La campagne présidentielle américaine traverse actuellement une période en fait plutôt calme. Entre la fin du suspense dans les primaires et l'officialisation de la désignation des candidats pendants les conventions, chaque candidat peut se consacrer à des tâches de fond qui ne pourront plus être accomplies lors des dernières semaines de campagne. Les candidats peuvent donc se permettre de participer à des levées de fond ou voyager à l'étranger, comme l'avait fait John McCain en mai ou Barack Obama la semaine dernière. L'un des marronniers des journalistes est la spéculation de savoir qui sera désigné comme candidat à la vice-présidence par le candidat titulaire de chaque parti, le but étant que le ticket soit au complet lors de la convention, généralement fin août. Généralement plusieurs critères sont pris en compte, comme le message donné par le duo de personnalités, la possibilité de compléter le candidat titulaire sur un de ses points faibles ou bien l'effet électoral direct, en sélectionnant quelqu'un venant d'une zone géographique différente du candidat dans l'espoir qu'il y rapporte des voix.

Au niveau électoral, le choix du vice-président s'avère en fin de compte assez anecdotique. Ils peinent souvent à laisser une empreinte sur la campagne, et donc ne sont pas un critère important dans le choix des électeurs. Cette faible influence est d'ailleurs un peu aussi attendue : il n'est pas dans l'intérêt d'un titulaire que son suppléant fasse davantage l'actualité que lui. Ainsi, Dick Cheney ou Joe Lieberman ont été très transparents dans les deux dernières campagnes. Qui se souvient encore de Jack Kemp ou de Lloyd Bentsen, candidats à la vice-présidence ces 20 dernières années ? Les seuls cas où les candidats à la vice-présidence passent vraiment à la postérité sont ceux où ils nuisent de façon sérieuse à leur camp. Geraldine Ferraro est la seule femme qui se soit présentée à la vice-présidence en 1984 pour l'un des deux principaux partis, mais elle a surtout embarrassé la campagne de Walter Mondale à cause d'un scandale fiscal. En 1972, le candidat démocrate George McGovern a du changer de "running mate" lorsqu'il s'est avéré que le premier, Thomas Eagleton, avait été traité aux électrochocs pour une dépression, faisant craindre une instabilité mentale.

Une fois au pouvoir, le rôle d'un vice-président est normalement très restreint. Il peut apporter une voix décisive en tant que président du Sénat en cas d'égalité, et doit remplacer le Président si celui-ci vient à mourir ou à quitter le pouvoir. C'est tout. Jusqu'ici, c'est bien Dick Cheney qui a eu le rôle le plus important dans l'histoire des vice-présidents. Il a eu une très grande influence sur l'administration Bush pendant le contrecoup du 11 septembre : étant un néo-conservateur, il a pu s'imposer plus facilement sur les questions de politiques étrangères devant George Bush, peu au fait de ces questions. Rien ne garantit que le prochain ait un rôle aussi important.

Cette année, les enjeux sont assez simples. Barack Obama souhaite-t-il faire campagne et risque de cohabiter à la maison blanche avec une de ses anciennes habitantes, Hillary Clinton ? C'est peu probable. Et pour John McCain, à 72 ans, il peut être amené à rencontrer des problèmes de santé graves au cours des huit prochaines années. Et l'autre nom du ticket peut être amené à le remplacer plus tôt que prévu, et c'est donc d'ores et déjà une responsabilité présidentielle qu'il doit assumer en choisissant son colistier.