochain président du Sénat serait bien inspiré de proposer la fusion de Public Sénat avec La Chaîne Parlementaire de l'Assemblée Nationale, pour commencer.