Nous sommes en mars et déjà, le grand cirque de la célébration des 40 ans de mai 68 a commencé. On peut donc compter pour les mois à venir sur une overdose d'images d'archives, d'interviews de contemporains et de débats s'émerveillant sur la grandeur de l'événement. Il n'y a pourtant pas de quoi se réjouir : l'événement en question se résume à une crise d'adolescence d'étudiants bourgeois croyant changer le monde en lançant des pavés sur les policiers, un mouvement qui s'est ensuite transformé en une très classique grève générale. Les conséquences économiques furent limitées : les augmentations concédées aux syndicats lors du Traité de Grenelle ont été logiquement effacées par l'inflation qu'elles entrainèrent. Au niveau politique, après un doute, le Général de Gaulle en sortit vainqueur avec une majorité renforcée à l'Assemblée Nationale. Mais c'est au niveau social que les changements ont été les plus évidents. La remise en cause de la société qui était le mot d'ordre des émeutiers de mai 68 s'est transformée en une crise de l'autorité aux conséquences néfastes.

Cela se traduit notamment chez certaines familles par la façon d'élever les enfants. Il est surprenant de voir les parents d'enfants délinquants défendre contre tout leur progéniture, sans se poser la question de la façon dont elle a pu en arriver là. Cela se traduit par un irrespect généralisé, où chacun cherche à voir comment il peut profiter au maximum de la société, tout en évitant au maximum de se soumettre aux règles. Cela se traduit encore de nos jours par l'état de nos universités, malades d'avoir refuser pendant 40 ans la sélection à l'entrée, et toujours régulièrement bloquées par de nouvelles générations d'étudiants faisant leurs gammes de militants d'extrème gauche. La crise de l'autorité se répercute également dans le système judiciaire français, où règne une certaine doctrine de la larme à l'oeil, un syndicat de magistrat n'hésitant pas à introduire un biais politique dans sa conception de l'application de la loi.

Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui sont mal à l'aise vis-à-vis du concept d'autorité. Ils le voient comme un élément visant à limiter la liberté. Pourtant, il ne peut y avoir de réelle liberté sans un cadre fixe établi. Ce cadre, c'est déjà celui de la loi. C'est aussi celui de la morale. De nos jours, le mot semble tabou. Or c'est précisément ce qui semble nous manquer le plus à l'heure actuelle. Sans prendre en compte cela, la liberté totale entraîne souvent à être victime de la liberté des autres. Que celui qui respecte la loi, les autres, et qui travaille dur soit davantage récompensé par la vie par rapport à celui qui se comporte mal est la base d'un certain ordre qui est trop souvent oublié. Raymond Aron craignait la décadence de l'Europe, voire de l'Occident, à force de la voir remettre en cause de façon si violente l'autorité des institutions. Depuis, la situation n'est plus tout à fait la même, mais l'on ne peut manquer le problème en voyant la force de la délinquance et de la criminalité juvénile. Elles doivent être combattues au quotidien, mais un nouveau changement sociétal aiderait à calmer les choses. Remettre à leurs justes places les concepts d'autorité et de morale serait un bon début.