jeudi 2 août 2012
La légitimité du Président roumain
Par xerbias, jeudi 2 août 2012 à 23:43 :: Europe
Lorsqu'en 1991, la Roumanie voulut se donner une nouvelle constitution en sortant de l'ère communiste, elle choisit curieusement de s'inspirer fortement de la constitution française de la Vème République française. En conséquence, le Président est élu directement par le peuple, ainsi que les députés. Contrairement à la France, les durées des mandats de Président et de député n'ont pas été égalisés, le gouvernement change donc au gré des coalitions ou des élections législatives, sans lien avec les élections présidentielles. En 2004, Traian Basescu (centre droit) avait été élu Président de la Roumanie sur la base d'une programme anti-corruption. Ne se contentant pas du simple rôle de figure tutélaire de la nation, il avait prévenu qu'il voulait influer sur les politiques menées. Alors qu'il était Président, la Roumanie a rejoint l'Union Européenne en 2007. Mais ils semble qu'en se montrant trop impliqué en politique, il énerve profondément ses adversaires politiques.
En 2007, l'opposition avait demandé sa destitution, arguant qu'il n'était pas dans son rôle de Président. La cour constitutionnelle roumaine n'avait pas vu de faute de sa part dans l'exercice de son mandat, mais il se trouva quand même une majorité du parlement pour le suspendre et organiser un référendum sur sa destitution. Le résultat fut clair : 75 % des votants s'opposèrent à ce qu'il soit destitué. En 2009, Traian Basescu fut réélu à la Présidence. Réélu de peu, certes (avec 51 % des voix), mais réélu légitimement quand même, pour un second mandat de cinq ans.
Comme en France, la Roumanie peut donc connaître des périodes de cohabitation. Depuis mai dernier, le nouveau Premier ministre est ainsi un social démocrate, Victor Ponta. Bien qu'englué dans son propre scandale (la thèse qu'il écrivit plus jeune était truffée de copier-coller), Victor Ponta a voulu une nouvelle crise politique. Considérant que son arrivée au poste de Premier ministre n'était pas compatible avec la présence d'un libéral à la Présidence, il souhaite pousser Traian Basescu à la sortie. Et il a lui même engagé la procédure de référendum pour destitution visant le Président. Considéré comme sortant, Traian Basescu est d'autant plus impopulaire que la crise économique mondiale est passée par là , et s'est traduit par une politique de rigueur pour les Roumains. Le référendum a eu lieu dimanche dernier, mais le parti de Traian Basescu préféra demander à ses soutiens de s'abstenir, le référendum n'étant pas valide si la participation est en dessous de 50 %. Le résultat fut donc de 88 % de oui, mais seulement 46 % de participation. Victor Ponta écume, considère que Traian Basescu doit partir quand même, et a essayé de bidouiller le seuil de validité avant et après l'élection.
Cela fonctionnera peut-être, d'ailleurs. Mais le principe n'en est pas bon pour autant. Traian Basescu a été élu pour cinq ans, pas pour être destitué en cours de route par un coup politique. Si les Roumains n'étaient pas contents de lui, ils pouvaient tout à fait le remplacer en 2014. Mais tenir des référendums pour destituer tel ou tel homme politique est destructeur, car renforce l'instabilité politique, alors que la fonction de Président est justement de permettre une certaine stabilité. Le référendum sur le nom d'une seule personne créé un climat politique malsain, et lance une véritable chasse à l'homme qui n'aide jamais à faire avancer la chose publique. Ce système existe dans d'autres pays, avec des effets souvent néfastes.
Aux Etats-Unis, la procédure du "recall" existe dans plusieurs Etats, permettant d'organiser un référendum sur la destitution d'un élu local, s'il se trouve suffisamment de gens pour signer une pétition. Quand le gouverneur californien Gray Davis dut affronter une telle procédure, la Californie fut un véritable cirque politique où n'importe qui s'est présenté pour le remplacer. Arnold Schwarzenegger fut élu. Plus récemment, le gouverneur du Wisconsin fit face à cette menace, l'élection créant un climat de guerre civile. Pendant ce temps, il n'est jamais question de résoudre les problèmes des électeurs. Et ce genre de menaces empêche les décisions impopulaires, mais parfois nécessaires. Dans nos démocraties, les élus ont le pouvoir pour un temps limité. Il doit être respecté, ce qui suppose de ne pas rester après la fin de son mandat (n'en déplaise à Laurent Gbagbo), mais cela suppose aussi de laisser le temps imparti à l'élu. Pour qu'il soit viré en cours de mandat, il faut que de vraies fautes graves soient établies, et non pas de simples divergences de politiques à appliquer. Dès lors, il faut espérer que Traian Basescu termine normalement son mandat, et ne soit plus inquiété par ce genre de coup fourré.
En 2007, l'opposition avait demandé sa destitution, arguant qu'il n'était pas dans son rôle de Président. La cour constitutionnelle roumaine n'avait pas vu de faute de sa part dans l'exercice de son mandat, mais il se trouva quand même une majorité du parlement pour le suspendre et organiser un référendum sur sa destitution. Le résultat fut clair : 75 % des votants s'opposèrent à ce qu'il soit destitué. En 2009, Traian Basescu fut réélu à la Présidence. Réélu de peu, certes (avec 51 % des voix), mais réélu légitimement quand même, pour un second mandat de cinq ans.
Comme en France, la Roumanie peut donc connaître des périodes de cohabitation. Depuis mai dernier, le nouveau Premier ministre est ainsi un social démocrate, Victor Ponta. Bien qu'englué dans son propre scandale (la thèse qu'il écrivit plus jeune était truffée de copier-coller), Victor Ponta a voulu une nouvelle crise politique. Considérant que son arrivée au poste de Premier ministre n'était pas compatible avec la présence d'un libéral à la Présidence, il souhaite pousser Traian Basescu à la sortie. Et il a lui même engagé la procédure de référendum pour destitution visant le Président. Considéré comme sortant, Traian Basescu est d'autant plus impopulaire que la crise économique mondiale est passée par là , et s'est traduit par une politique de rigueur pour les Roumains. Le référendum a eu lieu dimanche dernier, mais le parti de Traian Basescu préféra demander à ses soutiens de s'abstenir, le référendum n'étant pas valide si la participation est en dessous de 50 %. Le résultat fut donc de 88 % de oui, mais seulement 46 % de participation. Victor Ponta écume, considère que Traian Basescu doit partir quand même, et a essayé de bidouiller le seuil de validité avant et après l'élection.
Cela fonctionnera peut-être, d'ailleurs. Mais le principe n'en est pas bon pour autant. Traian Basescu a été élu pour cinq ans, pas pour être destitué en cours de route par un coup politique. Si les Roumains n'étaient pas contents de lui, ils pouvaient tout à fait le remplacer en 2014. Mais tenir des référendums pour destituer tel ou tel homme politique est destructeur, car renforce l'instabilité politique, alors que la fonction de Président est justement de permettre une certaine stabilité. Le référendum sur le nom d'une seule personne créé un climat politique malsain, et lance une véritable chasse à l'homme qui n'aide jamais à faire avancer la chose publique. Ce système existe dans d'autres pays, avec des effets souvent néfastes.
Aux Etats-Unis, la procédure du "recall" existe dans plusieurs Etats, permettant d'organiser un référendum sur la destitution d'un élu local, s'il se trouve suffisamment de gens pour signer une pétition. Quand le gouverneur californien Gray Davis dut affronter une telle procédure, la Californie fut un véritable cirque politique où n'importe qui s'est présenté pour le remplacer. Arnold Schwarzenegger fut élu. Plus récemment, le gouverneur du Wisconsin fit face à cette menace, l'élection créant un climat de guerre civile. Pendant ce temps, il n'est jamais question de résoudre les problèmes des électeurs. Et ce genre de menaces empêche les décisions impopulaires, mais parfois nécessaires. Dans nos démocraties, les élus ont le pouvoir pour un temps limité. Il doit être respecté, ce qui suppose de ne pas rester après la fin de son mandat (n'en déplaise à Laurent Gbagbo), mais cela suppose aussi de laisser le temps imparti à l'élu. Pour qu'il soit viré en cours de mandat, il faut que de vraies fautes graves soient établies, et non pas de simples divergences de politiques à appliquer. Dès lors, il faut espérer que Traian Basescu termine normalement son mandat, et ne soit plus inquiété par ce genre de coup fourré.