La coupe du monde fut belle pour la France, certes pas en tant que trophée, mais en tant que compétition. Et ce d'autant plus que l'équipe tricolore n'était pas attendue en finale de la compétition, à l'instar de l'Italie d'ailleurs. Le Brésil, grand favori de la compétition, a été éliminé en quart de finale par les Bleus, provoquant une déception semblable à celle que connut la France en 2002. Zinedine Zidane, Franck Ribéry et Lilian Thuram furent les héros français de la compétition, mais ils n'arrivèrent pas à emporter la victoire face à une équipe italienne pourtant soucieuse des démêlés judiciaires où se trouvaient les équipes de certains de leurs joueurs. La fin du match fut même marquée par la provocation et la riposte de Materrazzi et de Zidane, spectacle déplorable de la part des deux joueurs. Bien que son rôle fut probablement mineur dans les succès de l'équipe de France, Raymond Domenech est parvenu à garder sa place, reprenant du service pour les deux prochaines années minimum. Il faudra à nouveau reconstruire l'équipe, ou tout du moins lui insuffler du sang neuf si le sélectionneur finit par accepter les demandes de retraites des joueurs les plus expérimentés. En tous cas, l'espace d'un mois, la France entière a rêvé et a espéré la victoire, les succès des Bleus faisant oublier un instant aux Français leurs soucis quotidiens.

Faut-il se contenter d'un commentaire sportif de l'événement ? Probablement. Inutile d'y voir plus de symboles, de faire trop couler d'encre à faire des métaphores éphémères et discutables, il est préférable d'éviter les parallèles entre la France et son équipe de football. Le surplus de croissance apporté par les succès est inexistant, et l'exemple de la victoire de 1998 a montré qu'il est inutile de s'enflammer et d'étendre à 60 millions de personnes les performances d'une vingtaine de personnes. Le slogan d'équipe "black blanc beur", représentative d'une France "riche de sa diversité" et victorieuse n'a pas duré. D'une part parce qu'il était faux à la base, d'autre part car depuis la France a continué de connaître bien des problèmes de racisme, de difficulté d'intégration et de communautarisme, malgré tous les espoirs de l'époque. La coupe du monde permet tout au plus temporairement d'apporter de la bonne humeur et une hausse de la consommation, mais ça se limite à ça. Pourtant, la notion de prestige et de fierté ne doit pas être forcément dévalorisée. Il faut simplement être conscient de la juste portée des succès. S'il n'est donc pas nécessaire d'analyser les résultats sportifs d'un point de vue politique, cela ne veut pas dire qu'il faille que la politique se désintéresse du sport.

En l'occurrence, le rôle du système politique dans ce domaine consiste à l'organiser. Ce sont bien les Etats qui décident de l'organisation des grands événements sportifs, en coopération avec les fédérations concernées. Et cette année, le rôle de l'Allemagne fut admirable dans le succès de l'événement. La France a encore en mémoire le retentissement de la coupe du monde organisée sur son territoire en 1998. Par la suite l'idée de l'organisation des Jeux Olympiques d'été par la France avait fait consensus, mais les candidatures de Paris ont été rejetées pour l'organisation des Jeux de 2008 et de 2012. La France n'a pas eu les Jeux Olympiques d'été depuis 1924 ce qui pour un pays de cette taille et de cette importance dans l'olympisme est ahurissant. On ne compte pourtant plus le nombre de fois où ont été organisés les Jeux Olympiques aux Etats-Unis ou d'une manière plus générale dans un pays anglophone depuis. Les conditions du dernier refus en date permettent de penser que le sérieux et l'honnêteté ne sont plus récompensés dans le jugement des dossiers, laissant place aux lobbyings les plus sombres et les plus douteux. Si l'idée olympique est bonne et généreuse, sa gestion par le Comité International Olympique et le mépris affiché par celui-ci vis-à-vis de la France font redouter la naissance d'une prise de distance par les Français envers l'événement.