La crise des finances publiques grecques est vécu comme une crise politique européenne. La révélation de déficits et de dettes cachées ont entrainé un doute sur la solvabilité de ce pays, et donc un renchérissement du coût de son crédit. Cela forme un cercle vicieux, mettant à mal l'économie grecque. Une solution en deux parties est inévitable. D'une part, les autres membres de la zone euro doivent rassurer les créanciers de la Grèce en garantissant les dettes de ces derniers. Dans le cas contraire, la Grèce coulerait en faisant défaut, cela mettrait à mal l'ensemble de la zone euro. D'autre part, la Grèce doit prendre ses responsabilités, et faire en sorte de diminuer ses considérables déficits publics pour que la situation se résorbe le plus rapidement possible. Les mesures impopulaires sont alors inévitables.

Si le deuxième volet créé l'agitation à l'intérieur de la Grèce, c'est le premier volet qui est controversé à l'extérieur. L'Allemagne apprécie peu en effet de "renflouer" la Grèce, même en se contentant de garantir la dette grecque. Ce mécanisme, déjà utilisé pour le sauvetage des banques, consiste à prêter de l'argent à la Grèce, de l'argent que l'on emprunte soi-même sur les marchés. La Grèce rembourse cet argent à ses partenaires à un taux plus élevé, mais toujours moins élevé que celui qu'elle aurait du payer si elle avait du emprunter cet argent elle-même sur les marchés. Ce que les autres pays prennent en charge, c'est en fait le risque de défaut de la Grèce. Et c'est pour cela qu'ils peuvent se permettre de faire pression sur la Grèce pour qu'elle diminue ses déficits et donc réduise ce risque.

Une fois que cette solution est mise en place, la contagion de la crise grecque est largement endiguée. Le risque provient alors davantage de l'irrationalité des marchés financiers, ou même de leur spéculation intéressé. En voyant un pays de la zone euro en situation difficile, tous les agents anticipent une baisse de l'euro (suite à d'éventuelles créations monétaires ou baisse de l'activité économique). Avec le mécanisme des prophéties auto-réalisatrices, l'euro baisse en effet. Encore une fois, cela ne fait pas plaisir à l'Allemagne, qui aime avoir une monnaie forte et une inflation stable. Or jusqu'à présent, l'inflation reste stable, inférieure à 2 %, le risque étant plus la déflation que l'inflation coutumière des périodes de forte croissance économique.

La baisse de l'euro est en fait une bonne nouvelle. Ces dernières années, le taux de change entre l'euro et le dollar était devenu franchement délirant, dépassant régulièrement le dollar et demi pour un euro. Cela ne correspond pas du tout au meilleur critère de comparaison, la parité de pouvoir d'achat. Par exemple, selon l'indice Big Mac, le célèbre sandwich coûtait 35 % plus cher dans la zone euro qu'aux Etats-Unis en janvier dernier. Cela signifie que l'euro était grandement surévalué. A l'aune de cet indice, le cours de l'euro devrait davantage tourner autour de 1,06 $ pour un euro. Dès lors, on comprend qu'un cours se situant entre 1 $ et 1,20 $ doit être l'objectif.

La zone euro a beaucoup souffert de cette surévaluation de sa monnaie. Ses exportations coûtaient plus chers, les importations moins chers, incitant les entreprises à délocaliser pour pouvoir être compétitives. Même si la crise grecque fut un coup dur pour l'Europe et pour elle-même, il s'agit en fait d'une excellent opportunité. Sans tomber dans l'excès non plus, il faut simplement espérer que ce mouvement continue pour que l'euro puisse se stabiliser dans une zone favorable et juste.